Séance en hémicycle du 2 mai 2023 à 14h30

Résumé de la séance

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Sommaire

La séance

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La séance est ouverte à quatorze heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 13 avril 2023 a été publié sur le site internet du sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chauvet

Lors du scrutin n° 270, sur les amendements identiques n° 24, 25 rectifié bis, 44, 55 et 68 tendant à supprimer l’article 11 de la proposition de loi pour une école de la liberté, de l’égalité des chances et de la laïcité, M. Moga souhaitait voter contre, tandis que M. Pierre-Antoine Levi et Mme Élisabeth Doineau souhaitaient s’abstenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Acte est donné de cette mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin concerné.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande du groupe Les Républicains, sur le thème : « Quelles solutions pour développer l’hydrogène au sein de notre mix énergétique ? »

Dans le débat, la parole est à M. Daniel Gremillet, pour le groupe auteur de la demande.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Évelyne Perrot applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Gremillet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’inclusion de l’hydrogène nucléaire aux côtés de l’hydrogène renouvelable dans les textes européens en cours de négociation, qu’il s’agisse de la révision de la directive sur les énergies renouvelables ou du règlement pour une industrie à zéro émission nette, fait l’objet de vifs débats.

C’est regrettable pour notre transition énergétique, car l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050 résultant de l’accord de Paris de 2015 et la loi relative à l’énergie et au climat de 2019, dite Énergie-climat, suppose de mobiliser toutes les sources et tous les vecteurs d’énergie décarbonée.

C’est aussi contraire à notre souveraineté énergétique, car l’article 194 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne consacre le droit des États membres de choisir entre ces différentes sources d’énergie.

C’est enfin mal avisé au regard de la compétition internationale : l’Europe ergote sur la définition de l’hydrogène, alors que les États-Unis, dans le cadre de la loi sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act), accordent une remise fiscale allant jusqu’à 3 euros par kilogramme sur l’hydrogène décarboné, quelle que soit son origine.

Que de moyens gâchés, que de temps perdu, que d’opportunités manquées, ici, en Europe !

Or l’hydrogène est un vecteur de premier plan pour réussir notre transition énergétique. Il permet, d’une part, de décarboner certains secteurs, en particulier l’industrie et les transports, d’autre part, de stocker l’électricité.

Cette capacité de stockage est essentielle pour promouvoir la mobilité propre, en complément des batteries électriques, ainsi que les énergies renouvelables, qui pèchent toujours par leur intermittence.

Dans ce contexte, la commission des affaires économiques du Sénat s’est mobilisée en faveur de l’hydrogène bien avant le Gouvernement – et bien souvent contre lui.

Dans la loi Énergie-climat de 2019, nous avions fixé un objectif de 20 % à 40 % d’hydrogène décarboné d’ici à 2030 au travers du développement de ses usages dans l’industrie, l’énergie et la mobilité.

Dans notre plan de relance Énergie, publié en juin 2020, en pleine crise de la covid-19, nous avons appelé à « révéler le potentiel de l’hydrogène », en consolidant la gouvernance et les moyens de la filière.

Cet engagement a été affirmé dans la loi de 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite Climat et résilience, dans laquelle nous avons introduit un paquet hydrogène : tout d’abord, nous avons inscrit l’hydrogène dans la future loi quinquennale de programmation sur l’énergie et le climat de 2023 ; nous l’avons aussi intégré aux appels d’offres de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) portant sur le stockage ; en complément, nous avons facilité l’octroi de garanties d’origine aux groupements de collectivités ; enfin, nous avons dispensé de mise en concurrence l’utilisation du domaine public de l’État.

Plus récemment, dans notre rapport sur l’énergie nucléaire et l’hydrogène bas-carbone, publié en juillet 2022, nous avons plaidé pour « saisir l’occasion de la relance du nucléaire pour favoriser une production massive d’hydrogène bas-carbone ».

Cela nous a conduits à consolider la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables de mars dernier : d’une part, nous avons imposé un bilan carbone à tous les projets d’hydrogène soutenus par appels d’offres, afin de favoriser les projets les moins émissifs et les plus circulaires ; d’autre part, nous avons intégré l’hydrogène à la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), ainsi qu’aux débats des comités régionaux de l’énergie.

Nous avons aussi prévu que ces projets soient promus par la CRE et par les autorités organisatrices de la distribution d’énergie.

Nous avons enfin adopté plusieurs mesures de simplification en instituant un guichet unique et en consolidant les opérations d’autoconsommation et les plateformes industrielles.

La commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, dit Nouveau nucléaire, se réunira après-demain. Nous proposons dans ce texte l’application des mesures d’accélération aux projets d’électrolyseurs d’hydrogène couplés à des réacteurs nucléaires de nouvelle génération, plus performants en termes de rendement.

S’il faut se réjouir de l’attention portée aujourd’hui à l’hydrogène, notre commission considère qu’il faut faire davantage.

Sur le plan programmatique, la loi quinquennale de programmation sur l’énergie et le climat doit fixer un cadre législatif pérenne, au-delà de la PPE et de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) de 2020.

Monsieur le ministre, nous espérons que ce projet de loi quinquennale, qui doit normalement être examiné avant le 1er juillet prochain, conformément à l’article L. 100-1 A du code de l’énergie, ne sera ni reporté ni annulé. Ce texte est le fruit du compromis issu de la commission mixte paritaire sur le projet de loi Énergie-climat de 2019. Convaincus de la nécessité d’inverser la hiérarchie des normes en matière énergétique, nous avions souhaité établir la primauté de cette loi quinquennale sur les documents de planification réglementaires.

Face aux changements climatiques qui posent aussi un défi démocratique, nous avions voulu affirmer la préséance du législateur sur le pouvoir réglementaire, celle de la politique sur la technique.

Sur le plan de la gouvernance, le Conseil national de l’hydrogène devrait se réunir plus souvent et mieux associer les collectivités territoriales.

Sur celui des moyens, les montants annoncés en faveur de l’hydrogène dans le cadre du plan de relance – 7 milliards d’euros – et du plan d’investissement – 1, 9 milliard d’euros – doivent être engagés. À l’échelle nationale, les appels d’offres de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) sur la mobilité et les écosystèmes ont besoin d’être pérennisés. À l’échelle communautaire, le budget des projets importants d’intérêt européen commun (Piiec), doté de 1, 6 milliard d’euros, attend d’être bouclé.

Enfin, l’avenir de l’hydrogène se joue dans les négociations européennes en cours. Dans notre résolution sur l’inclusion du nucléaire dans le volet climatique de la taxonomie européenne des investissements durables de décembre 2021, nous avons appelé au maintien d’une neutralité technologique entre l’hydrogène nucléaire et l’hydrogène renouvelable.

Dans notre résolution sur le paquet Ajustement à l’objectif 55 d’avril 2022, nous avons plaidé en faveur de la même vigilance.

L’hydrogène bas-carbone ne doit pas être pénalisé par la directive sur la taxation de l’énergie ni être exclu de la directive sur les énergies renouvelables ou du règlement sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs. Il doit profiter de dispositions plus simples, dans le cadre du règlement sur le paquet gazier, ou plus incitatives, dans le cadre du règlement sur les infrastructures de recharge.

L’hydrogène doit être activement soutenu, tant dans les processus de l’industrie que dans les modes de transport. Pour y parvenir, une stratégie claire, une gouvernance solide, des financements pérennes et une réglementation idoine sont nécessaires.

Le Gouvernement doit faire de la prochaine loi quinquennale de programmation sur l’énergie et le climat celle de l’amorçage de la filière française de l’hydrogène.

Quant à la Commission européenne, elle doit garantir à l’hydrogène une complète neutralité technologique dans le paquet Ajustement à l’objectif 55.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer quelles dispositions sur l’hydrogène nucléaire ou renouvelable comportera la prochaine loi quinquennale de programmation sur l’énergie et le climat ?

Pouvez-vous également nous préciser comment la France entend défendre l’hydrogène nucléaire dans le cadre du paquet Ajustement à l’objectif 55 ?

Monsieur le ministre, un compromis a-t-il été trouvé sur la directive relative aux énergies renouvelables ? Qu’en est-il des autres textes ?

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Franck Menonville applaudit également.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord remercier le groupe Les Républicains et M. le sénateur Daniel Gremillet d'avoir demandé l'inscription de ce débat à l'ordre du jour de la reprise de vos travaux.

L'hydrogène n'est pas la pierre philosophale de la décarbonation ; il ne remplacera pas l'ensemble des énergies fossiles. Pour autant, il est un vecteur énergétique essentiel.

Il est l'unique moyen de décarboner certaines industries. Ainsi, depuis 150 à 200 ans, l'acier est fabriqué à l'aide du charbon. Pour ne plus avoir recours à ce dernier, il faudra utiliser l'hydrogène.

De même – j'étais au Havre vendredi dernier –, inventer et mettre en place des procédés décarbonés de production d'engrais et renforcer ainsi la souveraineté industrielle de notre beau pays et de notre continent nécessitera de l'hydrogène, tout comme pour produire du méthanol et de l'ammoniac.

L'hydrogène est également essentiel à la mobilité lourde : il apportera aux poids lourds, autobus ou autres véhicules une autonomie aujourd'hui hors de portée des batteries traditionnelles.

Pour autant, l'hydrogène ne remplacera pas le gaz naturel dans tous ses usages. Il s'agit d'un vecteur énergétique à même de transformer, de transporter de l'énergie, mais il n'est pas une source d'énergie et ne permet pas d'en créer.

L'hydrogène est essentiellement créé à partir d'électricité. Les gisements sont sans doute insuffisants pour assurer notre souveraineté, même s'il est possible, nous y reviendrons peut-être dans le débat, d'en trouver ici ou là.

Lµ'hydrogène est coûteux à produire et difficile à transporter. Il n'y en aura pas sur l'ensemble du territoire et il ne sera pas disponible pour l'ensemble des usages du gaz naturel. Ainsi, nous n'utiliserons pas nos casseroles – bien aimées ces temps-ci §– sur des cuisinières à hydrogène !

Pour autant, le mix énergétique de demain sera plus diversifié que celui d'aujourd'hui.

L'électricité – nous le souhaitons – deviendra majoritaire, juste devant la biomasse qui servira pour la chaleur haute température, les carburants et la chimie. L'hydrogène sera utilisé pour les usages à haute valeur ajoutée, auxquels il est indispensable.

Ces usages sont stratégiques, car ils concernent les industries de base. Garantir l'accès à de l'hydrogène bas-carbone – ce terme est important – est un choix de souveraineté industrielle qui permettra de maintenir sur notre territoire des industries lourdes, qui ne peuvent se décarboner sans hydrogène.

Le Président de la République m'a chargé d'élaborer une feuille de route pour les cinquante sites les plus émetteurs de gaz à effet de serre en France, qui représentent à eux seuls plus de 60 % des émissions de l'industrie française. Dix-huit d'entre eux sont des actifs stratégiques, qui auront besoin d'hydrogène pour être décarbonés. C'est notamment le cas des aciéries et des usines d'engrais.

Par conséquent, nous devrons répondre dans les prochaines années à des besoins croissants en hydrogène, qui vous seront présentés dans le cadre du projet de loi de programmation sur l'énergie et le climat. Monsieur le sénateur Gremillet, nous aurons bien une loi : j'étais le président de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale lors de l'examen du projet de loi Énergie-climat et nous avions demandé une loi.

Nous sommes en pleine phase de programmation de la transition écologique. Le Conseil de planification écologique doit se réunir dans les prochaines semaines afin de passer en revue l'ensemble des plans de décarbonation des différents secteurs, dont le secteur industriel.

La loi sera disponible à l'automne, comme la Première ministre s'y est engagée, selon un calendrier un peu décalé par rapport à celui qui avait été retenu dans la loi Énergie-climat.

Pour ma part, je préfère une bonne loi, complète, adoptée selon un calendrier décalé, plutôt qu'une loi qui risquerait d'être incomplète.

La production d'hydrogène devra augmenter de plus de 50 % d'ici à 2030 : un tiers pour remplacer des usages fossiles et deux tiers pour de nouveaux usages. Enfin, la production d'hydrogène bas-carbone doublera d'ici à 2035.

Ce choix est impératif pour la réindustrialisation et la décarbonation. Nous devons désormais accélérer tout en répondant à deux questions essentielles : quel sera notre modèle de production ? Comment réussirons-nous ce défi ?

Il est nécessaire de produire en France pour être souverain sur cette technologie et pour accélérer la décarbonation.

Comme vous l'avez souligné, nous avons un débat de fond avec un certain nombre de nos voisins, notamment allemands, qui privilégient des importations massives d'hydrogène vert ou renouvelable à la production d'un hydrogène bas-carbone sur leur territoire essentiellement via des centrales nucléaires.

Pour répondre à votre question, nous ne sommes pas encore tout à fait parvenus à un compromis qui nous permettrait d'avancer sur la directive relative aux énergies renouvelables, mais nous sommes sur la bonne voie.

Un certain nombre de discussions sont assez avancées, notamment sur le pourcentage d'hydrogène vert nécessaire afin de valider les modèles de production. J'ai toute confiance en ma collègue Agnès Pannier-Runacher, actuellement en déplacement à l'étranger pour débattre de ce sujet, pour obtenir un compromis.

Notre vision de la stratégie allemande d'importation est que les conditions de transport de l'hydrogène ne sont pas garanties : infrastructures insuffisantes, prix de transport incertain, risques géopolitiques… Tout cela fait peser des risques sur l'accélération de la décarbonation.

Ainsi, remplacer une dépendance au gaz fourni par la Russie par d'autres dépendances pourrait entraîner un risque géopolitique à l'horizon des vingt, trente ou quarante prochaines années – soit précisément celui sur lequel nous travaillons.

Produire de l'hydrogène sur le territoire représente donc un défi, mais présente des avantages importants : devenir souverain en maîtrisant cette technologie et en faire un véritable facteur d'attractivité pour les investisseurs internationaux.

La maîtrise des coûts est un élément essentiel de cette stratégie. Nous devons être compétitifs à la fois face à l'hydrogène existant, à savoir l'hydrogène fossile, qui coûte aujourd'hui 2 euros le kilo, et face aux États-Unis, dont l'Inflation Reduction Act fixe actuellement le prix de l'hydrogène à 0, 8 euro le kilo avant transport – transport inclus, l'hydrogène made in America nous coûterait sans doute 2, 5 euros le kilo –, alors que le prix de l'hydrogène made in France, sans subventions, serait compris entre 3 et4 euros le kilo.

Nous devons donc aider cette filière et nous allons continuer de le faire en lui offrant une électricité à un prix compétitif, ce qui est essentiel, et en améliorant l'efficacité de la production notamment en développant des hubs, à savoir des noyaux de production d'hydrogène, non loin des centrales nucléaires. Cela nous permettra à la fois de mettre en commun les facilités, y compris avec des industries extrêmement gourmandes en hydrogène, et de profiter des synergies avec la production d'électricité.

Je ne doute pas que nous aurons l'occasion, au cours du débat, de revenir sur tous ces sujets. Encore une fois, je vous remercie d'avoir mis sur la table cette question essentielle.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Photo de Roger Karoutchi

Nous allons maintenant procéder au débat interactif.

Je rappelle que chaque orateur dispose de deux minutes au maximum pour présenter sa question et son éventuelle réplique.

Le Gouvernement dispose pour répondre d'une durée équivalente. Il aura la faculté, s'il le juge nécessaire, de répondre à la réplique pendant une minute supplémentaire. L'auteur de la question disposera alors à son tour du droit de répondre pendant une minute.

Dans le débat interactif, la parole est à M. Guillaume Chevrollier.

Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord remercier le groupe Les Républicains et M. le sénateur Daniel Gremillet d'avoir demandé l'inscription de ce débat à l'ordre du jour de la reprise de vos travaux.

L'hydrogène n'est pas la pierre philosophale de la décarbonation ; il ne remplacera pas l'ensemble des énergies fossiles. Pour autant, il est un vecteur énergétique essentiel. Il est notamment l'unique moyen de décarboner certaines industries comme la production d'acier, dépendante depuis 150 à 200 ans du charbon.

De même – j'étais au Havre vendredi dernier –, inventer et mettre en place des procédés décarbonés de production d'engrais et renforcer ainsi la souveraineté industrielle de notre beau pays et de notre continent nécessitera de l'hydrogène, tout comme pour produire du méthanol et de l'ammoniac.

L'hydrogène est également essentiel à la mobilité lourde : il apportera aux poids lourds, autobus ou autres véhicules une autonomie aujourd'hui hors de portée des batteries traditionnelles.

Pour autant, l'hydrogène ne remplacera pas le gaz naturel dans tous ses usages. Il s'agit d'un vecteur énergétique à même de transformer, de transporter de l'énergie, mais il n'est pas une source d'énergie.

L'hydrogène est essentiellement créé à partir d'électricité. Les gisements sont sans doute insuffisants pour assurer notre souveraineté, même s'il est possible, nous y reviendrons peut-être dans le débat, d'en trouver ici ou là.

L'hydrogène est coûteux à produire et difficile à transporter. Il n'y en aura pas sur l'ensemble du territoire et il ne sera pas disponible pour l'ensemble des usages actuels du gaz naturel. Ainsi, nous n'utiliserons pas nos casseroles – bien aimées ces temps-ci §– sur des cuisinières à hydrogène !

Pour autant, le mix énergétique de demain sera plus diversifié que celui d'aujourd'hui.

L'électricité, nous le souhaitons, deviendra majoritaire juste devant la biomasse, laquelle servira pour la chaleur haute température, les carburants et la chimie. L'hydrogène sera utilisé pour les usages à haute valeur ajoutée, auxquels il est indispensable.

Ces usages sont stratégiques, car ils concernent les industries de base. Garantir l'accès à de l'hydrogène bas-carbone – ce dernier terme est important – est un choix de souveraineté industrielle qui permettra de maintenir sur notre territoire des industries lourdes, qui ne peuvent se décarboner sans hydrogène.

Le Président de la République m'a chargé d'élaborer une feuille de route pour les cinquante sites les plus émetteurs de gaz à effet de serre en France, qui représentent à eux seuls plus de 60 % des émissions de l'industrie française. Dix-huit d'entre eux sont des actifs stratégiques, qui auront besoin d'hydrogène pour être décarbonés. C'est notamment le cas des aciéries et des usines d'engrais.

Par conséquent, nous devrons répondre dans les prochaines années à des besoins croissants en hydrogène, qui vous seront présentés dans le cadre du projet de loi de programmation sur l'énergie et le climat. Monsieur le sénateur Gremillet, nous aurons bien une loi : j'étais le président de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale lors de l'examen du projet de loi Énergie-climat et nous avions demandé une loi.

Nous sommes en pleine phase de programmation de la transition écologique. Le Conseil de planification écologique doit se réunir dans les prochaines semaines afin de passer en revue l'ensemble des plans de décarbonation des différents secteurs, dont le secteur industriel.

La loi sera disponible à l'automne, comme la Première ministre s'y est engagée, selon un calendrier un peu décalé par rapport à celui qui avait été retenu dans la loi Énergie-climat.

Pour ma part, je préfère une bonne loi, complète, adoptée selon un calendrier décalé, plutôt qu'une loi qui risquerait d'être incomplète.

La production d'hydrogène devra augmenter de plus de 50 % d'ici à 2030 : un tiers pour remplacer des usages fossiles et deux tiers pour de nouveaux usages. Enfin, la production d'hydrogène bas-carbone doublera d'ici à 2035.

Ce choix est impératif pour la réindustrialisation et la décarbonation. Nous devons désormais accélérer tout en répondant à deux questions essentielles : quel sera notre modèle de production ? Comment réussirons-nous ce défi ?

Il est nécessaire de produire en France pour être souverain sur cette technologie et pour accélérer la décarbonation.

Comme vous l'avez souligné, nous avons un débat de fond avec un certain nombre de nos voisins, notamment allemands, qui privilégient des importations massives d'hydrogène vert ou renouvelable à la production d'un hydrogène bas-carbone sur leur territoire essentiellement via des centrales nucléaires.

Pour répondre à votre question, nous ne sommes pas encore tout à fait parvenus à un compromis sur la directive relative aux énergies renouvelables qui nous permettrait d'avancer, mais nous sommes sur la bonne voie.

Un certain nombre de discussions sont assez avancées, notamment sur le pourcentage d'hydrogène vert nécessaire afin de valider les modèles de production. J'ai toute confiance en ma collègue Agnès Pannier-Runacher, actuellement en déplacement à l'étranger, pour obtenir un compromis.

Notre vision de la stratégie allemande d'importation est que les conditions de transport de l'hydrogène ne sont pas garanties : infrastructures insuffisantes, prix de transport incertain, risques géopolitiques… Tout cela fait peser des risques sur l'accélération de la décarbonation.

Ainsi, remplacer une dépendance au gaz fourni par la Russie par d'autres dépendances pourrait entraîner un risque géopolitique à l'horizon des vingt, trente ou quarante prochaines années, soit précisément celui sur lequel nous travaillons.

Produire de l'hydrogène sur le territoire est certes un défi, mais cela présente des avantages importants : devenir souverain en maîtrisant cette technologie et en faire un véritable facteur d'attractivité pour les investisseurs internationaux.

La maîtrise des coûts est un élément essentiel de cette stratégie. Nous devons être compétitifs à la fois face à l'hydrogène existant, à savoir l'hydrogène fossile, qui coûte aujourd'hui 2 euros le kilo, et face aux États-Unis, dont l'Inflation Reduction Act fixe actuellement le prix de l'hydrogène à 0, 8 euro le kilo avant transport – transport inclus, l'hydrogène made in America nous coûterait sans doute 2, 5 euros le kilo –, alors que le prix de l'hydrogène made in France, sans subventions, serait compris entre 3 et4 euros le kilo.

Nous devons donc aider cette filière et nous allons continuer de le faire en lui offrant une électricité à un prix compétitif, ce qui est essentiel, et en améliorant l'efficacité de la production, notamment en développant des hubs, des noyaux de production d'hydrogène, non loin des centrales nucléaires. Cela nous permettra à la fois de mettre en commun les facilités, y compris avec des industries extrêmement gourmandes en hydrogène, et de profiter des synergies avec la production d'électricité.

Je ne doute pas que nous aurons l'occasion, au cours du débat, de revenir sur tous ces sujets. Encore une fois, je vous remercie d'avoir mis sur la table cette question essentielle.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord remercier le groupe Les Républicains et M. le sénateur Daniel Gremillet d’avoir demandé l’inscription de ce débat à l’ordre du jour de la reprise de vos travaux.

L’hydrogène n’est pas la pierre philosophale de la décarbonation ; il ne remplacera pas l’ensemble des énergies fossiles. Pour autant, il est un vecteur énergétique essentiel. Il est notamment l’unique moyen de décarboner certaines industries comme la production d’acier, dépendante depuis 150 à 200 ans du charbon.

De même – j’étais au Havre vendredi dernier –, inventer et mettre en place des procédés décarbonés de production d’engrais et renforcer ainsi la souveraineté industrielle de notre beau pays et de notre continent nécessitera de l’hydrogène, tout comme pour produire du méthanol et de l’ammoniac.

L’hydrogène est également essentiel à la mobilité lourde : il apportera aux poids lourds, autobus ou autres véhicules une autonomie aujourd’hui hors de portée des batteries traditionnelles.

Pour autant, l’hydrogène ne remplacera pas le gaz naturel dans tous ses usages. Il s’agit d’un vecteur énergétique à même de transformer, de transporter de l’énergie, mais il n’est pas une source d’énergie.

L’hydrogène est essentiellement créé à partir d’électricité. Les gisements sont sans doute insuffisants pour assurer notre souveraineté, même s’il est possible, nous y reviendrons peut-être dans le débat, d’en trouver ici ou là.

L’hydrogène est coûteux à produire et difficile à transporter. Il n’y en aura pas sur l’ensemble du territoire et il ne sera pas disponible pour l’ensemble des usages actuels du gaz naturel. Ainsi, nous n’utiliserons pas nos casseroles – bien aimées ces temps-ci §– sur des cuisinières à hydrogène !

Pour autant, le mix énergétique de demain sera plus diversifié que celui d’aujourd’hui.

L’électricité, nous le souhaitons, deviendra majoritaire juste devant la biomasse, laquelle servira pour la chaleur haute température, les carburants et la chimie. L’hydrogène sera utilisé pour les usages à haute valeur ajoutée, auxquels il est indispensable.

Ces usages sont stratégiques, car ils concernent les industries de base. Garantir l’accès à de l’hydrogène bas-carbone – ce dernier terme est important – est un choix de souveraineté industrielle qui permettra de maintenir sur notre territoire des industries lourdes, qui ne peuvent se décarboner sans hydrogène.

Le Président de la République m’a chargé d’élaborer une feuille de route pour les cinquante sites les plus émetteurs de gaz à effet de serre en France, qui représentent à eux seuls plus de 60 % des émissions de l’industrie française. Dix-huit d’entre eux sont des actifs stratégiques, qui auront besoin d’hydrogène pour être décarbonés. C’est notamment le cas des aciéries et des usines d’engrais.

Par conséquent, nous devrons répondre dans les prochaines années à des besoins croissants en hydrogène, qui vous seront présentés dans le cadre du projet de loi de programmation sur l’énergie et le climat. Monsieur le sénateur Gremillet, nous aurons bien une loi : j’étais le président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale lors de l’examen du projet de loi Énergie-climat et nous avions demandé une loi.

Nous sommes en pleine phase de programmation de la transition écologique. Le Conseil de planification écologique doit se réunir dans les prochaines semaines afin de passer en revue l’ensemble des plans de décarbonation des différents secteurs, dont le secteur industriel.

La loi sera disponible à l’automne, comme la Première ministre s’y est engagée, selon un calendrier un peu décalé par rapport à celui qui avait été retenu dans la loi Énergie-climat.

Pour ma part, je préfère une bonne loi, complète, adoptée selon un calendrier décalé, plutôt qu’une loi qui risquerait d’être incomplète.

La production d’hydrogène devra augmenter de plus de 50 % d’ici à 2030 : un tiers pour remplacer des usages fossiles et deux tiers pour de nouveaux usages. Enfin, la production d’hydrogène bas-carbone doublera d’ici à 2035.

Ce choix est impératif pour la réindustrialisation et la décarbonation. Nous devons désormais accélérer tout en répondant à deux questions essentielles : quel sera notre modèle de production ? Comment réussirons-nous ce défi ?

Il est nécessaire de produire en France pour être souverain sur cette technologie et pour accélérer la décarbonation.

Comme vous l’avez souligné, nous avons un débat de fond avec un certain nombre de nos voisins, notamment allemands, qui privilégient des importations massives d’hydrogène vert ou renouvelable à la production d’un hydrogène bas-carbone sur leur territoire essentiellement via des centrales nucléaires.

Pour répondre à votre question, nous ne sommes pas encore tout à fait parvenus à un compromis sur la directive relative aux énergies renouvelables qui nous permettrait d’avancer, mais nous sommes sur la bonne voie.

Un certain nombre de discussions sont assez avancées, notamment sur le pourcentage d’hydrogène vert nécessaire afin de valider les modèles de production. J’ai toute confiance en ma collègue Agnès Pannier-Runacher, actuellement en déplacement à l’étranger, pour obtenir un compromis.

Notre vision de la stratégie allemande d’importation est que les conditions de transport de l’hydrogène ne sont pas garanties : infrastructures insuffisantes, prix de transport incertain, risques géopolitiques… Tout cela fait peser des risques sur l’accélération de la décarbonation.

Ainsi, remplacer une dépendance au gaz fourni par la Russie par d’autres dépendances pourrait entraîner un risque géopolitique à l’horizon des vingt, trente ou quarante prochaines années, soit précisément celui sur lequel nous travaillons.

Produire de l’hydrogène sur le territoire est certes un défi, mais cela présente des avantages importants : devenir souverain en maîtrisant cette technologie et en faire un véritable facteur d’attractivité pour les investisseurs internationaux.

La maîtrise des coûts est un élément essentiel de cette stratégie. Nous devons être compétitifs à la fois face à l’hydrogène existant, à savoir l’hydrogène fossile, qui coûte aujourd’hui 2 euros le kilo, et face aux États-Unis, dont l ’ Inflation Reduction Act fixe actuellement le prix de l’hydrogène à 0, 8 euro le kilo avant transport – transport inclus, l’hydrogène made in America nous coûterait sans doute 2, 5 euros le kilo –, alors que le prix de l’hydrogène made in France, sans subventions, serait compris entre 3 et4 euros le kilo.

Nous devons donc aider cette filière et nous allons continuer de le faire en lui offrant une électricité à un prix compétitif, ce qui est essentiel, et en améliorant l’efficacité de la production, notamment en développant des hubs, des noyaux de production d’hydrogène, non loin des centrales nucléaires. Cela nous permettra à la fois de mettre en commun les facilités, y compris avec des industries extrêmement gourmandes en hydrogène, et de profiter des synergies avec la production d’électricité.

Je ne doute pas que nous aurons l’occasion, au cours du débat, de revenir sur tous ces sujets. Encore une fois, je vous remercie d’avoir mis sur la table cette question essentielle.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord remercier le groupe Les Républicains et M. le sénateur Daniel Gremillet d’avoir demandé l’inscription de ce débat à l’ordre du jour de la reprise de vos travaux.

L’hydrogène n’est pas la pierre philosophale de la décarbonation ; il ne remplacera pas l’ensemble des énergies fossiles. Pour autant, il est un vecteur énergétique essentiel. Il est notamment l’unique moyen de décarboner certaines industries comme la production d’acier, dépendante depuis 150 à 200 ans du charbon.

De même – j’étais au Havre vendredi dernier –, inventer et mettre en place des procédés décarbonés de production d’engrais et renforcer ainsi la souveraineté industrielle de notre beau pays et de notre continent nécessitera de l’hydrogène, tout comme pour produire du méthanol et de l’ammoniac.

L’hydrogène est également essentiel à la mobilité lourde : il apportera aux poids lourds, autobus ou autres véhicules une autonomie aujourd’hui hors de portée des batteries traditionnelles.

Pour autant, l’hydrogène ne remplacera pas le gaz naturel dans tous ses usages. Il s’agit d’un vecteur énergétique à même de transformer, de transporter de l’énergie, mais il n’est pas une source d’énergie.

L’hydrogène est essentiellement créé à partir d’électricité. Les gisements sont sans doute insuffisants pour assurer notre souveraineté, même s’il est possible, nous y reviendrons peut-être dans le débat, d’en trouver ici ou là.

L’hydrogène est coûteux à produire et difficile à transporter. Il n’y en aura pas sur l’ensemble du territoire et il ne sera pas disponible pour l’ensemble des usages actuels du gaz naturel. Ainsi, nous n’utiliserons pas nos casseroles – bien aimées ces temps-ci

Débat interactif

Photo de Guillaume Chevrollier

Monsieur le ministre, à l'heure des défis climatiques et de la nécessaire décarbonation, la technologie de l'hydrogène vert a connu ces dernières années un développement fulgurant. Nous pouvons nous réjouir qu'une stratégie française de l'hydrogène vert se dessine enfin, stimulée notamment par le paquet européen « Ajustement à l'objectif 55 ».

Les objectifs fixés sont clairs et ambitieux : remplacer progressivement l'hydrogène gris, qui représente actuellement plus de 90 % de la production, et parvenir à l'installation de 6, 5 gigawatts d'électrolyse en 2030, soit la production de 600 kilotonnes par an d'hydrogène décarboné.

Plusieurs sites de production commencent à se déployer sur le territoire. À cet effet, de nombreuses aides sont mises en place : soutien des investissements déterminants pour la construction d'une véritable filière d'hydrogène vert à hauteur de 7 milliards d'euros dans le cadre de France 2030, aides du fonds européen de développement régional, dispositifs de soutien aux démonstrateurs ainsi qu'aux écosystèmes territoriaux via l'Ademe et les programmes d'investissements d'avenir, mécanismes de soutien réservés aux grands projets d'intérêt européen commun...

Tout cela nourrit une dynamique plutôt enthousiasmante pour la transition énergétique de notre économie et de nos territoires, comme je le constate dans ma région.

Néanmoins, un défi majeur demeure : celui du développement des usages, que ce soit dans l'industrie ou dans la mobilité.

En effet, l'acquisition d'un bus ou d'un camion à hydrogène reste extrêmement coûteuse pour les entreprises et les collectivités locales. Le plan rétrofit et le plan de soutien à la décarbonation des cinquante sites les plus polluants ne contiennent que quelques mesures timides en matière d'usage d'hydrogène vert. Il faut donc proposer de véritables incitations, notamment financières, comme cela a été fait pour l'électricité ou les biocarburants. Seule une augmentation de la demande permettra de faire baisser le prix de production.

Monsieur le ministre, quelle politique d'incitation le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre pour le développement de la production d'hydrogène vert, qui s'accompagne d'une massification de son usage dans tous les secteurs de l'économie ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons maintenant procéder au débat interactif.

Je rappelle que chaque orateur dispose de deux minutes au maximum pour présenter sa question et son éventuelle réplique.

Le Gouvernement dispose pour répondre d'une durée équivalente. Il aura la faculté, s'il le juge nécessaire, de répondre à la réplique pendant une minute supplémentaire. L'auteur de la question disposera alors à son tour du droit de répondre pendant une minute.

Dans le débat interactif, la parole est à M. Guillaume Chevrollier.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons maintenant procéder au débat interactif.

Je rappelle que chaque orateur dispose de deux minutes au maximum pour présenter sa question et son éventuelle réplique.

Le Gouvernement dispose pour répondre d’une durée équivalente. Il aura la faculté, s’il le juge nécessaire, de répondre à la réplique pendant une minute supplémentaire. L’auteur de la question disposera alors à son tour du droit de répondre pendant une minute.

Dans le débat interactif, la parole est à M. Guillaume Chevrollier.

Roland Lescure

Pour autant, le mix énergétique de demain sera plus diversifié que celui d’aujourd’hui.

L’électricité, nous le souhaitons, deviendra majoritaire juste devant la biomasse, laquelle servira pour la chaleur haute température, les carburants et la chimie. L’hydrogène sera utilisé pour les usages à haute valeur ajoutée, auxquels il est indispensable.

Ces usages sont stratégiques, car ils concernent les industries de base. Garantir l’accès à de l’hydrogène bas-carbone – ce dernier terme est important – est un choix de souveraineté industrielle qui permettra de maintenir sur notre territoire des industries lourdes, qui ne peuvent se décarboner sans hydrogène.

Le Président de la République m’a chargé d’élaborer une feuille de route pour les cinquante sites les plus émetteurs de gaz à effet de serre en France, qui représentent à eux seuls plus de 60 % des émissions de l’industrie française. Dix-huit d’entre eux sont des actifs stratégiques, qui auront besoin d’hydrogène pour être décarbonés. C’est notamment le cas des aciéries et des usines d’engrais.

Par conséquent, nous devrons répondre dans les prochaines années à des besoins croissants en hydrogène, qui vous seront présentés dans le cadre du projet de loi de programmation sur l’énergie et le climat. Monsieur le sénateur Gremillet, nous aurons bien une loi : j’étais le président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale lors de l’examen du projet de loi Énergie-climat et nous avions demandé une loi.

Nous sommes en pleine phase de programmation de la transition écologique. Le Conseil de planification écologique doit se réunir dans les prochaines semaines afin de passer en revue l’ensemble des plans de décarbonation des différents secteurs, dont le secteur industriel.

La loi sera disponible à l’automne, comme la Première ministre s’y est engagée, selon un calendrier un peu décalé par rapport à celui qui avait été retenu dans la loi Énergie-climat.

Pour ma part, je préfère une bonne loi, complète, adoptée selon un calendrier décalé, plutôt qu’une loi qui risquerait d’être incomplète.

La production d’hydrogène devra augmenter de plus de 50 % d’ici à 2030 : un tiers pour remplacer des usages fossiles et deux tiers pour de nouveaux usages. Enfin, la production d’hydrogène bas-carbone doublera d’ici à 2035.

Ce choix est impératif pour la réindustrialisation et la décarbonation. Nous devons désormais accélérer tout en répondant à deux questions essentielles : quel sera notre modèle de production ? Comment réussirons-nous ce défi ?

Il est nécessaire de produire en France pour être souverain sur cette technologie et pour accélérer la décarbonation.

Comme vous l’avez souligné, nous avons un débat de fond avec un certain nombre de nos voisins, notamment allemands, qui privilégient des importations massives d’hydrogène vert ou renouvelable à la production d’un hydrogène bas-carbone sur leur territoire essentiellement via des centrales nucléaires.

Pour répondre à votre question, nous ne sommes pas encore tout à fait parvenus à un compromis sur la directive relative aux énergies renouvelables qui nous permettrait d’avancer, mais nous sommes sur la bonne voie.

Un certain nombre de discussions sont assez avancées, notamment sur le pourcentage d’hydrogène vert nécessaire afin de valider les modèles de production. J’ai toute confiance en ma collègue Agnès Pannier-Runacher, actuellement en déplacement à l’étranger, pour obtenir un compromis.

Notre vision de la stratégie allemande d’importation est que les conditions de transport de l’hydrogène ne sont pas garanties : infrastructures insuffisantes, prix de transport incertain, risques géopolitiques… Tout cela fait peser des risques sur l’accélération de la décarbonation.

Ainsi, remplacer une dépendance au gaz fourni par la Russie par d’autres dépendances pourrait entraîner un risque géopolitique à l’horizon des vingt, trente ou quarante prochaines années, soit précisément celui sur lequel nous travaillons.

Produire de l’hydrogène sur le territoire est certes un défi, mais cela présente des avantages importants : devenir souverain en maîtrisant cette technologie et en faire un véritable facteur d’attractivité pour les investisseurs internationaux.

La maîtrise des coûts est un élément essentiel de cette stratégie. Nous devons être compétitifs à la fois face à l’hydrogène existant, à savoir l’hydrogène fossile, qui coûte aujourd’hui 2 euros le kilogramme, et face aux États-Unis, dont l’Inflation Reduction Act fixe actuellement le prix de l’hydrogène à 0, 8 euro le kilogramme avant transport – transport inclus, l’hydrogène made in America nous coûterait sans doute 2, 5 euros le kilogramme –, alors que le prix de l’hydrogène made in France, sans subventions, serait compris entre 3 et 4 euros le kilogramme.

Nous devons donc aider cette filière et nous allons continuer de le faire en lui offrant une électricité à un prix compétitif, ce qui est essentiel, et en améliorant l’efficacité de la production, notamment en développant des hubs, des noyaux de production d’hydrogène, non loin des centrales nucléaires. Cela nous permettra à la fois de mettre en commun les facilités, y compris avec des industries extrêmement gourmandes en hydrogène, et de profiter des synergies avec la production d’électricité.

Je ne doute pas que nous aurons l’occasion, au cours du débat, de revenir sur tous ces sujets. Encore une fois, je vous remercie d’avoir mis sur la table cette question essentielle.

Débat interactif

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Chevrollier

Monsieur le ministre, à l'heure des défis climatiques et de la nécessaire décarbonation, la technologie de l'hydrogène vert a connu ces dernières années un développement fulgurant. Nous pouvons nous réjouir qu'une stratégie française de l'hydrogène vert se dessine enfin, stimulée notamment par le paquet européen « Ajustement à l'objectif 55 ».

Les objectifs fixés sont clairs et ambitieux : remplacer progressivement l'hydrogène gris, qui représente actuellement plus de 90 % de la production, et parvenir à l'installation de 6, 5 gigawatts d'électrolyse en 2030, soit la production de 600 kilotonnes par an d'hydrogène décarboné.

Plusieurs sites de production commencent à se déployer sur le territoire. À cet effet, de nombreuses aides sont mises en place : soutien des investissements déterminants pour la construction d'une véritable filière d'hydrogène vert à hauteur de 7 milliards d'euros dans le cadre de France 2030, aides du fonds européen de développement régional, dispositifs de soutien aux démonstrateurs ainsi qu'aux écosystèmes territoriaux via l'Ademe et les programmes d'investissements d'avenir, mécanismes de soutien réservés aux grands projets d'intérêt européen commun...

Tout cela nourrit une dynamique plutôt enthousiasmante pour la transition énergétique de notre économie et de nos territoires, comme je le constate dans ma région.

Néanmoins, un défi majeur demeure : celui du développement des usages, que ce soit dans l'industrie ou dans la mobilité.

En effet, l'acquisition d'un bus ou d'un camion à hydrogène reste extrêmement coûteuse pour les entreprises et les collectivités locales. Le plan rétrofit et le plan de soutien à la décarbonation des cinquante sites les plus polluants ne contiennent que quelques mesures timides en matière d'usage d'hydrogène vert. Il faut donc proposer de véritables incitations, notamment financières, comme nous l'avons fait pour l'électricité ou les biocarburants. Seule une augmentation de la demande permettra de faire baisser le prix de production.

Monsieur le ministre, quelle politique d'incitation le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre pour le développement de la production d'hydrogène vert, qui s'accompagne d'une massification de son usage dans tous les secteurs de l'économie ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Chevrollier

Monsieur le ministre, à l’heure des défis climatiques et de la nécessaire décarbonation, la technologie de l’hydrogène vert a connu ces dernières années un développement fulgurant. Nous pouvons nous réjouir qu’une stratégie française de l’hydrogène vert se dessine enfin, stimulée notamment par le paquet européen « Ajustement à l’objectif 55 ».

Les objectifs fixés sont clairs et ambitieux : remplacer progressivement l’hydrogène gris, qui représente actuellement plus de 90 % de la production, et parvenir à l’installation de 6, 5 gigawatts d’électrolyse en 2030, soit la production de 600 kilotonnes par an d’hydrogène décarboné.

Plusieurs sites de production commencent à se déployer sur le territoire. À cet effet, de nombreuses aides sont mises en place : soutien des investissements déterminants pour la construction d’une véritable filière d’hydrogène vert à hauteur de 7 milliards d’euros dans le cadre de France 2030, aides du fonds européen de développement régional, dispositifs de soutien aux démonstrateurs ainsi qu’aux écosystèmes territoriaux via l’Ademe et les programmes d’investissements d’avenir, mécanismes de soutien réservés aux grands projets d’intérêt européen commun…

Tout cela nourrit une dynamique plutôt enthousiasmante pour la transition énergétique de notre économie et de nos territoires, comme je le constate dans ma région.

Néanmoins, un défi majeur demeure : celui du développement des usages, que ce soit dans l’industrie ou dans la mobilité.

En effet, l’acquisition d’un bus ou d’un camion à hydrogène reste extrêmement coûteuse pour les entreprises et les collectivités locales. Le plan rétrofit et le plan de soutien à la décarbonation des cinquante sites les plus polluants ne contiennent que quelques mesures timides en matière d’usage d’hydrogène vert. Il faut donc proposer de véritables incitations, notamment financières, comme nous l’avons fait pour l’électricité ou les biocarburants. Seule une augmentation de la demande permettra de faire baisser le prix de production.

Monsieur le ministre, quelle politique d’incitation le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre pour le développement de la production d’hydrogène vert, qui s’accompagne d’une massification de son usage dans tous les secteurs de l’économie ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous allons maintenant procéder au débat interactif.

Je rappelle que chaque orateur dispose de deux minutes au maximum pour présenter sa question et son éventuelle réplique.

Le Gouvernement dispose pour répondre d’une durée équivalente. Il aura la faculté, s’il le juge nécessaire, de répondre à la réplique pendant une minute supplémentaire. L’auteur de la question disposera alors à son tour du droit de répondre pendant une minute.

Dans le débat interactif, la parole est à M. Guillaume Chevrollier.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette question extrêmement pertinente, même si l'essentiel est tout de même de disposer d'hydrogène français décarboné à un coût compétitif afin d'en développer les usages. Il s'agit d'un enjeu majeur.

Pour autant, vous avez raison, nous devons soutenir le développement des usages de l'hydrogène, notamment en matière de mobilité lourde – c'est notre conviction à ce stade. Les autobus, les poids lourds, les bennes à ordures, etc. ont sans doute un intérêt certain.

À cet égard, je peux d'ores et déjà annoncer une bonne nouvelle : voilà quelques semaines a été publié en ligne, dans le cadre de France 2030, un appel à projets, qui est toujours ouvert, doté de 125 millions d'euros et intitulé Écosystèmes territoriaux hydrogène, qui vise à aider à l'acquisition de poids lourds, d'autocars ou de véhicules d'un poids important qui fonctionneront à l'hydrogène.

Nous n'aurions pas d'intérêt à subventionner le développement des usages en favorisant les importations en provenance du bout du monde. Il s'avère que nous disposons de fabricants français capables de produire ces véhicules. Il est donc possible de « fermer le cercle » et de répondre à des usages en utilisant de l'hydrogène français produit grâce à des fabricants français.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du g roupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Franck Menonville.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Chevrollier

Monsieur le ministre, à l’heure des défis climatiques et de la nécessaire décarbonation, la technologie de l’hydrogène vert a connu ces dernières années un développement fulgurant. Nous pouvons nous réjouir qu’une stratégie française de l’hydrogène vert se dessine enfin, stimulée notamment par le paquet européen Ajustement à l’objectif 55.

Les objectifs fixés sont clairs et ambitieux : remplacer progressivement l’hydrogène gris, qui représente actuellement plus de 90 % de la production, et parvenir à l’installation de 6, 5 gigawatts d’électrolyse en 2030, soit la production de 600 kilotonnes par an d’hydrogène décarboné.

Plusieurs sites de production commencent à se déployer sur le territoire. À cet effet, de nombreuses aides sont mises en place : soutien des investissements déterminants pour la construction d’une véritable filière d’hydrogène vert à hauteur de 7 milliards d’euros dans le cadre de France 2030, aides du fonds européen de développement régional, dispositifs de soutien aux démonstrateurs ainsi qu’aux écosystèmes territoriaux via l’Ademe et les programmes d’investissements d’avenir, mécanismes de soutien réservés aux grands projets d’intérêt européen commun…

Tout cela nourrit une dynamique plutôt enthousiasmante pour la transition énergétique de notre économie et de nos territoires, comme je le constate dans ma région.

Néanmoins, un défi majeur demeure : celui du développement des usages, que ce soit dans l’industrie ou dans la mobilité.

En effet, l’acquisition d’un bus ou d’un camion à hydrogène reste extrêmement coûteuse pour les entreprises et les collectivités locales. Le plan rétrofit et le plan de soutien à la décarbonation des cinquante sites les plus polluants ne contiennent que quelques mesures timides en matière d’usage d’hydrogène vert. Il faut donc proposer de véritables incitations, notamment financières, comme nous l’avons fait pour l’électricité ou les biocarburants. Seule une augmentation de la demande permettra de faire baisser le prix de production.

Monsieur le ministre, quelle politique d’incitation le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre pour le développement de la production d’hydrogène vert, qui s’accompagne d’une massification de son usage dans tous les secteurs de l’économie ?

M. Alain Marc applaudit.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette question extrêmement pertinente, même si l'essentiel est de disposer d'hydrogène français décarboné à un coût compétitif afin d'en développer les usages. Il s'agit d'un enjeu majeur.

Pour autant, vous avez raison, nous devons soutenir le développement des usages de l'hydrogène, notamment en matière de mobilité lourde – autobus, les poids lourds, les bennes à ordures… C'est notre conviction à notre stade.

À cet égard, je peux d'ores et déjà annoncer une bonne nouvelle : voilà quelques semaines a été publié en ligne, dans le cadre de France 2030, un appel à projets, qui est toujours ouvert, doté de 125 millions d'euros et intitulé Écosystèmes territoriaux hydrogène, qui vise à aider à l'acquisition de poids lourds, d'autocars ou de véhicules d'un poids important qui fonctionneront à l'hydrogène.

Nous n'aurions pas d'intérêt à subventionner le développement des usages en favorisant les importations en provenance du bout du monde. Il s'avère que nous disposons de fabricants français capables de produire ces véhicules. Il est donc possible de « fermer le cercle » et de répondre à des usages en utilisant de l'hydrogène français produit grâce à des fabricants français.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette question extrêmement pertinente, même si l’essentiel est de disposer d’hydrogène français décarboné à un coût compétitif afin d’en développer les usages. Il s’agit d’un enjeu majeur.

Pour autant, vous avez raison, nous devons soutenir le développement des usages de l’hydrogène, notamment en matière de mobilité lourde – autobus, les poids lourds, les bennes à ordures… C’est notre conviction à notre stade.

À cet égard, je peux d’ores et déjà annoncer une bonne nouvelle : voilà quelques semaines a été publié en ligne, dans le cadre de France 2030, un appel à projets, qui est toujours ouvert, doté de 125 millions d’euros et intitulé Écosystèmes territoriaux hydrogène, qui vise à aider à l’acquisition de poids lourds, d’autocars ou de véhicules d’un poids important qui fonctionneront à l’hydrogène.

Nous n’aurions pas d’intérêt à subventionner le développement des usages en favorisant les importations en provenance du bout du monde. Il s’avère que nous disposons de fabricants français capables de produire ces véhicules. Il est donc possible de « fermer le cercle » et de répondre à des usages en utilisant de l’hydrogène français produit grâce à des fabricants français.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Menonville

Monsieur le ministre, développer l'hydrogène au sein de notre mix énergétique, c'est allier la transition énergétique avec une politique industrielle efficace et ambitieuse.

Alors que la France a fait le choix de la relance de sa filière électronucléaire, elle ambitionne également de développer une filière hydrogène décarbonée s'appuyant tant sur le développement des énergies renouvelables que sur notre filière nucléaire.

C'est la garantie de notre souveraineté et de notre indépendance énergétiques, alors même que d'autres pays européens s'orientent plutôt vers de l'hydrogène issu d'énergie exclusivement renouvelable et vers des importations.

La situation géopolitique actuelle nous appelle à plus d'autonomie aux niveaux français et européen. Développer l'hydrogène, c'est faire en sorte qu'il soit encouragé à l'échelle européenne et, plus encore, qu'il soit promu.

Actuellement l'hydrogène est majoritairement produit à partir d'énergies fossiles. La dernière synthèse du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) est claire : nous devons utiliser les énergies bas-carbone pour réduire nos émissions.

En France, notre mix énergétique est principalement fondé sur le nucléaire, énergie décarbonée. Nous faisons donc preuve de cohérence en nous battant pour que l'hydrogène qui en est issu soit intégré aux outils de transition et aux objectifs verts de l'Union européenne.

Monsieur le ministre, je vous sais très engagé, notamment sur la taxonomie, sur la révision de la directive sur les énergies renouvelables (Renewable Energy Directive, dite « RED III ») et sur l'enjeu de la neutralité technologique. Cela sera-t-il suffisant pour faciliter la production d'hydrogène bas-carbone ?

À quelques semaines de l'examen du projet de loi de programmation sur l'énergie et le climat, pouvez-vous nous préciser quelle place y tiendra l'hydrogène ? Quelle articulation comptez-vous bâtir entre les énergies renouvelables, la filière électronucléaire et l'hydrogène ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Franck Menonville.

M. Alain Marc applaudit.

M. Alain Marc applaudit.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette question extrêmement pertinente, même si l’essentiel est de disposer d’hydrogène français décarboné à un coût compétitif afin d’en développer les usages. Il s’agit d’un enjeu majeur.

Pour autant, vous avez raison, nous devons soutenir le développement des usages de l’hydrogène, notamment en matière de mobilité lourde – autobus, les poids lourds, les bennes à ordures… C’est notre conviction à notre stade.

À cet égard, je peux d’ores et déjà annoncer une bonne nouvelle : voilà quelques semaines a été publié en ligne, dans le cadre de France 2030, un appel à projets, qui est toujours ouvert, doté de 125 millions d’euros et intitulé Écosystèmes territoriaux hydrogène, qui vise à aider à l’acquisition de poids lourds, d’autocars ou de véhicules d’un poids important qui fonctionneront à l’hydrogène.

Nous n’aurions pas d’intérêt à subventionner le développement des usages en favorisant les importations en provenance du bout du monde. Il se trouve que nous disposons de fabricants français capables de produire ces véhicules. Il est donc possible de « fermer le cercle » et de répondre à des usages en utilisant de l’hydrogène français produit grâce à des fabricants français.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, nous sommes en pleines négociations, je ne peux donc préjuger de leur point d'atterrissage.

Pour autant, sachez que la proposition de la Commission européenne va dans le bon sens, avec un abaissement de la cible de 20 % pour les pays qui auront été capables de réduire la part de l'hydrogène fossile dans le mix total à moins de 23 % d'ici à 2030.

La France est sans doute capable d'atteindre cet objectif grâce à des investissements ambitieux. Si tel est le cas, nos cibles seront réduites dans le cadre de la directive RED III.

Selon les chiffres actuels, qui sont loin d'être définitifs puisque nous ambitionnons de renégocier encore ce compromis, l'actuelle cible de 42 % d'hydrogène vert d'ici à 2030 serait abaissée à 33 % grâce à ce compromis.

Comme vous l'avez souligné, nous sommes extrêmement actifs pour faire en sorte que les objectifs de la directive sur les énergies renouvelables soient cohérents avec le développement des énergies renouvelables, tel que nous le souhaitons tous et tel que vous l'avez d'ailleurs voté ici même lors de l'examen du projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, tout en préservant la part importante de l'hydrogène décarboné produit par nos centrales nucléaires passées, présentes et à venir.

Ce mix énergétique reposant à la fois sur du renouvelable et du nucléaire nous permettra de développer l'hydrogène non seulement en France, mais sans doute aussi en Europe. Si nous abordons tous la stratégie hydrogène comme le font nos voisins d'outre-Rhin, nous manquerons d'hydrogène dans le monde.

Nous avons sans doute besoin d'importer de l'hydrogène – les Allemands le feront –, mais aussi et surtout d'en produire chez nous, ce que nous envisageons de faire avec ambition.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Menonville

Monsieur le ministre, développer l'hydrogène au sein de notre mix énergétique, c'est allier la transition énergétique avec une politique industrielle efficace et ambitieuse.

Alors que la France a fait le choix de la relance de sa filière électronucléaire, elle ambitionne également de développer une filière hydrogène décarbonée s'appuyant tant sur le développement des énergies renouvelables que sur notre filière nucléaire.

C'est la garantie de notre souveraineté et de notre indépendance énergétiques, alors même que d'autres pays européens s'orientent plutôt vers de l'hydrogène issu d'énergies exclusivement renouvelables et vers des importations.

La situation géopolitique actuelle nous appelle à plus d'autonomie aux niveaux français et européen. Développer l'hydrogène, c'est faire en sorte qu'il soit encouragé, voire promu, à l'échelle européenne.

Actuellement, l'hydrogène est majoritairement produit à partir d'énergies fossiles. La dernière synthèse du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) est claire : nous devons utiliser les énergies bas-carbone pour réduire nos émissions.

En France, notre mix énergétique est principalement fondé sur le nucléaire, énergie décarbonée. Nous faisons donc preuve de cohérence en nous battant pour que l'hydrogène qui en est issu soit intégré aux outils de transition et aux objectifs verts de l'Union européenne.

Monsieur le ministre, je vous sais très engagé, notamment sur la taxonomie, sur la révision de la directive relative aux énergies renouvelables (Renewable Energy Directive, dite « RED III ») et sur l'enjeu de la neutralité technologique. Cela sera-t-il suffisant pour faciliter la production d'hydrogène bas-carbone ?

À quelques semaines de l'examen du projet de loi de programmation sur l'énergie et le climat, pouvez-vous nous préciser quelle place y tiendra l'hydrogène ? Quelle articulation comptez-vous bâtir entre les énergies renouvelables, la filière électronucléaire et l'hydrogène ?

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Menonville

Monsieur le ministre, développer l’hydrogène au sein de notre mix énergétique, c’est allier la transition énergétique avec une politique industrielle efficace et ambitieuse.

Alors que la France a fait le choix de la relance de sa filière électronucléaire, elle ambitionne également de développer une filière hydrogène décarbonée s’appuyant tant sur le développement des énergies renouvelables que sur notre filière nucléaire.

C’est la garantie de notre souveraineté et de notre indépendance énergétiques, alors même que d’autres pays européens s’orientent plutôt vers de l’hydrogène issu d’énergies exclusivement renouvelables et vers des importations.

La situation géopolitique actuelle nous appelle à plus d’autonomie aux niveaux français et européen. Développer l’hydrogène, c’est faire en sorte qu’il soit encouragé, voire promu, à l’échelle européenne.

Actuellement, l’hydrogène est majoritairement produit à partir d’énergies fossiles. La dernière synthèse du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) est claire : nous devons utiliser les énergies bas-carbone pour réduire nos émissions.

En France, notre mix énergétique est principalement fondé sur le nucléaire, énergie décarbonée. Nous faisons donc preuve de cohérence en nous battant pour que l’hydrogène qui en est issu soit intégré aux outils de transition et aux objectifs verts de l’Union européenne.

Monsieur le ministre, je vous sais très engagé, notamment sur la taxonomie, sur la révision de la directive relative aux énergies renouvelables (Renewable Energy Directive, dite « RED III ») et sur l’enjeu de la neutralité technologique. Cela sera-t-il suffisant pour faciliter la production d’hydrogène bas-carbone ?

À quelques semaines de l’examen du projet de loi de programmation sur l’énergie et le climat, pouvez-vous nous préciser quelle place y tiendra l’hydrogène ? Quelle articulation comptez-vous bâtir entre les énergies renouvelables, la filière électronucléaire et l’hydrogène ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Franck Menonville.

M. Alain Marc applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Monsieur le ministre, à la différence de l'électricité, l'hydrogène est une énergie de stock et non une énergie de flux. C'est là tout son intérêt : il peut être associé à des énergies intermittentes ou variables, comme le solaire et l'éolien. Il a donc toute sa place dans notre mix énergétique.

S'il nous semble intéressant de développer cette production, il convient en parallèle de s'assurer qu'elle se fera à partir d'énergies renouvelables. Aujourd'hui, plus de 95 % de l'hydrogène produit est gris, c'est-à-dire provenant d'énergies fossiles.

Alors que le projet de pipeline H2Med entre la péninsule ibérique et la France a été lancé, la politique française s'appuiera-t-elle majoritairement sur ces importations ? Envisagez-vous le développement de l'hydrogène via une production locale avec des énergies renouvelables ?

Vous avez donné quelques éléments de réponse, j'attends des développements complémentaires.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, nous sommes en pleines négociations, je ne peux donc préjuger de leur point d'atterrissage.

Pour autant, sachez que la proposition de la Commission européenne va dans le bon sens, avec un abaissement de la cible de 20 % pour les pays qui auront été capables de réduire la part de l'hydrogène fossile dans le mix total à moins de 23 % d'ici à 2030.

La France est sans doute capable d'atteindre cet objectif grâce à des investissements ambitieux. Si tel est le cas, nos cibles seront réduites dans le cadre de la directive RED III.

Selon les chiffres actuels, qui sont loin d'être définitifs puisque nous ambitionnons de renégocier encore ce compromis, l'actuelle cible de 42 % d'hydrogène vert d'ici à 2030 serait abaissée à 33 % grâce à ce compromis.

Comme vous l'avez souligné, nous sommes extrêmement actifs pour faire en sorte que les objectifs de la directive sur les énergies renouvelables soient cohérents avec le développement des énergies renouvelables, tel que nous le souhaitons tous et tel que vous l'avez d'ailleurs voté ici même lors de l'examen du projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, tout en préservant la part importante de l'hydrogène décarboné produit par nos centrales nucléaires passées, présentes et à venir.

Ce mix énergétique reposant à la fois sur du renouvelable et du nucléaire nous permettra de développer l'hydrogène non seulement en France, mais sans doute aussi en Europe. Si nous abordons tous la stratégie hydrogène comme le font nos voisins d'outre-Rhin, nous manquerons d'hydrogène dans le monde.

Nous avons sans doute besoin d'importer de l'hydrogène – les Allemands le feront –, mais aussi et surtout d'en produire chez nous, ce que nous envisageons de faire avec ambition.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, nous sommes en pleines négociations, je ne peux donc préjuger de leur point d’atterrissage.

Pour autant, sachez que la proposition de la Commission européenne va dans le bon sens, avec un abaissement de la cible de 20 % pour les pays qui auront été capables de réduire la part de l’hydrogène fossile dans le mix total à moins de 23 % d’ici à 2030.

La France est sans doute capable d’atteindre cet objectif grâce à des investissements ambitieux. Si tel est le cas, nos cibles seront réduites dans le cadre de la directive RED III.

Selon les chiffres actuels, qui sont loin d’être définitifs puisque nous ambitionnons de renégocier encore ce compromis, l’actuelle cible de 42 % d’hydrogène vert d’ici à 2030 serait abaissée à 33 % grâce à ce compromis.

Comme vous l’avez souligné, nous sommes extrêmement actifs pour faire en sorte que les objectifs de la directive sur les énergies renouvelables soient cohérents avec le développement des énergies renouvelables, tel que nous le souhaitons tous et tel que vous l’avez d’ailleurs voté ici même lors de l’examen du projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, tout en préservant la part importante de l’hydrogène décarboné produit par nos centrales nucléaires passées, présentes et à venir.

Ce mix énergétique reposant à la fois sur du renouvelable et du nucléaire nous permettra de développer l’hydrogène non seulement en France, mais sans doute aussi en Europe. Si nous abordons tous la stratégie hydrogène comme le font nos voisins d’outre-Rhin, nous manquerons d’hydrogène dans le monde.

Nous avons sans doute besoin d’importer de l’hydrogène – les Allemands le feront –, mais aussi et surtout d’en produire chez nous, ce que nous envisageons de faire avec ambition.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Menonville

Monsieur le ministre, développer l’hydrogène au sein de notre mix énergétique, c’est allier la transition énergétique avec une politique industrielle efficace et ambitieuse.

Alors que la France a fait le choix de la relance de sa filière électronucléaire, elle ambitionne également de développer une filière hydrogène décarbonée s’appuyant tant sur le développement des énergies renouvelables que sur notre filière nucléaire.

C’est la garantie de notre souveraineté et de notre indépendance énergétiques, alors même que d’autres pays européens s’orientent plutôt vers de l’hydrogène issu d’énergies exclusivement renouvelables et vers des importations.

La situation géopolitique actuelle nous appelle à plus d’autonomie aux niveaux français et européen. Développer l’hydrogène, c’est faire en sorte qu’il soit encouragé, voire promu, à l’échelle européenne.

Actuellement, l’hydrogène est majoritairement produit à partir d’énergies fossiles. La dernière synthèse du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) est claire : nous devons utiliser les énergies bas-carbone pour réduire nos émissions.

En France, notre mix énergétique est principalement fondé sur le nucléaire, énergie décarbonée. Nous faisons donc preuve de cohérence en nous battant pour que l’hydrogène qui en est issu soit intégré aux outils de transition et aux objectifs verts de l’Union européenne.

Monsieur le ministre, je vous sais très engagé, notamment sur la taxonomie, sur la révision de la directive relative aux énergies renouvelables (Renewable Energy Directive, dite RED III) et sur l’enjeu de la neutralité technologique. Cela sera-t-il suffisant pour faciliter la production d’hydrogène bas-carbone ?

À quelques semaines de l’examen du projet de loi de programmation sur l’énergie et le climat, pouvez-vous nous préciser quelle place y tiendra l’hydrogène ? Quelle articulation comptez-vous bâtir entre les énergies renouvelables, la filière électronucléaire et l’hydrogène ?

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Menonville

Monsieur le ministre, développer l’hydrogène au sein de notre mix énergétique, c’est allier la transition énergétique avec une politique industrielle efficace et ambitieuse.

Alors que la France a fait le choix de la relance de sa filière électronucléaire, elle ambitionne également de développer une filière hydrogène décarbonée s’appuyant tant sur le développement des énergies renouvelables que sur notre filière nucléaire.

C’est la garantie de notre souveraineté et de notre indépendance énergétiques, alors même que d’autres pays européens s’orientent plutôt vers de l’hydrogène issu d’énergies exclusivement renouvelables et vers des importations.

La situation géopolitique actuelle nous appelle à plus d’autonomie aux niveaux français et européen. Développer l’hydrogène, c’est faire en sorte qu’il soit encouragé, voire promu, à l’échelle européenne.

Actuellement, l’hydrogène est majoritairement produit à partir d’énergies fossiles. La dernière synthèse du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) est claire : nous devons utiliser les énergies bas-carbone pour réduire nos émissions.

En France, notre mix énergétique est principalement fondé sur le nucléaire, énergie décarbonée. Nous faisons donc preuve de cohérence en nous battant pour que l’hydrogène qui en est issu soit intégré aux outils de transition et aux objectifs verts de l’Union européenne.

Monsieur le ministre, je vous sais très engagé, notamment sur la taxonomie, sur la révision de la directive relative aux énergies renouvelables (Renewable Energy Directive, dite RED III) et sur l’enjeu de la neutralité technologique. Cela sera-t-il suffisant pour faciliter la production d’hydrogène bas-carbone ?

À quelques semaines de l’examen du projet de loi de programmation sur l’énergie et le climat, pouvez-vous nous préciser quelle place y tiendra l’hydrogène ? Quelle articulation comptez-vous bâtir entre les énergies renouvelables, la filière électronucléaire et l’hydrogène ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, votre question est essentielle : si nous voulons décarboner l'industrie traditionnelle en développant l'industrie de la décarbonation dans nos territoires, en créant de l'emploi et de la prospérité, en réconciliant économie et écologie, il faut produire l'hydrogène chez nous.

Nous pourrions nous appuyer sur les importations, comme souhaitent le faire un certain nombre de nos voisins. Pour notre part, nous sommes convaincus que nous devons développer l'hydrogène chez nous.

Celui-ci sera issu à la fois d'énergies renouvelables et d'énergies décarbonées. On peut et l'on doit faire l'un et l'autre.

Vous avez examiné deux projets de loi : l'un, relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables ; l'autre, visant l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires. Comme M. le sénateur Gremillet l'a souligné dans son intervention, vous attendez et vous aurez une loi de programmation pluriannuelle qui permettra de mettre tout cela en perspective. Nous croyons aux deux, nous aurons les deux et vous aurez l'occasion de voter sur les deux très bientôt.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Monsieur le ministre, à la différence de l'électricité, l'hydrogène est une énergie de stock et non une énergie de flux. C'est là tout son intérêt : il peut être associé à des énergies intermittentes ou variables, comme le solaire et l'éolien. Il a donc toute sa place dans notre mix énergétique.

S'il nous semble intéressant de développer cette production, il convient en parallèle de s'assurer qu'elle se fera à partir d'énergies renouvelables. Aujourd'hui, plus de 95 % de l'hydrogène produit est gris, c'est-à-dire provenant d'énergies fossiles.

Alors que le projet de pipeline H2Med entre la péninsule ibérique et la France a été lancé, la politique française s'appuiera-t-elle majoritairement sur ces importations ? Envisagez-vous le développement de l'hydrogène via une production locale avec des énergies renouvelables ?

Vous avez donné quelques éléments de réponse, j'attends des développements complémentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Monsieur le ministre, à la différence de l’électricité, l’hydrogène est une énergie de stock et non une énergie de flux. C’est là tout son intérêt : il peut être associé à des énergies intermittentes ou variables, comme le solaire et l’éolien. Il a donc toute sa place dans notre mix énergétique.

S’il nous semble intéressant de développer cette production, il convient en parallèle de s’assurer qu’elle se fera à partir d’énergies renouvelables. Aujourd’hui, plus de 95 % de l’hydrogène produit est gris, c’est-à-dire provenant d’énergies fossiles.

Alors que le projet de pipeline H2Med entre la péninsule ibérique et la France a été lancé, la politique française s’appuiera-t-elle majoritairement sur ces importations ? Envisagez-vous le développement de l’hydrogène via une production locale avec des énergies renouvelables ?

Vous avez donné quelques éléments de réponse, j’attends des développements complémentaires.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, nous sommes en pleines négociations, je ne peux donc préjuger leur point d’atterrissage.

Pour autant, sachez que la proposition de la Commission européenne va dans le bon sens, avec un abaissement de la cible de 20 % pour les pays qui auront été capables de réduire la part de l’hydrogène fossile dans le mix total à moins de 23 % d’ici à 2030.

La France est sans doute capable d’atteindre cet objectif grâce à des investissements ambitieux. Si tel est le cas, nos cibles seront réduites dans le cadre de la directive RED III.

Selon les chiffres actuels, qui sont loin d’être définitifs puisque nous ambitionnons de renégocier encore ce compromis, l’actuelle cible de 42 % d’hydrogène vert d’ici à 2030 serait abaissée à 33 % grâce à ce compromis.

Comme vous l’avez souligné, nous sommes extrêmement actifs pour faire en sorte que les objectifs de la directive sur les énergies renouvelables soient cohérents avec le développement des énergies renouvelables, tel que nous le souhaitons tous et tel que vous l’avez d’ailleurs voté ici même lors de l’examen du projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, tout en préservant la part importante de l’hydrogène décarboné produit par nos centrales nucléaires passées, présentes et à venir.

Ce mix énergétique reposant à la fois sur du renouvelable et du nucléaire nous permettra de développer l’hydrogène non seulement en France, mais sans doute aussi en Europe. Si nous abordons tous la stratégie hydrogène comme le font nos voisins d’outre-Rhin, nous manquerons d’hydrogène dans le monde.

Nous avons sans doute besoin d’importer de l’hydrogène – les Allemands le feront –, mais aussi et surtout d’en produire chez nous, ce que nous envisageons de faire avec ambition.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Monsieur le ministre, votre mix énergétique s'appuie essentiellement sur le nucléaire et le renouvelable. Pour ma part, vous le savez, je ne suis pas favorable au nucléaire.

Il faut regarder les choses en face : pour une énergie primaire issue d'une centrale thermique, qu'elle soit fossile ou nucléaire, le rendement de la production électrique est de 35 %. Ensuite, à partir de cette électricité, le rendement de la production d'hydrogène est de 30 %.

Résultat des courses : 90 % de l'énergie primaire est partie dans la nature. C'est un immense gâchis ! Surtout à partir de centrales thermiques.

Il en va tout autrement quand on emploie une électricité issue du renouvelable, car l'on ne subit pas, d'emblée, 35 % de pertes.

Il me semble donc indispensable de développer la production d'hydrogène à partir d'énergies renouvelables : ces dernières offrent un rendement nettement supérieur et l'on sait qu'à l'avenir elles seront bien plus compétitives que l'énergie nucléaire.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, votre question est essentielle : si nous voulons décarboner l'industrie traditionnelle en développant l'industrie de la décarbonation dans nos territoires, en créant de l'emploi et de la prospérité, en réconciliant économie et écologie, il faut produire l'hydrogène chez nous.

Nous pourrions nous appuyer sur les importations, comme souhaitent le faire un certain nombre de nos voisins. Pour notre part, nous sommes convaincus que nous devons développer l'hydrogène chez nous.

Celui-ci sera issu à la fois d'énergies renouvelables et d'énergies décarbonées. On peut et l'on doit faire l'un et l'autre.

Vous avez examiné deux projets de loi : l'un, relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables ; l'autre, visant à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires. Comme M. le sénateur Gremillet l'a souligné dans son intervention, vous attendez et vous aurez une loi de programmation pluriannuelle qui permettra de mettre tout cela en perspective. Nous croyons en l'un et en l'autre, nous aurons l'un et l'autre et vous aurez l'occasion d'en discuter très bientôt.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, votre question est essentielle : si nous voulons décarboner l’industrie traditionnelle en développant l’industrie de la décarbonation dans nos territoires, en créant de l’emploi et de la prospérité, en réconciliant économie et écologie, il faut produire l’hydrogène chez nous.

Nous pourrions nous appuyer sur les importations, comme souhaitent le faire un certain nombre de nos voisins. Pour notre part, nous sommes convaincus que nous devons développer l’hydrogène chez nous.

Celui-ci sera issu à la fois d’énergies renouvelables et d’énergies décarbonées. On peut et l’on doit faire l’un et l’autre.

Vous avez examiné deux projets de loi : l’un, relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables ; l’autre, visant à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires. Comme M. le sénateur Gremillet l’a souligné dans son intervention, vous attendez et vous aurez une loi de programmation pluriannuelle qui permettra de mettre tout cela en perspective. Nous croyons en l’un et en l’autre, nous aurons l’un et l’autre et vous aurez l’occasion d’en discuter très bientôt.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Monsieur le ministre, à la différence de l’électricité, l’hydrogène est une énergie de stock et non une énergie de flux. C’est là tout son intérêt : il peut être associé à des énergies intermittentes ou variables, comme le solaire et l’éolien. Il a donc toute sa place dans notre mix énergétique.

S’il nous semble intéressant de développer cette production, il convient en parallèle de s’assurer qu’elle se fera à partir d’énergies renouvelables. Aujourd’hui, plus de 95 % de l’hydrogène produit est gris, c’est-à-dire provenant d’énergies fossiles.

Alors que le projet de pipeline H2Med entre la péninsule ibérique et la France a été lancé, la politique française s’appuiera-t-elle majoritairement sur ces importations ? Envisagez-vous le développement de l’hydrogène via une production locale avec des énergies renouvelables ?

Vous avez donné quelques éléments de réponse, j’attends des développements complémentaires.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué

Monsieur le sénateur, les chiffres de rendements que vous mentionnez ne tiennent pas compte de l'intermittence, facteur clef de l'énergie renouvelable.

J'ai rappelé les prix auxquels l'hydrogène était compétitif. Aujourd'hui, les industriels indiquent avoir besoin d'un hydrogène entre 2 et 2, 5 euros le kilo. Or, à ce stade du développement des énergies renouvelables, le prix de l'électricité que fourniraient les projets d'électrolyse est quasiment du double, entre 4 et 6 euros le kilo.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Monsieur le ministre, votre mix énergétique s'appuie essentiellement sur le nucléaire et le renouvelable. Pour ma part, vous le savez, je ne suis pas favorable au nucléaire.

Il faut regarder les choses en face : pour une énergie primaire issue d'une centrale thermique, qu'elle soit fossile ou nucléaire, le rendement de la production électrique est de 35 %. Ensuite, à partir de cette électricité, le rendement de la production d'hydrogène est de 30 %. Résultat des courses : 90 % de l'énergie primaire est partie dans la nature. C'est un immense gâchis ! Surtout à partir de centrales thermiques.

Il en va tout autrement quand on emploie une électricité issue du renouvelable, car l'on ne subit pas, d'emblée, 35 % de pertes.

Il me semble donc indispensable de développer la production d'hydrogène à partir d'énergies renouvelables : ces dernières offrent un rendement nettement supérieur et l'on sait qu'à l'avenir elles seront bien plus compétitives que l'énergie nucléaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Monsieur le ministre, votre mix énergétique s’appuie essentiellement sur le nucléaire et le renouvelable. Pour ma part, vous le savez, je ne suis pas favorable au nucléaire.

Il faut regarder les choses en face : pour une énergie primaire issue d’une centrale thermique, qu’elle soit fossile ou nucléaire, le rendement de la production électrique est de 35 %. Ensuite, à partir de cette électricité, le rendement de la production d’hydrogène est de 30 %. Résultat des courses : 90 % de l’énergie primaire est partie dans la nature. C’est un immense gâchis ! Surtout à partir de centrales thermiques.

Il en va tout autrement quand on emploie une électricité issue du renouvelable, car l’on ne subit pas, d’emblée, 35 % de pertes.

Il me semble donc indispensable de développer la production d’hydrogène à partir d’énergies renouvelables : ces dernières offrent un rendement nettement supérieur et l’on sait qu’à l’avenir elles seront bien plus compétitives que l’énergie nucléaire.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, votre question est essentielle : si nous voulons décarboner l’industrie traditionnelle en développant l’industrie de la décarbonation dans nos territoires, en créant de l’emploi et de la prospérité, en réconciliant économie et écologie, il faut produire l’hydrogène chez nous.

Nous pourrions nous appuyer sur les importations, comme souhaitent le faire un certain nombre de nos voisins. Pour notre part, nous sommes convaincus que nous devons développer l’hydrogène chez nous.

Celui-ci sera issu à la fois d’énergies renouvelables et d’énergies décarbonées. On peut et l’on doit faire l’un et l’autre.

Vous avez examiné deux projets de loi : l’un, relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, l’autre, visant à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires. Comme M. le sénateur Gremillet l’a souligné dans son intervention, vous attendez et vous aurez une loi de programmation pluriannuelle qui permettra de mettre tout cela en perspective. Nous croyons en l’un et en l’autre, nous aurons l’un et l’autre et vous aurez l’occasion d’en discuter très bientôt.

M. Daniel Salmon acquiesce.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué

À ce jour, les énergies renouvelables ne permettent donc pas de produire de l'hydrogène compétitif. Nous y arriverons sans doute à mesure que les volumes augmenteront ; mais, d'ici là – peut-être serons-nous d'accord pour reconnaître ce désaccord entre nous –, le nucléaire est un élément essentiel du développement de l'hydrogène.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué

Monsieur le sénateur, les chiffres de rendements que vous mentionnez ne tiennent pas compte de l'intermittence, facteur clef de l'énergie renouvelable.

J'ai rappelé les prix auxquels l'hydrogène était compétitif. Aujourd'hui, les industriels indiquent avoir besoin d'un hydrogène entre 2 et 2, 5 euros le kilo. Or, à ce stade du développement des énergies renouvelables, le prix de l'électricité que fourniraient les projets d'électrolyse est quasiment du double, entre 4 et 6 euros le kilo.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, les chiffres de rendements que vous mentionnez ne tiennent pas compte de l’intermittence, facteur clef de l’énergie renouvelable.

J’ai rappelé les prix auxquels l’hydrogène était compétitif. Aujourd’hui, les industriels indiquent avoir besoin d’un hydrogène entre 2 et 2, 5 euros le kilo. Or, à ce stade du développement des énergies renouvelables, le prix de l’électricité que fourniraient les projets d’électrolyse est quasiment du double, entre 4 et 6 euros le kilo.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Monsieur le ministre, votre mix énergétique s’appuie essentiellement sur le nucléaire et le renouvelable. Pour ma part, vous le savez, je ne suis pas favorable au nucléaire.

Il faut regarder les choses en face : pour une énergie primaire issue d’une centrale thermique, qu’elle soit fossile ou nucléaire, le rendement de la production électrique est de 35 %. Ensuite, à partir de cette électricité, le rendement de la production d’hydrogène est de 30 %. Résultat des courses : 90 % de l’énergie primaire est partie dans la nature. C’est un immense gâchis ! Surtout à partir de centrales thermiques.

Il en va tout autrement quand on emploie une électricité issue du renouvelable, car l’on ne subit pas, d’emblée, 35 % de pertes.

Il me semble donc indispensable de développer la production d’hydrogène à partir d’énergies renouvelables : ces dernières offrent un rendement nettement supérieur et l’on sait qu’à l’avenir elles seront bien plus compétitives que l’énergie nucléaire.

M. Daniel Salmon acquiesce.

M. Daniel Salmon acquiesce.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué

À ce jour, les énergies renouvelables ne permettent donc pas de produire de l'hydrogène compétitif. Nous y arriverons sans doute à mesure de l'augmentation des volumes. D'ici là – peut-être serons-nous d'accord pour reconnaître ce désaccord entre nous –, le nucléaire est un élément essentiel du développement de l'hydrogène.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

À ce jour, les énergies renouvelables ne permettent donc pas de produire de l’hydrogène compétitif. Nous y arriverons sans doute à mesure de l’augmentation des volumes. D’ici là – peut-être serons-nous d’accord pour reconnaître ce désaccord entre nous –, le nucléaire est un élément essentiel du développement de l’hydrogène.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, les chiffres de rendements que vous mentionnez ne tiennent pas compte de l’intermittence, facteur clé de l’énergie renouvelable.

J’ai rappelé les prix auxquels l’hydrogène était compétitif. Aujourd’hui, les industriels indiquent avoir besoin d’un hydrogène entre 2 et 2, 5 euros le kilogramme. Or, à ce stade du développement des énergies renouvelables, le prix de l’électricité que fourniraient les projets d’électrolyse est quasiment du double, entre 4 et 6 euros le kilogramme.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Monsieur le ministre, j'entends bien votre réponse, mais vous ne m'avez pas franchement convaincu.

Certes, le nucléaire n'est pas une énergie intermittente, mais, si l'on tient compte de tous ses coûts induits, il affiche un rendement assez détestable. Dans les années à venir, le mégawattheure produit par le nouveau nucléaire atteindra 100 à 120 euros. Bien entendu, vous misez sur une baisse de ces coûts, mais ce n'est guère ce qui se passe à Flamanville. On observe même plutôt le mouvement inverse, l'électricité produite devenant de plus en plus chère.

On assiste aujourd'hui au développement massif de l'éolien offshore, surtout par les pays nordiques ; dans son ensemble, le renouvelable présente de très grandes potentialités.

Nous sommes effectivement face à un certain nombre de défis technologiques. Peut-être pourrez-vous nous apporter quelques réponses au sujet des électrolyseurs, dont le rendement serait meilleur. Où en est la recherche actuellement ?

M. Daniel Salmon acquiesce.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

À ce jour, les énergies renouvelables ne permettent donc pas de produire de l’hydrogène compétitif. Nous y arriverons sans doute à mesure de l’augmentation des volumes. D’ici là – peut-être serons-nous d’accord pour reconnaître ce désaccord entre nous –, le nucléaire est un élément essentiel du développement de l’hydrogène.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Marchand

S'appuyer sur nos laboratoires de recherche et sur nos industriels à la pointe de l'innovation, créer une filière compétitive d'hydrogène renouvelable et bas-carbone et devenir l'un des leaders mondiaux de l'hydrogène décarboné par électrolyse : telle est la feuille de route de notre pays en la matière.

Néanmoins, pour offrir à l'hydrogène un futur prometteur dans notre mix énergétique, il est indispensable de lever certains freins, en améliorant le rendement des procédés de production, en optimisant le stockage à haute pression ou encore en favorisant les investissements, ce qui suppose de réduire autant que possible le risque industriel.

Il semble donc incontournable de mettre en place des politiques publiques visant à encourager le déploiement et la baisse de coûts de certaines technologies.

L'Union européenne et ses États membres ont récemment réaffirmé leur intention de mettre en œuvre des contrats pour la différence, plus connus sous l'acronyme anglais de CFD, visant à soutenir la production d'hydrogène. Or une note récente de l'institut pour le développement durable et les relations internationales (Iddri) met en exergue quelques antagonismes dans le système mis en place.

Jusqu'à présent, l'attribution des contrats repose souvent sur un système d'enchères, remportées par les projets les moins coûteux par volume d'hydrogène produit ou par tonne de CO2 évitée. L'objectif est d'encourager la concurrence entre acteurs industriels et de réduire au maximum le coût pour la puissance publique ; mais les enchères défavorisent les technologies plus chères et plus innovantes ainsi que les nouveaux entrants, alors que ces acteurs peuvent jouer un rôle important dans la décarbonation.

On pourrait envisager d'octroyer les CFD par panier de technologies, en isolant les technologies de production que l'on estime incontournables tout en conservant une forme de concurrence.

Chaque panier pourrait disposer d'une enveloppe budgétaire garantie. Ce faisant, la concurrence entre paniers serait contenue dans des limites précises – c'est le cas dans le nouveau système mis en place aux Pays-Bas et en Angleterre pour l'électricité renouvelable.

En outre, les contrats pourraient faire l'objet d'un guichet ouvert au lieu d'être mis aux enchères. Dès lors, tous les projets éligibles pourraient recevoir une aide.

Monsieur le ministre, à l'instar de ce qui a été réalisé pour les énergies renouvelables, envisage-t-on de conclure des CFD entre la puissance publique et des acteurs privés afin d'accélérer la production d'hydrogène ? Je pense notamment à l'électrolyse : ces contrats permettraient de soutenir de premiers projets de nature commerciale grâce à la garantie de revenus aux producteurs et, ainsi, d'inciter les développeurs à la commercialisation directe.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Monsieur le ministre, j'entends bien votre réponse, mais vous ne m'avez pas franchement convaincu.

Certes, le nucléaire n'est pas une énergie intermittente ; mais si l'on tient compte de tous ses coûts induits, il affiche un rendement assez détestable. Dans les années à venir, le mégawattheure produit par le nouveau nucléaire atteindra 100 à 120 euros. Bien entendu, vous misez sur une baisse de ces coûts, mais ce n'est guère ce qui se passe à Flamanville. On observe même plutôt le mouvement inverse, l'électricité produite devenant de plus en plus chère.

On assiste aujourd'hui au développement massif de l'éolien offshore, surtout par les pays nordiques ; dans son ensemble, le renouvelable présente de très grandes potentialités.

Nous sommes effectivement face à un certain nombre de défis technologiques. Peut-être pourrez-vous nous apporter quelques réponses au sujet des électrolyseurs, dont le rendement serait meilleur. Où en est la recherche actuellement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Monsieur le ministre, j’entends bien votre réponse, mais vous ne m’avez pas franchement convaincu.

Certes, le nucléaire n’est pas une énergie intermittente ; mais si l’on tient compte de tous ses coûts induits, il affiche un rendement assez détestable. Dans les années à venir, le mégawattheure produit par le nouveau nucléaire atteindra 100 à 120 euros. Bien entendu, vous misez sur une baisse de ces coûts, mais ce n’est guère ce qui se passe à Flamanville. On observe même plutôt le mouvement inverse, l’électricité produite devenant de plus en plus chère.

On assiste aujourd’hui au développement massif de l’éolien offshore, surtout par les pays nordiques ; dans son ensemble, le renouvelable présente de très grandes potentialités.

Nous sommes effectivement face à un certain nombre de défis technologiques. Peut-être pourrez-vous nous apporter quelques réponses au sujet des électrolyseurs, dont le rendement serait meilleur. Où en est la recherche actuellement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Marchand

S'appuyer sur nos laboratoires de recherche et sur nos industriels à la pointe de l'innovation, créer une filière compétitive d'hydrogène renouvelable et bas-carbone et devenir l'un des leaders mondiaux de l'hydrogène décarboné par électrolyse : telle est la feuille de route de notre pays en la matière.

Néanmoins, pour offrir à l'hydrogène un futur prometteur dans notre mix énergétique, il est indispensable de lever certains freins, en améliorant le rendement des procédés de production, en optimisant le stockage à haute pression ou encore en favorisant les investissements, ce qui suppose de réduire autant que possible le risque industriel.

Il semble donc incontournable de mettre en place des politiques publiques visant à encourager le déploiement et la baisse de coûts de certaines technologies.

L'Union européenne et ses États membres ont récemment réaffirmé leur intention de mettre en œuvre des contrats pour la différence, plus connus sous le sigle anglais de CFD, visant à soutenir la production d'hydrogène. Or une note récente de l'institut pour le développement durable et les relations internationales (Iddri) met en exergue quelques antagonismes dans le système retenu.

Jusqu'à présent, l'attribution des contrats repose souvent sur un système d'enchères, remportées par les projets les moins coûteux par volume d'hydrogène produit ou par tonne de CO2 évitée. L'objectif est d'encourager la concurrence entre acteurs industriels et de réduire au maximum le coût pour la puissance publique ; mais les enchères défavorisent les technologies plus chères et plus innovantes ainsi que les nouveaux entrants, alors que ces acteurs peuvent jouer un rôle important dans la décarbonation.

On pourrait envisager d'octroyer les CFD par paniers de technologies, en isolant les technologies de production que l'on estime incontournables tout en conservant une forme de concurrence.

Chaque panier pourrait disposer d'une enveloppe budgétaire garantie. Ce faisant, la concurrence entre paniers serait contenue dans des limites précises – c'est le cas dans le nouveau système mis en place aux Pays-Bas et en Angleterre pour l'électricité renouvelable.

En outre, les contrats pourraient faire l'objet d'un guichet ouvert au lieu d'être mis aux enchères. Dès lors, tous les projets éligibles pourraient recevoir une aide.

Monsieur le ministre, à l'instar de ce qui a été réalisé pour les énergies renouvelables, envisage-t-on de conclure des CFD entre la puissance publique et des acteurs privés afin d'accélérer la production d'hydrogène ? Je pense notamment à l'électrolyse : ces contrats permettraient de soutenir de premiers projets de nature commerciale grâce à la garantie de revenus aux producteurs et, ainsi, d'inciter les développeurs à la commercialisation directe.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Marchand

S’appuyer sur nos laboratoires de recherche et sur nos industriels à la pointe de l’innovation, créer une filière compétitive d’hydrogène renouvelable et bas-carbone et devenir l’un des leaders mondiaux de l’hydrogène décarboné par électrolyse : telle est la feuille de route de notre pays en la matière.

Néanmoins, pour offrir à l’hydrogène un futur prometteur dans notre mix énergétique, il est indispensable de lever certains freins, en améliorant le rendement des procédés de production, en optimisant le stockage à haute pression ou encore en favorisant les investissements, ce qui suppose de réduire autant que possible le risque industriel.

Il semble donc incontournable de mettre en place des politiques publiques visant à encourager le déploiement et la baisse de coûts de certaines technologies.

L’Union européenne et ses États membres ont récemment réaffirmé leur intention de mettre en œuvre des contrats pour la différence, plus connus sous le sigle anglais de CFD, visant à soutenir la production d’hydrogène. Or une note récente de l’institut pour le développement durable et les relations internationales (Iddri) met en exergue quelques antagonismes dans le système retenu.

Jusqu’à présent, l’attribution des contrats repose souvent sur un système d’enchères, remportées par les projets les moins coûteux par volume d’hydrogène produit ou par tonne de CO2 évitée. L’objectif est d’encourager la concurrence entre acteurs industriels et de réduire au maximum le coût pour la puissance publique ; mais les enchères défavorisent les technologies plus chères et plus innovantes ainsi que les nouveaux entrants, alors que ces acteurs peuvent jouer un rôle important dans la décarbonation.

On pourrait envisager d’octroyer les CFD par paniers de technologies, en isolant les technologies de production que l’on estime incontournables tout en conservant une forme de concurrence.

Chaque panier pourrait disposer d’une enveloppe budgétaire garantie. Ce faisant, la concurrence entre paniers serait contenue dans des limites précises – c’est le cas dans le nouveau système mis en place aux Pays-Bas et en Angleterre pour l’électricité renouvelable.

En outre, les contrats pourraient faire l’objet d’un guichet ouvert au lieu d’être mis aux enchères. Dès lors, tous les projets éligibles pourraient recevoir une aide.

Monsieur le ministre, à l’instar de ce qui a été réalisé pour les énergies renouvelables, envisage-t-on de conclure des CFD entre la puissance publique et des acteurs privés afin d’accélérer la production d’hydrogène ? Je pense notamment à l’électrolyse : ces contrats permettraient de soutenir de premiers projets de nature commerciale grâce à la garantie de revenus aux producteurs et, ainsi, d’inciter les développeurs à la commercialisation directe.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Monsieur le ministre, j’entends bien votre réponse, mais vous ne m’avez pas franchement convaincu.

Certes, le nucléaire n’est pas une énergie intermittente ; mais si l’on tient compte de tous ses coûts induits, il affiche un rendement assez détestable. Dans les années à venir, le mégawattheure produit par le nouveau nucléaire atteindra 100 à 120 euros. Bien entendu, vous misez sur une baisse de ces coûts, mais ce n’est guère ce qui se passe à Flamanville. On observe même plutôt le mouvement inverse, l’électricité produite devenant de plus en plus chère.

On assiste aujourd’hui au développement massif de l’éolien offshore, surtout par les pays nordiques ; dans son ensemble, le renouvelable présente de très grandes potentialités.

Nous sommes effectivement face à un certain nombre de défis technologiques. Peut-être pourrez-vous nous apporter quelques réponses au sujet des électrolyseurs, dont le rendement serait meilleur. Où en est la recherche actuellement ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, votre question est pertinente : comme vous le soulignez, les contrats pour la différence peuvent avoir quelques effets pervers. Parfois, seuls les producteurs les plus compétitifs y ont accès et profitent, ainsi, de l'écart avec le prix du marché.

Néanmoins, tel n'est pas le cas pour l'hydrogène : les projets les plus innovants sont même souvent ceux qui présentent les rendements les plus élevés. En finançant les Capex (Capital Expenditures), comme nous nous y engageons dans le cadre des Piiec, on peut obtenir des Opex (Operating Expenses) plus faibles pour les projets les plus innovants. Les CFD deviennent ainsi un mécanisme vertueux : in fine, ils bénéficient aux acteurs les plus innovants, lesquels proposent aussi le meilleur rendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Marchand

S’appuyer sur nos laboratoires de recherche et sur nos industriels à la pointe de l’innovation, créer une filière compétitive d’hydrogène renouvelable et bas-carbone et devenir l’un des leaders mondiaux de l’hydrogène décarboné par électrolyse : telle est la feuille de route de notre pays en la matière.

Néanmoins, pour offrir à l’hydrogène un futur prometteur dans notre mix énergétique, il est indispensable de lever certains freins, en améliorant le rendement des procédés de production, en optimisant le stockage à haute pression ou encore en favorisant les investissements, ce qui suppose de réduire autant que possible le risque industriel.

Il semble donc incontournable de mettre en place des politiques publiques visant à encourager le déploiement et la baisse de coûts de certaines technologies.

L’Union européenne et ses États membres ont récemment réaffirmé leur intention de mettre en œuvre des contrats pour la différence, plus connus sous le sigle anglais de CFD, visant à soutenir la production d’hydrogène. Or une note récente de l’Institut pour le développement durable et les relations internationales (Iddri) met en exergue quelques antagonismes dans le système retenu.

Jusqu’à présent, l’attribution des contrats repose souvent sur un système d’enchères, remportées par les projets les moins coûteux par volume d’hydrogène produit ou par tonne de CO2 évitée. L’objectif est d’encourager la concurrence entre acteurs industriels et de réduire au maximum le coût pour la puissance publique ; mais les enchères défavorisent les technologies plus chères et plus innovantes ainsi que les nouveaux entrants, alors que ces acteurs peuvent jouer un rôle important dans la décarbonation.

On pourrait envisager d’octroyer les CFD par paniers de technologies, en isolant les technologies de production que l’on estime incontournables tout en conservant une forme de concurrence.

Chaque panier pourrait disposer d’une enveloppe budgétaire garantie. Ce faisant, la concurrence entre paniers serait contenue dans des limites précises – c’est le cas dans le nouveau système mis en place aux Pays-Bas et en Angleterre pour l’électricité renouvelable.

En outre, les contrats pourraient faire l’objet d’un guichet ouvert au lieu d’être mis aux enchères. Dès lors, tous les projets éligibles pourraient recevoir une aide.

Monsieur le ministre, à l’instar de ce qui a été réalisé pour les énergies renouvelables, envisage-t-on de conclure des CFD entre la puissance publique et des acteurs privés afin d’accélérer la production d’hydrogène ? Je pense notamment à l’électrolyse : ces contrats permettraient de soutenir de premiers projets de nature commerciale grâce à la garantie de revenus aux producteurs et, ainsi, d’inciter les développeurs à la commercialisation directe.

Applaudissements sur des travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, votre question est pertinente : comme vous le soulignez, les contrats pour la différence peuvent avoir quelques effets pervers. Parfois, seuls les producteurs les plus compétitifs y ont accès et profitent, ainsi, de l'écart avec le prix du marché.

Néanmoins, tel n'est pas le cas pour l'hydrogène : les projets les plus innovants sont même souvent ceux qui présentent les rendements les plus élevés. En finançant les Capex (Capital Expenditures), comme nous nous y engageons dans le cadre des Piiec, on peut obtenir des Opex (Operating Expenses) plus faibles pour les projets les plus innovants. Les CFD deviennent ainsi un mécanisme vertueux : in fine, ils bénéficient aux acteurs les plus innovants, lesquels proposent aussi le meilleur rendement.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, votre question est pertinente : comme vous le soulignez, les contrats pour la différence peuvent avoir quelques effets pervers. Parfois, seuls les producteurs les plus compétitifs y ont accès et profitent, ainsi, de l’écart avec le prix du marché.

Néanmoins, tel n’est pas le cas pour l’hydrogène : les projets les plus innovants sont même souvent ceux qui présentent les rendements les plus élevés. En finançant les Capex (Capital Expenditures), comme nous nous y engageons dans le cadre des Piiec, on peut obtenir des Opex (Operating Expenses) plus faibles pour les projets les plus innovants. Les CFD deviennent ainsi un mécanisme vertueux : in fine, ils bénéficient aux acteurs les plus innovants, lesquels proposent aussi le meilleur rendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Tissot

Un débat relatif à l'hydrogène a tout son intérêt pour le législateur, car il le conduit à poser deux questions essentielles : cette énergie est-elle réellement utile et positive pour notre transition énergétique ? Si oui, comment pouvons-nous assurer sa démocratisation au-delà des aspects uniquement économiques ?

Monsieur le ministre, au sujet de la première interrogation, il me semble nécessaire de formuler ce rappel à la suite de notre collègue Daniel Salmon : la majeure partie de l'hydrogène est aujourd'hui produite à partir de combustibles fossiles – elle est dérivée du méthane, pour les trois quarts, et pour le dernier quart du charbon. En parallèle, l'hydrogène vert ne représente que 1 % de la production mondiale totale, notamment à cause de son coût trop élevé.

Comment la France, qui, pour citer le Président de la République, entend devenir le « leader de l'hydrogène vert en 2030 », compte-t-elle réussir cette transition vers un hydrogène vert ? Malgré les millions d'euros investis par l'Union européenne, l'on peut nourrir quelques doutes quant à la crédibilité des annonces présidentielles, voire des craintes pour la réussite de la transition de notre mix énergétique.

J'en viens à la démocratisation de cette énergie. En 2020, lors de son audition devant la commission des affaires économiques du Sénat, le président-directeur général (PDG) d'Air Liquide reconnaissait que le développement de l'hydrogène se concentrait essentiellement sur l'industrie et les transports lourds. Il admettait surtout que la voiture individuelle à l'hydrogène restait un mythe, faute d'attrait économique.

Après avoir tranché les questions de production, comment le Gouvernement prévoit-il d'accompagner la démocratisation de l'hydrogène, non seulement auprès des particuliers, mais aussi auprès des collectivités territoriales ? Certaines d'entre elles perçoivent l'intérêt économique et énergétique d'un développement local de l'hydrogène – il en est de même pour la méthanisation –, mais manquent souvent d'information quant à ces projets industriels d'ampleur.

Au sein de votre ministère, mène-t-on une réflexion pour bâtir une communication dédiée aux collectivités territoriales, en traitant à la fois des aspects positifs et négatifs de telles solutions ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot.

Applaudissements sur des travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, votre question est pertinente : comme vous le soulignez, les contrats pour la différence peuvent avoir quelques effets pervers. Parfois, seuls les producteurs les plus compétitifs y ont accès et profitent, ainsi, de l’écart avec le prix du marché.

Néanmoins, tel n’est pas le cas pour l’hydrogène : les projets les plus innovants sont même souvent ceux qui présentent les rendements les plus élevés. En finançant les Capex (Capital Expenditures), comme nous nous y engageons dans le cadre des Piiec, on peut obtenir des Opex (Operating Expenses) plus faibles pour les projets les plus innovants. Les CFD deviennent ainsi un mécanisme vertueux : in fine, ils bénéficient aux acteurs les plus innovants, lesquels proposent aussi le meilleur rendement.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, l'hydrogène fait bel et bien partie des piliers énergétiques du futur. Il relève essentiellement des relations de commerce à commerce, ou B to B, plutôt que de commerce à consommateur, ou B to C.

La démocratisation de l'hydrogène, que vous appelez de vos vœux, n'est sans doute pas pour demain : elle supposerait de déployer partout en France des réseaux très coûteux, pour que les véhicules individuels puissent « faire le plein », si je puis m'exprimer ainsi. De plus, pour les petits véhicules, le rendement de l'hydrogène est insuffisant pour concurrencer les batteries.

J'y insiste : la meilleure manière de démocratiser l'hydrogène, c'est de cibler les transports en commun. Les trains et les bus à hydrogène existent déjà et ils seront rentables – je pense aussi aux poids lourds. Pour les autres moyens de transport, nous privilégions le développement de l'industrie bas-carbone de demain.

C'est, j'en suis convaincu, une belle histoire que nous avons à écrire. Nous sommes en train d'assister à une nouvelle révolution industrielle. Des territoires depuis trop longtemps déclassés, à la suite de la désindustrialisation, reprennent espoir grâce à l'industrie de la décarbonation : on va produire de l'acier à partir d'hydrogène ; on va capturer du carbone dans des cimenteries ; on va fabriquer des engrais à partir d'hydrogène.

Si l'hydrogène restera bien cantonné aux usages professionnels, nous aurons ensemble l'occasion d'écrire cette belle histoire pour les Françaises et les Français en créant de l'emploi partout, y compris dans des territoires qui en ont bien besoin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Tissot

Un débat relatif à l'hydrogène a tout son intérêt pour le législateur, car il le conduit à poser deux questions essentielles : cette énergie est-elle réellement utile et positive pour notre transition énergétique ? Si oui, comment pouvons-nous assurer sa démocratisation au-delà des aspects uniquement économiques ?

Monsieur le ministre, au sujet de la première interrogation, il me semble nécessaire de formuler ce rappel à la suite de notre collègue Daniel Salmon : la majeure partie de l'hydrogène est aujourd'hui produite à partir de combustibles fossiles – elle est dérivée du méthane pour les trois quarts, et du charbon pour le dernier quart. En parallèle, l'hydrogène vert ne représente que 1 % de la production mondiale totale, notamment en raison de son coût.

Comment la France, qui entend devenir, pour citer le Président de la République, le « leader de l'hydrogène vert en 2030 », compte-t-elle réussir cette transition vers un hydrogène vert ? Malgré les millions d'euros investis par l'Union européenne, l'on peut nourrir quelques doutes quant à la crédibilité des annonces présidentielles, voire des craintes pour la réussite de la transition de notre mix énergétique.

J'en viens à la démocratisation de cette énergie. En 2020, lors de son audition devant la commission des affaires économiques du Sénat, le président-directeur général (PDG) d'Air Liquide reconnaissait que le développement de l'hydrogène se concentrait essentiellement sur l'industrie et les transports lourds. Il admettait surtout que la voiture individuelle à l'hydrogène restait un mythe, faute d'attrait économique.

Après avoir tranché les questions de production, comment le Gouvernement prévoit-il d'accompagner la démocratisation de l'hydrogène, non seulement auprès des particuliers, mais aussi auprès des collectivités territoriales ? Certaines d'entre elles perçoivent l'intérêt économique et énergétique d'un développement local de l'hydrogène – il en est de même pour la méthanisation –, mais manquent souvent d'information quant à ces projets industriels d'ampleur.

Au sein de votre ministère, mène-t-on une réflexion pour bâtir une communication dédiée aux collectivités territoriales, en traitant à la fois des aspects positifs et négatifs de telles solutions ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Tissot

Un débat relatif à l’hydrogène a tout son intérêt pour le législateur, car il le conduit à poser deux questions essentielles : cette énergie est-elle réellement utile et positive pour notre transition énergétique ? Si oui, comment pouvons-nous assurer sa démocratisation au-delà des aspects uniquement économiques ?

Monsieur le ministre, au sujet de la première interrogation, il me semble nécessaire de formuler ce rappel à la suite de notre collègue Daniel Salmon : la majeure partie de l’hydrogène est aujourd’hui produite à partir de combustibles fossiles – elle est dérivée du méthane pour les trois quarts, et du charbon pour le dernier quart. En parallèle, l’hydrogène vert ne représente que 1 % de la production mondiale totale, notamment en raison de son coût.

Comment la France, qui entend devenir, pour citer le Président de la République, le « leader de l’hydrogène vert en 2030 », compte-t-elle réussir cette transition vers un hydrogène vert ? Malgré les millions d’euros investis par l’Union européenne, l’on peut nourrir quelques doutes quant à la crédibilité des annonces présidentielles, voire des craintes pour la réussite de la transition de notre mix énergétique.

J’en viens à la démocratisation de cette énergie. En 2020, lors de son audition devant la commission des affaires économiques du Sénat, le président-directeur général (PDG) d’Air Liquide reconnaissait que le développement de l’hydrogène se concentrait essentiellement sur l’industrie et les transports lourds. Il admettait surtout que la voiture individuelle à l’hydrogène restait un mythe, faute d’attrait économique.

Après avoir tranché les questions de production, comment le Gouvernement prévoit-il d’accompagner la démocratisation de l’hydrogène, non seulement auprès des particuliers, mais aussi auprès des collectivités territoriales ? Certaines d’entre elles perçoivent l’intérêt économique et énergétique d’un développement local de l’hydrogène – il en est de même pour la méthanisation –, mais manquent souvent d’information quant à ces projets industriels d’ampleur.

Au sein de votre ministère, mène-t-on une réflexion pour bâtir une communication dédiée aux collectivités territoriales, en traitant à la fois des aspects positifs et négatifs de telles solutions ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot.

Applaudissements sur des travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

L'hydrogène est une énergie d'avenir, porteuse de nombreux espoirs en vue de la décarbonation de notre industrie.

Aujourd'hui, la stratégie nationale hydrogène se décline en trois objectifs issus du plan d'investissement France 2030 : installer suffisamment d'électrolyseurs pour décarboner l'économie, développer les mobilités propres et construire une filière industrielle en créant 50 000 à 150 000 emplois.

Monsieur le ministre, se tourner vers le futur ne doit pas empêcher d'apprendre des erreurs du passé, en particulier lorsque l'ambition est de garantir à la France une souveraineté et une maîtrise technologiques.

Au total, 7 milliards d'euros sont mis sur la table : très bien. En finançant des entreprises, notamment des start-ups, ces crédits sont censés développer la filière française de l'hydrogène. Le modèle choisi, c'est donc une nouvelle fois celui de la subvention publique, essentiellement réservée au secteur privé.

J'aimerais comprendre ce qui permettra concrètement de maîtriser l'emploi, les savoir-faire et les moyens de production – je pense en particulier aux électrolyseurs – si, demain, les investisseurs trouvent que l'herbe est plus verte ailleurs.

En l'état, l'Europe essaie tant bien que mal d'apporter une réponse à l'Inflation Reduction Act américain, mais il ne faut pas se voiler la face : les États-Unis, qui subventionnent massivement l'hydrogène décarboné, sont pour l'instant bien plus attractifs que nous.

Si, demain, tel ou tel industriel privé décide de fermer des sites français au motif qu'il serait plus rentable de s'installer outre-Atlantique, de quelle maîtrise la France disposera-t-elle ? Concrètement, nous devrons réinvestir des milliards et des milliards d'euros sous peine de voir s'effondrer la filière et prendre une nouvelle fois du retard.

Ma question est simple. En misant sur le secteur privé pour développer une énergie d'avenir, comment comptez-vous garantir à la France la maîtrise de sa filière hydrogène à long terme ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, l'hydrogène fait bel et bien partie des piliers énergétiques du futur. Il relève essentiellement des relations de commerce à commerce, ou B to B, plutôt que de commerce à consommateur, ou B to C.

La démocratisation de l'hydrogène, que vous appelez de vos vœux, n'est sans doute pas pour demain : elle supposerait de déployer partout en France des réseaux très coûteux pour que les véhicules individuels puissent « faire le plein », si je puis m'exprimer ainsi. De plus, pour les petits véhicules, le rendement de l'hydrogène est insuffisant pour concurrencer les batteries.

J'y insiste : la meilleure manière de démocratiser l'hydrogène, c'est de cibler les transports en commun. Les trains et les bus à hydrogène existent déjà et ils seront rentables – je pense aussi aux poids lourds. Pour les autres moyens de transport, nous privilégions le développement de l'industrie bas-carbone de demain.

C'est, j'en suis convaincu, une belle histoire que nous avons à écrire. Nous sommes en train d'assister à une nouvelle révolution industrielle. Des territoires depuis trop longtemps déclassés, à la suite de la désindustrialisation, reprennent espoir grâce à l'industrie de la décarbonation : on va produire de l'acier à partir d'hydrogène ; on va capturer du carbone dans des cimenteries ; on va fabriquer des engrais à partir d'hydrogène.

Si l'hydrogène restera bien cantonné aux usages professionnels, nous aurons ensemble l'occasion d'écrire cette belle histoire pour les Françaises et les Français en créant de l'emploi partout, y compris dans des territoires qui en ont bien besoin.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, l’hydrogène fait bel et bien partie des piliers énergétiques du futur. Il relève essentiellement des relations de commerce à commerce, ou B to B, plutôt que de commerce à consommateur, ou B to C.

La démocratisation de l’hydrogène, que vous appelez de vos vœux, n’est sans doute pas pour demain : elle supposerait de déployer partout en France des réseaux très coûteux pour que les véhicules individuels puissent « faire le plein », si je puis m’exprimer ainsi. De plus, pour les petits véhicules, le rendement de l’hydrogène est insuffisant pour concurrencer les batteries.

J’y insiste : la meilleure manière de démocratiser l’hydrogène, c’est de cibler les transports en commun. Les trains et les bus à hydrogène existent déjà et ils seront rentables – je pense aussi aux poids lourds. Pour les autres moyens de transport, nous privilégions le développement de l’industrie bas-carbone de demain.

C’est, j’en suis convaincu, une belle histoire que nous avons à écrire. Nous sommes en train d’assister à une nouvelle révolution industrielle. Des territoires depuis trop longtemps déclassés, à la suite de la désindustrialisation, reprennent espoir grâce à l’industrie de la décarbonation : on va produire de l’acier à partir d’hydrogène ; on va capturer du carbone dans des cimenteries ; on va fabriquer des engrais à partir d’hydrogène.

Si l’hydrogène restera bien cantonné aux usages professionnels, nous aurons ensemble l’occasion d’écrire cette belle histoire pour les Françaises et les Français en créant de l’emploi partout, y compris dans des territoires qui en ont bien besoin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Tissot

Un débat relatif à l’hydrogène a tout son intérêt pour le législateur, car il le conduit à poser deux questions essentielles : cette énergie est-elle réellement utile et positive pour notre transition énergétique ? Si oui, comment pouvons-nous assurer sa démocratisation au-delà des aspects uniquement économiques ?

Monsieur le ministre, au sujet de la première interrogation, il me semble nécessaire de formuler ce rappel à la suite de notre collègue Daniel Salmon : la majeure partie de l’hydrogène est aujourd’hui produite à partir de combustibles fossiles – elle est dérivée du méthane pour les trois quarts, et du charbon pour le dernier quart. En parallèle, l’hydrogène vert ne représente que 1 % de la production mondiale totale, notamment en raison de son coût.

Comment la France, qui entend devenir, pour citer le Président de la République, le « leader de l’hydrogène vert en 2030 », compte-t-elle réussir cette transition vers un hydrogène vert ? Malgré les millions d’euros investis par l’Union européenne, l’on peut nourrir quelques doutes quant à la crédibilité des annonces présidentielles, voire des craintes pour la réussite de la transition de notre mix énergétique.

J’en viens à la démocratisation de cette énergie. En 2020, lors de son audition devant la commission des affaires économiques du Sénat, le président-directeur général (PDG) d’Air Liquide reconnaissait que le développement de l’hydrogène se concentrait essentiellement sur l’industrie et les transports lourds. Il admettait surtout que la voiture individuelle à l’hydrogène restait un mythe, faute d’attrait économique.

Après avoir tranché les questions de production, comment le Gouvernement prévoit-il d’accompagner la démocratisation de l’hydrogène, non seulement auprès des particuliers, mais aussi auprès des collectivités territoriales ? Certaines d’entre elles perçoivent l’intérêt économique et énergétique d’un développement local de l’hydrogène – il en est de même pour la méthanisation –, mais manquent souvent d’information quant à ces projets industriels d’ampleur.

Au sein de votre ministère, mène-t-on une réflexion pour bâtir une communication dédiée aux collectivités territoriales, en traitant à la fois des aspects positifs et négatifs de telles solutions ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie. Monsieur le sénateur, nous sommes convaincus que l'Europe possède des atouts face aux États-Unis, n'en déplaise à votre américanophilie apparente…

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

L'hydrogène est une énergie d'avenir, porteuse de nombreux espoirs en vue de la décarbonation de notre industrie.

Aujourd'hui, la stratégie nationale hydrogène se décline en trois objectifs issus du plan d'investissement France 2030 : installer suffisamment d'électrolyseurs pour décarboner l'économie, développer les mobilités propres et construire une filière industrielle en créant 50 000 à 150 000 emplois.

Monsieur le ministre, se tourner vers le futur ne doit pas empêcher d'apprendre des erreurs du passé, en particulier lorsque l'ambition est de garantir à la France une souveraineté et une maîtrise technologiques.

Au total, 7 milliards d'euros sont mis sur la table : très bien. En finançant des entreprises, notamment des start-ups, ces crédits sont censés développer la filière française de l'hydrogène. Le modèle choisi, c'est donc une nouvelle fois celui de la subvention publique, essentiellement réservée au secteur privé.

J'aimerais comprendre ce qui permettra concrètement de maîtriser l'emploi, les savoir-faire et les moyens de production – je pense en particulier aux électrolyseurs – si, demain, les investisseurs trouvent que l'herbe est plus verte ailleurs.

En l'état, l'Europe essaie tant bien que mal d'apporter une réponse à l'Inflation Reduction Act américain, mais il ne faut pas se voiler la face : les États-Unis, qui subventionnent massivement l'hydrogène décarboné, sont pour l'instant bien plus attractifs que nous.

Si, demain, tel ou tel industriel privé décide de fermer des sites français au motif qu'il serait plus rentable de s'installer outre-Atlantique, de quelle maîtrise la France disposera-t-elle ? Concrètement, nous devrons réinvestir des milliards et des milliards d'euros sous peine de voir s'effondrer la filière et prendre une nouvelle fois du retard.

Ma question est simple. En misant sur le secteur privé pour développer une énergie d'avenir, comment comptez-vous garantir à la France la maîtrise de sa filière hydrogène à long terme ?

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

L’hydrogène est une énergie d’avenir, porteuse de nombreux espoirs en vue de la décarbonation de notre industrie.

Aujourd’hui, la stratégie nationale hydrogène se décline en trois objectifs issus du plan d’investissement France 2030 : installer suffisamment d’électrolyseurs pour décarboner l’économie, développer les mobilités propres et construire une filière industrielle en créant 50 000 à 150 000 emplois.

Monsieur le ministre, se tourner vers le futur ne doit pas empêcher d’apprendre des erreurs du passé, en particulier lorsque l’ambition est de garantir à la France une souveraineté et une maîtrise technologiques.

Au total, 7 milliards d’euros sont mis sur la table : très bien. En finançant des entreprises, notamment des start-ups, ces crédits sont censés développer la filière française de l’hydrogène. Le modèle choisi, c’est donc une nouvelle fois celui de la subvention publique, essentiellement réservée au secteur privé.

J’aimerais comprendre ce qui permettra concrètement de maîtriser l’emploi, les savoir-faire et les moyens de production – je pense en particulier aux électrolyseurs – si, demain, les investisseurs trouvent que l’herbe est plus verte ailleurs.

En l’état, l’Europe essaie tant bien que mal d’apporter une réponse à l’Inflation Reduction Act américain, mais il ne faut pas se voiler la face : les États-Unis, qui subventionnent massivement l’hydrogène décarboné, sont pour l’instant bien plus attractifs que nous.

Si, demain, tel ou tel industriel privé décide de fermer des sites français au motif qu’il serait plus rentable de s’installer outre-Atlantique, de quelle maîtrise la France disposera-t-elle ? Concrètement, nous devrons réinvestir des milliards et des milliards d’euros sous peine de voir s’effondrer la filière et prendre une nouvelle fois du retard.

Ma question est simple. En misant sur le secteur privé pour développer une énergie d’avenir, comment comptez-vous garantir à la France la maîtrise de sa filière hydrogène à long terme ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, l’hydrogène fait bel et bien partie des piliers énergétiques du futur. Il relève essentiellement des relations de commerce à commerce, ou B to B, plutôt que de commerce à consommateur, ou B to C.

La démocratisation de l’hydrogène, que vous appelez de vos vœux, n’est sans doute pas pour demain : elle supposerait de déployer partout en France des réseaux très coûteux pour que les véhicules individuels puissent « faire le plein », si je puis m’exprimer ainsi. De plus, pour les petits véhicules, le rendement de l’hydrogène est insuffisant pour concurrencer les batteries.

J’y insiste : la meilleure manière de démocratiser l’hydrogène, c’est de cibler les transports en commun. Les trains et les bus à hydrogène existent déjà et ils seront rentables – je pense aussi aux poids lourds. Pour les autres moyens de transport, nous privilégions le développement de l’industrie bas-carbone de demain.

C’est, j’en suis convaincu, une belle histoire que nous avons à écrire. Nous sommes en train d’assister à une nouvelle révolution industrielle. Des territoires depuis trop longtemps déclassés, à la suite de la désindustrialisation, reprennent espoir grâce à l’industrie de la décarbonation : on va produire de l’acier à partir d’hydrogène ; on va capturer du carbone dans des cimenteries ; on va fabriquer des engrais à partir d’hydrogène.

Si l’hydrogène restera bien cantonné aux usages professionnels, nous aurons ensemble l’occasion d’écrire cette belle histoire pour les Françaises et les Français en créant de l’emploi partout, y compris dans des territoires qui en ont bien besoin.

Sourires sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie. Monsieur le sénateur, nous sommes convaincus que l'Europe possède des atouts face aux États-Unis, n'en déplaise à votre américanophilie apparente…

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l ’ économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l ’ industrie. Monsieur le sénateur, nous sommes convaincus que l’Europe possède des atouts face aux États-Unis, n’en déplaise à votre américanophilie apparente…

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

L’hydrogène est une énergie d’avenir, porteuse de nombreux espoirs en vue de la décarbonation de notre industrie.

Aujourd’hui, la stratégie nationale hydrogène se décline en trois objectifs issus du plan d’investissement France 2030 : installer suffisamment d’électrolyseurs pour décarboner l’économie, développer les mobilités propres et construire une filière industrielle en créant 50 000 à 150 000 emplois.

Monsieur le ministre, se tourner vers le futur ne doit pas empêcher d’apprendre des erreurs du passé, en particulier lorsque l’ambition est de garantir à la France une souveraineté et une maîtrise technologiques.

Au total, 7 milliards d’euros sont mis sur la table : très bien. En finançant des entreprises, notamment des start-up, ces crédits sont censés développer la filière française de l’hydrogène. Le modèle choisi, c’est donc une nouvelle fois celui de la subvention publique, essentiellement réservée au secteur privé.

J’aimerais comprendre ce qui permettra concrètement de maîtriser l’emploi, les savoir-faire et les moyens de production – je pense en particulier aux électrolyseurs – si, demain, les investisseurs trouvent que l’herbe est plus verte ailleurs.

En l’état, l’Europe essaie tant bien que mal d’apporter une réponse à l’Inflation Reduction Act américain, mais il ne faut pas se voiler la face : les États-Unis, qui subventionnent massivement l’hydrogène décarboné, sont pour l’instant bien plus attractifs que nous.

Si, demain, tel ou tel industriel privé décide de fermer des sites français au motif qu’il serait plus rentable de s’installer outre-Atlantique, de quelle maîtrise la France disposera-t-elle ? Concrètement, nous devrons réinvestir des milliards et des milliards d’euros sous peine de voir s’effondrer la filière et prendre une nouvelle fois du retard.

Ma question est simple. En misant sur le secteur privé pour développer une énergie d’avenir, comment comptez-vous garantir à la France la maîtrise de sa filière hydrogène à long terme ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué

Je plaisante, évidemment !

Sourires sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l ’ économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l ’ industrie. Monsieur le sénateur, nous sommes convaincus que l’Europe possède des atouts face aux États-Unis, n’en déplaise à votre américanophilie apparente…

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué

Vous mentionnez l'Inflation Reduction Act. Mais, comme vous le savez, l'Europe bénéficie d'un énorme avantage compétitif : ses brevets, sa technologie, sa recherche et son développement.

Nous avons en Europe plus de brevets dédiés à l'hydrogène qu'il n'en existe partout ailleurs dans le monde. La France est particulièrement forte de sa capacité à innover : en la matière, elle est au deuxième rang mondial, et le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) dispose du plus gros portefeuille de brevets au monde : profitons-en. Tirons parti de cet avantage technologique, que nous ne possédons pas dans d'autres industries traditionnelles, pour investir.

Investir, aujourd'hui, cela veut effectivement dire subventionner. Vous l'avez rappelé : les États-Unis, chantres du libéralisme, sont eux aussi entrés dans la course aux subventions. Leur stratégie est extrêmement ambitieuse, au risque, d'ailleurs, d'avoir des effets délétères.

Oui, nous allons continuer de subventionner cette technologie. Oui, nous allons continuer de subventionner les investissements pour que la France et l'Europe développent une industrie souveraine, à même de s'inscrire dans la durée.

Devrions-nous agir dans un cadre public ? J'en doute. Nous le faisons dans un certain nombre de domaines. Vous le savez : l'entreprise Électricité de France, qui va construire l'essentiel des futurs réacteurs nucléaires, est sur le point d'être nationalisée à 100 %. Si je ne m'abuse, cette mesure prend effet aujourd'hui même, la justice ayant donné son blanc-seing au Gouvernement. C'est tout au plus une question de jours.

Pour ce qui concerne l'électricité d'origine nucléaire, nous croyons à la souveraineté publique. Mais les enjeux auxquels nous sommes confrontés au sujet de l'hydrogène, tant en matière d'innovation que de financement, sont bien trop grands et les solutions bien trop diverses pour que l'État puisse, à la place d'autres, choisir ce qui est bon.

Nous croyons à l'innovation. Nous croyons à l'entrepreneuriat. Évidemment, les subventions seront extrêmement encadrées, notamment par les règles européennes. Mais, selon nous, ce modèle est le meilleur, car il est le mieux à même de nous fournir de l'hydrogène…

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Je plaisante, évidemment !

Sourires sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué …

innovant et compétitif.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué

Vous mentionnez l'Inflation Reduction Act. Mais, comme vous le savez, l'Europe bénéficie d'un énorme avantage compétitif : ses brevets, sa technologie, sa recherche et son développement.

Nous avons en Europe plus de brevets dédiés à l'hydrogène qu'il n'en existe partout ailleurs dans le monde. La France est particulièrement forte de sa capacité à innover : en la matière, elle est au deuxième rang mondial et le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) dispose du plus gros portefeuille de brevets au monde. Profitons-en en tirant parti de cet avantage technologique, que nous ne possédons pas dans d'autres industries traditionnelles, pour investir.

Investir signifie effectivement aujourd'hui subventionner. Vous l'avez rappelé : les États-Unis, chantres du libéralisme, sont eux aussi entrés dans la course aux subventions. Leur stratégie est extrêmement ambitieuse, au risque, d'ailleurs, d'avoir des effets délétères.

Oui, nous allons continuer de subventionner cette technologie. Oui, nous allons continuer de subventionner les investissements pour que la France et l'Europe développent une industrie souveraine, à même de s'inscrire dans la durée.

Devrions-nous agir dans un cadre public ? J'en doute. Nous le faisons dans un certain nombre de domaines. Vous le savez : l'entreprise Électricité de France, qui va construire l'essentiel des futurs réacteurs nucléaires, est sur le point d'être nationalisée à 100 %. Si je ne m'abuse, cette mesure prend effet aujourd'hui même, la justice ayant donné son blanc-seing au Gouvernement. C'est tout au plus une question de jours.

Pour ce qui concerne l'électricité d'origine nucléaire, nous croyons à la souveraineté publique. Mais les enjeux auxquels nous sommes confrontés au sujet de l'hydrogène, tant en matière d'innovation que de financement, sont bien trop grands et les solutions bien trop diverses pour que l'État puisse, à la place d'autres, choisir ce qui est bon.

Nous croyons à l'innovation. Nous croyons à l'entrepreneuriat. Évidemment, les subventions seront extrêmement encadrées, notamment par les règles européennes. Mais, selon nous, ce modèle est le meilleur, car il est le mieux à même de nous fournir de l'hydrogène…

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Vous mentionnez l’ Inflation Reduction Act. Mais, comme vous le savez, l’Europe bénéficie d’un énorme avantage compétitif : ses brevets, sa technologie, sa recherche et son développement.

Nous avons en Europe plus de brevets dédiés à l’hydrogène qu’il n’en existe partout ailleurs dans le monde. La France est particulièrement forte de sa capacité à innover : en la matière, elle est au deuxième rang mondial et le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) dispose du plus gros portefeuille de brevets au monde. Profitons-en en tirant parti de cet avantage technologique, que nous ne possédons pas dans d’autres industries traditionnelles, pour investir.

Investir signifie effectivement aujourd’hui subventionner. Vous l’avez rappelé : les États-Unis, chantres du libéralisme, sont eux aussi entrés dans la course aux subventions. Leur stratégie est extrêmement ambitieuse, au risque, d’ailleurs, d’avoir des effets délétères.

Oui, nous allons continuer de subventionner cette technologie. Oui, nous allons continuer de subventionner les investissements pour que la France et l’Europe développent une industrie souveraine, à même de s’inscrire dans la durée.

Devrions-nous agir dans un cadre public ? J’en doute. Nous le faisons dans un certain nombre de domaines. Vous le savez : l’entreprise Électricité de France, qui va construire l’essentiel des futurs réacteurs nucléaires, est sur le point d’être nationalisée à 100 %. Si je ne m’abuse, cette mesure prend effet aujourd’hui même, la justice ayant donné son blanc-seing au Gouvernement. C’est tout au plus une question de jours.

Pour ce qui concerne l’électricité d’origine nucléaire, nous croyons à la souveraineté publique. Mais les enjeux auxquels nous sommes confrontés au sujet de l’hydrogène, tant en matière d’innovation que de financement, sont bien trop grands et les solutions bien trop diverses pour que l’État puisse, à la place d’autres, choisir ce qui est bon.

Nous croyons à l’innovation. Nous croyons à l’entrepreneuriat. Évidemment, les subventions seront extrêmement encadrées, notamment par les règles européennes. Mais, selon nous, ce modèle est le meilleur, car il est le mieux à même de nous fournir de l’hydrogène…

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Je plaisante, évidemment !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chauvet

L'Union européenne s'est récemment fixé pour objectif, à l'horizon 2030, d'atteindre un niveau de production de 10 millions de tonnes d'hydrogène vert.

Ambitieux pour certains, utopique pour d'autres, cet objectif passera nécessairement par la multiplication de nos capacités d'importation d'énergie d'origine renouvelable.

Dans cette perspective, l'Union européenne a d'ores et déjà signé des protocoles d'accord avec nombre de pays, notamment africains, afin de bénéficier de leurs capacités de production d'énergies renouvelables.

Toutefois, un certain nombre d'observateurs alertent dès à présent quant aux limites d'un fort recours à l'importation. En effet, les pays exportateurs d'énergies renouvelables devront puiser dans leurs réseaux nationaux pour fournir l'énergie nécessaire à l'Union européenne, au détriment des populations locales.

L'exemple de la Namibie est particulièrement éloquent. En 2022, seuls 56 % des Namibiens avaient accès à l'électricité. Pourtant, leur pays se dit prêt à exporter en masse sa production d'énergies renouvelables vers les États européens. L'accord trouvé avec l'Union européenne est symbolique de cette dynamique dramatique.

Afin de développer l'hydrogène vert, nous cannibaliserons les ressources en énergies renouvelables de ces pays. Nous renforcerons, en conséquence, leur dépendance aux énergies fossiles. Or la lutte contre le changement climatique ne saurait être menée en vase clos. Notre transition énergétique sera mondiale ou ne sera pas. Il est de notre responsabilité de la concevoir à l'échelle mondiale.

Monsieur le ministre, ferons-nous le pari de l'hydrogène vert s'il implique une dépendance toujours plus grande d'autres pays aux énergies fossiles ?

De plus, l'immense majorité de l'hydrogène produit est aujourd'hui de l'hydrogène bleu. Le vert ringardisera-t-il le bleu en dépit des qualités manifestes de ce dernier et de sa plus forte disponibilité immédiate ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué …

innovant et compétitif.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

… innovant et compétitif.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Vous mentionnez l’Inflation Reduction Act. Mais, comme vous le savez, l’Europe bénéficie d’un énorme avantage compétitif : ses brevets, sa technologie, sa recherche et son développement.

Nous avons en Europe plus de brevets dédiés à l’hydrogène qu’il n’en existe partout ailleurs dans le monde. La France est particulièrement forte de sa capacité à innover : en la matière, elle est au deuxième rang mondial et le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) dispose du plus gros portefeuille de brevets au monde. Profitons-en en tirant parti de cet avantage technologique, que nous ne possédons pas dans d’autres industries traditionnelles, pour investir.

Investir signifie effectivement aujourd’hui subventionner. Vous l’avez rappelé : les États-Unis, chantres du libéralisme, sont eux aussi entrés dans la course aux subventions. Leur stratégie est extrêmement ambitieuse, au risque, d’ailleurs, d’avoir des effets délétères.

Oui, nous allons continuer de subventionner cette technologie. Oui, nous allons continuer de subventionner les investissements pour que la France et l’Europe développent une industrie souveraine, à même de s’inscrire dans la durée.

Devrions-nous agir dans un cadre public ? J’en doute. Nous le faisons dans un certain nombre de domaines. Vous le savez : l’entreprise Électricité de France, qui va construire l’essentiel des futurs réacteurs nucléaires, est sur le point d’être nationalisée à 100 %. Si je ne m’abuse, cette mesure prend effet aujourd’hui même, la justice ayant donné son blanc-seing au Gouvernement. C’est tout au plus une question de jours.

Pour ce qui concerne l’électricité d’origine nucléaire, nous croyons à la souveraineté publique. Mais les enjeux auxquels nous sommes confrontés au sujet de l’hydrogène, tant en matière d’innovation que de financement, sont bien trop grands et les solutions bien trop diverses pour que l’État puisse, à la place d’autres, choisir ce qui est bon.

Nous croyons à l’innovation. Nous croyons à l’entrepreneuriat. Évidemment, les subventions seront extrêmement encadrées, notamment par les règles européennes. Toutefois, selon nous, ce modèle est le meilleur, car il est le mieux à même de nous fournir de l’hydrogène…

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, j'ai déjà eu l'occasion de le rappeler : pour la France comme pour l'Europe, produire son hydrogène décarboné ou renouvelable est une bonne manière d'assurer sa souveraineté et de créer de l'emploi. À l'inverse, importer cette énergie, c'est remplacer notre dépendance aux hydrocarbures venus du Moyen-Orient ou de Russie par une autre, à l'égard de pays producteurs d'énergies renouvelables.

Notre liste d'arguments est déjà longue et vous l'étoffez encore : en important l'hydrogène, l'on risquerait de déshabiller Pierre pour habiller Paul. Les pays exportateurs n'en produisant pas suffisamment pour couvrir leurs propres besoins, ils seraient conduits à accroître leur consommation d'énergies carbonées et leur exposition à ces dernières.

Il n'est pas nécessaire d'aller bien loin pour trouver un exemple de ce type. Actuellement, l'Allemagne connaît à la fois une forte augmentation de la part de ses énergies renouvelables et, du fait de la fermeture de ses centrales nucléaires, une forte hausse de sa consommation d'énergie carbonée.

Ce risque-là existe : raison de plus pour assurer la souveraineté française et européenne dans ce cadre. Nous continuons de penser que, via les centrales nucléaires et les énergies renouvelables, nous sommes capables de produire l'hydrogène dont nous avons besoin en assurant notre souveraineté.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chauvet

L'Union européenne s'est récemment fixé pour objectif, à l'horizon 2030, d'atteindre un niveau de production de 10 millions de tonnes d'hydrogène vert.

Ambitieux pour certains, utopique pour d'autres, cet objectif passera nécessairement par la multiplication de nos capacités d'importation d'énergie d'origine renouvelable.

Dans cette perspective, l'Union européenne a d'ores et déjà signé des protocoles d'accord avec nombre de pays, notamment africains, afin de bénéficier de leurs capacités de production d'énergies renouvelables.

Toutefois, un certain nombre d'observateurs alertent dès à présent quant aux limites d'un fort recours à l'importation. En effet, les pays exportateurs d'énergies renouvelables devront puiser dans leurs réseaux nationaux pour fournir l'énergie nécessaire à l'Union européenne, au détriment des populations locales.

L'exemple de la Namibie est particulièrement éloquent. En 2022, seuls 56 % des Namibiens avaient accès à l'électricité. Pourtant, leur pays se dit prêt à exporter en masse sa production d'énergies renouvelables vers les États européens. L'accord trouvé avec l'Union européenne est symbolique de cette dynamique dramatique.

Afin de développer l'hydrogène vert, nous cannibaliserons les ressources en énergies renouvelables de ces pays. Nous renforcerons, en conséquence, leur dépendance aux énergies fossiles. Or la lutte contre le changement climatique ne saurait être menée en vase clos. Notre transition énergétique sera mondiale ou ne sera pas. Il est de notre responsabilité de la concevoir à l'échelle mondiale.

Monsieur le ministre, ferons-nous le pari de l'hydrogène vert s'il implique une dépendance toujours plus grande d'autres pays aux énergies fossiles ?

De plus, l'immense majorité de l'hydrogène produit est aujourd'hui de l'hydrogène bleu. Le vert ringardisera-t-il le bleu en dépit des qualités manifestes de ce dernier et de sa plus forte disponibilité immédiate ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chauvet

L’Union européenne s’est récemment fixé pour objectif, à l’horizon 2030, d’atteindre un niveau de production de 10 millions de tonnes d’hydrogène vert.

Ambitieux pour certains, utopique pour d’autres, cet objectif passera nécessairement par la multiplication de nos capacités d’importation d’énergie d’origine renouvelable.

Dans cette perspective, l’Union européenne a d’ores et déjà signé des protocoles d’accord avec nombre de pays, notamment africains, afin de bénéficier de leurs capacités de production d’énergies renouvelables.

Toutefois, un certain nombre d’observateurs alertent dès à présent quant aux limites d’un fort recours à l’importation. En effet, les pays exportateurs d’énergies renouvelables devront puiser dans leurs réseaux nationaux pour fournir l’énergie nécessaire à l’Union européenne, au détriment des populations locales.

L’exemple de la Namibie est particulièrement éloquent. En 2022, seuls 56 % des Namibiens avaient accès à l’électricité. Pourtant, leur pays se dit prêt à exporter en masse sa production d’énergies renouvelables vers les États européens. L’accord trouvé avec l’Union européenne est symbolique de cette dynamique dramatique.

Afin de développer l’hydrogène vert, nous cannibaliserons les ressources en énergies renouvelables de ces pays. Nous renforcerons, en conséquence, leur dépendance aux énergies fossiles. Or la lutte contre le changement climatique ne saurait être menée en vase clos. Notre transition énergétique sera mondiale ou ne sera pas. Il est de notre responsabilité de la concevoir à l’échelle mondiale.

Monsieur le ministre, ferons-nous le pari de l’hydrogène vert s’il implique une dépendance toujours plus grande d’autres pays aux énergies fossiles ?

De plus, l’immense majorité de l’hydrogène produit est aujourd’hui de l’hydrogène bleu. Le vert ringardisera-t-il le bleu en dépit des qualités manifestes de ce dernier et de sa plus forte disponibilité immédiate ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

… innovant et compétitif.

M. Daniel Salmon manifeste son désaccord.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Patrick Chauvet, pour la réplique.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, j'ai déjà eu l'occasion de le rappeler : pour la France comme pour l'Europe, produire son hydrogène décarboné ou renouvelable est une bonne manière d'assurer sa souveraineté et de créer de l'emploi. À l'inverse, importer cette énergie, c'est remplacer notre dépendance aux hydrocarbures venus du Moyen-Orient ou de Russie par une autre, à l'égard de pays producteurs d'énergies renouvelables.

Notre liste d'arguments est déjà longue et vous l'étoffez encore : en important l'hydrogène, l'on risquerait de déshabiller Pierre pour habiller Paul. Les pays exportateurs n'en produisant pas suffisamment pour couvrir leurs propres besoins, ils seraient conduits à accroître leur consommation d'énergies carbonées et leur exposition à ces dernières.

Il n'est pas nécessaire d'aller bien loin pour trouver un exemple de ce type. Actuellement, l'Allemagne connaît à la fois une forte augmentation de la part de ses énergies renouvelables et, du fait de la fermeture de ses centrales nucléaires, une forte hausse de sa consommation d'énergie carbonée.

Ce risque-là existe : raison de plus pour assurer la souveraineté française et européenne dans ce cadre. Nous continuons de penser que nous sommes capables, via les centrales nucléaires et les énergies renouvelables, de produire l'hydrogène dont nous avons besoin en assurant notre souveraineté.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, j’ai déjà eu l’occasion de le rappeler : pour la France comme pour l’Europe, produire son hydrogène décarboné ou renouvelable est une bonne manière d’assurer sa souveraineté et de créer de l’emploi. À l’inverse, importer cette énergie, c’est remplacer notre dépendance aux hydrocarbures venus du Moyen-Orient ou de Russie par une autre, à l’égard de pays producteurs d’énergies renouvelables.

Notre liste d’arguments est déjà longue et vous l’étoffez encore : en important l’hydrogène, l’on risquerait de déshabiller Pierre pour habiller Paul. Les pays exportateurs n’en produisant pas suffisamment pour couvrir leurs propres besoins, ils seraient conduits à accroître leur consommation d’énergies carbonées et leur exposition à ces dernières.

Il n’est pas nécessaire d’aller bien loin pour trouver un exemple de ce type. Actuellement, l’Allemagne connaît à la fois une forte augmentation de la part de ses énergies renouvelables et, du fait de la fermeture de ses centrales nucléaires, une forte hausse de sa consommation d’énergie carbonée.

Ce risque-là existe : raison de plus pour assurer la souveraineté française et européenne dans ce cadre. Nous continuons de penser que nous sommes capables, via les centrales nucléaires et les énergies renouvelables, de produire l’hydrogène dont nous avons besoin en assurant notre souveraineté.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chauvet

L’Union européenne s’est récemment fixé pour objectif, à l’horizon 2030, d’atteindre un niveau de production de 10 millions de tonnes d’hydrogène vert.

Ambitieux pour certains, utopique pour d’autres, cet objectif passera nécessairement par la multiplication de nos capacités d’importation d’énergie d’origine renouvelable.

Dans cette perspective, l’Union européenne a d’ores et déjà signé des protocoles d’accord avec nombre de pays, notamment africains, afin de bénéficier de leurs capacités de production d’énergies renouvelables.

Toutefois, un certain nombre d’observateurs alertent dès à présent quant aux limites d’un fort recours à l’importation. En effet, les pays exportateurs d’énergies renouvelables devront puiser dans leurs réseaux nationaux pour fournir l’énergie nécessaire à l’Union européenne, au détriment des populations locales.

L’exemple de la Namibie est particulièrement éloquent. En 2022, seuls 56 % des Namibiens avaient accès à l’électricité. Pourtant, leur pays se dit prêt à exporter en masse sa production d’énergies renouvelables vers les États européens. L’accord trouvé avec l’Union européenne est symbolique de cette dynamique dramatique.

Afin de développer l’hydrogène vert, nous cannibaliserons les ressources en énergies renouvelables de ces pays. Nous renforcerons, en conséquence, leur dépendance aux énergies fossiles. Or la lutte contre le changement climatique ne saurait être menée en vase clos. Notre transition énergétique sera mondiale ou ne sera pas. Il est de notre responsabilité de la concevoir à l’échelle mondiale.

Monsieur le ministre, ferons-nous le pari de l’hydrogène vert s’il implique une dépendance toujours plus grande d’autres pays aux énergies fossiles ?

De plus, l’immense majorité de l’hydrogène produit est aujourd’hui de l’hydrogène bleu. Le vert ringardisera-t-il le bleu en dépit des qualités manifestes de ce dernier et de sa plus forte disponibilité immédiate ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chauvet

Monsieur le ministre, vous insistez sur la nécessité de produire nous-mêmes l'hydrogène vert en France. C'est effectivement une bonne stratégie, mais serons-nous compétitifs face à ces pays ?

M. Daniel Salmon manifeste son désaccord.

M. Daniel Salmon manifeste son désaccord.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué

C'est un défi !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Patrick Chauvet, pour la réplique.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, j’ai déjà eu l’occasion de le rappeler : pour la France comme pour l’Europe, produire son hydrogène décarboné ou renouvelable est une bonne manière d’assurer sa souveraineté et de créer de l’emploi. À l’inverse, importer cette énergie, c’est remplacer notre dépendance aux hydrocarbures venus du Moyen-Orient ou de Russie par une autre, à l’égard de pays producteurs d’énergies renouvelables.

Notre liste d’arguments est déjà longue et vous l’étoffez encore : en important l’hydrogène, l’on risquerait de déshabiller Pierre pour habiller Paul. Les pays exportateurs n’en produisant pas suffisamment pour couvrir leurs propres besoins, ils seraient conduits à accroître leur consommation d’énergies carbonées et leur exposition à ces dernières.

Il n’est pas nécessaire d’aller bien loin pour trouver un exemple de ce type. Actuellement, l’Allemagne connaît à la fois une forte augmentation de la part de ses énergies renouvelables et, du fait de la fermeture de ses centrales nucléaires, une forte hausse de sa consommation d’énergie carbonée.

Ce risque-là existe : raison de plus pour assurer la souveraineté française et européenne dans ce cadre. Nous continuons de penser que nous sommes capables, via les centrales nucléaires et les énergies renouvelables, de produire l’hydrogène dont nous avons besoin en assurant notre souveraineté.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chauvet

Monsieur le ministre, vous insistez sur la nécessité de produire nous-mêmes l'hydrogène vert en France. C'est effectivement une bonne stratégie, mais serons-nous compétitifs face à ces pays ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chauvet

Monsieur le ministre, vous insistez sur la nécessité de produire nous-mêmes l’hydrogène vert en France. C’est effectivement une bonne stratégie, mais serons-nous compétitifs face à ces pays ?

M. Daniel Salmon manifeste son désaccord.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Corbisez

Poursuivant ses efforts de neutralité climatique, notre pays a l'ambition de faire décoller la filière d'hydrogène bas-carbone. Il prévoit ainsi le déploiement de 6, 5 gigawatts d'électrolyseurs installés à l'horizon 2030, permettant d'éviter l'émission de 6 millions de tonnes de CO2 par an. On ne peut qu'approuver un tel objectif.

L'hydrogène dit « vert » ou « décarboné » obtenu par électrolyse est non seulement une manne pour le développement des énergies renouvelables, mais aussi un vecteur incontournable pour la décarbonation de secteurs comme l'industrie lourde, les mobilités routières intensives ou les transports maritimes et aériens. Toutefois, je tiens à soulever quelques questions concernant l'amont de sa production.

L'hydrogène par électrolyse mobilise la ressource en eau. Ainsi, la production d'un million de tonnes d'hydrogène renouvelable et bas-carbone nécessiterait entre 10 et 20 millions de mètres cubes d'eau.

Certes, ce volume représenterait à peine 0, 2 % de la consommation d'eau annuelle de notre pays : c'est bien peu comparé aux besoins du secteur de l'énergie dans son ensemble, qui, à lui seul, représente le tiers de la consommation nationale. Mais dans le contexte actuel, marqué par les sécheresses à répétition, quelle stratégie adopter pour une meilleure utilisation de la ressource ?

Ne faudrait-il pas créer de nouvelles synergies pour la réutilisation des eaux usées industrielles, le développement des technologies de désalinisation partielle ou encore l'utilisation d'eau marine dans l'industrie ? Je souhaiterais connaître votre avis sur ces différentes pistes.

L'autonomie minière est également un enjeu majeur. En effet, la filière hydrogène n'échappe pas aux besoins en métaux critiques, tels que l'iridium et le platine. Alors que la production de platinoïdes est concentrée dans quelques pays, dont certains sont fragiles sur le plan géopolitique, et que la dynamique autour de l'hydrogène est très importante, en Europe comme dans d'autres régions du monde, comment sécuriser l'approvisionnement de la filière hydrogène pour les prochaines décennies ?

Enfin, sur les 10 milliards d'euros dédiés à l'hydrogène, qu'en est-il des 4, 2 milliards d'euros réservés au mécanisme de soutien à la production ? Il semble que ces crédits peinent à être déployés. Si vous ne me donnez pas la réponse aujourd'hui, vous me l'apporterez sans doute demain, puisque nous avons rendez-vous pour traiter de l'industrie verte.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué

C'est un défi !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Patrick Chauvet, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chauvet

Monsieur le ministre, vous insistez sur la nécessité de produire nous-mêmes l’hydrogène vert en France. C’est effectivement une bonne stratégie, mais serons-nous compétitifs face à ces pays ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, vous posez là trois questions en une.

Tout d'abord, vous m'interrogez au sujet de la consommation d'eau. La production d'hydrogène, comme toutes les industries, n'échappe évidemment pas aux enjeux de sobriété : sa consommation doit devenir encore plus raisonnable.

Néanmoins, en la matière comme dans de nombreux autres domaines, l'industrie a été plutôt en avance. Depuis déjà une dizaine d'années, elle réduit ses besoins en eau.

Nous avons eu l'occasion de l'indiquer au Sénat lors d'une séance de questions d'actualité au Gouvernement : nous travaillons à un plan de sobriété, annoncé par le Président de la République, dans le cadre duquel l'industrie joue elle aussi son rôle.

L'hydrogène, comme les autres industries, est capable de réutiliser son eau. Le décret dit « Réut » va permettre aux industriels de réutiliser leurs eaux usées dans leur processus de production, ce qui est aujourd'hui largement interdit. Il permettra, ce faisant, de limiter fortement la consommation d'eau, y compris pour produire l'hydrogène.

Ensuite, vous évoquez la dépendance aux métaux critiques. Vous avez raison : notre logique stratégique nous commande de réduire notre dépendance à cet égard. C'est précisément pourquoi nous créons un fonds d'investissement destiné à sécuriser nos approvisionnements, dans le monde comme en France. Sachez tout de même que les nouvelles technologies d'hydrogène, notamment les technologies dites « solides », ne font plus appel aux métaux rares que vous mentionnez : leur intérêt n'en est que plus grand.

Enfin, l'enveloppe de 4, 2 milliards d'euros que vous citez est encore en négociation, au titre des aides d'État, avec la Commission européenne. Nous avons bon espoir de converger très vite.

Je vous dis donc à demain pour notre réunion relative à l'industrie verte !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Corbisez

Poursuivant ses efforts de neutralité climatique, notre pays a l'ambition de faire décoller la filière hydrogène bas-carbone. Il prévoit ainsi le déploiement de 6, 5 gigawatts d'électrolyseurs installés à l'horizon 2030, permettant d'éviter l'émission de 6 millions de tonnes de CO2 par an. On ne peut qu'approuver un tel objectif.

L'hydrogène dit « vert » ou « décarboné » obtenu par électrolyse est non seulement une manne pour le développement des énergies renouvelables, mais aussi un vecteur incontournable pour la décarbonation de secteurs comme l'industrie lourde, les mobilités routières intensives ou les transports maritimes et aériens. Toutefois, je tiens à soulever quelques questions concernant l'amont de sa production.

L'hydrogène par électrolyse mobilise la ressource en eau. Ainsi, la production d'un million de tonnes d'hydrogène renouvelable et bas-carbone nécessiterait entre 10 et 20 millions de mètres cubes d'eau.

Certes, ce volume représenterait à peine 0, 2 % de la consommation d'eau annuelle de notre pays : c'est bien peu comparé aux besoins du secteur de l'énergie dans son ensemble, lequel représente à lui seul le tiers de la consommation nationale. Mais dans le contexte actuel, marqué par les sécheresses à répétition, quelle stratégie adopter pour une meilleure utilisation de la ressource ?

Ne faudrait-il pas créer de nouvelles synergies pour la réutilisation des eaux usées industrielles, le développement des technologies de désalinisation partielle ou encore l'utilisation d'eau marine dans l'industrie ? Je souhaiterais connaître votre avis sur ces différentes pistes.

L'autonomie minière est également un enjeu majeur. En effet, la filière hydrogène n'échappe pas aux besoins en métaux critiques, tels que l'iridium et le platine. Alors que la production de platinoïdes est concentrée dans quelques pays, dont certains sont fragiles sur le plan géopolitique, et que la dynamique autour de l'hydrogène est très importante, en Europe comme dans d'autres régions du monde, comment sécuriser l'approvisionnement de la filière hydrogène pour les prochaines décennies ?

Enfin, sur les 10 milliards d'euros dédiés à l'hydrogène, qu'en est-il des 4, 2 milliards d'euros réservés au mécanisme de soutien à la production ? Il semble que ces crédits peinent à être déployés. Si vous ne me donnez pas la réponse aujourd'hui, vous me l'apporterez sans doute demain, puisque nous avons rendez-vous pour traiter de l'industrie verte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Corbisez

Poursuivant ses efforts de neutralité climatique, notre pays a l’ambition de faire décoller la filière hydrogène bas-carbone. Il prévoit ainsi le déploiement de 6, 5 gigawatts d’électrolyseurs installés à l’horizon 2030, permettant d’éviter l’émission de 6 millions de tonnes de CO2 par an. On ne peut qu’approuver un tel objectif.

L’hydrogène dit « vert » ou « décarboné » obtenu par électrolyse est non seulement une manne pour le développement des énergies renouvelables, mais aussi un vecteur incontournable pour la décarbonation de secteurs comme l’industrie lourde, les mobilités routières intensives ou les transports maritimes et aériens. Toutefois, je tiens à soulever quelques questions concernant l’amont de sa production.

L’hydrogène par électrolyse mobilise la ressource en eau. Ainsi, la production d’un million de tonnes d’hydrogène renouvelable et bas-carbone nécessiterait entre 10 et 20 millions de mètres cubes d’eau.

Certes, ce volume représenterait à peine 0, 2 % de la consommation d’eau annuelle de notre pays : c’est bien peu comparé aux besoins du secteur de l’énergie dans son ensemble, lequel représente à lui seul le tiers de la consommation nationale. Mais dans le contexte actuel, marqué par les sécheresses à répétition, quelle stratégie adopter pour une meilleure utilisation de la ressource ?

Ne faudrait-il pas créer de nouvelles synergies pour la réutilisation des eaux usées industrielles, le développement des technologies de désalinisation partielle ou encore l’utilisation d’eau marine dans l’industrie ? Je souhaiterais connaître votre avis sur ces différentes pistes.

L’autonomie minière est également un enjeu majeur. En effet, la filière hydrogène n’échappe pas aux besoins en métaux critiques, tels que l’iridium et le platine. Alors que la production de platinoïdes est concentrée dans quelques pays, dont certains sont fragiles sur le plan géopolitique, et que la dynamique autour de l’hydrogène est très importante, en Europe comme dans d’autres régions du monde, comment sécuriser l’approvisionnement de la filière hydrogène pour les prochaines décennies ?

Enfin, sur les 10 milliards d’euros dédiés à l’hydrogène, qu’en est-il des 4, 2 milliards d’euros réservés au mécanisme de soutien à la production ? Il semble que ces crédits peinent à être déployés. Si vous ne me donnez pas la réponse aujourd’hui, vous me l’apporterez sans doute demain, puisque nous avons rendez-vous pour traiter de l’industrie verte.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, vous posez là trois questions en une.

Tout d'abord, vous m'interrogez au sujet de la consommation d'eau. La production d'hydrogène, comme toutes les industries, n'échappe évidemment pas aux enjeux de sobriété : sa consommation doit devenir encore plus raisonnable.

Néanmoins, en la matière comme dans de nombreux autres domaines, l'industrie a été plutôt en avance. Depuis déjà une dizaine d'années, elle réduit ses besoins en eau.

Nous avons eu l'occasion de l'indiquer au Sénat lors d'une séance de questions d'actualité au Gouvernement : nous travaillons à un plan de sobriété, annoncé par le Président de la République, dans le cadre duquel l'industrie joue elle aussi son rôle.

L'hydrogène, comme les autres industries, est capable de réutiliser son eau. Le décret dit « Réut » va permettre aux industriels de réutiliser leurs eaux usées dans leur processus de production, ce qui est aujourd'hui largement interdit. Il permettra, ce faisant, de limiter fortement la consommation d'eau, y compris pour produire l'hydrogène.

Ensuite, vous évoquez la dépendance aux métaux critiques. Vous avez raison : notre logique stratégique nous commande de réduire notre dépendance à cet égard. C'est précisément pourquoi nous créons un fonds d'investissement destiné à sécuriser nos approvisionnements, dans le monde comme en France. Sachez tout de même que les nouvelles technologies d'hydrogène, notamment les technologies dites « solides », ne font plus appel aux métaux rares que vous mentionnez : leur intérêt n'en est que plus grand.

Enfin, l'enveloppe de 4, 2 milliards d'euros que vous citez est encore en négociation, au titre des aides d'État, avec la Commission européenne. Nous avons bon espoir de converger très vite.

Je vous dis donc à demain pour notre réunion relative à l'industrie verte !

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, vous posez là trois questions en une.

Tout d’abord, vous m’interrogez au sujet de la consommation d’eau. La production d’hydrogène, comme toutes les industries, n’échappe évidemment pas aux enjeux de sobriété : sa consommation doit devenir encore plus raisonnable.

Néanmoins, en la matière comme dans de nombreux autres domaines, l’industrie a été plutôt en avance. Depuis déjà une dizaine d’années, elle réduit ses besoins en eau.

Nous avons eu l’occasion de l’indiquer au Sénat lors d’une séance de questions d’actualité au Gouvernement : nous travaillons à un plan de sobriété, annoncé par le Président de la République, dans le cadre duquel l’industrie joue elle aussi son rôle.

L’hydrogène, comme les autres industries, est capable de réutiliser son eau. Le décret dit « Réut » va permettre aux industriels de réutiliser leurs eaux usées dans leur processus de production, ce qui est aujourd’hui largement interdit. Il permettra, ce faisant, de limiter fortement la consommation d’eau, y compris pour produire l’hydrogène.

Ensuite, vous évoquez la dépendance aux métaux critiques. Vous avez raison : notre logique stratégique nous commande de réduire notre dépendance à cet égard. C’est précisément pourquoi nous créons un fonds d’investissement destiné à sécuriser nos approvisionnements, dans le monde comme en France. Sachez tout de même que les nouvelles technologies d’hydrogène, notamment les technologies dites « solides », ne font plus appel aux métaux rares que vous mentionnez : leur intérêt n’en est que plus grand.

Enfin, l’enveloppe de 4, 2 milliards d’euros que vous citez est encore en négociation, au titre des aides d’État, avec la Commission européenne. Nous avons bon espoir de converger très vite.

Je vous dis donc à demain pour notre réunion relative à l’industrie verte !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Corbisez

Poursuivant ses efforts de neutralité climatique, notre pays a l’ambition de faire décoller la filière hydrogène bas-carbone. Il prévoit ainsi le déploiement de 6, 5 gigawatts d’électrolyseurs installés à l’horizon 2030, permettant d’éviter l’émission de 6 millions de tonnes de CO2 par an. On ne peut qu’approuver un tel objectif.

L’hydrogène dit vert ou décarboné obtenu par électrolyse est non seulement une manne pour le développement des énergies renouvelables, mais aussi un vecteur incontournable pour la décarbonation de secteurs comme l’industrie lourde, les mobilités routières intensives ou les transports maritimes et aériens. Toutefois, je tiens à soulever quelques questions concernant l’amont de sa production.

L’hydrogène par électrolyse mobilise la ressource en eau. Ainsi, la production d’un million de tonnes d’hydrogène renouvelable et bas-carbone nécessiterait entre 10 millions et 20 millions de mètres cubes d’eau.

Certes, ce volume représenterait à peine 0, 2 % de la consommation d’eau annuelle de notre pays : c’est bien peu comparé aux besoins du secteur de l’énergie dans son ensemble, lequel représente à lui seul le tiers de la consommation nationale. Cependant, dans le contexte actuel, marqué par les sécheresses à répétition, quelle stratégie adopter pour une meilleure utilisation de la ressource ?

Ne faudrait-il pas créer de nouvelles synergies pour la réutilisation des eaux usées industrielles, le développement des technologies de désalinisation partielle ou encore l’utilisation d’eau marine dans l’industrie ? Je souhaiterais connaître votre avis sur ces différentes pistes.

L’autonomie minière est également un enjeu majeur. En effet, la filière hydrogène n’échappe pas aux besoins en métaux critiques, tels que l’iridium et le platine. Alors que la production de platinoïdes est concentrée dans quelques pays, dont certains sont fragiles sur le plan géopolitique, et que la dynamique autour de l’hydrogène est très importante, en Europe comme dans d’autres régions du monde, comment sécuriser l’approvisionnement de la filière hydrogène pour les prochaines décennies ?

Enfin, sur les 10 milliards d’euros dédiés à l’hydrogène, qu’en est-il des 4, 2 milliards d’euros réservés au mécanisme de soutien à la production ? Il semble que ces crédits peinent à être déployés. Si vous ne me donnez pas la réponse aujourd’hui, vous me l’apporterez sans doute demain, puisque nous avons rendez-vous pour traiter de l’industrie verte.

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Cyril Pellevat

Assurément, l'hydrogène occupera une place de choix dans l'avenir énergétique de notre pays ; notre débat d'aujourd'hui le confirme une fois de plus.

Offrant des capacités de stockage de l'électricité inenvisageables par le passé, l'hydrogène vert ouvre également la voie à la décarbonation de certaines industries qui n'avaient, jusqu'à présent, aucune solution pour faire baisser leurs émissions de gaz à effet de serre. En outre, il ouvre de nouvelles perspectives pour la mobilité, notamment lourde, en complément des batteries.

Monsieur le ministre, l'industrie du décolletage, très présente dans la vallée de l'Arve, en Haute-Savoie, que vous connaissez, est menacée par la fin des moteurs thermiques d'ici à 2035 : elle voit dans ces nouvelles technologies une importante piste de développement.

Toutefois, vous l'avez rappelé vous-même : considérer l'hydrogène comme une solution miracle appelée à remplacer les autres formes d'énergie reviendrait à se méprendre.

Son usage ne peut s'inscrire qu'en complémentarité avec les énergies renouvelables telles que le photovoltaïque, l'hydroélectricité et l'éolien, lesquelles devront nécessairement monter en puissance pour que la France puisse produire suffisamment d'hydrogène. Toutefois, même en accélérant notre production d'énergie renouvelable, la France et plus largement l'Union européenne ont nettement moins de potentiel de production renouvelable que des pays situés sur d'autres continents.

Il est donc essentiel que l'hydrogène produit grâce à l'énergie nucléaire, également appelé hydrogène rose, puisse être considéré comme renouvelable. Autrement, il serait illusoire de penser répondre à notre demande intérieure et, a fortiori, exporter.

Bruxelles a ouvert une porte en février dernier, par le biais d'un acte délégué, mais sept États membres, dont l'Allemagne et l'Espagne, s'y opposent et les négociations sont loin d'être terminées : à ce stade, la révision de la directive RED III, que vous avez mentionnée, n'inclut toujours pas l'hydrogène bas-carbone dans les objectifs d'énergies renouvelables.

Monsieur le ministre, où en sont les négociations européennes relatives à l'inclusion de l'hydrogène rose ? Quels moyens la France compte-t-elle mettre en œuvre pour infléchir la position des sept États qui s'y opposent ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, vous posez là trois questions en une.

Tout d’abord, vous m’interrogez au sujet de la consommation d’eau. La production d’hydrogène, comme toutes les industries, n’échappe évidemment pas aux enjeux de sobriété : sa consommation doit devenir encore plus raisonnable.

Néanmoins, en la matière comme dans de nombreux autres domaines, l’industrie a été plutôt en avance. Depuis déjà une dizaine d’années, elle réduit ses besoins en eau.

Nous avons eu l’occasion de l’indiquer au Sénat lors d’une séance de questions d’actualité au Gouvernement : nous travaillons à un plan de sobriété, annoncé par le Président de la République, dans le cadre duquel l’industrie joue elle aussi son rôle.

L’hydrogène, comme les autres industries, est capable de réutiliser son eau. Le décret relatif aux usages et aux conditions de réutilisation des eaux usées traitées, dit décret Reut, va permettre aux industriels de réutiliser leurs eaux usées dans leur processus de production, ce qui est aujourd’hui largement interdit. Il permettra, ce faisant, de limiter fortement la consommation d’eau, y compris pour produire l’hydrogène.

Ensuite, vous évoquez la dépendance aux métaux critiques. Vous avez raison : notre logique stratégique nous commande de réduire notre dépendance à cet égard. C’est précisément pourquoi nous créons un fonds d’investissement destiné à sécuriser nos approvisionnements, dans le monde comme en France. Sachez tout de même que les nouvelles technologies d’hydrogène, notamment les technologies dites solides, ne font plus appel aux métaux rares que vous mentionnez : leur intérêt n’en est que plus grand.

Enfin, l’enveloppe de 4, 2 milliards d’euros que vous citez est encore en négociation, au titre des aides d’État, avec la Commission européenne. Nous avons bon espoir de converger très vite.

Je vous dis donc à demain pour notre réunion relative à l’industrie verte !

Mme Martine Berthet et M. Stéphane Piednoir applaudissent.

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Cyril Pellevat

Assurément, l'hydrogène occupera une place de choix dans l'avenir énergétique de notre pays ; notre débat d'aujourd'hui le confirme une fois de plus.

Offrant des capacités de stockage de l'électricité inenvisageables par le passé, l'hydrogène vert ouvre également la voie à la décarbonation de certaines industries qui n'avaient, jusqu'à présent, aucune solution pour faire baisser leurs émissions de gaz à effet de serre. En outre, il ouvre de nouvelles perspectives pour la mobilité, notamment lourde, en complément des batteries.

Monsieur le ministre, l'industrie du décolletage, très présente dans la vallée de l'Arve, en Haute-Savoie, que vous connaissez, est menacée par la fin des moteurs thermiques d'ici à 2035 : elle voit dans ces nouvelles technologies une importante piste de développement.

Toutefois, vous l'avez rappelé vous-même : considérer l'hydrogène comme une solution miracle appelée à remplacer les autres formes d'énergie reviendrait à se méprendre.

Son usage ne peut s'inscrire qu'en complémentarité avec les énergies renouvelables telles que le photovoltaïque, l'hydroélectricité et l'éolien, lesquelles devront nécessairement monter en puissance pour que la France puisse produire suffisamment d'hydrogène. Toutefois, même en accélérant notre production d'énergie renouvelable, la France et plus largement l'Union européenne ont nettement moins de potentiel de production renouvelable que des pays situés sur d'autres continents.

Il est donc essentiel que l'hydrogène produit grâce à l'énergie nucléaire, également appelé hydrogène rose, puisse être considéré comme renouvelable. Autrement, il serait illusoire de penser répondre à notre demande intérieure et, a fortiori, exporter.

Bruxelles a ouvert une porte en février dernier, par le biais d'un acte délégué, mais sept États membres, dont l'Allemagne et l'Espagne, s'y opposent et les négociations sont loin d'être terminées : à ce stade, la révision de la directive RED III, que vous avez mentionnée, n'inclut toujours pas l'hydrogène bas-carbone dans les objectifs d'énergies renouvelables.

Monsieur le ministre, où en sont les négociations européennes relatives à l'inclusion de l'hydrogène rose ? Quels moyens la France compte-t-elle mettre en œuvre pour infléchir la position des sept États qui s'y opposent ?

Debut de section - PermalienPhoto de Cyril Pellevat

Assurément, l’hydrogène occupera une place de choix dans l’avenir énergétique de notre pays ; notre débat d’aujourd’hui le confirme une fois de plus.

Offrant des capacités de stockage de l’électricité inenvisageables par le passé, l’hydrogène vert ouvre également la voie à la décarbonation de certaines industries qui n’avaient, jusqu’à présent, aucune solution pour faire baisser leurs émissions de gaz à effet de serre. En outre, il ouvre de nouvelles perspectives pour la mobilité, notamment lourde, en complément des batteries.

Monsieur le ministre, l’industrie du décolletage, très présente dans la vallée de l’Arve, en Haute-Savoie, que vous connaissez, est menacée par la fin des moteurs thermiques d’ici à 2035 : elle voit dans ces nouvelles technologies une importante piste de développement.

Toutefois, vous l’avez rappelé vous-même : considérer l’hydrogène comme une solution miracle appelée à remplacer les autres formes d’énergie reviendrait à se méprendre.

Son usage ne peut s’inscrire qu’en complémentarité avec les énergies renouvelables telles que le photovoltaïque, l’hydroélectricité et l’éolien, lesquelles devront nécessairement monter en puissance pour que la France puisse produire suffisamment d’hydrogène. Toutefois, même en accélérant notre production d’énergie renouvelable, la France et plus largement l’Union européenne ont nettement moins de potentiel de production renouvelable que des pays situés sur d’autres continents.

Il est donc essentiel que l’hydrogène produit grâce à l’énergie nucléaire, également appelé hydrogène rose, puisse être considéré comme renouvelable. Autrement, il serait illusoire de penser répondre à notre demande intérieure et, a fortiori, exporter.

Bruxelles a ouvert une porte en février dernier, par le biais d’un acte délégué, mais sept États membres, dont l’Allemagne et l’Espagne, s’y opposent et les négociations sont loin d’être terminées : à ce stade, la révision de la directive RED III, que vous avez mentionnée, n’inclut toujours pas l’hydrogène bas-carbone dans les objectifs d’énergies renouvelables.

Monsieur le ministre, où en sont les négociations européennes relatives à l’inclusion de l’hydrogène rose ? Quels moyens la France compte-t-elle mettre en œuvre pour infléchir la position des sept États qui s’y opposent ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, comme vous le savez sans doute, des projets de moteur thermique à hydrogène sont également à l'étude : eux aussi rendent espoir aux industries de la vallée de l'Arve, aujourd'hui focalisées sur les moteurs thermiques. Nous subventionnons les acteurs concernés au titre de nos différentes stratégies : je pense notamment à Symbio et à Feve. C'est important pour les industries de votre département de Haute-Savoie.

L'hydrogène rose est, en quelque sorte, un tabou de part et d'autre du Rhin : nous n'en parlons pas explicitement lors des discussions, qui aujourd'hui – vous le savez – concernent essentiellement la part d'hydrogène vert qui sera présente dans le mix énergétique, mais la question est implicite.

Revoir à la baisse les objectifs d'hydrogène vert pour les États qui, en la matière, dépasseront 23 % dès 2030, c'est de fait donner un avantage à ceux qui, comme nous, souhaitent développer l'hydrogène dit « rose », ou hydrogène à bas-carbone. Mais, je le répète, la question est un peu tabou…

Nous n'avons pas encore atteint un compromis qui nous satisfait. De plus, au sein du Gouvernement, les discussions ne sont pas encore tout à fait terminées pour fixer notre position finale sur le compromis de la Commission.

Ce que je peux vous dire, c'est que cette avancée, bien qu'indéniable, ne nous satisfait pas entièrement. Cela étant, on va dans le bon sens. Nous aurons à la fois du vert et du rose, mais nous n'avons pas encore complètement convergé : nous allons continuer à travailler.

Mme Martine Berthet et M. Stéphane Piednoir applaudissent.

Mme Martine Berthet et M. Stéphane Piednoir applaudissent.

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.

Debut de section - PermalienPhoto de Cyril Pellevat

Assurément, l’hydrogène occupera une place de choix dans l’avenir énergétique de notre pays ; notre débat d’aujourd’hui le confirme une fois de plus.

Offrant des capacités de stockage de l’électricité inenvisageables par le passé, l’hydrogène vert ouvre également la voie à la décarbonation de certaines industries qui n’avaient, jusqu’à présent, aucune solution pour faire baisser leurs émissions de gaz à effet de serre. En outre, il ouvre de nouvelles perspectives pour la mobilité, notamment lourde, en complément des batteries.

Monsieur le ministre, l’industrie du décolletage, très présente dans la vallée de l’Arve, en Haute-Savoie, que vous connaissez, est menacée par la fin des moteurs thermiques d’ici à 2035 : elle voit dans ces nouvelles technologies une importante piste de développement.

Toutefois, vous l’avez rappelé vous-même : considérer l’hydrogène comme une solution miracle appelée à remplacer les autres formes d’énergie reviendrait à se méprendre.

Son usage ne peut s’inscrire qu’en complémentarité avec les énergies renouvelables telles que le photovoltaïque, l’hydroélectricité et l’éolien, lesquelles devront nécessairement monter en puissance pour que la France puisse produire suffisamment d’hydrogène. Toutefois, même en accélérant notre production d’énergie renouvelable, la France et plus largement l’Union européenne ont nettement moins de potentiel de production renouvelable que des pays situés sur d’autres continents.

Il est donc essentiel que l’hydrogène produit grâce à l’énergie nucléaire, également appelé hydrogène rose, puisse être considéré comme renouvelable. Autrement, il serait illusoire de penser répondre à notre demande intérieure et a fortiori exporter.

Bruxelles a ouvert une porte en février dernier, par le biais d’un acte délégué, mais sept États membres, dont l’Allemagne et l’Espagne, s’y opposent et les négociations sont loin d’être terminées : à ce stade, la révision de la directive RED III, que vous avez mentionnée, n’inclut toujours pas l’hydrogène bas-carbone dans les objectifs d’énergies renouvelables.

Monsieur le ministre, où en sont les négociations européennes relatives à l’inclusion de l’hydrogène rose ? Quels moyens la France compte-t-elle mettre en œuvre pour infléchir la position des sept États qui s’y opposent ?

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, comme vous le savez sans doute, des projets de moteur thermique à hydrogène sont également à l'étude : eux aussi rendent espoir aux industries de la vallée de l'Arve, aujourd'hui focalisées sur les moteurs thermiques. Nous subventionnons les acteurs concernés au titre de nos différentes stratégies : je pense notamment à Symbio et à Feve. C'est important pour les industries de votre département de Haute-Savoie.

L'hydrogène rose est, en quelque sorte, un tabou de part et d'autre du Rhin : nous n'en parlons pas explicitement lors de nos discussions, qui concernent aujourd'hui essentiellement la part d'hydrogène vert qui sera présente dans le mix énergétique, mais la question est implicite…

Revoir à la baisse les objectifs d'hydrogène vert pour les États qui, en la matière, dépasseront 23 % dès 2030, revient de fait à donner un avantage à ceux qui, comme nous, souhaitent développer l'hydrogène dit « rose », ou hydrogène à bas-carbone. Mais, je le répète, la question est un peu tabou…

Nous n'avons pas encore atteint un compromis qui nous satisfasse. De plus, au sein du Gouvernement, les discussions ne sont pas encore tout à fait terminées pour fixer notre position finale sur le compromis de la Commission.

Ce que je peux vous dire, c'est que cette avancée, bien qu'indéniable, ne nous satisfait pas entièrement. Cela étant, nous allons dans le bon sens. Nous aurons à la fois du vert et du rose, mais nous n'avons pas encore complètement convergé : nous allons continuer d'y travailler.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, comme vous le savez sans doute, des projets de moteur thermique à hydrogène sont également à l’étude : eux aussi rendent espoir aux industries de la vallée de l’Arve, aujourd’hui focalisées sur les moteurs thermiques. Nous subventionnons les acteurs concernés au titre de nos différentes stratégies : je pense notamment à Symbio et à Feve. C’est important pour les industries de votre département de Haute-Savoie.

L’hydrogène rose est, en quelque sorte, un tabou de part et d’autre du Rhin : nous n’en parlons pas explicitement lors de nos discussions, qui concernent aujourd’hui essentiellement la part d’hydrogène vert qui sera présente dans le mix énergétique, mais la question est implicite…

Revoir à la baisse les objectifs d’hydrogène vert pour les États qui, en la matière, dépasseront 23 % dès 2030, revient de fait à donner un avantage à ceux qui, comme nous, souhaitent développer l’hydrogène dit « rose », ou hydrogène à bas-carbone. Mais, je le répète, la question est un peu tabou…

Nous n’avons pas encore atteint un compromis qui nous satisfasse. De plus, au sein du Gouvernement, les discussions ne sont pas encore tout à fait terminées pour fixer notre position finale sur le compromis de la Commission.

Ce que je peux vous dire, c’est que cette avancée, bien qu’indéniable, ne nous satisfait pas entièrement. Cela étant, nous allons dans le bon sens. Nous aurons à la fois du vert et du rose, mais nous n’avons pas encore complètement convergé : nous allons continuer d’y travailler.

Mme Martine Berthet et M. Stéphane Piednoir applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Redon-Sarrazy

Monsieur le ministre, nous dressons un même constat quant à l'utilité de l'hydrogène pour accélérer la transition énergétique.

L'hydrogène peut effectivement contribuer au basculement progressif vers les énergies renouvelables, mais encore faut-il s'entendre sur son mode de production. Aujourd'hui – les précédents orateurs l'ont rappelé –, force est de constater que l'Europe utilise majoritairement un hydrogène gris, obtenu grâce aux énergies fossiles.

Pour rappel, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), l'hydrogène produit actuellement à l'échelle mondiale provient à 69 % du gaz naturel et à 27 % du charbon, le reste étant fourni par l'électrolyse de l'eau et d'autres solutions plus vertueuses. Sa production n'a donc entraîné aucune décarbonation des économies.

L'hydrogène doit évoluer vers un mode de production décarboné, idéalement en passant par une source d'électricité renouvelable.

La voie offerte par l'électrolyse est intéressante à plusieurs égards. Elle utilise l'énergie électrique pour récupérer l'hydrogène présent dans l'eau. De plus, en couplant un électrolyseur à une source décarbonée d'électricité, l'on obtient de l'hydrogène vert, qui n'émet pas de CO2.

Si l'on choisit l'éolien ou le photovoltaïque comme source d'électricité, l'électrolyse permet de répondre aux difficultés posées par la variabilité : on stocke les excédents d'électricité en les transformant en hydrogène. Néanmoins, leur déploiement à grande échelle posera d'autres problèmes, dont l'artificialisation des sols.

Par ailleurs, l'hydrogène électrolytique suppose des infrastructures complexes, non seulement de production, mais aussi de transport et de distribution, et des capacités de stockage. On estime que le déploiement de telles infrastructures ne pourrait se faire avant le milieu de la décennie. Dans l'attente, on persistera à produire de l'hydrogène carboné, à moins que l'État n'engage une stratégie clairement définie en la matière.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous détailler le calendrier que l'État entend suivre pour développer une filière de production d'hydrogène vert ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, comme vous le savez sans doute, des projets de moteur thermique à hydrogène sont également à l’étude : eux aussi rendent espoir aux industries de la vallée de l’Arve, aujourd’hui focalisées sur les moteurs thermiques. Nous subventionnons les acteurs concernés au titre de nos différentes stratégies : je pense notamment à Symbio et à Feve. C’est important pour les industries de votre département de Haute-Savoie.

L’hydrogène rose est, en quelque sorte, un tabou de part et d’autre du Rhin : nous n’en parlons pas explicitement lors de nos discussions, qui concernent aujourd’hui essentiellement la part d’hydrogène vert qui sera présente dans le mix énergétique, mais la question est implicite…

Revoir à la baisse les objectifs d’hydrogène vert pour les États qui, en la matière, dépasseront 23 % dès 2030, revient de fait à donner un avantage à ceux qui, comme nous, souhaitent développer l’hydrogène dit rose, ou hydrogène à bas-carbone. Néanmoins, je le répète, la question est un peu taboue…

Nous n’avons pas encore atteint un compromis qui nous satisfasse. De plus, au sein du Gouvernement, les discussions ne sont pas encore tout à fait terminées pour fixer notre position finale sur le compromis de la Commission.

Ce que je peux vous dire, c’est que cette avancée, bien qu’indéniable, ne nous satisfait pas entièrement. Cela étant, nous allons dans le bon sens. Nous aurons à la fois du vert et du rose, mais nous n’avons pas encore complètement convergé : nous allons continuer d’y travailler.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, je vais vous répondre de manière très concrète.

Nos objectifs sont les suivants : accroître de 50 % notre production d'hydrogène, vert ou décarboné – c'est-à-dire produit à partir d'énergies renouvelables ou d'énergie nucléaire –, et assurer son doublement d'ici à 2035.

Nous nous donnons les moyens d'atteindre ces objectifs ambitieux en mettant sur la table des subventions dignes de ce nom et en assurant, dès maintenant, un accompagnement des porteurs de projet.

Il s'agit de répondre aux objectifs européens vers lesquels nous souhaitons converger, en vertu du compromis que nous sommes en train de négocier à Bruxelles. Il s'agit de surcroît de couvrir nos besoins. L'essentiel, c'est que les aciéries ou encore les fabriques d'engrais puissent utiliser de l'hydrogène décarboné. Dès lors, la production française d'acier et d'engrais sera elle-même décarbonée.

J'espère avoir répondu à votre question. Si tel n'est pas le cas, n'hésitez pas à nous solliciter par écrit : nous vous apporterons des informations plus précises.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Redon-Sarrazy

Monsieur le ministre, nous dressons un même constat quant à l'utilité de l'hydrogène pour accélérer la transition énergétique.

L'hydrogène peut effectivement contribuer au basculement progressif vers les énergies renouvelables, mais encore faut-il s'entendre sur son mode de production. Aujourd'hui – les précédents orateurs l'ont rappelé –, force est de constater que l'Europe utilise majoritairement un hydrogène gris, obtenu grâce aux énergies fossiles.

Pour rappel, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), l'hydrogène produit actuellement à l'échelle mondiale provient à 69 % du gaz naturel et à 27 % du charbon, le reste étant fourni par l'électrolyse de l'eau et d'autres solutions plus vertueuses. Sa production n'a donc entraîné aucune décarbonation des économies.

L'hydrogène doit évoluer vers un mode de production décarboné, idéalement en passant par une source d'électricité renouvelable.

La voie offerte par l'électrolyse est intéressante à plusieurs égards. Elle utilise l'énergie électrique pour récupérer l'hydrogène présent dans l'eau. De plus, en couplant un électrolyseur à une source décarbonée d'électricité, l'on obtient de l'hydrogène vert, qui n'émet pas de CO2.

Si l'on choisit l'éolien ou le photovoltaïque comme source d'électricité, l'électrolyse permet de répondre aux difficultés posées par la variabilité : on stocke les excédents d'électricité en les transformant en hydrogène. Néanmoins, leur déploiement à grande échelle posera d'autres problèmes, dont l'artificialisation des sols.

Par ailleurs, l'hydrogène électrolytique suppose des infrastructures complexes, non seulement de production, mais aussi de transport et de distribution, et des capacités de stockage. On estime que le déploiement de telles infrastructures ne pourrait se faire avant le milieu de la décennie. Dans l'attente, on persistera à produire de l'hydrogène carboné, à moins que l'État n'engage une stratégie clairement définie en la matière.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous détailler le calendrier que l'État entend suivre pour développer une filière de production d'hydrogène vert ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Redon-Sarrazy

Monsieur le ministre, nous dressons un même constat quant à l’utilité de l’hydrogène pour accélérer la transition énergétique.

L’hydrogène peut effectivement contribuer au basculement progressif vers les énergies renouvelables, mais encore faut-il s’entendre sur son mode de production. Aujourd’hui – les précédents orateurs l’ont rappelé –, force est de constater que l’Europe utilise majoritairement un hydrogène gris, obtenu grâce aux énergies fossiles.

Pour rappel, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), l’hydrogène produit actuellement à l’échelle mondiale provient à 69 % du gaz naturel et à 27 % du charbon, le reste étant fourni par l’électrolyse de l’eau et d’autres solutions plus vertueuses. Sa production n’a donc entraîné aucune décarbonation des économies.

L’hydrogène doit évoluer vers un mode de production décarboné, idéalement en passant par une source d’électricité renouvelable.

La voie offerte par l’électrolyse est intéressante à plusieurs égards. Elle utilise l’énergie électrique pour récupérer l’hydrogène présent dans l’eau. De plus, en couplant un électrolyseur à une source décarbonée d’électricité, l’on obtient de l’hydrogène vert, qui n’émet pas de CO2.

Si l’on choisit l’éolien ou le photovoltaïque comme source d’électricité, l’électrolyse permet de répondre aux difficultés posées par la variabilité : on stocke les excédents d’électricité en les transformant en hydrogène. Néanmoins, leur déploiement à grande échelle posera d’autres problèmes, dont l’artificialisation des sols.

Par ailleurs, l’hydrogène électrolytique suppose des infrastructures complexes, non seulement de production, mais aussi de transport et de distribution, et des capacités de stockage. On estime que le déploiement de telles infrastructures ne pourrait se faire avant le milieu de la décennie. Dans l’attente, on persistera à produire de l’hydrogène carboné, à moins que l’État n’engage une stratégie clairement définie en la matière.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous détailler le calendrier que l’État entend suivre pour développer une filière de production d’hydrogène vert ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Avec ma collègue Denise Saint-Pé, que j'associe à ma question, nous sommes persuadés que l'hydrogène est appelé à prendre une importance capitale dans la transition énergétique.

Monsieur le ministre, la France dispose d'atouts technologiques et d'une politique offensive d'accompagnement financier des projets, au travers du plan hydrogène 2030, et c'est réellement une très bonne chose.

Pour peu qu'il soit vert, c'est-à-dire produit à partir d'énergies renouvelables, l'hydrogène peut décarboner trois grands secteurs d'activité : les mobilités, l'industrie et le chauffage des bâtiments.

Les transports, lourds et en commun, bénéficieront de cette technologie à moyen terme, tout comme l'industrie de fabrication d'acier et de ciment, actuellement très polluante. Quant aux bâtiments, ils pourraient profiter de la mise sur le marché des premières chaudières faisant appel à la technologie de la condensation de gaz.

Toutefois, la fabrication de l'hydrogène vert reste à ce jour excessivement onéreuse – vous l'avez dit vous-même –, au point que, malgré les financements publics, la possibilité de produire une molécule de ce type à moins de 10 euros le kilo n'est pas encore envisageable d'un point de vue économique.

Dans un tel contexte, le Gouvernement entend-il recourir à l'extraction de l'hydrogène présent dans le sous-sol, dit « hydrogène natif » ou « hydrogène blanc » ?

Ce concept est très récent, car l'hydrogène a longtemps été considéré comme un gaz n'existant pas naturellement sous sa forme moléculaire dans le sous-sol. Or ce postulat vient d'être contredit par de récentes expérimentations menées au Mali, aux États-Unis, en Australie ainsi qu'en Chine.

Les réserves mondiales étant considérables et le prix d'extraction très inférieur à celui de la fabrication, des demandes d'autorisation de recherche provenant de sociétés françaises ont été formulées. L'État français envisage-t-il d'y répondre favorablement ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, je vais vous répondre de manière très concrète.

Nos objectifs sont les suivants : accroître de 50 % notre production d'hydrogène, vert ou décarboné, c'est-à-dire produit à partir d'énergies renouvelables ou d'énergie nucléaire, et assurer son doublement d'ici à 2035.

Nous nous donnons les moyens d'atteindre ces objectifs ambitieux en mettant sur la table des subventions dignes de ce nom et en assurant, dès maintenant, un accompagnement des porteurs de projet.

Il s'agit de répondre aux objectifs européens vers lesquels nous souhaitons converger, en vertu du compromis que nous sommes en train de négocier à Bruxelles. Il s'agit de surcroît de couvrir nos besoins. L'essentiel, c'est que les aciéries ou encore les fabriques d'engrais puissent utiliser de l'hydrogène décarboné. Dès lors, la production française d'acier et d'engrais sera elle-même décarbonée.

J'espère avoir répondu à votre question. Si tel n'est pas le cas, n'hésitez pas à nous solliciter par écrit : nous vous apporterons des informations plus précises.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, je vais vous répondre de manière très concrète.

Nos objectifs sont les suivants : accroître de 50 % notre production d’hydrogène, vert ou décarboné, c’est-à-dire produit à partir d’énergies renouvelables ou d’énergie nucléaire, et assurer son doublement d’ici à 2035.

Nous nous donnons les moyens d’atteindre ces objectifs ambitieux en mettant sur la table des subventions dignes de ce nom et en assurant, dès maintenant, un accompagnement des porteurs de projet.

Il s’agit de répondre aux objectifs européens vers lesquels nous souhaitons converger, en vertu du compromis que nous sommes en train de négocier à Bruxelles. Il s’agit de surcroît de couvrir nos besoins. L’essentiel, c’est que les aciéries ou encore les fabriques d’engrais puissent utiliser de l’hydrogène décarboné. Dès lors, la production française d’acier et d’engrais sera elle-même décarbonée.

J’espère avoir répondu à votre question. Si tel n’est pas le cas, n’hésitez pas à nous solliciter par écrit : nous vous apporterons des informations plus précises.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Redon-Sarrazy

Monsieur le ministre, nous dressons un même constat quant à l’utilité de l’hydrogène pour accélérer la transition énergétique.

L’hydrogène peut effectivement contribuer au basculement progressif vers les énergies renouvelables, mais encore faut-il s’entendre sur son mode de production. Aujourd’hui – les précédents orateurs l’ont rappelé –, force est de constater que l’Europe utilise majoritairement un hydrogène gris, obtenu grâce aux énergies fossiles.

Pour rappel, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), l’hydrogène produit actuellement à l’échelle mondiale provient à 69 % du gaz naturel et à 27 % du charbon, le reste étant fourni par l’électrolyse de l’eau et d’autres solutions plus vertueuses. Sa production n’a donc entraîné aucune décarbonation des économies.

L’hydrogène doit évoluer vers un mode de production décarboné, idéalement en passant par une source d’électricité renouvelable.

La voie offerte par l’électrolyse est intéressante à plusieurs égards. Elle utilise l’énergie électrique pour récupérer l’hydrogène présent dans l’eau. De plus, en couplant un électrolyseur à une source décarbonée d’électricité, l’on obtient de l’hydrogène vert, qui n’émet pas de CO2.

Si l’on choisit l’éolien ou le photovoltaïque comme source d’électricité, l’électrolyse permet de répondre aux difficultés posées par la variabilité : on stocke les excédents d’électricité en les transformant en hydrogène. Néanmoins, leur déploiement à grande échelle posera d’autres problèmes, dont l’artificialisation des sols.

Par ailleurs, l’hydrogène électrolytique suppose des infrastructures complexes, non seulement de production, mais aussi de transport et de distribution, et des capacités de stockage. On estime que le déploiement de telles infrastructures ne pourrait se faire avant le milieu de la décennie. Dans l’attente, on persistera à produire de l’hydrogène carboné, à moins que l’État n’engage une stratégie clairement définie en la matière.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous détailler le calendrier que l’État entend suivre pour développer une filière de production d’hydrogène vert ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Après l'hydrogène bleu, l'hydrogène gris, l'hydrogène vert et l'hydrogène rose, vous m'interrogez au sujet de l'hydrogène dit « blanc », qui existerait à l'état natif.

La mise à jour de notre ambitieuse stratégie hydrogène nous conduit, aujourd'hui, à étudier toutes les méthodes existantes : il convient bel et bien d'accroître nos capacités de production.

Au-delà de l'électrolyse, à laquelle j'ai fait référence, nous envisageons la production par voie de biomasse. L'enjeu d'usage dont il s'agit est absolument considérable : nous aurons largement besoin de la biomasse, notamment pour voler propre demain.

De même, nous étudions la possibilité d'employer l'hydrogène natif, issu de l'extraction minière. L'hydrogène a d'ailleurs été inclus dans le code minier dès 2021 et nous avons identifié quelques projets. On ne saurait évidemment préjuger de leur instruction : l'État doit déterminer, selon le code minier, l'ampleur du potentiel de gisement, les fondamentaux économiques et les bénéfices environnementaux réels. Nous nous attacherons bien sûr à remplir ces trois conditions.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Avec ma collègue Denise Saint-Pé, que j'associe à ma question, nous sommes persuadés que l'hydrogène est appelé à prendre une importance capitale dans la transition énergétique.

Monsieur le ministre, la France dispose d'atouts technologiques et d'une politique offensive d'accompagnement financier des projets, au travers du plan hydrogène 2030, et c'est réellement une très bonne chose.

Pour peu qu'il soit vert, c'est-à-dire produit à partir d'énergies renouvelables, l'hydrogène peut décarboner trois grands secteurs d'activité : les mobilités, l'industrie et le chauffage des bâtiments.

Les transports, lourds et en commun, bénéficieront de cette technologie à moyen terme, tout comme l'industrie de fabrication d'acier et de ciment, actuellement très polluante. Quant aux bâtiments, ils pourraient profiter de la mise sur le marché des premières chaudières faisant appel à la technologie de la condensation de gaz.

Toutefois, la fabrication de l'hydrogène vert reste à ce jour excessivement onéreuse – vous l'avez dit vous-même –, au point que, malgré les financements publics, la possibilité de produire une molécule de ce type à moins de 10 euros le kilo n'est pas encore envisageable d'un point de vue économique.

Dans un tel contexte, le Gouvernement entend-il recourir à l'extraction de l'hydrogène présent dans le sous-sol, dit « hydrogène natif » ou « hydrogène blanc » ?

Ce concept est très récent, car l'hydrogène a longtemps été considéré comme un gaz n'existant pas naturellement sous sa forme moléculaire dans le sous-sol. Or ce postulat vient d'être contredit par de récentes expérimentations menées au Mali, aux États-Unis, en Australie ainsi qu'en Chine.

Les réserves mondiales étant considérables et le prix d'extraction très inférieur à celui de la fabrication, des demandes d'autorisation de recherche provenant de sociétés françaises ont été formulées. L'État français envisage-t-il d'y répondre favorablement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Avec ma collègue Denise Saint-Pé, que j’associe à ma question, nous sommes persuadés que l’hydrogène est appelé à prendre une importance capitale dans la transition énergétique.

Monsieur le ministre, la France dispose d’atouts technologiques et d’une politique offensive d’accompagnement financier des projets, au travers du plan hydrogène 2030, et c’est réellement une très bonne chose.

Pour peu qu’il soit vert, c’est-à-dire produit à partir d’énergies renouvelables, l’hydrogène peut décarboner trois grands secteurs d’activité : les mobilités, l’industrie et le chauffage des bâtiments.

Les transports, lourds et en commun, bénéficieront de cette technologie à moyen terme, tout comme l’industrie de fabrication d’acier et de ciment, actuellement très polluante. Quant aux bâtiments, ils pourraient profiter de la mise sur le marché des premières chaudières faisant appel à la technologie de la condensation de gaz.

Toutefois, la fabrication de l’hydrogène vert reste à ce jour excessivement onéreuse – vous l’avez dit vous-même –, au point que, malgré les financements publics, la possibilité de produire une molécule de ce type à moins de 10 euros le kilo n’est pas encore envisageable d’un point de vue économique.

Dans un tel contexte, le Gouvernement entend-il recourir à l’extraction de l’hydrogène présent dans le sous-sol, dit « hydrogène natif » ou « hydrogène blanc » ?

Ce concept est très récent, car l’hydrogène a longtemps été considéré comme un gaz n’existant pas naturellement sous sa forme moléculaire dans le sous-sol. Or ce postulat vient d’être contredit par de récentes expérimentations menées au Mali, aux États-Unis, en Australie ainsi qu’en Chine.

Les réserves mondiales étant considérables et le prix d’extraction très inférieur à celui de la fabrication, des demandes d’autorisation de recherche provenant de sociétés françaises ont été formulées. L’État français envisage-t-il d’y répondre favorablement ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, je vais vous répondre de manière très concrète.

Nos objectifs sont les suivants : accroître de 50 % notre production d’hydrogène, vert ou décarboné, c’est-à-dire produit à partir d’énergies renouvelables ou d’énergie nucléaire, et assurer son doublement d’ici à 2035.

Nous nous donnons les moyens d’atteindre ces objectifs ambitieux en mettant sur la table des subventions dignes de ce nom et en assurant, dès maintenant, un accompagnement des porteurs de projet.

Il s’agit de répondre aux objectifs européens vers lesquels nous souhaitons converger, en vertu du compromis que nous sommes en train de négocier à Bruxelles. Il s’agit de surcroît de couvrir nos besoins. L’essentiel, c’est que les aciéries ou encore les fabriques d’engrais puissent utiliser de l’hydrogène décarboné. Dès lors, la production française d’acier et d’engrais sera elle-même décarbonée.

J’espère avoir répondu à votre question. Si tel n’est pas le cas, n’hésitez pas à nous solliciter par écrit : nous vous apporterons des informations plus précises.

Photo de Roger Karoutchi

La parole est à M. le ministre délégué.

Photo de Roger Karoutchi

Elle est accompagnée par notre collègue Mme Valérie Boyer, présidente du groupe d'amitié France-Pologne.

Cette visite d'étude permettra de renforcer la coopération franco-polonaise dans le contexte particulier du conflit en Ukraine. Ses travaux concerneront le domaine de la défense, mais aussi le secteur agricole et la coopération en matière scientifique.

La richesse de la culture partagée entre la France et la Pologne sera mise à l'honneur avec la visite du château et du village de Montrésor, en Indre-et-Loire, qui sont intimement liés à l'histoire polonaise.

Mes chers collègues, à la veille du 3 mai, qui est une fête nationale en Pologne, célébrant la Constitution du 3 mai 1791, je souhaite, en votre nom à tous, à nos homologues du Sénat polonais, la plus cordiale bienvenue ainsi qu'un excellent et fructueux séjour.

Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Après l'hydrogène bleu, l'hydrogène gris, l'hydrogène vert et l'hydrogène rose, vous m'interrogez au sujet de l'hydrogène dit « blanc », qui existerait à l'état natif.

La mise à jour de notre ambitieuse stratégie hydrogène nous conduit à étudier toutes les méthodes existantes : il convient bel et bien d'accroître nos capacités de production.

Au-delà de l'électrolyse, à laquelle j'ai fait référence, nous envisageons la production par voie de biomasse. L'enjeu d'usage dont il s'agit est absolument considérable : nous aurons largement besoin de la biomasse, notamment pour voler propre demain.

De même, nous étudions la possibilité d'employer l'hydrogène natif, issu de l'extraction minière. L'hydrogène a d'ailleurs été inclus dans le code minier dès 2021 et nous avons identifié quelques projets. On ne saurait évidemment préjuger de leur instruction : l'État doit déterminer, selon le code minier, l'ampleur du potentiel de gisement, les fondamentaux économiques et les bénéfices environnementaux réels. Nous nous attacherons bien sûr à remplir ces trois conditions.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Après l’hydrogène bleu, l’hydrogène gris, l’hydrogène vert et l’hydrogène rose, vous m’interrogez au sujet de l’hydrogène dit « blanc », qui existerait à l’état natif.

La mise à jour de notre ambitieuse stratégie hydrogène nous conduit à étudier toutes les méthodes existantes : il convient bel et bien d’accroître nos capacités de production.

Au-delà de l’électrolyse, à laquelle j’ai fait référence, nous envisageons la production par voie de biomasse. L’enjeu d’usage dont il s’agit est absolument considérable : nous aurons largement besoin de la biomasse, notamment pour voler propre demain.

De même, nous étudions la possibilité d’employer l’hydrogène natif, issu de l’extraction minière. L’hydrogène a d’ailleurs été inclus dans le code minier dès 2021 et nous avons identifié quelques projets. On ne saurait évidemment préjuger de leur instruction : l’État doit déterminer, selon le code minier, l’ampleur du potentiel de gisement, les fondamentaux économiques et les bénéfices environnementaux réels. Nous nous attacherons bien sûr à remplir ces trois conditions.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Ma collègue Denise Saint-Pé, que j’associe à ma question, et moi-même sommes persuadés que l’hydrogène est appelé à prendre une importance capitale dans la transition énergétique.

Monsieur le ministre, la France dispose d’atouts technologiques et d’une politique offensive d’accompagnement financier des projets, au travers du plan hydrogène 2030, et c’est réellement une très bonne chose.

Pour peu qu’il soit vert, c’est-à-dire produit à partir d’énergies renouvelables, l’hydrogène peut décarboner trois grands secteurs d’activité : les mobilités, l’industrie et le chauffage des bâtiments.

Les transports, lourds et en commun, bénéficieront de cette technologie à moyen terme, tout comme l’industrie de fabrication d’acier et de ciment, actuellement très polluante. Quant aux bâtiments, ils pourraient profiter de la mise sur le marché des premières chaudières faisant appel à la technologie de la condensation de gaz.

Toutefois, la fabrication de l’hydrogène vert reste à ce jour excessivement onéreuse – vous l’avez dit vous-même –, au point que, malgré les financements publics, la possibilité de produire une molécule de ce type à moins de 10 euros le kilogramme n’est pas encore envisageable d’un point de vue économique.

Dans un tel contexte, le Gouvernement entend-il recourir à l’extraction de l’hydrogène présent dans le sous-sol, dit hydrogène natif ou hydrogène blanc ?

Ce concept est très récent, car l’hydrogène a longtemps été considéré comme un gaz n’existant pas naturellement sous sa forme moléculaire dans le sous-sol. Or ce postulat vient d’être contredit par de récentes expérimentations menées au Mali, aux États-Unis, en Australie ainsi qu’en Chine.

Les réserves mondiales étant considérables et le prix d’extraction très inférieur à celui de la fabrication, des demandes d’autorisation de recherche provenant de sociétés françaises ont été formulées. L’État français envisage-t-il d’y répondre favorablement ?

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

Photo de Roger Karoutchi

La parole est à M. le ministre délégué.

Photo de Roger Karoutchi

Elle est accompagnée par notre collègue Mme Valérie Boyer, présidente du groupe d'amitié France-Pologne.

Cette visite d'étude permettra de renforcer la coopération franco-polonaise dans le contexte particulier du conflit en Ukraine. Ses travaux concerneront le domaine de la défense, mais aussi le secteur agricole et la coopération en matière scientifique.

La richesse de la culture partagée entre la France et la Pologne sera mise à l'honneur avec la visite du château et du village de Montrésor, en Indre-et-Loire, qui sont intimement liés à l'histoire polonaise.

Mes chers collègues, à la veille du 3 mai, qui est une fête nationale en Pologne, célébrant la Constitution du 3 mai 1791, je souhaite, en votre nom à tous, à nos homologues du Sénat polonais, la plus cordiale bienvenue ainsi qu'un excellent et fructueux séjour.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Elle est accompagnée par notre collègue Mme Valérie Boyer, présidente du groupe d’amitié France-Pologne.

Cette visite d’étude permettra de renforcer la coopération franco-polonaise dans le contexte particulier du conflit en Ukraine. Ses travaux concerneront le domaine de la défense, mais aussi le secteur agricole et la coopération en matière scientifique.

La richesse de la culture partagée entre la France et la Pologne sera mise à l’honneur avec la visite du château et du village de Montrésor, en Indre-et-Loire, qui sont intimement liés à l’histoire polonaise.

Mes chers collègues, à la veille du 3 mai, qui est une fête nationale en Pologne, célébrant la Constitution du 3 mai 1791, je souhaite, en votre nom à tous, à nos homologues du Sénat polonais, la plus cordiale bienvenue ainsi qu’un excellent et fructueux séjour.

Roland Lescure

Après l’hydrogène bleu, l’hydrogène gris, l’hydrogène vert et l’hydrogène rose, vous m’interrogez au sujet de l’hydrogène dit blanc, qui existerait à l’état natif.

La mise à jour de notre ambitieuse stratégie hydrogène nous conduit à étudier toutes les méthodes existantes : il convient bel et bien d’accroître nos capacités de production.

Au-delà de l’électrolyse, à laquelle j’ai fait référence, nous envisageons la production par voie de biomasse. L’enjeu d’usage dont il s’agit est absolument considérable : nous aurons largement besoin de la biomasse, notamment pour voler propre demain.

De même, nous étudions la possibilité d’employer l’hydrogène natif, issu de l’extraction minière. L’hydrogène a d’ailleurs été inclus dans le code minier dès 2021 et nous avons identifié quelques projets. On ne saurait évidemment préjuger de leur instruction : l’État doit déterminer, selon le code minier, l’ampleur du potentiel de gisement, les fondamentaux économiques et les bénéfices environnementaux réels. Nous nous attacherons bien sûr à remplir ces trois conditions.

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

Photo de Roger Karoutchi

Dans la suite du débat, la parole est à Mme Martine Berthet.

Quelles solutions pour développer l’hydrogène au sein de notre mix énergétique ?

Photo de Roger Karoutchi

Elle est accompagnée par notre collègue Mme Valérie Boyer, présidente du groupe d’amitié France-Pologne.

Cette visite d’étude permettra de renforcer la coopération franco-polonaise dans le contexte particulier du conflit en Ukraine. Ses travaux concerneront le domaine de la défense, mais aussi le secteur agricole et la coopération en matière scientifique.

La richesse de la culture partagée entre la France et la Pologne sera mise à l’honneur avec la visite du château et du village de Montrésor, en Indre-et-Loire, qui sont intimement liés à l’histoire polonaise.

Mes chers collègues, à la veille du 3 mai, qui est une fête nationale en Pologne, célébrant la Constitution du 3 mai 1791, je souhaite, en votre nom à tous, à nos homologues du Sénat polonais, la plus cordiale bienvenue ainsi qu’un excellent et fructueux séjour.

Photo de Martine Berthet

Monsieur le ministre, la révision de la stratégie nationale pour le développement de l'hydrogène décarboné, annoncée en février dernier, devrait être présentée d'ici à l'été prochain.

Que pouvez-vous nous en dire ? Je pense tout particulièrement à la construction de gigafactories et à la fabrication d'équipements clefs pour la production et les usages de l'hydrogène que sont les électrolyseurs, les piles à combustible et les réservoirs, accompagnées financièrement par l'État, qui devraient entraîner tout un tissu manufacturier de PME-PMI dans les territoires, des savoir-faire et de nombreux emplois.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire concrètement comment le Gouvernement va s'assurer que ces entreprises, issues de la filière française de l'électrolyse pour l'hydrogène renouvelable et bas-carbone, trouveront des débouchés suffisants d'ici à 2030 qui leur permettront de se consolider, de devenir des fleurons industriels durables pour notre pays et ainsi de bénéficier sur le long terme de notre position de nation pionnière dans ce domaine ?

Suite d'un débat organisé à la demande du groupe Les Républicains

Suite d’un débat organisé à la demande du groupe Les Républicains

Photo de Roger Karoutchi

La parole est à M. le ministre délégué.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Dans la suite du débat, la parole est à Mme Martine Berthet.

Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question qui me permet de mettre en avant trois projets de gigafactories déjà en cours de construction.

Elogen, start-up située aux Ulis, envisage de construire sa gigafactory à Vendôme d'ici à quelques mois, pour une ouverture prévue dans deux ans.

Genvia, autre entreprise française de qualité, qui met au point une technologie importante, construit sa gigafactory à Béziers. Elle a beaucoup d'avenir.

Enfin, John Cockerill, entreprise franco-belge, envisage de construire sa gigafactory en Alsace.

Il existe donc trois projets, qui devraient produire, en régime permanent, environ 2 gigawattheures, alors que les besoins sont estimés aux alentours de 6 gigawattheures. Aussi, nous aurons largement les moyens de répondre à la production de ces trois gigafactories.

Il reste, bien évidemment, à les construire – nous aidons les entreprises en ce sens – et à produire de l'hydrogène à un coût compétitif ; d'où la question essentielle de l'électricité décarbonée, sur laquelle nous devons travailler ensemble.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Berthet

Monsieur le ministre, la révision de la stratégie nationale pour le développement de l'hydrogène décarboné, annoncée en février dernier, devrait être présentée d'ici à l'été prochain.

Que pouvez-vous nous en dire ? Je pense tout particulièrement à la construction de gigafactories et à la fabrication d'équipements clefs pour la production et les usages de l'hydrogène que sont les électrolyseurs, les piles à combustible et les réservoirs, accompagnées financièrement par l'État, qui devraient entraîner le développement de tout un tissu manufacturier de PME-PMI dans les territoires, de savoir-faire et la création de nombreux emplois.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire concrètement comment le Gouvernement va s'assurer que ces entreprises, issues de la filière française de l'électrolyse pour l'hydrogène renouvelable et bas-carbone, trouveront des débouchés suffisants d'ici à 2030 qui leur permettront de se consolider, de devenir des fleurons industriels durables pour notre pays et ainsi de bénéficier sur le long terme de notre position de nation pionnière dans ce domaine ?

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Berthet

Monsieur le ministre, la révision de la stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné, annoncée en février dernier, devrait être présentée d’ici à l’été prochain.

Que pouvez-vous nous en dire ? Je pense tout particulièrement à la construction de gigafactories et à la fabrication d’équipements clefs pour la production et les usages de l’hydrogène que sont les électrolyseurs, les piles à combustible et les réservoirs, accompagnées financièrement par l’État, qui devraient entraîner le développement de tout un tissu manufacturier de PME-PMI dans les territoires, de savoir-faire et la création de nombreux emplois.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire concrètement comment le Gouvernement va s’assurer que ces entreprises, issues de la filière française de l’électrolyse pour l’hydrogène renouvelable et bas-carbone, trouveront des débouchés suffisants d’ici à 2030 qui leur permettront de se consolider, de devenir des fleurons industriels durables pour notre pays et ainsi de bénéficier sur le long terme de notre position de nation pionnière dans ce domaine ?

Suite d’un débat organisé à la demande du groupe Les Républicains

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Martine Berthet, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Dans la suite du débat, la parole est à Mme Martine Berthet.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Berthet

Monsieur le ministre, il y a le sujet des gigafactories et celui de la décarbonation des sites identifiés comme gros émetteurs de gaz à effet de serre – ils sont importants –, mais également celui du soutien au développement de la mobilité professionnelle – des véhicules utilitaires légers aux camions, des bennes à ordures aux autobus – et de la mise en place d'infrastructures de recharge hydrogène maillant l'ensemble du territoire national.

Ces points ne doivent être ni retardés ni négligés dans la révision de la stratégie nationale. Alors que la France a la chance de compter deux constructeurs automobiles ayant mis au point des véhicules utilitaires légers à hydrogène, il serait véritablement regrettable de ne pas potentialiser cette avance technologique au moment où les zones à faibles émissions (ZFE) vont être mises en œuvre.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question, qui me permet de mettre en avant trois projets de gigafactories déjà en cours de construction.

Elogen, start-up située aux Ulis, envisage de construire sa gigafactory à Vendôme d'ici à quelques mois, pour une ouverture prévue dans deux ans.

Genvia, autre entreprise française de qualité, qui met au point une technologie importante, construit sa gigafactory à Béziers. Elle a beaucoup d'avenir.

Enfin, John Cockerill, entreprise franco-belge, envisage de construire sa gigafactory en Alsace.

Il existe donc trois projets, qui devraient produire, en régime permanent, environ 2 gigawattheures, alors que les besoins sont estimés aux alentours de 6 gigawattheures. Aussi, nous aurons largement les moyens de répondre à la production de ces trois gigafactories.

Il reste, bien évidemment, à les construire – nous aidons les entreprises en ce sens – et à produire de l'hydrogène à un coût compétitif. D'où la question essentielle de l'électricité décarbonée, sur laquelle nous devons travailler ensemble.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question, qui me permet de mettre en avant trois projets de gigafactories déjà en cours de construction.

Elogen, start-up située aux Ulis, envisage de construire sa gigafactory à Vendôme d’ici à quelques mois, pour une ouverture prévue dans deux ans.

Genvia, autre entreprise française de qualité, qui met au point une technologie importante, construit sa gigafactory à Béziers. Elle a beaucoup d’avenir.

Enfin, John Cockerill, entreprise franco-belge, envisage de construire sa gigafactory en Alsace.

Il existe donc trois projets, qui devraient produire, en régime permanent, environ 2 gigawattheures, alors que les besoins sont estimés aux alentours de 6 gigawattheures. Aussi, nous aurons largement les moyens de répondre à la production de ces trois gigafactories.

Il reste, bien évidemment, à les construire – nous aidons les entreprises en ce sens – et à produire de l’hydrogène à un coût compétitif. D’où la question essentielle de l’électricité décarbonée, sur laquelle nous devons travailler ensemble.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Berthet

Monsieur le ministre, la révision de la stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné, annoncée en février dernier, devrait être présentée d’ici à l’été prochain.

Que pouvez-vous nous en dire ? Je pense tout particulièrement à la construction de gigafactories et à la fabrication d’équipements clés pour la production et les usages de l’hydrogène que sont les électrolyseurs, les piles à combustible et les réservoirs, accompagnées financièrement par l’État, qui devraient entraîner le développement de tout un tissu manufacturier de PME-PMI dans les territoires, de savoir-faire et la création de nombreux emplois.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire concrètement comment le Gouvernement va s’assurer que ces entreprises, issues de la filière française de l’électrolyse pour l’hydrogène renouvelable et bas-carbone, trouveront des débouchés suffisants d’ici à 2030 qui leur permettront de se consolider, de devenir des fleurons industriels durables pour notre pays et ainsi de bénéficier sur le long terme de notre position de nation pionnière dans ce domaine ?

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Montaugé

Dans la politique énergétique nationale, l'hydrogène est avant tout considéré comme un moyen de décarbonation de l'énergie de certaines filières industrielles particulières, que vous avez d'ailleurs évoquées, monsieur le ministre.

Mais on parle peu des solutions que l'hydrogène devra apporter pour permettre le bon fonctionnement de l'ensemble du parc national de production d'électricité.

Plus précisément, dans la perspective de scenarii à forte proportion d'énergies renouvelables (EnR) intermittentes, la production et le stockage d'hydrogène contribueront à la flexibilité du réseau et à l'équilibre production/demande du système électrique.

Dit autrement, plus la part d'énergies renouvelables dans le mix énergétique sera importante, plus nous aurons besoin de faire appel à la fonction particulière de stockage de l'hydrogène.

La compétitivité des énergies renouvelables sera aussi fonction de la contribution de l'hydrogène à la flexibilité et à l'équilibre du réseau en situation de moindre disponibilité des énergies renouvelables.

Mais cette contribution à la flexibilité du réseau nécessite des infrastructures de stockage et de transport d'hydrogène importantes.

Pour réussir cela, il est indispensable d'intégrer au mix énergétique et au réseau d'énergie électrique national un système hydrogène composé d'électrolyseurs, de stockages d'hydrogène, de points d'avitaillement, de centrales thermiques à hydrogène, de réseaux de transport voire d'interconnexion avec les pays limitrophes.

En définitive, la nature et l'ampleur du système hydrogène qui serait intégré à la régulation du réseau électrique national conduirait à plus ou moins de flexibilité.

Un tel choix politique – c'en est un ! – aura des conséquences sur les niveaux d'énergies renouvelables dans le mix et donc sur la PPE.

Monsieur le ministre, quelle est la doctrine du Gouvernement en matière de gestion de la flexibilité du futur réseau électrique national ? Quel type de système hydrogène entendez-vous développer en matière de flexibilité ? Où en êtes-vous de la planification des investissements nécessaires ? Comment et sur quels acteurs les coûts de ces investissements seront-ils répercutés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Martine Berthet, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Berthet

Monsieur le ministre, il y a le sujet des gigafactories et celui de la décarbonation des sites identifiés comme gros émetteurs de gaz à effet de serre – ils sont importants –, mais également celui du soutien au développement de la mobilité professionnelle – des véhicules utilitaires légers aux camions, des bennes à ordures aux autobus – et de la mise en place d'infrastructures de recharge hydrogène maillant l'ensemble du territoire national.

Ces points ne doivent être ni retardés ni négligés dans la révision de la stratégie nationale. Alors que la France a la chance de compter deux constructeurs automobiles ayant mis au point des véhicules utilitaires légers à hydrogène, il serait véritablement regrettable de ne pas potentialiser cette avance technologique au moment où les zones à faibles émissions (ZFE) vont être mises en œuvre.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Berthet

Monsieur le ministre, il y a le sujet des gigafactories et celui de la décarbonation des sites identifiés comme gros émetteurs de gaz à effet de serre – ils sont importants –, mais également celui du soutien au développement de la mobilité professionnelle – des véhicules utilitaires légers aux camions, des bennes à ordures aux autobus – et de la mise en place d’infrastructures de recharge hydrogène maillant l’ensemble du territoire national.

Ces points ne doivent être ni retardés ni négligés dans la révision de la stratégie nationale. Alors que la France a la chance de compter deux constructeurs automobiles ayant mis au point des véhicules utilitaires légers à hydrogène, il serait véritablement regrettable de ne pas potentialiser cette avance technologique au moment où les zones à faibles émissions (ZFE) vont être mises en œuvre.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question, qui me permet de mettre en avant trois projets de gigafactories déjà en cours de construction.

Elogen, start-up située aux Ulis, envisage de construire sa gigafactory à Vendôme d’ici quelques mois, pour une ouverture prévue dans deux ans.

Genvia, autre entreprise française de qualité, qui met au point une technologie importante, construit sa gigafactory à Béziers. Elle a beaucoup d’avenir.

Enfin, John Cockerill, entreprise franco-belge, envisage de construire sa gigafactory en Alsace.

Il existe donc trois projets, qui devraient produire, en régime permanent, environ 2 gigawattheures, alors que les besoins sont estimés aux alentours de 6 gigawattheures. Aussi, nous aurons largement les moyens de répondre à la production de ces trois gigafactories.

Il reste, bien évidemment, à les construire – nous aidons les entreprises en ce sens – et à produire de l’hydrogène à un coût compétitif. Se pose alors la question essentielle de l’électricité décarbonée, sur laquelle nous devons travailler ensemble.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, c'est une bonne question, car l'hydrogène, vous l'avez dit, peut être stocké en grande quantité dans des cavités salines.

C'est un avantage énorme que n'ont pas les énergies renouvelables. Il a été prouvé par la réutilisation, aux États-Unis et en Angleterre, d'anciennes cavités stockant du gaz naturel. Or de telles cavités existent en France, autour de Manosque, en France ; la possibilité d'en construire de nouvelles, dans plusieurs géologies favorables, est également à l'étude.

Plus particulièrement, les installations de Manosque pourraient stocker jusqu'à 30 kilotonnes d'hydrogène à court terme, c'est-à-dire des quantités importantes.

Le stockage d'hydrogène permet d'en abaisser le coût, d'arbitrer sur le choix des horaires de production de l'hydrogène électrolytique et d'optimiser le prix de l'électricité, qui représente 70 % du coût de l'hydrogène.

Cela pourrait aussi aider, à plus long terme, c'est-à-dire à l'horizon 2040, voire au-delà, à équilibrer le système électrique en produisant de l'électricité au moyen d'une pile à combustible à partir de l'hydrogène stocké. Concrètement, cela revient à stocker l'hydrogène qui est fabriqué à partir d'énergies renouvelables, puis à le transformer en électricité. La start-up française Hydrogène de France (HDF Energy) mène un projet en ce sens ; une expérimentation est même prévue en Guyane dans les mois qui viennent.

Il serait également possible de réutiliser les centrales à gaz naturel à cycle combiné. Pour ce faire, il faudrait plutôt regarder la stratégie allemande de réemploi des centrales à gaz. Mais, comme vous le savez, notre système dépend moins du gaz que le système allemand…

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Montaugé

Dans la politique énergétique nationale, l'hydrogène est avant tout considéré comme un moyen de décarbonation de l'énergie de filières industrielles particulières, que vous avez d'ailleurs évoquées, monsieur le ministre.

Mais on parle peu des solutions que l'hydrogène devra apporter pour permettre le bon fonctionnement de l'ensemble du parc national de production d'électricité.

Plus précisément, dans la perspective de scenarii à forte proportion d'énergies renouvelables (EnR) intermittentes, la production et le stockage d'hydrogène contribueront à la flexibilité du réseau et à l'équilibre entre production et demande du système électrique.

Dit autrement, plus la part d'énergies renouvelables dans le mix énergétique sera importante, plus nous aurons besoin de faire appel à la fonction particulière de stockage de l'hydrogène.

La compétitivité des énergies renouvelables sera aussi fonction de la contribution de l'hydrogène à la flexibilité et à l'équilibre du réseau en situation de moindre disponibilité des énergies renouvelables. Mais cette contribution à la flexibilité du réseau nécessite des infrastructures de stockage et de transport d'hydrogène importantes.

Pour y parvenir, il est indispensable d'intégrer au mix énergétique et au réseau d'énergie électrique national un système hydrogène composé d'électrolyseurs, de stockages d'hydrogène, de points d'avitaillement, de centrales thermiques à hydrogène, de réseaux de transport, voire d'interconnexions avec les pays limitrophes.

En définitive, la nature et l'ampleur du système hydrogène qui serait intégré à la régulation du réseau électrique national conduirait à plus ou moins de flexibilité. Un tel choix politique – c'en est un ! – aura des conséquences sur les niveaux d'énergies renouvelables dans le mix et donc sur la PPE.

Monsieur le ministre, quelle est la doctrine du Gouvernement en matière de gestion de la flexibilité du futur réseau électrique national ? Quel type de système hydrogène entendez-vous développer en matière de flexibilité ? Où en êtes-vous de la planification des investissements nécessaires ? Comment et sur quels acteurs les coûts de ces investissements seront-ils répercutés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Martine Berthet, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Berthet

Monsieur le ministre, il y a le sujet des gigafactories et celui de la décarbonation des sites identifiés comme gros émetteurs de gaz à effet de serre – ils sont importants –, mais également celui du soutien au développement de la mobilité professionnelle – des véhicules utilitaires légers aux camions, des bennes à ordures aux autobus – et de la mise en place d’infrastructures de recharge hydrogène maillant l’ensemble du territoire national.

Ces points ne doivent être ni retardés ni négligés dans la révision de la stratégie nationale. Alors que la France a la chance de compter deux constructeurs automobiles ayant mis au point des véhicules utilitaires légers à hydrogène, il serait véritablement regrettable de ne pas potentialiser cette avance technologique au moment où les zones à faibles émissions (ZFE) vont être mises en œuvre.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, c'est une bonne question, car l'hydrogène, vous l'avez dit, peut être stocké en grande quantité dans des cavités salines.

C'est un avantage énorme, que n'ont pas les énergies renouvelables, et qui a été démontré par la réutilisation d'anciennes cavités stockant du gaz naturel aux États-Unis et en Angleterre. Or de telles cavités existent en France, notamment autour de Manosque ; la possibilité d'en construire de nouvelles, dans plusieurs géologies favorables, est également à l'étude. Les installations de Manosque pourraient stocker jusqu'à 30 kilotonnes d'hydrogène à court terme, c'est-à-dire des quantités importantes.

Le stockage de l'hydrogène permet d'en abaisser le coût, d'arbitrer sur le choix des horaires de production de l'hydrogène électrolytique et d'optimiser le prix de l'électricité, qui représente 70 % du coût de l'hydrogène.

Cela pourrait aussi aider, à plus long terme, c'est-à-dire à l'horizon 2040, voire au-delà, à équilibrer le système électrique en produisant de l'électricité au moyen d'une pile à combustible à partir de l'hydrogène stocké. Concrètement, cela revient à stocker l'hydrogène qui est fabriqué à partir d'énergies renouvelables, puis à le transformer en électricité. La start-up française Hydrogène de France (HDF Energy) mène un projet en ce sens ; une expérimentation est même prévue en Guyane dans les mois qui viennent.

Il serait également possible de réutiliser les centrales à gaz naturel à cycle combiné. Pour ce faire, il faudrait plutôt regarder la stratégie allemande de réemploi des centrales à gaz. Mais, comme vous le savez, notre système dépend moins du gaz que celui de nos voisins…

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Montaugé

Dans la politique énergétique nationale, l’hydrogène est avant tout considéré comme un moyen de décarbonation de l’énergie de filières industrielles particulières, que vous avez d’ailleurs évoquées, monsieur le ministre.

Mais on parle peu des solutions que l’hydrogène devra apporter pour permettre le bon fonctionnement de l’ensemble du parc national de production d’électricité.

Plus précisément, dans la perspective de scenarii à forte proportion d’énergies renouvelables (EnR) intermittentes, la production et le stockage d’hydrogène contribueront à la flexibilité du réseau et à l’équilibre entre production et demande du système électrique.

Dit autrement, plus la part d’énergies renouvelables dans le mix énergétique sera importante, plus nous aurons besoin de faire appel à la fonction particulière de stockage de l’hydrogène.

La compétitivité des énergies renouvelables sera aussi fonction de la contribution de l’hydrogène à la flexibilité et à l’équilibre du réseau en situation de moindre disponibilité des énergies renouvelables. Mais cette contribution à la flexibilité du réseau nécessite des infrastructures de stockage et de transport d’hydrogène importantes.

Pour y parvenir, il est indispensable d’intégrer au mix énergétique et au réseau d’énergie électrique national un système hydrogène composé d’électrolyseurs, de stockages d’hydrogène, de points d’avitaillement, de centrales thermiques à hydrogène, de réseaux de transport, voire d’interconnexions avec les pays limitrophes.

En définitive, la nature et l’ampleur du système hydrogène qui serait intégré à la régulation du réseau électrique national conduirait à plus ou moins de flexibilité. Un tel choix politique – c’en est un ! – aura des conséquences sur les niveaux d’énergies renouvelables dans le mix et donc sur la PPE.

Monsieur le ministre, quelle est la doctrine du Gouvernement en matière de gestion de la flexibilité du futur réseau électrique national ? Quel type de système hydrogène entendez-vous développer en matière de flexibilité ? Où en êtes-vous de la planification des investissements nécessaires ? Comment et sur quels acteurs les coûts de ces investissements seront-ils répercutés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé.

Debut de section - PermalienPhoto de Béatrice Gosselin

Mes chers collègues, à condition qu'il soit produit par des moyens ne conduisant pas à des émissions significatives de carbone, l'hydrogène présente l'intérêt d'être, d'une part, un vecteur énergétique de choix pour certaines industries ou pour la mobilité lourde et, d'autre part, un outil de flexibilité du mix électrique qui aide à décarboner des secteurs difficiles à électrifier.

Comme énergie, l'hydrogène bas-carbone est applicable au secteur de la mobilité – transport collectif de personnes et transport de marchandises –, là où les solutions à base de batterie sont plus difficiles à mettre en œuvre ou soulèvent des enjeux majeurs.

Utilisé dans une pile à combustible, il présente l'avantage de ne rejeter que de l'eau, ce qui permet d'éliminer les émissions de particules, de soufre, d'oxyde d'azote et de contribuer à l'amélioration de la qualité de l'air.

En période de surproduction électrique, l'électricité peut être stockée, mais aussi utilisée pour produire de l'hydrogène facilement stockable.

L'hydrogène renouvelable, produit par l'électrolyse de l'eau, n'est certes pas polluant, mais coûte beaucoup plus cher à produire. Son déploiement passera par la baisse du coût de production de l'électricité renouvelable – solaire et éolien –, et par celle du coût des électrolyseurs ou des piles à combustible.

Pour autant, c'est bien l'électrolyse de l'eau qui représente le futur du développement de la filière hydrogène. Le projet Sealhyfe en Vendée, plateforme en mer raccordée à une éolienne flottante, s'avère être une perspective intéressante pour la production d'hydrogène renouvelable. En effet, après désalinisation de l'eau de mer, l'hydrogène sera produit par électrolyse et acheminé sur terre via un réseau de pipelines.

Mais le défi immédiat, pour accompagner la production par électrolyse d'hydrogène propre, consiste à assurer un approvisionnement suffisant en électricité décarbonée.

Aussi, monsieur le ministre, pour atteindre les objectifs de décarbonation fixés par la Commission européenne en 2030, l'hydrogène bas-carbone produit à partir d'électricité nucléaire sera-t-il reconnu comme indispensable, à l'instar de l'hydrogène renouvelable ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, c’est une bonne question, car l’hydrogène, vous l’avez dit, peut être stocké en grande quantité dans des cavités salines.

C’est un avantage énorme, que n’ont pas les énergies renouvelables, et qui a été démontré par la réutilisation d’anciennes cavités stockant du gaz naturel aux États-Unis et en Angleterre. Or de telles cavités existent en France, notamment autour de Manosque ; la possibilité d’en construire de nouvelles, dans plusieurs géologies favorables, est également à l’étude. Les installations de Manosque pourraient stocker jusqu’à 30 kilotonnes d’hydrogène à court terme, c’est-à-dire des quantités importantes.

Le stockage de l’hydrogène permet d’en abaisser le coût, d’arbitrer sur le choix des horaires de production de l’hydrogène électrolytique et d’optimiser le prix de l’électricité, qui représente 70 % du coût de l’hydrogène.

Cela pourrait aussi aider, à plus long terme, c’est-à-dire à l’horizon 2040, voire au-delà, à équilibrer le système électrique en produisant de l’électricité au moyen d’une pile à combustible à partir de l’hydrogène stocké. Concrètement, cela revient à stocker l’hydrogène qui est fabriqué à partir d’énergies renouvelables, puis à le transformer en électricité. La start-up française Hydrogène de France (HDF Energy) mène un projet en ce sens ; une expérimentation est même prévue en Guyane dans les mois qui viennent.

Il serait également possible de réutiliser les centrales à gaz naturel à cycle combiné. Pour ce faire, il faudrait plutôt regarder la stratégie allemande de réemploi des centrales à gaz. Mais, comme vous le savez, notre système dépend moins du gaz que celui de nos voisins…

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Montaugé

Dans la politique énergétique nationale, l’hydrogène est avant tout considéré comme un moyen de décarbonation de l’énergie de filières industrielles particulières, que vous avez d’ailleurs évoquées, monsieur le ministre.

Pour autant, on parle peu des solutions que l’hydrogène devra apporter pour permettre le bon fonctionnement de l’ensemble du parc national de production d’électricité.

Plus précisément, dans la perspective de scenarii à forte proportion d’énergies renouvelables (EnR) intermittentes, la production et le stockage d’hydrogène contribueront à la flexibilité du réseau et à l’équilibre entre production et demande du système électrique.

Dit autrement, plus la part d’énergies renouvelables dans le mix énergétique sera importante, plus nous aurons besoin de faire appel à la fonction particulière de stockage de l’hydrogène.

La compétitivité des énergies renouvelables sera aussi fonction de la contribution de l’hydrogène à la flexibilité et à l’équilibre du réseau en situation de moindre disponibilité des énergies renouvelables. Toutefois, cette contribution à la flexibilité du réseau nécessite des infrastructures de stockage et de transport d’hydrogène importantes.

Pour y parvenir, il est indispensable d’intégrer au mix énergétique et au réseau d’énergie électrique national un système hydrogène composé d’électrolyseurs, de stockages d’hydrogène, de points d’avitaillement, de centrales thermiques à hydrogène, de réseaux de transport, voire d’interconnexions avec les pays limitrophes.

En définitive, la nature et l’ampleur du système hydrogène qui serait intégré à la régulation du réseau électrique national conduiraient à plus ou moins de flexibilité. Un tel choix politique – c’en est un ! – aura des conséquences sur les niveaux d’énergies renouvelables dans le mix et donc sur la PPE.

Monsieur le ministre, quelle est la doctrine du Gouvernement en matière de gestion de la flexibilité du futur réseau électrique national ? Quel type de système hydrogène entendez-vous développer en matière de flexibilité ? Où en êtes-vous de la planification des investissements nécessaires ? Comment et sur quels acteurs les coûts de ces investissements seront-ils répercutés ?

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Madame la sénatrice, vous l'avez dit, l'hydrogène a des avantages indéniables.

Je voudrais comparer quelques chiffres pour illustrer votre propos relatif à l'autonomie des véhicules. Par exemple, avec 5 kilogrammes d'hydrogène, stockés dans un réservoir de 125 litres, qui pèse environ 130 kilogrammes, auxquels il faut ajouter les quelque 100 kilogrammes de la pile à combustible, soit environ 235 kilogrammes de matériel embarqué, l'autonomie du véhicule à hydrogène est équivalente à celle d'une batterie de 500 kilogrammes. Ainsi, pour les gros véhicules, pour les trains et pour les véhicules de transport collectif, il est clair que l'hydrogène présente un avantage comparatif indéniable.

Madame la sénatrice, vous avez également rappelé quels sont ses petits défauts : le coût élevé des composants liés à la productionde l'hydrogène et le rendement total de la chaîne hydrogène, qui s'élève à environ un tiers de celui de la batterie. Ainsi, pour les véhicules individuels, le compte n'y est pas !

Pour les véhicules utilitaires légers – je réponds ainsi à la question qui m'a été posée précédemment –, oui, cela existe ; il existe des projets très avancés en matière de logistique urbaine, développés notamment par Stellantis.

Par ailleurs, la production d'hydrogène offshore est au stade de la recherche et développement, que nous finançons, afin de profiter, si c'est possible, d'hydrogène moins cher dans le futur. Nous n'y sommes pas encore, mais nous investissons dans ce sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Béatrice Gosselin

Mes chers collègues, à condition qu'il soit produit par des moyens ne conduisant pas à des émissions significatives de carbone, l'hydrogène présente l'intérêt d'être, d'une part, un vecteur énergétique de choix pour certaines industries ou pour la mobilité lourde et, d'autre part, un outil de flexibilité du mix électrique qui aide à décarboner des secteurs difficiles à électrifier.

Comme énergie, l'hydrogène bas-carbone est applicable au secteur de la mobilité – transport collectif de personnes et transport de marchandises –, là où les solutions à base de batterie sont plus difficiles à mettre en œuvre ou soulèvent des enjeux majeurs.

Utilisé dans une pile à combustible, il présente l'avantage de ne rejeter que de l'eau, ce qui permet d'éliminer les émissions de particules, de soufre, d'oxyde d'azote et de contribuer à l'amélioration de la qualité de l'air.

En période de surproduction électrique, l'électricité peut être stockée, mais aussi utilisée pour produire de l'hydrogène facilement stockable.

L'hydrogène renouvelable, produit par l'électrolyse de l'eau, n'est certes pas polluant, mais coûte beaucoup plus cher à produire. Son déploiement passera par la baisse du coût de production de l'électricité renouvelable – solaire et éolien –, et par celle du coût des électrolyseurs ou des piles à combustible.

Pour autant, c'est bien l'électrolyse de l'eau qui représente le futur du développement de la filière hydrogène. Le projet Sealhyfe en Vendée, plateforme en mer raccordée à une éolienne flottante, s'avère être une perspective intéressante pour la production d'hydrogène renouvelable. En effet, après désalinisation de l'eau de mer, l'hydrogène sera produit par électrolyse et acheminé sur terre via un réseau de pipelines.

Mais le défi immédiat, pour accompagner la production par électrolyse d'hydrogène propre, consiste à assurer un approvisionnement suffisant en électricité décarbonée.

Aussi, monsieur le ministre, pour atteindre les objectifs de décarbonation fixés par la Commission européenne en 2030, l'hydrogène bas-carbone produit à partir d'électricité nucléaire sera-t-il reconnu comme indispensable, à l'instar de l'hydrogène renouvelable ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin.

Debut de section - PermalienPhoto de Sabine Drexler

Monsieur le ministre, dans le Haut-Rhin, le complexe chimique Alsachimie regroupe trois entreprises sur une plateforme fabriquant entre autres du nylon, de l'ammoniac et des engrais. Ce complexe utilise près de 75 000 tonnes d'hydrogène par an produit, pour l'instant, à partir de gaz, ce qui est très émetteur de CO2.

Pour passer à l'hydrogène vert, il faudrait un électrolyseur d'une capacité de 500 mégawatts, sachant que la plateforme chimique pourrait utiliser la chaleur fatale de ce dernier.

Cet avantage en matière d'optimisation énergétique pourrait conduire à une augmentation de 100 mégawatts de capacité pour fournir de l'hydrogène décarboné pour le transport, par exemple. Mais avec la forte variation du coût du gaz en Europe, nettement plus cher que le gaz américain ou russe, ces entreprises ont dû réduire leur production, faute de pouvoir exporter.

L'une d'entre elles, Butachimie, ne tourne plus qu'à 30 % de sa capacité. Dans ce modèle économique intégré, si l'une d'entre elles venait à cesser son activité, cela entraînerait de sérieuses difficultés pour les deux autres.

Le Gouvernement veut passer à l'hydrogène vert, produit par électrolyse. Toutefois, avec l'explosion des prix de l'énergie, cela semble très mal engagé. Les aides plafonnées à 4 millions d'euros ne sont pas suffisantes pour des entreprises de cette taille, car une différence de 1 euro sur le prix du kilogramme d'hydrogène représente une perte de 75 millions d'euros.

Il faut absolument revoir notre modèle de soutien à cette industrie, afin de pérenniser les installations actuelles et leur donner de la visibilité. À défaut, sur ce seul site, plus de 2 000 emplois directs et autant d'emplois indirects risqueraient de disparaître, s'ajoutant ainsi aux 2 000 emplois qui ont été récemment perdus à la suite de la fermeture de la centrale de Fessenheim.

Monsieur le ministre, que compte faire le Gouvernement pour soutenir cette industrie et les investissements qu'elle va devoir engager pour passer à l'hydrogène vert ? Quelles actions vont être mises en œuvre pour soutenir ce complexe chimique, afin d'empêcher un nouveau désastre économique ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Monsieur le sénateur, c’est une bonne question, car l’hydrogène, vous l’avez dit, peut être stocké en grande quantité dans des cavités salines.

C’est un avantage énorme, que n’ont pas les énergies renouvelables, et qui a été démontré par la réutilisation d’anciennes cavités stockant du gaz naturel aux États-Unis et en Angleterre. Or de telles cavités existent en France, notamment autour de Manosque ; la possibilité d’en construire de nouvelles, dans plusieurs géologies favorables, est également à l’étude. Les installations de Manosque pourraient stocker jusqu’à 30 kilotonnes d’hydrogène à court terme, c’est-à-dire des quantités importantes.

Le stockage de l’hydrogène permet d’en abaisser le coût, d’arbitrer sur le choix des horaires de production de l’hydrogène électrolytique et d’optimiser le prix de l’électricité, qui représente 70 % du coût de l’hydrogène.

Cela pourrait aussi aider, à plus long terme, c’est-à-dire à l’horizon 2040, voire au-delà, à équilibrer le système électrique en produisant de l’électricité au moyen d’une pile à combustible à partir de l’hydrogène stocké. Concrètement, cela revient à stocker l’hydrogène qui est fabriqué à partir d’énergies renouvelables, puis à le transformer en électricité. La start-up française Hydrogène de France (HDF Energy) mène un projet en ce sens ; une expérimentation est même prévue en Guyane dans les mois qui viennent.

Il serait également possible de réutiliser les centrales à gaz naturel à cycle combiné. Pour ce faire, il faudrait plutôt regarder la stratégie allemande de réemploi des centrales à gaz. Mais, comme vous le savez, notre système dépend moins du gaz que celui de nos voisins…

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Madame la sénatrice, vous l'avez dit, l'hydrogène a des avantages indéniables.

Je voudrais comparer quelques chiffres pour illustrer votre propos relatif à l'autonomie des véhicules. Par exemple, avec 5 kilogrammes d'hydrogène, stockés dans un réservoir de 125 litres, qui pèse environ 130 kilogrammes, auxquels il faut ajouter les quelque 100 kilogrammes de la pile à combustible, soit environ 235 kilogrammes de matériel embarqué, l'autonomie du véhicule à hydrogène est équivalente à celle d'une batterie de 500 kilogrammes. Ainsi, pour les gros véhicules, pour les trains et pour les véhicules de transport collectif, il est clair que l'hydrogène présente un avantage comparatif indéniable.

Madame la sénatrice, vous avez également rappelé quels sont ses petits défauts : le coût élevé des composants liés à la productionde l'hydrogène et le rendement total de la chaîne hydrogène, qui s'élève à environ un tiers de celui de la batterie. Ainsi, pour les véhicules individuels, le compte n'y est pas !

Pour les véhicules utilitaires légers – je réponds ainsi à la question qui m'a été posée précédemment –, oui, cela existe ; il y a des projets très avancés en matière de logistique urbaine, développés notamment par Stellantis.

Par ailleurs, la production d'hydrogène offshore est au stade de la recherche et développement, que nous finançons, afin de profiter, si c'est possible, d'hydrogène moins cher dans le futur. Nous n'y sommes pas encore, mais nous investissons dans ce sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Béatrice Gosselin

Mes chers collègues, à condition qu’il soit produit par des moyens ne conduisant pas à des émissions significatives de carbone, l’hydrogène présente l’intérêt d’être, d’une part, un vecteur énergétique de choix pour certaines industries ou pour la mobilité lourde et, d’autre part, un outil de flexibilité du mix électrique qui aide à décarboner des secteurs difficiles à électrifier.

Comme énergie, l’hydrogène bas-carbone est applicable au secteur de la mobilité – transport collectif de personnes et transport de marchandises –, là où les solutions à base de batterie sont plus difficiles à mettre en œuvre ou soulèvent des enjeux majeurs.

Utilisé dans une pile à combustible, il présente l’avantage de ne rejeter que de l’eau, ce qui permet d’éliminer les émissions de particules, de soufre, d’oxyde d’azote et de contribuer à l’amélioration de la qualité de l’air.

En période de surproduction électrique, l’électricité peut être stockée, mais aussi utilisée pour produire de l’hydrogène facilement stockable.

L’hydrogène renouvelable, produit par l’électrolyse de l’eau, n’est certes pas polluant, mais coûte beaucoup plus cher à produire. Son déploiement passera par la baisse du coût de production de l’électricité renouvelable – solaire et éolien –, et par celle du coût des électrolyseurs ou des piles à combustible.

Pour autant, c’est bien l’électrolyse de l’eau qui représente le futur du développement de la filière hydrogène. Le projet Sealhyfe en Vendée, plateforme en mer raccordée à une éolienne flottante, s’avère être une perspective intéressante pour la production d’hydrogène renouvelable. En effet, après désalinisation de l’eau de mer, l’hydrogène sera produit par électrolyse et acheminé sur terre via un réseau de pipelines.

Mais le défi immédiat, pour accompagner la production par électrolyse d’hydrogène propre, consiste à assurer un approvisionnement suffisant en électricité décarbonée.

Aussi, monsieur le ministre, pour atteindre les objectifs de décarbonation fixés par la Commission européenne en 2030, l’hydrogène bas-carbone produit à partir d’électricité nucléaire sera-t-il reconnu comme indispensable, à l’instar de l’hydrogène renouvelable ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Madame la sénatrice, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec les dirigeants de ces deux sociétés sœurs, si je puis dire, en ce qu'elles sont toutes deux membres d'un grand groupe allemand.

Voilà quelques mois, les prix de l'énergie étaient bien plus élevés qu'ils ne le sont actuellement, ce qui a conduit ces entreprises à réduire leur production de façon marginale – mais non négligeable ! – et à modifier légèrement leurs sources d'approvisionnement.

Aujourd'hui, ces entreprises vont mieux, en tout cas moins mal, et la baisse des prix de l'énergie n'y est pas pour rien !

La façon dont les prix de l'intrant et de l'extrant sont fixés rend difficile l'accès de ces entreprises aux aides européennes, car elles vendent essentiellement leurs produits à leur maison mère. Malheureusement, les règles européennes sont telles que nous ne sommes pas en mesure de verser plus que les 4 millions d'euros que vous avez mentionnés.

Pour autant, je pense que ces entreprises vont mieux – j'espère qu'elles vous le confirmeront, madame la sénatrice –, du fait de la baisse des prix de l'énergie.

Faut-il pour autant les abandonner ? Non, au contraire ! Elles ont évidemment des projets extrêmement ambitieux, vous l'avez rappelé, pour passer à l'hydrogène. L'entreprise de Borealis mène à Ottmarsheim – ce n'est pas loin de chez vous, me semble-t-il, madame la sénatrice – un projet similaire, qui prévoit la création de quelque 200 emplois, et pour lequel nous sommes à la manœuvre.

Nous avons déjà notifié à la Commission européenne une aide de 100 millions d'euros, qui permettrait d'installer un électrolyseur de 50 mégawatts pour décarboner le site chimique avec un procédé d'ammoniac.

Le projet auquel vous faites référence est d'une plus grande ampleur. Il aura, vous l'avez dit également, un impact économique et social plus important pour la région. Nous sommes prêts à l'aider, de la même manière que nous aidons celui de son voisin.

Nous travaillons avec les entreprises en question pour nous assurer qu'elles seront bien accompagnées dans leurs efforts de décarbonation.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Mme Sabine Drexler marque son approbation.

Applaudissements sur les travées d u groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Madame la sénatrice, vous l’avez dit, l’hydrogène a des avantages indéniables.

Je voudrais comparer quelques chiffres pour illustrer votre propos relatif à l’autonomie des véhicules. Par exemple, avec 5 kilogrammes d’hydrogène, stockés dans un réservoir de 125 litres, qui pèse environ 130 kilogrammes, auxquels il faut ajouter les quelque 100 kilogrammes de la pile à combustible, soit environ 235 kilogrammes de matériel embarqué, l’autonomie du véhicule à hydrogène est équivalente à celle d’une batterie de 500 kilogrammes. Ainsi, pour les gros véhicules, pour les trains et pour les véhicules de transport collectif, il est clair que l’hydrogène présente un avantage comparatif indéniable.

Madame la sénatrice, vous avez également rappelé quels sont ses petits défauts : le coût élevé des composants liés à la production de l’hydrogène et le rendement total de la chaîne hydrogène, qui s’élève à environ un tiers de celui de la batterie. Ainsi, pour les véhicules individuels, le compte n’y est pas !

Pour les véhicules utilitaires légers – je réponds ainsi à la question qui m’a été posée précédemment –, oui, cela existe ; il y a des projets très avancés en matière de logistique urbaine, développés notamment par Stellantis.

Par ailleurs, la production d’hydrogène offshore est au stade de la recherche et développement, que nous finançons, afin de profiter, si c’est possible, d’hydrogène moins cher dans le futur. Nous n’y sommes pas encore, mais nous investissons dans ce sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Béatrice Gosselin

Mes chers collègues, à condition qu’il soit produit par des moyens ne conduisant pas à des émissions significatives de carbone, l’hydrogène présente l’intérêt d’être, d’une part, un vecteur énergétique de choix pour certaines industries ou pour la mobilité lourde et, d’autre part, un outil de flexibilité du mix électrique qui aide à décarboner des secteurs difficiles à électrifier.

Comme énergie, l’hydrogène bas-carbone est applicable au secteur de la mobilité – transport collectif de personnes et transport de marchandises –, là où les solutions à base de batterie sont plus difficiles à mettre en œuvre ou soulèvent des enjeux majeurs.

Utilisé dans une pile à combustible, il présente l’avantage de ne rejeter que de l’eau, ce qui permet d’éliminer les émissions de particules, de soufre, d’oxyde d’azote et de contribuer à l’amélioration de la qualité de l’air.

En période de surproduction électrique, l’électricité peut être stockée, mais aussi utilisée pour produire de l’hydrogène facilement stockable.

L’hydrogène renouvelable, produit par l’électrolyse de l’eau, certes n’est pas polluant, mais coûte beaucoup plus cher à produire. Son déploiement passera par la baisse du coût de production de l’électricité renouvelable – solaire et éolien –, et par celle du coût des électrolyseurs ou des piles à combustible.

Pour autant, c’est bien l’électrolyse de l’eau qui représente l’avenir du développement de la filière hydrogène. Le projet Sealhyfe en Vendée, plateforme en mer raccordée à une éolienne flottante, s’avère être une perspective intéressante pour la production d’hydrogène renouvelable. En effet, après désalinisation de l’eau de mer, l’hydrogène sera produit par électrolyse et acheminé sur terre via un réseau de pipelines.

Mais le défi immédiat, pour accompagner la production par électrolyse d’hydrogène propre, consiste à assurer un approvisionnement suffisant en électricité décarbonée.

Aussi, monsieur le ministre, pour atteindre les objectifs de décarbonation fixés par la Commission européenne en 2030, l’hydrogène bas-carbone produit à partir d’électricité nucléaire sera-t-il reconnu comme indispensable, à l’instar de l’hydrogène renouvelable ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Calvet

Monsieur le ministre, dans le cadre du plan d'investissement France 2030, le Gouvernement a annoncé une accélération de la stratégie nationale pour le développement de l'hydrogène décarboné, lancée en 2020.

Je m'étonne qu'il n'y soit question que d'hydrogène issu de l'électrolyse de l'eau et que l'on ne trouve rien sur l'hydrogène naturel ! On saut pourtant, depuis la découverte fortuite, voilà presque dix ans, d'un puits d'hydrogène presque pur au Mali, qu'il existe de nombreuses sources d'hydrogène naturel un peu partout dans le monde.

Aussi, l'hydrogène constitue une source d'énergie primaire à extraire du sous-sol. Le mouvement est maintenant lancé : en Australie du Sud, quelque trente-cinq permis d'exploration ont été déposés.

La France possède sur son territoire, notamment dans les Pyrénées, des poches d'hydrogène qui intéressent beaucoup les sociétés de prospection. L'une d'entre elles a déposé une demande de prospection exclusive sur un périmètre de 226 kilomètres carrés dans les Pyrénées-Atlantiques. Si le projet aboutit, un chantier de production d'hydrogène comme source d'énergie primaire décarbonée et disponible en permanence sera lancé avec un coût de production de moins de 1 euro le kilo.

La France ne peut ignorer cet énorme potentiel !

Je souhaite donc savoir si le Gouvernement compte accompagner le mouvement en encourageant et en encadrant les opérations de prospection et d'exploitation, qui vont se multiplier, notamment dans les Pyrénées-Orientales, puisque la présence d'hydrogène et de failles en profondeur a été confirmée dans l'ensemble du massif pyrénéen.

Debut de section - PermalienPhoto de Sabine Drexler

Monsieur le ministre, dans le Haut-Rhin, le complexe chimique Alsachimie regroupe trois entreprises sur une plateforme fabriquant entre autres du nylon, de l'ammoniac et des engrais. Ce complexe utilise près de 75 000 tonnes d'hydrogène par an produit, pour l'instant, à partir de gaz, ce qui est très émetteur de CO2.

Pour passer à l'hydrogène vert, il faudrait un électrolyseur d'une capacité de 500 mégawatts, sachant que la plateforme chimique pourrait utiliser la chaleur fatale de ce dernier.

Cet avantage en matière d'optimisation énergétique pourrait conduire à une augmentation de 100 mégawatts de capacité pour fournir de l'hydrogène décarboné pour le transport, par exemple. Mais avec la forte variation du coût du gaz en Europe, nettement plus cher que le gaz américain ou russe, ces entreprises ont dû réduire leur production, faute de pouvoir exporter.

Butachimie, par exemple, ne tourne plus qu'à 30 % de sa capacité. Dans ce modèle économique intégré, si l'une de ces entreprises venait à cesser son activité, cela entraînerait de sérieuses difficultés pour les deux autres.

Le Gouvernement veut passer à l'hydrogène vert, produit par électrolyse. Toutefois, avec l'explosion des prix de l'énergie, cela semble très mal engagé. Les aides plafonnées à 4 millions d'euros ne sont pas suffisantes pour des entreprises de cette taille, car une différence de 1 euro sur le prix du kilogramme d'hydrogène représente in fine une perte de 75 millions d'euros.

Il faut absolument revoir notre modèle de soutien à cette industrie, afin de pérenniser les installations actuelles et leur donner de la visibilité. À défaut, sur ce seul site, plus de 2 000 emplois directs et autant d'emplois indirects risqueraient de disparaître, qui s'ajouteraient ainsi aux 2 000 emplois récemment perdus à la suite de la fermeture de la centrale de Fessenheim.

Monsieur le ministre, que compte faire le Gouvernement pour soutenir cette industrie et les investissements qu'elle va devoir engager pour passer à l'hydrogène vert ? Quelles actions vont être mises en œuvre pour soutenir ce complexe chimique, afin d'empêcher un nouveau désastre économique ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Madame la sénatrice, vous l’avez dit, l’hydrogène a des avantages indéniables.

Je voudrais comparer quelques chiffres pour illustrer votre propos relatif à l’autonomie des véhicules. Par exemple, avec 5 kilogrammes d’hydrogène, stockés dans un réservoir de 125 litres, qui pèse environ 130 kilogrammes, auxquels il faut ajouter les quelque 100 kilogrammes de la pile à combustible, soit environ 235 kilogrammes de matériel embarqué, l’autonomie du véhicule à hydrogène est équivalente à celle d’une batterie de 500 kilogrammes. Ainsi, pour les gros véhicules, pour les trains et pour les véhicules de transport collectif, il est clair que l’hydrogène présente un avantage comparatif indéniable.

Madame la sénatrice, vous avez également rappelé quels sont ses petits défauts : le coût élevé des composants liés à la production de l’hydrogène et le rendement total de la chaîne hydrogène, qui s’élève à environ un tiers de celui de la batterie. Ainsi, pour les véhicules individuels, le compte n’y est pas !

Pour les véhicules utilitaires légers – je réponds ainsi à la question qui m’a été posée précédemment –, oui, cela existe ; il y a des projets très avancés en matière de logistique urbaine, développés notamment par Stellantis.

Par ailleurs, la production d’hydrogène offshore est au stade de la recherche et développement, que nous finançons, afin de profiter, si c’est possible, d’hydrogène moins cher à l’avenir. Nous n’y sommes pas encore, mais nous investissons dans ce sens.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, qui me permet de compléter ma réponse à la précédente. Celle-ci portait sur notre capacité collective à chercher l'hydrogène là où il pourrait se trouver, plutôt que de le produire, ce qui soulève les enjeux du coût des technologies et de la rentabilité, qui ont déjà été évoqués.

Je pense que vous faites référence au projet dit « Sauve Terre H2 », situé dans les Pyrénées-Atlantiques, c'est-à-dire de l'autre côté des Pyrénées-Orientales. Le dossier est en cours d'instruction par les services miniers.

Il s'agit d'une surface – importante – de 226 kilomètres carrés. Il serait nécessaire de creuser profondément, jusqu'à 6 000 mètres, pour extraire l'hydrogène, mais pour un coût, selon les premières estimations, de 1 euro le kilo, ce qui serait extrêmement compétitif par rapport aux autres sources d'hydrogène que nous avons étudiées ensemble aujourd'hui.

L'État doit déterminer, selon le code minier, à l'occasion de cette instruction, l'ampleur potentielle du gisement, les fondamentaux économiques, notamment la solidité financière du porteur de projet, et les bénéfices énergétiques réels, tout comme les éventuels impacts environnementaux de cette extraction.

De telles perspectives nous intéressent fortement, car elles nous permettraient de disposer d'hydrogène peu cher et clairement souverain. Quelques obstacles doivent encore être levés dans le cadre de l'instruction du dossier, monsieur le sénateur, ce que vous comprendrez aisément.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Madame la sénatrice, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec les dirigeants de ces deux sociétés sœurs, si je puis dire, en ce qu'elles sont toutes deux membres d'un grand groupe allemand.

Voilà quelques mois, les prix de l'énergie étaient bien plus élevés qu'ils ne le sont actuellement, ce qui a conduit ces entreprises à réduire leur production de façon marginale, mais non négligeable, et à modifier légèrement leurs sources d'approvisionnement.

Aujourd'hui, ces entreprises vont mieux, en tout cas moins mal, et la baisse des prix de l'énergie n'y est pas pour rien.

La façon dont les prix de l'intrant et de l'extrant sont fixés rend difficile l'accès de ces entreprises aux aides européennes, car elles vendent essentiellement leurs produits à leur maison mère. Malheureusement, les règles européennes sont telles que nous ne sommes pas en mesure de verser davantage que les 4 millions d'euros que vous avez mentionnés.

Pour autant, je pense que ces entreprises vont mieux – j'espère qu'elles vous le confirmeront, madame la sénatrice –, du fait de la baisse des prix de l'énergie.

Faut-il pour autant les abandonner ? Non, au contraire ! Elles ont évidemment des projets extrêmement ambitieux, vous l'avez rappelé, pour passer à l'hydrogène. L'entreprise de Borealis mène à Ottmarsheim – ce n'est pas loin de chez vous, me semble-t-il, madame la sénatrice – un projet similaire, qui prévoit la création de quelque 200 emplois, et pour lequel nous sommes à la manœuvre.

Nous avons déjà notifié à la Commission européenne une aide de 100 millions d'euros, qui permettrait d'installer un électrolyseur de 50 mégawatts pour décarboner le site chimique avec un procédé d'ammoniac.

Le projet auquel vous faites référence est d'une plus grande ampleur. Il aura, vous l'avez dit également, un impact économique et social plus important pour la région. Nous sommes prêts à l'aider, de la même manière que nous aidons celui de son voisin.

Nous travaillons avec les entreprises en question pour nous assurer qu'elles seront bien accompagnées dans leurs efforts de décarbonation.

Debut de section - PermalienPhoto de Sabine Drexler

Monsieur le ministre, dans le Haut-Rhin, le complexe chimique Alsachimie regroupe trois entreprises sur une plateforme fabriquant entre autres du nylon, de l’ammoniac et des engrais. Ce complexe utilise près de 75 000 tonnes d’hydrogène par an produit, pour l’instant, à partir de gaz, ce qui est très émetteur de CO2.

Pour passer à l’hydrogène vert, il faudrait un électrolyseur d’une capacité de 500 mégawatts, sachant que la plateforme chimique pourrait utiliser la chaleur fatale de ce dernier.

Cet avantage en matière d’optimisation énergétique pourrait conduire à une augmentation de 100 mégawatts de capacité pour fournir de l’hydrogène décarboné pour le transport, par exemple. Mais avec la forte variation du coût du gaz en Europe, nettement plus cher que le gaz américain ou russe, ces entreprises ont dû réduire leur production, faute de pouvoir exporter.

Butachimie, par exemple, ne tourne plus qu’à 30 % de sa capacité. Dans ce modèle économique intégré, si l’une de ces entreprises venait à cesser son activité, cela entraînerait de sérieuses difficultés pour les deux autres.

Le Gouvernement veut passer à l’hydrogène vert, produit par électrolyse. Toutefois, avec l’explosion des prix de l’énergie, cela semble très mal engagé. Les aides plafonnées à 4 millions d’euros ne sont pas suffisantes pour des entreprises de cette taille, car une différence de 1 euro sur le prix du kilogramme d’hydrogène représente in fine une perte de 75 millions d’euros.

Il faut absolument revoir notre modèle de soutien à cette industrie, afin de pérenniser les installations actuelles et leur donner de la visibilité. À défaut, sur ce seul site, plus de 2 000 emplois directs et autant d’emplois indirects risqueraient de disparaître, qui s’ajouteraient ainsi aux 2 000 emplois récemment perdus à la suite de la fermeture de la centrale de Fessenheim.

Monsieur le ministre, que compte faire le Gouvernement pour soutenir cette industrie et les investissements qu’elle va devoir engager pour passer à l’hydrogène vert ? Quelles actions vont être mises en œuvre pour soutenir ce complexe chimique, afin d’empêcher un nouveau désastre économique ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Photo de Roger Karoutchi

M. le président. En conclusion de ce débat, la parole est à M. Stéphane Piednoir, pour le groupe auteur de la demande.

Photo de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. François Calvet.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Madame la sénatrice, j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec les dirigeants de ces deux sociétés sœurs, si je puis dire, en ce qu’elles sont toutes deux membres d’un grand groupe allemand.

Voilà quelques mois, les prix de l’énergie étaient bien plus élevés qu’ils ne le sont actuellement, ce qui a conduit ces entreprises à réduire leur production de façon marginale, mais non négligeable, et à modifier légèrement leurs sources d’approvisionnement.

Aujourd’hui, ces entreprises vont mieux, en tout cas moins mal, et la baisse des prix de l’énergie n’y est pas pour rien.

La façon dont les prix de l’intrant et de l’extrant sont fixés rend difficile l’accès de ces entreprises aux aides européennes, car elles vendent essentiellement leurs produits à leur maison mère. Malheureusement, les règles européennes sont telles que nous ne sommes pas en mesure de verser davantage que les 4 millions d’euros que vous avez mentionnés.

Pour autant, je pense que ces entreprises vont mieux – j’espère qu’elles vous le confirmeront, madame la sénatrice –, du fait de la baisse des prix de l’énergie.

Faut-il pour autant les abandonner ? Non, au contraire ! Elles ont évidemment des projets extrêmement ambitieux, vous l’avez rappelé, pour passer à l’hydrogène. L’entreprise de Borealis mène à Ottmarsheim – ce n’est pas loin de chez vous, me semble-t-il, madame la sénatrice – un projet similaire, qui prévoit la création de quelque 200 emplois, et pour lequel nous sommes à la manœuvre.

Nous avons déjà notifié à la Commission européenne une aide de 100 millions d’euros, qui permettrait d’installer un électrolyseur de 50 mégawatts pour décarboner le site chimique avec un procédé d’ammoniac.

Le projet auquel vous faites référence est d’une plus grande ampleur. Il aura, vous l’avez dit également, un impact économique et social plus important pour la région. Nous sommes prêts à l’aider, de la même manière que nous aidons celui de son voisin.

Nous travaillons avec les entreprises en question pour nous assurer qu’elles seront bien accompagnées dans leurs efforts de décarbonation.

Debut de section - PermalienPhoto de Sabine Drexler

Monsieur le ministre, dans le Haut-Rhin, le complexe chimique Alsachimie regroupe trois entreprises sur une plateforme fabriquant entre autres du nylon, de l’ammoniac et des engrais. Ce complexe utilise près de 75 000 tonnes d’hydrogène par an produit, pour l’instant, à partir de gaz, ce qui est très émetteur de CO2.

Pour passer à l’hydrogène vert, il faudrait un électrolyseur d’une capacité de 500 mégawatts, sachant que la plateforme chimique pourrait utiliser la chaleur fatale de ce dernier.

Cet avantage en matière d’optimisation énergétique pourrait conduire à une augmentation de 100 mégawatts de capacité pour fournir de l’hydrogène décarboné pour le transport, par exemple. Mais avec la forte variation du coût du gaz en Europe, nettement plus cher que le gaz américain ou russe, ces entreprises ont dû réduire leur production, faute de pouvoir exporter.

Butachimie, par exemple, ne tourne plus qu’à 30 % de sa capacité. Dans ce modèle économique intégré, si l’une de ces entreprises venait à cesser son activité, cela entraînerait de sérieuses difficultés pour les deux autres.

Le Gouvernement veut passer à l’hydrogène vert, produit par électrolyse. Toutefois, avec l’explosion des prix de l’énergie, cela semble très mal engagé. Les aides plafonnées à 4 millions d’euros ne sont pas suffisantes pour des entreprises de cette taille, car une différence de 1 euro sur le prix du kilogramme d’hydrogène représente in fine une perte de 75 millions d’euros.

Il faut absolument revoir notre modèle de soutien à cette industrie, afin de pérenniser les installations actuelles et leur donner de la visibilité. À défaut, sur ce seul site, plus de 2 000 emplois directs et autant d’emplois indirects risqueraient de disparaître, qui s’ajouteraient ainsi aux 2 000 emplois récemment perdus à la suite de la fermeture de la centrale de Fessenheim.

Monsieur le ministre, que compte faire le Gouvernement pour soutenir cette industrie et les investissements qu’elle va devoir engager pour passer à l’hydrogène vert ? Quelles actions vont être mises en œuvre pour soutenir ce complexe chimique, afin d’empêcher un nouveau désastre économique ?

Applaudissements sur les travé es du groupe Les Républicains.

Mme Sabine Drexler marque son approbation.

Photo de Stéphane Piednoir

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'adresse mes remerciements au groupe Les Républicains – on n'est jamais mieux servi que par soi-même – pour l'organisation de ce débat. Il nous a permis de nous poser les bonnes questions, si je puis dire, à propos de notre mix énergétique, en dehors de la pression législative qui parfois nuit à la sérénité des débats et à l'objectivité des prises de position.

Au travers des interventions de mes collègues, nous avons clairement perçu une orientation assez pragmatique. En effet, compte tenu de la faiblesse de nos ressources naturelles propres, nous devons diversifier nos modes de production d'énergie, tout en convergeant vers la sortie de notre dépendance aux énergies fossiles, condition indispensable à l'atteinte des objectifs de décarbonation, notamment dans les secteurs de l'industrie, du bâtiment et de la mobilité.

À ce titre, l'hydrogène est incontestablement un levier d'action. Toutefois, la singularité de ses caractéristiques se traduit par nombre de défis auxquels il nous faut répondre, sans perdre de vue qu'il n'y aura pas de « magie » hydrogène.

Le premier défi, c'est l'abondance de cet élément chimique, qui n'est toutefois pas accessible facilement. Les modes d'isolement de la molécule de dihydrogène ne sont en effet pas tous des plus vertueux !

Ainsi, la production de 1 million de tonnes d'hydrogène sur notre territoire, essentiellement par vaporeformage du méthane, engendre plus de 11 millions de tonnes de dioxyde de carbone. L'enjeu, bien identifié, est donc de parvenir à des modes de production neutres en CO2.

Tel est le deuxième défi auquel nous sommes confrontés : comment concilier les promesses intrinsèques de ce vecteur énergétique avec des réalités économiques et écologiques qui lui sont aujourd'hui encore assez défavorables ? Comme pour toute filière novatrice, les coûts de production de l'hydrogène bas-carbone, essentiellement par électrolyse de l'eau, sont encore élevés – jusqu'à 8 euros le kilogramme contre environ 2 euros pour un kilogramme d'hydrogène gris.

La marche est haute et l'équilibre ne pourra être atteint sans les aides publiques importantes à l'investissement, surtout si l'on veut doubler le volume produit d'ici à 2028 à hauteur de 20 % de la production globale.

Monsieur le ministre, le Gouvernement a bien identifié le sujet lors du précédent quinquennat. Néanmoins, plusieurs biais ont été soulignés dans ce débat.

D'abord, l'ambition : quand la France consacrait 100 millions d'euros pour sa stratégie hydrogène en 2018, le voisin allemand mettait déjà 7 milliards d'euros sur la table, en affichant son ambition de devenir le leader dans ce domaine. Certes, je vous l'accorde, conscient d'être à la traîne, le Gouvernement a rectifié le tir en 2020 en proposant un nouveau plan doté de financements plus importants, mais sans couvrir entièrement les enjeux de la filière.

Je rappelle que le coût d'un électrolyseur a été divisé par quatre en l'espace de dix ans. Ce simple constat permet de prendre conscience de l'évolution très rapide du secteur, qui va de pair avec l'amélioration des performances en matière de rendement, point crucial pour la rentabilité de la filière hydrogène.

Les technologies évoluent aussi, en particulier l'électrolyse à haute température, avec des rendements deux à trois fois supérieurs aux autres technologies. Cela mérite, me semble-t-il, un soutien fort à la recherche pour accélérer les brevets et les innovations dans ce domaine.

Ensuite, le stockage, point faible de l'électricité, est évidemment un axe important du développement de l'hydrogène. Les batteries issues de l'industrie automobile seront bientôt associées en série et nous disposerons également de gigafactories produisant des batteries XXL, capables de stocker les surplus de production avant leur transformation par électrolyse.

Il reste à identifier les sources de production. Nous en avons beaucoup parlé ; il devrait y avoir un consensus assez large en la matière.

Le surplus de production des énergies renouvelables intermittentes peut devenir intéressant s'il est associé à la production d'hydrogène, se trouvant ainsi à disposition lors des pics de consommation – tout le monde en convient.

(M. le ministre marque son étonnement.), certes élaborés avant la conversion au nucléaire du Président Macron, révélatrice d'un sacrifice industriel et commercial pour de basses œuvres politiciennes.

Photo de François Calvet

Monsieur le ministre, dans le cadre du plan d'investissement France 2030, le Gouvernement a annoncé une accélération de la stratégie nationale pour le développement de l'hydrogène décarboné, lancée en 2020.

Je m'étonne qu'il n'y soit question que de l'hydrogène issu de l'électrolyse de l'eau et que l'on ne trouve rien sur l'hydrogène naturel. On sait pourtant, depuis la découverte fortuite, voilà presque dix ans, d'un puits d'hydrogène presque pur au Mali, qu'il existe de nombreuses sources d'hydrogène naturel un peu partout dans le monde.

Aussi, l'hydrogène constitue une source d'énergie primaire à extraire du sous-sol. Le mouvement est maintenant lancé : en Australie du Sud, quelque trente-cinq permis d'exploration ont été déposés.

La France possède sur son territoire, notamment dans les Pyrénées, des poches d'hydrogène qui intéressent beaucoup les sociétés de prospection. L'une d'entre elles a déposé une demande de prospection exclusive sur un périmètre de 226 kilomètres carrés dans les Pyrénées-Atlantiques. Si le projet aboutit, un chantier de production d'hydrogène comme source d'énergie primaire décarbonée et disponible en permanence sera lancé avec un coût de production de moins de 1 euro le kilo. La France ne peut ignorer cet énorme potentiel !

Je souhaite donc savoir si le Gouvernement compte accompagner le mouvement en encourageant et en encadrant les opérations de prospection et d'exploitation, qui vont se multiplier, notamment dans les Pyrénées-Orientales, puisque la présence d'hydrogène et de failles en profondeur a été confirmée dans l'ensemble du massif pyrénéen.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. François Calvet.

Debut de section - Permalien
Roland Lescure

Madame la sénatrice, j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec les dirigeants de ces deux sociétés sœurs, si je puis dire, en ce qu’elles sont toutes deux membres d’un grand groupe allemand.

Voilà quelques mois, les prix de l’énergie étaient bien plus élevés qu’ils ne le sont actuellement, ce qui a conduit ces entreprises à réduire leur production de façon marginale, mais non négligeable, et à modifier légèrement leurs sources d’approvisionnement.

Aujourd’hui, ces entreprises vont mieux, en tout cas moins mal, et la baisse des prix de l’énergie n’y est pas pour rien.

La façon dont les prix de l’intrant et de l’extrant sont fixés rend difficile l’accès de ces entreprises aux aides européennes, car elles vendent essentiellement leurs produits à leur maison mère. Malheureusement, les règles européennes sont telles que nous ne sommes pas en mesure de verser davantage que les 4 millions d’euros que vous avez mentionnés.

Pour autant, je pense que ces entreprises vont mieux – j’espère qu’elles vous le confirmeront, madame la sénatrice –, du fait de la baisse des prix de l’énergie.

Faut-il pour autant les abandonner ? Non, au contraire ! Elles ont évidemment des projets extrêmement ambitieux, vous l’avez rappelé, pour passer à l’hydrogène. L’entreprise de Borealis mène à Ottmarsheim – ce n’est pas loin de chez vous, me semble-t-il, madame la sénatrice – un projet similaire, qui prévoit la création de quelque 200 emplois, et pour lequel nous sommes à la manœuvre.

Nous avons déjà notifié à la Commission européenne une aide de 100 millions d’euros, qui permettrait d’installer un électrolyseur de 50 mégawatts pour décarboner le site chimique avec un procédé d’ammoniac.

Le projet auquel vous faites référence est d’une plus grande ampleur. Il aura, vous l’avez dit également, un impact économique et social plus important pour la région. Nous sommes prêts à l’aider, de la même manière que nous aidons celui de son voisin.

Nous travaillons avec les entreprises en question pour nous assurer qu’elles seront bien accompagnées dans leurs efforts de décarbonation.

Photo de Roger Karoutchi

La parole est à M. le ministre délégué.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Mme Sabine Drexler marque son approbation.

Photo de Stéphane Piednoir

En revanche, et c'est très surprenant, le couplage au nucléaire est absent des intentions gouvernementales, à ce jour. On ne trouve aucun mot à ce sujet dans les différents plans hydrogène §

Il est temps d'en finir avec cette schizophrénie et de profiter d'un coût marginal très faible de l'électricité d'origine nucléaire pour approvisionner des électrolyseurs ad hoc. Les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, ainsi que la future programmation pluriannuelle de l'énergie, prévue pour cet été, vous en donneront l'occasion, monsieur le ministre.

Je terminerai par deux points de vigilance, qui n'ont pas été évoqués dans ce débat. Premièrement, la combinaison de l'hydrogène avec le dioxyde de carbone émis par certaines industries permettrait de produire du méthane de synthèse. Cette économie circulaire mériterait davantage d'attention et d'intentions, pour contribuer, au passage, au verdissement de la filière gaz.

Deuxièmement, les futurs réseaux de distribution doivent être construits en cohérence avec des schémas nationaux robustes et des emprises foncières intégrées dans une enveloppe nationale de l'objectif de « zéro artificialisation nette », par exemple. Mailler le territoire ne sera pas la plus anodine des politiques à mener, avant de structurer des partenariats puissants avec nos voisins européens.

Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, qui me permet de compléter ma réponse à la précédente. Celle-ci portait sur notre capacité collective à chercher l'hydrogène là où il pourrait se trouver, plutôt que de le produire, ce qui soulève les enjeux du coût des technologies et de la rentabilité, qui ont déjà été évoqués.

Je pense que vous faites référence au projet dit « Sauve Terre H2 », situé dans les Pyrénées-Atlantiques, c'est-à-dire de l'autre côté des Pyrénées-Orientales. Le dossier est en cours d'instruction par les services miniers.

Il s'agit d'une surface – importante – de 226 kilomètres carrés. Il serait nécessaire de creuser profondément, jusqu'à 6 000 mètres, pour extraire l'hydrogène, mais pour un coût, selon les premières estimations, de 1 euro le kilo, ce qui serait extrêmement compétitif par rapport aux autres sources d'hydrogène que nous avons évoquées aujourd'hui.

L'État doit déterminer, selon le code minier, à l'occasion de cette instruction, l'ampleur potentielle du gisement, les fondamentaux économiques, notamment la solidité financière du porteur de projet, les bénéfices énergétiques réels et les éventuels impacts environnementaux de cette extraction.

De telles perspectives nous intéressent fortement, car elles nous permettraient de disposer d'hydrogène peu cher et clairement souverain. Quelques obstacles doivent encore être levés dans le cadre de l'instruction du dossier, monsieur le sénateur, ce que vous comprendrez aisément.

Debut de section - PermalienPhoto de François Calvet

Monsieur le ministre, dans le cadre du plan d’investissement France 2030, le Gouvernement a annoncé une accélération de la stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné, lancée en 2020.

Je m’étonne qu’il n’y soit question que de l’hydrogène issu de l’électrolyse de l’eau et que l’on ne trouve rien sur l’hydrogène naturel. On sait pourtant, depuis la découverte fortuite, voilà presque dix ans, d’un puits d’hydrogène presque pur au Mali, qu’il existe de nombreuses sources d’hydrogène naturel un peu partout dans le monde.

Aussi, l’hydrogène constitue une source d’énergie primaire à extraire du sous-sol. Le mouvement est maintenant lancé : en Australie du Sud, quelque trente-cinq permis d’exploration ont été déposés.

La France possède sur son territoire, notamment dans les Pyrénées, des poches d’hydrogène qui intéressent beaucoup les sociétés de prospection. L’une d’entre elles a déposé une demande de prospection exclusive sur un périmètre de 226 kilomètres carrés dans les Pyrénées-Atlantiques. Si le projet aboutit, un chantier de production d’hydrogène comme source d’énergie primaire décarbonée et disponible en permanence sera lancé avec un coût de production de moins de 1 euro le kilo. La France ne peut ignorer cet énorme potentiel !

Je souhaite donc savoir si le Gouvernement compte accompagner le mouvement en encourageant et en encadrant les opérations de prospection et d’exploitation, qui vont se multiplier, notamment dans les Pyrénées-Orientales, puisque la présence d’hydrogène et de failles en profondeur a été confirmée dans l’ensemble du massif pyrénéen.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. François Calvet.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Photo de Roger Karoutchi

La parole est à M. le ministre délégué.

Photo de Roger Karoutchi

Nous en avons terminé avec le débat sur le thème : « Quelles solutions pour développer l'hydrogène au sein de notre mix énergétique ? ».

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. En conclusion de ce débat, la parole est à M. Stéphane Piednoir, pour le groupe auteur de la demande.

Roland Lescure

Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, qui me permet de compléter ma réponse à la précédente. Celle-ci portait sur notre capacité collective à chercher l’hydrogène là où il pourrait se trouver, plutôt que de le produire, ce qui soulève les enjeux du coût des technologies et de la rentabilité, qui ont déjà été évoqués.

Je pense que vous faites référence au projet dit « Sauve Terre H2 », situé dans les Pyrénées-Atlantiques, c’est-à-dire de l’autre côté des Pyrénées-Orientales. Le dossier est en cours d’instruction par les services miniers.

Il s’agit d’une surface – importante – de 226 kilomètres carrés. Il serait nécessaire de creuser profondément, jusqu’à 6 000 mètres, pour extraire l’hydrogène, mais pour un coût, selon les premières estimations, de 1 euro le kilo, ce qui serait extrêmement compétitif par rapport aux autres sources d’hydrogène que nous avons évoquées aujourd’hui.

L’État doit déterminer, selon le code minier, à l’occasion de cette instruction, l’ampleur potentielle du gisement, les fondamentaux économiques, notamment la solidité financière du porteur de projet, les bénéfices énergétiques réels et les éventuels impacts environnementaux de cette extraction.

De telles perspectives nous intéressent fortement, car elles nous permettraient de disposer d’hydrogène peu cher et clairement souverain. Quelques obstacles doivent encore être levés dans le cadre de l’instruction du dossier, monsieur le sénateur, ce que vous comprendrez aisément.

Debut de section - PermalienPhoto de François Calvet

Monsieur le ministre, dans le cadre du plan d’investissement France 2030, le Gouvernement a annoncé une accélération de la stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné, lancée en 2020.

Je m’étonne qu’il n’y soit question que de l’hydrogène issu de l’électrolyse de l’eau et que l’on ne trouve rien sur l’hydrogène naturel. On sait pourtant, depuis la découverte fortuite, voilà presque dix ans, d’un puits d’hydrogène presque pur au Mali, qu’il existe de nombreuses sources d’hydrogène naturel un peu partout dans le monde.

Aussi, l’hydrogène constitue une source d’énergie primaire à extraire du sous-sol. Le mouvement est maintenant lancé : en Australie du Sud, quelque trente-cinq permis d’exploration ont été déposés.

La France possède sur son territoire, notamment dans les Pyrénées, des poches d’hydrogène qui intéressent beaucoup les sociétés de prospection. L’une d’entre elles a déposé une demande de prospection exclusive sur un périmètre de 226 kilomètres carrés dans les Pyrénées-Atlantiques. Si le projet aboutit, un chantier de production d’hydrogène comme source d’énergie primaire décarbonée et disponible en permanence sera lancé avec un coût de production de moins de 1 euro le kilogramme. La France ne peut ignorer cet énorme potentiel !

Je souhaite donc savoir si le Gouvernement compte accompagner le mouvement en encourageant et en encadrant les opérations de prospection et d’exploitation, qui vont se multiplier, notamment dans les Pyrénées-Orientales, puisque la présence d’hydrogène et de failles en profondeur a été confirmée dans l’ensemble du massif pyrénéen.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Conclusion du débat

Photo de Roger Karoutchi

La parole est à M. le ministre délégué.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Piednoir

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'adresse mes remerciements au groupe Les Républicains – on n'est jamais mieux servi que par soi-même – pour l'organisation de ce débat. Il nous a permis de nous poser les bonnes questions, si je puis dire, à propos de notre mix énergétique, en dehors de la pression législative qui parfois nuit à la sérénité des débats et à l'objectivité des prises de position.

Au travers des interventions de mes collègues, nous avons clairement perçu une orientation assez pragmatique. En effet, compte tenu de la faiblesse de nos ressources naturelles propres, nous devons diversifier nos modes de production d'énergie tout en convergeant vers la sortie de notre dépendance aux énergies fossiles, condition indispensable à l'atteinte des objectifs de décarbonation, notamment dans les secteurs de l'industrie, du bâtiment et de la mobilité.

À ce titre, l'hydrogène est incontestablement un levier d'action. Toutefois, la singularité de ses caractéristiques se traduit par nombre de défis auxquels il nous faut répondre, sans perdre de vue qu'il n'y aura pas de « magie » hydrogène.

Le premier défi, c'est l'abondance de cet élément chimique, qui n'est toutefois pas accessible facilement. Les modes d'isolement de la molécule de dihydrogène ne sont en effet pas tous des plus vertueux.

Ainsi, la production de 1 million de tonnes d'hydrogène sur notre territoire, essentiellement par vaporeformage du méthane, engendre plus de 11 millions de tonnes de dioxyde de carbone. L'enjeu, bien identifié, est donc de parvenir à des modes de production neutres en CO2.

Tel est le deuxième défi auquel nous sommes confrontés : comment concilier les promesses intrinsèques de ce vecteur énergétique avec des réalités économiques et écologiques qui lui sont aujourd'hui encore assez défavorables ? Comme pour toute filière novatrice, les coûts de production de l'hydrogène bas-carbone, essentiellement par électrolyse de l'eau, sont encore élevés – jusqu'à 8 euros le kilogramme contre environ 2 euros pour l'hydrogène gris.

La marche est haute et l'équilibre ne pourra être atteint sans aides publiques importantes à l'investissement, surtout si l'on veut doubler le volume produit d'ici à 2028 à hauteur de 20 % de la production globale.

Monsieur le ministre, le Gouvernement a bien identifié le sujet lors du précédent quinquennat. Néanmoins, plusieurs biais ont été soulignés au cours de ce débat.

D'abord, l'ambition : quand la France consacrait 100 millions d'euros pour sa stratégie hydrogène en 2018, notre voisin allemand mettait déjà 7 milliards d'euros sur la table, en affichant son ambition de devenir le leader dans ce domaine. Certes, je vous l'accorde, conscient d'être à la traîne, le Gouvernement a rectifié le tir en 2020 en proposant un nouveau plan doté de financements plus importants, mais sans couvrir entièrement les enjeux de la filière.

Je rappelle que le coût d'un électrolyseur a été divisé par quatre en l'espace de dix ans. Ce simple constat permet de prendre conscience de l'évolution très rapide du secteur, qui va de pair avec l'amélioration des performances en matière de rendement, point crucial pour la rentabilité de la filière hydrogène.

Les technologies évoluent aussi, en particulier l'électrolyse à haute température, avec des rendements deux à trois fois supérieurs aux autres technologies. Cela mérite, me semble-t-il, un soutien fort à la recherche pour accélérer les brevets et les innovations dans ce domaine.

Ensuite, le stockage, point faible de l'électricité, est évidemment un axe important du développement de l'hydrogène. Les batteries issues de l'industrie automobile seront bientôt associées en série et nous disposerons également de gigafactories produisant des batteries XXL, capables de stocker les surplus de production avant leur transformation par électrolyse.

Il reste à identifier les sources de production. Nous en avons beaucoup parlé ; il devrait y avoir un consensus assez large en la matière.

Le surplus de production des énergies renouvelables intermittentes peut devenir intéressant s'il est associé à la production d'hydrogène, se trouvant ainsi à disposition lors des pics de consommation – tout le monde en convient.

(M. le ministre délégué s'étonne .), certes élaborés avant la conversion au nucléaire du Président Macron, révélatrice d'un sacrifice industriel et commercial pour de basses œuvres politiciennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. En conclusion de ce débat, la parole est à M. Stéphane Piednoir, pour le groupe auteur de la demande.

Roland Lescure

Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, qui me permet de compléter ma réponse à la précédente. Celle-ci portait sur notre capacité collective à chercher l’hydrogène là où il pourrait se trouver, plutôt que de le produire, ce qui soulève les enjeux du coût des technologies et de la rentabilité, qui ont déjà été évoqués.

Je pense que vous faites référence au projet dit Sauve Terre H2, situé dans les Pyrénées-Atlantiques, c’est-à-dire de l’autre côté des Pyrénées-Orientales. Le dossier est en cours d’instruction par les services miniers.

Il s’agit d’une surface – importante – de 226 kilomètres carrés. Il serait nécessaire de creuser profondément, jusqu’à 6 000 mètres, pour extraire l’hydrogène, mais pour un coût, selon les premières estimations, de 1 euro le kilogramme, ce qui serait extrêmement compétitif par rapport aux autres sources d’hydrogène que nous avons évoquées aujourd’hui.

L’État doit déterminer, selon le code minier, à l’occasion de cette instruction, l’ampleur potentielle du gisement, les fondamentaux économiques, notamment la solidité financière du porteur de projet, les bénéfices énergétiques réels et les éventuels impacts environnementaux de cette extraction.

De telles perspectives nous intéressent fortement, car elles nous permettraient de disposer d’hydrogène peu cher et clairement souverain. Quelques obstacles doivent encore être levés dans le cadre de l’instruction du dossier, monsieur le sénateur, ce que vous comprendrez aisément.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Conclusion du débat

Photo de Stéphane Piednoir

En revanche, et c'est très surprenant, le couplage au nucléaire est à ce jour absent des intentions gouvernementales. On ne trouve aucun mot à ce sujet dans les différents plans hydrogène §

Il est temps d'en finir avec cette schizophrénie et de profiter d'un coût marginal très faible de l'électricité d'origine nucléaire pour approvisionner des électrolyseurs ad hoc.

Les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, ainsi que la future programmation pluriannuelle de l'énergie, prévue pour cet été, vous en donneront l'occasion, monsieur le ministre.

Je terminerai par deux points de vigilance, qui n'ont pas été évoqués dans ce débat. Premièrement, la combinaison de l'hydrogène avec le dioxyde de carbone émis par certaines industries permettrait de produire du méthane de synthèse. Cette économie circulaire mériterait davantage d'attention et d'intentions, pour contribuer, au passage, au verdissement de la filière gaz.

Deuxièmement, les futurs réseaux de distribution doivent être construits en cohérence avec des schémas nationaux robustes et des emprises foncières intégrées dans une enveloppe nationale de l'objectif de « zéro artificialisation nette », par exemple. Mailler le territoire ne sera pas la plus anodine des politiques à mener, avant de structurer des partenariats puissants avec nos voisins européens.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Piednoir

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’adresse mes remerciements au groupe Les Républicains – on n’est jamais mieux servi que par soi-même – pour l’organisation de ce débat. Il nous a permis de nous poser les bonnes questions, si je puis dire, à propos de notre mix énergétique, en dehors de la pression législative qui parfois nuit à la sérénité des débats et à l’objectivité des prises de position.

Au travers des interventions de mes collègues, nous avons clairement perçu une orientation assez pragmatique. En effet, compte tenu de la faiblesse de nos ressources naturelles propres, nous devons diversifier nos modes de production d’énergie tout en convergeant vers la sortie de notre dépendance aux énergies fossiles, condition indispensable à l’atteinte des objectifs de décarbonation, notamment dans les secteurs de l’industrie, du bâtiment et de la mobilité.

À ce titre, l’hydrogène est incontestablement un levier d’action. Toutefois, la singularité de ses caractéristiques se traduit par nombre de défis auxquels il nous faut répondre, sans perdre de vue qu’il n’y aura pas de « magie » hydrogène.

Le premier défi, c’est l’abondance de cet élément chimique, qui n’est toutefois pas accessible facilement. Les modes d’isolement de la molécule de dihydrogène ne sont en effet pas tous des plus vertueux.

Ainsi, la production de 1 million de tonnes d’hydrogène sur notre territoire, essentiellement par vaporeformage du méthane, engendre plus de 11 millions de tonnes de dioxyde de carbone. L’enjeu, bien identifié, est donc de parvenir à des modes de production neutres en CO2.

Tel est le deuxième défi auquel nous sommes confrontés : comment concilier les promesses intrinsèques de ce vecteur énergétique avec des réalités économiques et écologiques qui lui sont aujourd’hui encore assez défavorables ? Comme pour toute filière novatrice, les coûts de production de l’hydrogène bas-carbone, essentiellement par électrolyse de l’eau, sont encore élevés – jusqu’à 8 euros le kilogramme contre environ 2 euros pour l’hydrogène gris.

La marche est haute et l’équilibre ne pourra être atteint sans aides publiques importantes à l’investissement, surtout si l’on veut doubler le volume produit d’ici à 2028 à hauteur de 20 % de la production globale.

Monsieur le ministre, le Gouvernement a bien identifié le sujet lors du précédent quinquennat. Néanmoins, plusieurs biais ont été soulignés au cours de ce débat.

D’abord, l’ambition : quand la France consacrait 100 millions d’euros pour sa stratégie hydrogène en 2018, notre voisin allemand mettait déjà 7 milliards d’euros sur la table, en affichant son ambition de devenir le leader dans ce domaine. Certes, je vous l’accorde, conscient d’être à la traîne, le Gouvernement a rectifié le tir en 2020 en proposant un nouveau plan doté de financements plus importants, mais sans couvrir entièrement les enjeux de la filière.

Je rappelle que le coût d’un électrolyseur a été divisé par quatre en l’espace de dix ans. Ce simple constat permet de prendre conscience de l’évolution très rapide du secteur, qui va de pair avec l’amélioration des performances en matière de rendement, point crucial pour la rentabilité de la filière hydrogène.

Les technologies évoluent aussi, en particulier l’électrolyse à haute température, avec des rendements deux à trois fois supérieurs aux autres technologies. Cela mérite, me semble-t-il, un soutien fort à la recherche pour accélérer les brevets et les innovations dans ce domaine.

Ensuite, le stockage, point faible de l’électricité, est évidemment un axe important du développement de l’hydrogène. Les batteries issues de l’industrie automobile seront bientôt associées en série et nous disposerons également de gigafactories produisant des batteries XXL, capables de stocker les surplus de production avant leur transformation par électrolyse.

Il reste à identifier les sources de production. Nous en avons beaucoup parlé ; il devrait y avoir un consensus assez large en la matière.

Le surplus de production des énergies renouvelables intermittentes peut devenir intéressant s’il est associé à la production d’hydrogène, se trouvant ainsi à disposition lors des pics de consommation – tout le monde en convient.

En revanche, et c’est très surprenant, le couplage au nucléaire est à ce jour absent des intentions gouvernementales. On ne trouve aucun mot à ce sujet dans les différents plans hydrogène

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. En conclusion de ce débat, la parole est à M. Stéphane Piednoir, pour le groupe auteur de la demande.

Photo de Roger Karoutchi

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à assurer la qualité et la pérennité des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, présentée par M. Patrick Chaize et plusieurs de ses collègues (proposition n° 795, texte de la commission n° 518, rapport n° 517).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Patrick Chaize, auteur de la proposition de loi.

M. le ministre délégué s ’ étonne.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Photo de Roger Karoutchi

Nous en avons terminé avec le débat sur le thème : « Quelles solutions pour développer l'hydrogène au sein de notre mix énergétique ? ».

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Piednoir

, certes élaborés avant la conversion au nucléaire du Président Macron, révélatrice d’un sacrifice industriel et commercial pour de basses œuvres politiciennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Piednoir

M. Stéphane Piednoir, pour le groupe Les Républicains. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’adresse mes remerciements au groupe Les Républicains – on n’est jamais mieux servi que par soi-même

Photo de Patrick Chaize

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis très heureux de vous retrouver aujourd'hui dans cet hémicycle pour examiner la proposition de loi visant à assurer la qualité et la pérennité des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, dont j'ai été à l'initiative, avec plus d'une centaine de mes collègues – 139 pour être exact –, de différents horizons politiques.

L'objet de ce texte est clair : répondre aux alertes, répétées depuis des années, relatives aux malfaçons et dégradations récurrentes, qui surviennent lors du raccordement de l'utilisateur final à la fibre optique.

Ces difficultés sont généralement attribuées à une mauvaise gestion du mode « sous-traitance opérateurs commerciaux » (Stoc), par lequel l'opérateur d'infrastructures, responsable du réseau, confie l'étape finale du déploiement aux opérateurs commerciaux. Or ces derniers ont eux-mêmes souvent recours à leurs propres sous-traitants.

Cette pratique, dérogatoire au mode principal de déploiement de la fibre, par lequel l'opérateur d'infrastructures assure le déploiement dans son intégralité, présente deux singularités. D'une part, elle est dépourvue de fondement législatif, puisqu'elle s'est développée sur la base de décisions de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep). D'autre part, elle semble entraver la liberté contractuelle et la liberté d'entreprendre, dès lors que la mise en œuvre du mode Stoc est considérée comme de droit par l'Arcep.

Le régulateur avait pourtant prévu un garde-fou en précisant que le recours automatique au mode Stoc ne serait valable qu'à la condition que les opérateurs commerciaux respectent strictement les règles de l'art.

Malheureusement, les désordres persistants sur l'ensemble du territoire démontrent à quel point ce principe demeure théorique.

Bien entendu, le tableau n'est pas entièrement noir. Le mode Stoc a été un élément clef du déploiement massif et rapide de la fibre sur notre territoire. Alors que nous figurions parmi les plus mauvais élèves de l'Union européenne avant 2013, plus de 18 millions de Français sont désormais raccordés à cette technologie.

Toutefois, ce succès ne doit pas être l'arbre qui cache la forêt. La situation actuelle n'est pas acceptable au regard des sommes engagées par l'État et les collectivités territoriales pour le déploiement de la fibre depuis 2013 dans le cadre du plan France Très Haut Débit ; elle l'est encore moins au regard des attentes des usagers quant à la qualité de la connexion, alors que les jours du réseau cuivre sont désormais comptés.

Le Gouvernement, l'Arcep et les opérateurs ont pris conscience du problème : dès 2019, un groupe de travail a été mis en place entre les opérateurs d'infrastructure (OI) et les opérateurs commerciaux (OC), aboutissant en 2020 à l'élaboration d'une feuille de route multilatérale pour l'amélioration de l'exploitation et de la qualité des réseaux fibre jusqu'à l'abonné (FttH, pour Fiber to the Home).

Cette feuille de route envisageait l'évolution des contrats Stoc selon quatre axes : un volet sous-traitance prévoyant une meilleure information de l'OC envers l'OI sur le recours à la sous-traitance et une limitation à deux du nombre de rangs de sous-traitants ; un volet qualité du réseau, incluant l'obligation de communiquer un compte rendu d'intervention (CRI) pour chaque raccordement ; un volet qualité de prestation, imposant aux opérateurs commerciaux de faire appel à des intervenants formés ; enfin, un volet sécurité, selon lequel l'OI doit s'assurer que chaque intervenant dispose des agréments nécessaires.

Alors que ces nouveaux contrats auraient dû être mis en œuvre avant la fin de 2020, ils n'étaient toujours pas appliqués sur une grande partie du territoire à l'été 2022. Face à cette inertie et à l'exaspération légitime des usagers et des élus locaux, j'ai déposé en juillet 2022 la proposition de loi qui vous est soumise aujourd'hui.

Monsieur le ministre, dès votre nomination, en juillet dernier, vous avez exprimé votre volonté de vous saisir de ce sujet ; je salue votre engagement. Les opérateurs ont d'ailleurs promis de nouvelles mesures en septembre 2022. Si cette proposition de loi a contribué à les sensibiliser à la nécessité d'accélérer leurs efforts, nous pouvons nous en réjouir.

Néanmoins, nous avons le droit de nous interroger sur la crédibilité de ces annonces, comme sur la capacité de la filière à mettre rapidement en place les mesures promises depuis trois ans. La fermeture du réseau cuivre étant désormais engagée, nous ne pouvons plus nous permettre de repousser les échéances.

C'est la raison pour laquelle ce texte a été inscrit à l'ordre du jour de notre assemblée. Il propose un ensemble de mesures concrètes pour assurer la qualité des raccordements à la fibre par le biais de cinq leviers.

Le premier, qui est peut-être le plus important, concerne l'encadrement des modalités de recours au mode Stoc. L'article 1er de la proposition de loi vise principalement à clarifier la répartition des responsabilités entre opérateurs et à rappeler le rôle de garant de la qualité des raccordements confié aux opérateurs d'infrastructure.

Cet article souligne que le recours au mode Stoc relève d'un choix de l'OI pour rétablir un véritable principe de sous-traitance et met en place des outils pour assurer la bonne réalisation des travaux et la réparation des malfaçons.

D'une part, il crée un guichet unique auprès de l'OI, chargé de traiter les difficultés de raccordement rencontrées par les usagers. D'autre part, il prévoit la remise systématique à l'utilisateur final, par l'intervenant chargé du raccordement, d'un certificat attestant de la conformité des opérations aux règles de l'art.

L'utilisateur pourra également se prévaloir face aux opérateurs des stipulations des contrats de sous-traitance, lesquels devront intégrer des garanties en matière de qualité de raccordement et de contrôle.

En outre, l'article 3, dans sa rédaction initiale, vise à interdire le recours au mode Stoc dans les zones ayant le statut de zone fibrée, soit 430 communes environ. Dans ces secteurs, déjà entièrement raccordables à la fibre et dans lesquels la transition de l'ADSL vers cette technologie va s'accélérer, il m'a semblé indispensable que la qualité des raccordements fasse l'objet d'une attention particulière.

Le deuxième axe concerne plus spécifiquement les leviers à disposition des collectivités pour contrôler la bonne réalisation des raccordements dans les réseaux d'initiative publique (RIP). La qualité des raccordements revêt en effet une importance supplémentaire dans ces zones, car les réseaux y sont déployés grâce aux deniers publics.

L'article 2 prévoit notamment la remise à la collectivité porteuse du RIP des certificats attestant de la qualité des raccordements afin que celle-ci puisse vérifier la bonne réalisation des travaux. En l'absence de remise de ces certificats, la collectivité ne sera pas tenue de rémunérer l'opérateur pour les travaux de raccordement.

M. le ministre délégué marque sa désapprobation.

Sourires .

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Piednoir

Il est temps d’en finir avec cette schizophrénie et de profiter d’un coût marginal très faible de l’électricité d’origine nucléaire pour approvisionner des électrolyseurs ad hoc.

Les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, ainsi que la future programmation pluriannuelle de l’énergie, prévue pour cet été, vous en donneront l’occasion, monsieur le ministre.

Je terminerai par deux points de vigilance, qui n’ont pas été évoqués dans ce débat. Premièrement, la combinaison de l’hydrogène avec le dioxyde de carbone émis par certaines industries permettrait de produire du méthane de synthèse. Cette économie circulaire mériterait davantage d’attention et d’intentions, pour contribuer, au passage, au verdissement de la filière gaz.

Deuxièmement, les futurs réseaux de distribution doivent être construits en cohérence avec des schémas nationaux robustes et des emprises foncières intégrées dans une enveloppe nationale de l’objectif de « zéro artificialisation nette », par exemple. Mailler le territoire ne sera pas la plus anodine des politiques à mener, avant de structurer des partenariats puissants avec nos voisins européens.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Piednoir

Au travers des interventions de mes collègues, nous avons clairement perçu une orientation assez pragmatique. En effet, compte tenu de la faiblesse de nos ressources naturelles propres, nous devons diversifier nos modes de production d’énergie tout en convergeant vers la sortie de notre dépendance aux énergies fossiles, condition indispensable à l’atteinte des objectifs de décarbonation, notamment dans les secteurs de l’industrie, du bâtiment et de la mobilité.

À ce titre, l’hydrogène est incontestablement un levier d’action. Toutefois, la singularité de ses caractéristiques se traduit par nombre de défis auxquels il nous faut répondre, sans perdre de vue qu’il n’y aura pas de « magie » hydrogène.

Le premier défi, c’est l’abondance de cet élément chimique, qui n’est toutefois pas accessible facilement. Les modes d’isolement de la molécule de dihydrogène ne sont en effet pas tous des plus vertueux.

Ainsi, la production de 1 million de tonnes d’hydrogène sur notre territoire, essentiellement par vaporeformage du méthane, engendre plus de 11 millions de tonnes de dioxyde de carbone. L’enjeu, bien identifié, est donc de parvenir à des modes de production neutres en CO2.

Tel est le deuxième défi auquel nous sommes confrontés : comment concilier les promesses intrinsèques de ce vecteur énergétique avec des réalités économiques et écologiques qui lui sont aujourd’hui encore assez défavorables ? Comme pour toute filière novatrice, les coûts de production de l’hydrogène bas-carbone, essentiellement par électrolyse de l’eau, sont encore élevés – jusqu’à 8 euros le kilogramme contre environ 2 euros pour l’hydrogène gris.

La marche est haute et l’équilibre ne pourra être atteint sans aides publiques importantes à l’investissement, surtout si l’on veut doubler le volume produit d’ici à 2028 à hauteur de 20 % de la production globale.

Monsieur le ministre, le Gouvernement a bien identifié le sujet lors du précédent quinquennat. Néanmoins, plusieurs biais ont été soulignés au cours de ce débat.

D’abord, l’ambition : quand la France consacrait 100 millions d’euros pour sa stratégie hydrogène en 2018, notre voisin allemand mettait déjà 7 milliards d’euros sur la table, en affichant son ambition de devenir le leader dans ce domaine. Certes, je vous l’accorde, conscient d’être à la traîne, le Gouvernement a rectifié le tir en 2020 en proposant un nouveau plan doté de financements plus importants, mais sans couvrir entièrement les enjeux de la filière.

Je rappelle que le coût d’un électrolyseur a été divisé par quatre en l’espace de dix ans. Ce simple constat permet de prendre conscience de l’évolution très rapide du secteur, qui va de pair avec l’amélioration des performances en matière de rendement, point crucial pour la rentabilité de la filière hydrogène.

Les technologies évoluent aussi, en particulier l’électrolyse à haute température, avec des rendements deux à trois fois supérieurs aux autres technologies. Cela mérite, me semble-t-il, un soutien fort à la recherche pour accélérer les brevets et les innovations dans ce domaine.

Ensuite, le stockage, point faible de l’électricité, est évidemment un axe important du développement de l’hydrogène. Les batteries issues de l’industrie automobile seront bientôt associées en série et nous disposerons également de gigafactories produisant des batteries XXL, capables de stocker les surplus de production avant leur transformation par électrolyse.

Il reste à identifier les sources de production. Nous en avons beaucoup parlé ; il devrait y avoir un consensus assez large en la matière.

Le surplus de production des énergies renouvelables intermittentes peut devenir intéressant s’il est associé à la production d’hydrogène, se trouvant ainsi à disposition lors des pics de consommation – tout le monde en convient.

En revanche, et c’est très surprenant, le couplage au nucléaire est à ce jour absent des intentions gouvernementales. On ne trouve aucun mot à ce sujet dans les différents plans hydrogène

Photo de Patrick Chaize

Le troisième levier concerne les pouvoirs de contrôle et de sanction de l'Arcep.

L'article 4 octroie au régulateur des télécommunications des pouvoirs spécifiques pour garantir la qualité des raccordements à la fibre à plusieurs égards.

Il confère ainsi une base législative au pouvoir de police spéciale des communications électroniques que détiennent conjointement l'Arcep, le ministre en charge du numérique et l'Agence nationale des fréquences (ANFR). Il prévoit également la publication trimestrielle par l'Arcep d'indicateurs portant sur le niveau de qualité de service des réseaux fibre transmis par les opérateurs.

La réalisation d'audits sur la qualité de l'accès au réseau de fibre optique et l'instauration d'un pouvoir d'astreinte au profit de l'Arcep sur ce sujet sont également prévues. Le texte intègre à ce titre l'ensemble des normes relatives à la qualité du raccordement à la fibre dans le corpus des règles dont l'Arcep sanctionne le respect.

Enfin, le dernier levier concerne la protection des droits des consommateurs en cas d'interruption prolongée de l'accès à internet.

L'article 5 vise ainsi à renforcer cette protection par la création de trois nouvelles pénalités à l'encontre du fournisseur d'accès à internet, selon la durée de la panne : suspension du paiement de l'abonnement d'abord ; versement d'une indemnité à l'abonné par l'opérateur ensuite ; enfin, résiliation sans frais de l'abonnement par l'usager.

Mes chers collègues, tels sont les grands axes du texte qui vous est soumis. Celui-ci a suscité une opposition de principe des opérateurs commerciaux, qui ont fait valoir que des engagements pris par la filière étaient préférables à une proposition de loi. Je pense, pour ma part, que les uns n'excluent pas l'autre.

Nous vous proposons donc de voter ce texte afin d'obtenir les engagements tant attendus et de leur conférer une assise solide. J'entends les inquiétudes concernant les risques qu'engendrerait une remise en cause du mode Stoc pour la continuité du déploiement de la fibre. Je tiens à rassurer sur ce point : notre objectif n'est en aucun cas de remettre en cause le modèle actuel, mais bien de guider et d'accompagner les démarches de qualité en cours afin de mieux les traduire sur le terrain. À cet égard, j'invite les opérateurs à lire le texte.

J'ai travaillé dans un état d'esprit d'équilibre avec la rapporteure de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, Patricia Demas, que je tiens à remercier pour son écoute, son implication et les compléments utiles qu'elle a apportés au texte initial.

La qualité des réseaux fibre est un sujet d'intérêt national qui ne saurait dépendre exclusivement du bon vouloir des acteurs économiques. Monsieur le ministre, nous comptons sur vous pour prendre conscience de notre responsabilité collective sur ce sujet et pour nous aider à enrichir et à perfectionner cette initiative sénatoriale dans le cadre de la navette parlementaire.

M. le ministre délégué s ’ étonne.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI.

Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Roger Karoutchi

Nous en avons terminé avec le débat sur le thème : « Quelles solutions pour développer l’hydrogène au sein de notre mix énergétique ? ».

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Piednoir

, certes élaborés avant la conversion au nucléaire du président Macron, révélatrice d’un sacrifice industriel et commercial pour de basses œuvres politiciennes.

Photo de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à assurer la qualité et la pérennité des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, présentée par M. Patrick Chaize et plusieurs de ses collègues (proposition n° 795, texte de la commission n° 518, rapport n° 517).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Patrick Chaize, auteur de la proposition de loi.

M. le ministre délégué marque sa désapprobation.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Piednoir

Il est temps d’en finir avec cette schizophrénie et de profiter d’un coût marginal très faible de l’électricité d’origine nucléaire pour approvisionner des électrolyseurs ad hoc.

Les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, ainsi que la future programmation pluriannuelle de l’énergie, prévue pour cet été, vous en donneront l’occasion, monsieur le ministre.

Je terminerai par deux points de vigilance, qui n’ont pas été évoqués dans ce débat.

D’une part, la combinaison de l’hydrogène avec le dioxyde de carbone émis par certaines industries permettrait de produire du méthane de synthèse. Cette économie circulaire mériterait davantage d’attention et d’intentions, pour contribuer, au passage, au verdissement de la filière gaz.

D’autre part, les futurs réseaux de distribution doivent être construits en cohérence avec des schémas nationaux robustes et des emprises foncières intégrées dans une enveloppe nationale de l’objectif de « zéro artificialisation nette », par exemple. Mailler le territoire ne sera pas la plus anodine des politiques à mener, avant de structurer des partenariats puissants avec nos voisins européens.

Photo de Patricia Demas

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui, si elle peut sembler technique au premier abord, répond à une préoccupation quotidienne de nos concitoyens.

Je tiens à remercier mon collègue Patrick Chaize d'avoir déposé ce texte, qui apporte des solutions pragmatiques pour remédier aux désordres occasionnés dans le raccordement d'utilisateurs finals à la fibre, en raison du recours à une chaîne de sous-traitance, souvent mal maîtrisée, dans le cadre du mode Stoc. Cette expression désigne un mode de réalisation des raccordements à la fibre par lequel l'opérateur d'infrastructure, responsable du réseau, confie la dernière partie du raccordement aux opérateurs commerciaux, qui font généralement eux-mêmes appel à d'autres prestataires.

Alors que cette pratique était l'exception avant 2015, ce mode opératoire est devenu la règle.

Nous avons tous constaté dans nos territoires l'exaspération des usagers et des élus locaux en raison des dysfonctionnements issus du recours au mode Stoc : débranchements injustifiés, branchements réalisés de façon anarchique, armoires vandalisées et, surtout, absence de recours effectif.

À l'aube de la fermeture du réseau cuivre, le raccordement final à la fibre optique est sans conteste le talon d'Achille du plan France Très Haut Débit. Il est dès lors de notre responsabilité de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la réussite de ce projet ambitieux, alors même que nous entrons dans sa dernière ligne droite.

Face aux problèmes liés à la qualité des raccordements à la fibre, trois options s'offrent à nous.

La première, privilégiée par le Gouvernement jusqu'à maintenant, consiste à négocier avec les opérateurs une solution contractuelle non prescriptive. Si ce mode d'action apparaît comme le plus souple, force est de constater qu'il est pour le moment insuffisant et qu'il n'a pas produit les résultats escomptés.

La révision des contrats Stoc initiée en 2020, grâce aux contrats dits « Stoc II », puis « Stoc III », a permis des progrès, qui restent toutefois trop timides. Le constat est clair : trois ans après le début des négociations, les engagements pris par les opérateurs peinent encore à être mis en œuvre.

La négociation avec la filière est indispensable, mais elle gagnerait à être encadrée et accompagnée par le législateur si nous souhaitons accélérer la montée en qualité des réseaux fibre et venir à bout des réticences de certains opérateurs.

La deuxième option, la plus radicale, serait de mettre fin au mode Stoc et de charger l'opérateur d'infrastructure de la réalisation du raccordement, passant donc en mode OI. À première vue, il peut s'agir de la solution la plus évidente, et je comprends que nombre d'acteurs, certains élus locaux notamment, aient pu l'avoir à l'esprit.

Elle conduirait cependant à changer de plan au milieu de la bataille, alors que, depuis 2018, 20 000 locaux en moyenne sont raccordés chaque jour à la fibre. Changer de mode opératoire à ce stade risquerait de mettre un coup d'arrêt à ce déploiement, ce qui ne serait pas conforme à nos objectifs.

La troisième option, à laquelle je souscris pleinement, consiste à mieux encadrer le mode Stoc. Cette solution pragmatique permet de répondre aux préoccupations des usagers et des collectivités sans pour autant renverser la table ni déstabiliser les dynamiques à l'œuvre.

Le texte que je vous présente aujourd'hui s'inscrit pleinement dans cette troisième voie d'équilibre. Je remercie Patrick Chaize et la commission de m'avoir accordé leur confiance à ce sujet.

Dans des délais restreints, j'ai entendu toutes les parties prenantes – opérateurs, régulateur, administrations centrales, élus locaux et usagers – et proposé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'intégrer plusieurs de leurs suggestions, reprises dans le présent texte.

J'en viens à présent aux axes qui ont guidé le travail de la commission et aux principales modifications apportées à la proposition de loi.

Le premier axe a été la clarification des modalités de mise en œuvre du mode Stoc et de la répartition des responsabilités entre les opérateurs.

Conformément aux objectifs de Patrick Chaize, nous avons prévu à l'article 1er que l'opérateur d'infrastructure confie la réalisation du raccordement à la fibre à l'opérateur commercial selon un mécanisme de priorité et sous réserve du strict respect des règles de l'art.

Cette proposition pragmatique permet de conserver la volonté de l'auteur de garantir un principe de sous-traitance, en rappelant que la mise en œuvre du mode Stoc relève d'un choix de l'opérateur d'infrastructure, tout en préservant l'équilibre des contrats de sous-traitance en cours.

Avec le même objectif, la commission a souhaité renforcer le caractère opérationnel du guichet unique pour prendre en charge les difficultés de raccordement à la fibre rencontrées par les utilisateurs. Nous avons renforcé la place de ces derniers dans le dispositif, en leur permettant de suivre la résolution des difficultés rencontrées et en garantissant que celle-ci intervienne dans un délai raisonnable, qui ne pourra excéder dix jours.

Ce guichet unique a suscité des réactions différentes chez les usagers, les opérateurs et le Gouvernement. Si tout le monde s'accorde sur son utilité, la définition de ses modalités opérationnelles fait débat. Notre proposition est une première pierre à l'édifice, mais nous sommes ouverts à la perspective qu'un travail plus approfondi soit mené sur cette question dans le cadre de la navette parlementaire.

Enfin, la commission a modifié l'article 3, qui interdit le recours au mode Stoc dans certaines zones du territoire, pour en affiner le périmètre d'application afin de prendre en compte la fermeture du réseau cuivre et de la réserver aux raccordements longs et complexes, de manière à limiter les atteintes à la liberté d'entreprendre.

Le deuxième axe des travaux de la commission a été de consolider les exigences de qualité et de contrôle applicables aux raccordements.

Nous avons prévu, à l'article 1er, l'élaboration d'un socle d'exigences minimales de qualité, que les contrats et les cahiers des charges liant les opérateurs commerciaux et leurs sous-traitants devront respecter.

Nous avons également introduit une obligation de labellisation de tout intervenant chargé de réaliser un raccordement à la fibre, selon un référentiel national. De plus, nous avons consacré dans la loi la réalisation systématique d'un compte rendu d'intervention pour permettre à l'opérateur d'infrastructure et à l'utilisateur de vérifier la bonne réalisation du raccordement.

Enfin, à l'article 2, qui concerne les réseaux d'initiative publique, c'est-à-dire les zones dites « RIP », nous avons garanti un délai maximal de quarante-huit heures pour la transmission à la collectivité du calendrier hebdomadaire des interventions de raccordement lorsque cette dernière en fait la demande, de manière à renforcer les moyens de contrôle des élus locaux, souvent démunis face aux malfaçons dans le raccordement final.

Le troisième et dernier axe des travaux de la commission a été d'assurer le caractère opérant des dispositifs.

Nous avons ainsi proposé une nouvelle rédaction de l'article 4, qui étend les pouvoirs en matière de qualité des raccordements à la fibre de l'Arcep, dont nous entendons ainsi clarifier les moyens de contrôle et de sanction.

À l'article 5, qui ouvre de nouveaux droits au consommateur en cas d'interruption prolongée du service d'accès à internet, nous avons, d'une part, amélioré l'articulation dans le temps des sanctions susceptibles d'être prononcées à l'encontre de l'opérateur commercial et, d'autre part, veillé à protéger ce dernier d'éventuels abus de la part des consommateurs.

En somme, tous ces ajustements de bon sens résultant d'un travail approfondi de concertation avec tous les acteurs s'inscrivent pleinement dans l'esprit du texte présenté par Patrick Chaize, tout en consolidant sa portée et son caractère opérationnel.

Vous l'aurez compris, face aux dysfonctionnements dans le raccordement des utilisateurs finals à la fibre optique, il n'existe pas de solution miracle emportant la satisfaction de l'ensemble des intervenants. Il y a pourtant urgence à agir pour assurer la pérennité et la qualité des raccordements. Le texte de la commission est une proposition ambitieuse et équilibrée, mais nous avons conscience qu'elle est aussi perfectible.

Monsieur le ministre, la balle est dans votre camp pour poursuivre, dans le cadre de la navette parlementaire, le travail sur cette initiative sénatoriale. Celle-ci répond, vous l'aurez compris, à de très fortes attentes de la part des usagers et des élus locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chaize

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis très heureux de vous retrouver aujourd'hui dans cet hémicycle pour examiner la proposition de loi visant à assurer la qualité et la pérennité des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, dont j'ai été à l'initiative, avec plus d'une centaine de mes collègues – 139 pour être exact –, de différents horizons politiques.

L'objet de ce texte est clair : répondre aux alertes, répétées depuis des années, relatives aux malfaçons et dégradations récurrentes, qui surviennent lors du raccordement de l'utilisateur final à la fibre optique.

Ces difficultés sont généralement attribuées à une mauvaise gestion du mode « sous-traitance opérateurs commerciaux » (Stoc), par lequel l'opérateur d'infrastructures, responsable du réseau, confie l'étape finale du déploiement aux opérateurs commerciaux. Or ces derniers ont eux-mêmes souvent recours à leurs propres sous-traitants.

Cette pratique, dérogatoire au mode principal de déploiement de la fibre, par lequel l'opérateur d'infrastructures assure le déploiement dans son intégralité, présente deux singularités. D'une part, elle est dépourvue de fondement législatif, puisqu'elle s'est développée sur la base de décisions de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep). D'autre part, elle semble entraver la liberté contractuelle et la liberté d'entreprendre, dès lors que la mise en œuvre du mode Stoc est considérée comme de droit par l'Arcep.

Le régulateur avait pourtant prévu un garde-fou en précisant que le recours automatique au mode Stoc ne serait valable qu'à la condition que les opérateurs commerciaux respectent strictement les règles de l'art.

Malheureusement, les désordres persistants sur l'ensemble du territoire démontrent à quel point ce principe demeure théorique.

Bien entendu, le tableau n'est pas entièrement noir. Le mode Stoc a été un élément clef du déploiement massif et rapide de la fibre sur notre territoire. Alors que nous figurions parmi les plus mauvais élèves de l'Union européenne avant 2013, plus de 18 millions de Français sont désormais raccordés à cette technologie.

Toutefois, ce succès ne doit pas être l'arbre qui cache la forêt. La situation actuelle n'est pas acceptable au regard des sommes engagées par l'État et les collectivités territoriales pour le déploiement de la fibre depuis 2013 dans le cadre du plan France Très Haut Débit ; elle l'est encore moins au regard des attentes des usagers quant à la qualité de la connexion, alors que les jours du réseau cuivre sont désormais comptés.

Le Gouvernement, l'Arcep et les opérateurs ont pris conscience du problème : dès 2019, un groupe de travail a été mis en place entre les opérateurs d'infrastructure (OI) et les opérateurs commerciaux (OC), aboutissant en 2020 à l'élaboration d'une feuille de route multilatérale pour l'amélioration de l'exploitation et de la qualité des réseaux fibre jusqu'à l'abonné (FttH, pour Fiber to the Home).

Cette feuille de route envisageait l'évolution des contrats Stoc selon quatre axes : un volet sous-traitance prévoyant une meilleure information de l'OC envers l'OI sur le recours à la sous-traitance et une limitation à deux du nombre de rangs de sous-traitants ; un volet qualité du réseau, incluant l'obligation de communiquer un compte rendu d'intervention (CRI) pour chaque raccordement ; un volet qualité de prestation, imposant aux opérateurs commerciaux de faire appel à des intervenants formés ; enfin, un volet sécurité, selon lequel l'OI doit s'assurer que chaque intervenant dispose des agréments nécessaires.

Alors que ces nouveaux contrats auraient dû être mis en œuvre avant la fin de 2020, ils n'étaient toujours pas appliqués sur une grande partie du territoire à l'été 2022. Face à cette inertie et à l'exaspération légitime des usagers et des élus locaux, j'ai déposé en juillet 2022 la proposition de loi qui vous est soumise aujourd'hui.

Monsieur le ministre, dès votre nomination, en juillet dernier, vous avez exprimé votre volonté de vous saisir de ce sujet ; je salue votre engagement. Les opérateurs ont d'ailleurs promis de nouvelles mesures en septembre 2022. Si cette proposition de loi a contribué à les sensibiliser à la nécessité d'accélérer leurs efforts, nous pouvons nous en réjouir.

Néanmoins, nous avons le droit de nous interroger sur la crédibilité de ces annonces comme sur la capacité de la filière à mettre rapidement en place les mesures promises depuis trois ans. La fermeture du réseau cuivre étant désormais engagée, nous ne pouvons plus nous permettre de repousser les échéances.

C'est la raison pour laquelle ce texte a été inscrit à l'ordre du jour de notre assemblée. Il propose un ensemble de mesures concrètes pour assurer la qualité des raccordements à la fibre par le biais de plusieurs leviers.

Le premier, qui est peut-être le plus important, concerne l'encadrement des modalités de recours au mode Stoc. L'article 1er de la proposition de loi vise principalement à clarifier la répartition des responsabilités entre opérateurs et à rappeler le rôle de garant de la qualité des raccordements confié aux opérateurs d'infrastructure.

Cet article souligne que le recours au mode Stoc relève d'un choix de l'OI pour rétablir un véritable principe de sous-traitance et met en place des outils pour assurer la bonne réalisation des travaux et la réparation des malfaçons.

D'une part, il crée un guichet unique auprès de l'OI, chargé de traiter les difficultés de raccordement rencontrées par les usagers. D'autre part, il prévoit la remise systématique à l'utilisateur final, par l'intervenant chargé du raccordement, d'un certificat attestant de la conformité des opérations aux règles de l'art.

L'utilisateur pourra également se prévaloir face aux opérateurs des stipulations des contrats de sous-traitance, lesquels devront intégrer des garanties en matière de qualité de raccordement et de contrôle.

En outre, l'article 3, dans sa rédaction initiale, vise à interdire le recours au mode Stoc dans les zones ayant le statut de zone fibrée, soit 430 communes environ. Dans ces secteurs, déjà entièrement raccordables à la fibre et dans lesquels la transition de l'ADSL vers cette technologie va s'accélérer, il m'a semblé indispensable que la qualité des raccordements fasse l'objet d'une attention particulière.

Le deuxième axe concerne plus spécifiquement les leviers à disposition des collectivités pour contrôler la bonne réalisation des raccordements dans les réseaux d'initiative publique (RIP). La qualité des raccordements revêt en effet une importance supplémentaire dans ces zones, car les réseaux y sont déployés grâce aux deniers publics.

L'article 2 prévoit notamment la remise à la collectivité porteuse du RIP des certificats attestant de la qualité des raccordements afin que celle-ci puisse vérifier la bonne réalisation des travaux. En l'absence de remise de ces certificats, la collectivité ne sera pas tenue de rémunérer l'opérateur pour les travaux de raccordement.

Photo de Roger Karoutchi

La parole est à M. le ministre délégué.

Applaudissements sur les travées des g roupes Les Républicains et UC.

Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Roger Karoutchi

Nous en avons terminé avec le débat sur le thème : « Quelles solutions pour développer l’hydrogène au sein de notre mix énergétique ? »

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications

Monsieur le président, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à remercier Patrick Chaize pour le dépôt de cette proposition de loi, qui a le mérite de nous permettre de débattre d'une politique publique remarquable : le plan France Très Haut Débit, dont nous célébrons cette année le dixième anniversaire.

Cela m'offre l'occasion de rappeler à quel point ce plan est un succès français : nous sommes passés d'un million de foyers éligibles à la fibre en 2013 à 8 millions en 2017 et à 34 millions en 2022, faisant de la France le pays d'Europe le plus avancé en matière de déploiement de cette technologie.

Il s'agit sans doute du programme d'investissement le plus ambitieux et le plus important depuis le début du siècle : 34 milliards d'euros lui ont été consacrés, dont 65 % ont été pris en charge par le secteur privé, 25 % par les collectivités territoriales et 10 % par l'État.

C'est également l'un des chantiers industriels les plus ambitieux et les plus importants depuis le début du siècle, qui a mobilisé plus de 40 000 agents sur l'ensemble du territoire pour déployer des millions de prises de fibre optique. Ce succès est vraisemblablement dû à un accord intelligent trouvé il y a dix ans entre l'État, les collectivités et les opérateurs.

Pour autant, ce que je viens de dire ne correspond pas au ressenti de certains de nos concitoyens. Comme le souligne la proposition de loi de Patrick Chaize, des problèmes de qualité très significatifs empoisonnent leur quotidien, en les empêchant d'être raccordés à la fibre ou en leur infligeant des coupures.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 20 000 notifications ont été inscrites sur le site de l'Arcep l'année dernière, et des témoignages de problèmes de qualité liés à la fibre sont relayés dans les journaux chaque semaine. Il suffit d'aller à la rencontre de nos concitoyens pour prendre la mesure de leur exaspération quant à ces aléas.

Où se situe la responsabilité de ces difficultés ?

Il convient d'abord d'examiner les acteurs en cause : d'un côté, les opérateurs d'infrastructure, qui déploient les réseaux, notamment jusqu'au point de mutualisation, et de l'autre, les opérateurs commerciaux, qui assurent le branchement au dernier kilomètre, en vertu du mode Stoc. Chacun rejette la faute sur l'autre.

Cependant, dans plus de 90 % des cas, les problèmes sont dus aux opérateurs d'infrastructure, en particulier à des réseaux très accidentogènes, souvent conçus à une époque antérieure au plan France Très Haut Débit, rendant le raccordement des foyers difficile et les exposant à des risques de coupures ou de défaillances. Cela permet de rendre compte de l'immense majorité des problèmes liés à la fibre.

Voilà pourquoi j'ai demandé il y a six mois aux opérateurs d'infrastructure dans les territoires où les réseaux sont les plus accidentogènes, de me présenter, ainsi qu'à l'Arcep, un plan de reprise complète de ces réseaux.

Ces plans ont été présentés pour 450 000 locaux et commencent à être déployés ; les opérateurs d'infrastructures sont en train de reconstruire les réseaux. Sur les 450 000 prises concernées, 23 000 ont été révisées à ce stade. C'est encore peu, mais une fois ces plans achevés dans des territoires comme le Calvados, la Seine-Maritime ou l'Essonne, nous aurons résolu une partie importante du problème.

Dans leur minorité, les problèmes sont liés aux opérateurs commerciaux. C'est là le sujet de la proposition de loi que nous allons discuter. En raison de la rapidité des déploiements et de problèmes de responsabilité en cas de défaillance, qui ont bien été identifiés par l'auteur de la proposition de loi, il existe des situations de débranchements ou de coupures sauvages : les sous-traitants des opérateurs commerciaux se présentent devant une armoire pour opérer le raccordement d'un client dans des temps très contraints et le font de manière non appropriée ou au détriment d'usagers déjà raccordés.

Pour résoudre cette minorité de problèmes de qualité de la fibre, on serait tenté de remettre en question l'organisation du déploiement entre opérateurs d'infrastructure et opérateurs commerciaux, que l'on appelle le mode Stoc. Depuis une décision de l'Arcep de 2015, l'opérateur d'infrastructures a, certes, la responsabilité de la qualité du réseau de bout en bout jusqu'au domicile, mais il ne peut pas s'opposer à ce que l'opérateur commercial installe le dernier kilomètre, en lien avec son client, sauf s'il le fait dans des conditions de qualité dégradées.

Le mode Stoc présente des inconvénients et des avantages. Son inconvénient majeur est que, lorsque survient une défaillance ou une coupure, l'opérateur commercial, en charge du dernier kilomètre, et l'opérateur d'infrastructures se renvoient la balle, ce qui retarde l'attribution des responsabilités et la réparation du dommage causé à l'usager. Il s'agit donc de résoudre cette difficulté relative à l'attribution des responsabilités.

Pour autant, les avantages du mode Stoc ont sans doute contribué à la rapidité du déploiement des réseaux de fibre optique sur l'ensemble du territoire. Cette technique offre de la simplicité pour l'usager, qui n'a qu'un seul interlocuteur pour son abonnement et son raccordement : son opérateur commercial.

De surcroît, la concurrence entre les opérateurs commerciaux pour raccorder au plus vite leurs clients a également contribué à la rapidité de déploiement du plan France Très Haut Débit.

Le Gouvernement, qui accueille les débats sur ces sujets, n'entend pas supprimer le mode Stoc, mais plutôt le corriger. Supprimer cet équilibre entraînerait en effet la réécriture d'un certain nombre de contrats, ce qui retarderait d'autant le déploiement du plan France Très Haut Débit, alors que l'objectif est plutôt de l'accélérer.

De plus, cela pourrait soulever des questions d'équité concurrentielle, car les opérateurs d'infrastructure pourraient être tentés de privilégier les clients de certains opérateurs commerciaux plutôt que d'autres, en raison de liens capitalistiques existants.

Cependant, il est nécessaire de le corriger. Si le Gouvernement propose des amendements sur les trois premiers articles de cette proposition de loi, sur lesquels son avis est réservé, il accueille très favorablement les articles 4 et 5. Ceux-ci renforcent les pouvoirs de l'Arcep pour sanctionner les opérateurs commerciaux qui ne respectent pas leurs responsabilités, et améliorent la protection des usagers lorsque leur accès à la fibre est interrompu pendant une trop longue période.

Les amendements portés par la rapporteure, concernant en particulier les certificats de conformité ou de non-raccordement, vont également dans le sens d'une amélioration du mode Stoc pour le rendre plus opérant. L'objectif est d'arriver à la fin du plan France Très Haut Débit, dont l'horizon n'est plus si lointain.

Il est essentiel d'y parvenir : l'étape suivante consistera à décommissionner le réseau cuivre, qui coûte cher à entretenir et présente des coûts environnementaux et énergétiques significatifs. Pour ce faire, il est essentiel que chacun puisse accéder au très haut débit, en particulier à la fibre, dans les meilleures conditions. Aujourd'hui, 80 % des Français y sont éligibles, l'objectif est d'atteindre 100 % à l'horizon 2025.

Les corrections qui seront apportées au mode Stoc aujourd'hui et durant la navette sont donc bienvenues pour atteindre cet objectif d'aménagement numérique des territoires et d'égal accès pour tous les citoyens aux possibilités ouvertes dans la société par l'économie numérique.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chaize

Le troisième levier concerne les pouvoirs de contrôle et de sanction de l'Arcep.

L'article 4 octroie au régulateur des télécommunications des pouvoirs spécifiques pour garantir la qualité des raccordements à la fibre à plusieurs égards.

Il confère ainsi une base législative au pouvoir de police spéciale des communications électroniques que détiennent conjointement l'Arcep, le ministre en charge du numérique et l'Agence nationale des fréquences (ANFR). Il prévoit également la publication trimestrielle par l'Arcep d'indicateurs portant sur le niveau de qualité de service des réseaux fibre transmis par les opérateurs.

La réalisation d'audits sur la qualité de l'accès au réseau de fibre optique et l'instauration d'un pouvoir d'astreinte au profit de l'Arcep sur ce sujet sont également prévues. Le texte intègre à ce titre l'ensemble des normes relatives à la qualité du raccordement à la fibre dans le corpus des règles dont l'Arcep sanctionne le respect.

Enfin, le dernier levier concerne la protection des droits des consommateurs en cas d'interruption prolongée de l'accès à internet.

L'article 5 vise ainsi à renforcer cette protection par la création de trois nouvelles pénalités à l'encontre du fournisseur d'accès à internet, selon la durée de la panne : suspension du paiement de l'abonnement d'abord ; versement d'une indemnité à l'abonné par l'opérateur ensuite ; enfin, résiliation sans frais de l'abonnement par l'usager.

Mes chers collègues, tels sont les grands axes du texte qui vous est soumis. Celui-ci a suscité une opposition de principe des opérateurs commerciaux, qui ont fait valoir que des engagements pris par la filière étaient préférables à une proposition de loi. Je pense, pour ma part, que les uns n'excluent pas l'autre.

Nous vous proposons donc de voter ce texte afin d'obtenir les engagements tant attendus et de leur conférer une assise solide. J'entends les inquiétudes concernant les risques qu'engendrerait une remise en cause du mode Stoc pour la continuité du déploiement de la fibre. Je tiens à rassurer sur ce point : notre objectif n'est en aucun cas de remettre en cause le modèle actuel, mais bien de guider et d'accompagner les démarches de qualité en cours afin de mieux les traduire sur le terrain. À cet égard, j'invite les opérateurs à lire le texte.

J'ai travaillé dans un état d'esprit d'équilibre avec la rapporteure de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, Patricia Demas, que je tiens à remercier pour son écoute, son implication et les compléments utiles qu'elle a apportés au texte initial.

La qualité des réseaux fibre est un sujet d'intérêt national qui ne saurait dépendre exclusivement du bon vouloir des acteurs économiques. Monsieur le ministre, nous comptons sur vous pour prendre conscience de notre responsabilité collective sur ce sujet et pour nous aider à enrichir et à perfectionner cette initiative sénatoriale dans le cadre de la navette parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à assurer la qualité et la pérennité des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, présentée par M. Patrick Chaize et plusieurs de ses collègues (proposition n° 795, texte de la commission n° 518, rapport n° 517).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Patrick Chaize, auteur de la proposition de loi.

Photo de Roger Karoutchi

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Pierre-Jean Verzelen.

Debut de section - Permalien
Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications

Monsieur le président, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à remercier Patrick Chaize pour le dépôt de cette proposition de loi, qui a le mérite de nous permettre de débattre d'une politique publique remarquable : le plan France Très Haut Débit, dont nous célébrons cette année le dixième anniversaire.

Cela m'offre l'occasion de rappeler à quel point ce plan est un très grand succès français : nous sommes passés de 1 million de foyers éligibles à la fibre en 2013 à 8 millions en 2017 et à 34 millions en 2022, faisant de la France le pays d'Europe le plus avancé en matière de déploiement de cette technologie.

Il s'agit sans doute du programme d'investissement le plus ambitieux et le plus important depuis le début du siècle : 34 milliards d'euros lui ont été consacrés, dont 65 % ont été pris en charge par le secteur privé, 25 % par les collectivités territoriales et 10 % par l'État.

C'est également l'un des chantiers industriels les plus ambitieux et les plus importants depuis le début du siècle, qui a mobilisé plus de 40 000 agents sur l'ensemble du territoire pour déployer des millions de prises de fibre optique. Ce succès est vraisemblablement le fruit d'un accord intelligent trouvé voilà dix ans entre l'État, les collectivités et les opérateurs.

Pour autant, ce que je viens de dire ne correspond pas au ressenti de certains de nos concitoyens. Comme le souligne la proposition de loi de Patrick Chaize, des problèmes de qualité très significatifs empoisonnent leur quotidien, en les empêchant d'être raccordés à la fibre ou en leur infligeant des coupures.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 20 000 notifications ont été inscrites sur le site de l'Arcep l'année dernière et des témoignages de problèmes de qualité liés à la fibre sont relayés dans les journaux chaque semaine. Il suffit d'aller à la rencontre de nos concitoyens pour prendre la mesure de leur exaspération quant à ces aléas.

Où se situe la responsabilité de ces difficultés ?

Il convient d'abord d'examiner les acteurs en cause : d'un côté, les opérateurs d'infrastructure, qui déploient les réseaux, notamment jusqu'au point de mutualisation ; de l'autre, les opérateurs commerciaux, qui assurent le branchement au dernier kilomètre, en vertu du mode Stoc. Chacun rejette la faute sur l'autre.

Cependant, dans plus de 90 % des cas, les problèmes sont dus aux opérateurs d'infrastructure, en particulier à des réseaux très accidentogènes, souvent conçus à une époque antérieure au plan France Très Haut Débit, rendant le raccordement des foyers difficile et les exposant à des risques de coupures ou de défaillances. Cela permet de rendre compte de l'immense majorité des problèmes liés à la fibre.

Voilà pourquoi j'ai demandé il y a six mois aux opérateurs d'infrastructure dans les territoires où les réseaux sont les plus accidentogènes de me présenter, ainsi qu'à l'Arcep, un plan de reprise complète de ces réseaux.

Ces plans ont été présentés pour 450 000 locaux et commencent à être déployés ; les opérateurs d'infrastructures sont en train de reconstruire les réseaux. Sur les 450 000 prises concernées, 23 000 ont été révisées à ce stade. C'est encore peu, mais une fois ces plans achevés dans des territoires comme le Calvados, la Seine-Maritime ou l'Essonne, nous aurons résolu une partie importante du problème.

Dans leur minorité, les problèmes sont liés aux opérateurs commerciaux. C'est là le sujet de la proposition de loi que nous allons discuter. En raison de la rapidité des déploiements et de problèmes de responsabilité en cas de défaillance, qui ont bien été identifiés par l'auteur de la proposition de loi, il existe des situations de débranchements ou de coupures sauvages : les sous-traitants des opérateurs commerciaux se présentent devant une armoire pour opérer le raccordement d'un client dans des temps très contraints et le font parfois de manière non appropriée ou au détriment d'usagers déjà raccordés.

Pour résoudre cette minorité de problèmes de qualité de la fibre, on serait tenté de remettre en question l'organisation du déploiement entre opérateurs d'infrastructure et opérateurs commerciaux, que l'on appelle le mode Stoc. Depuis une décision de l'Arcep de 2015, l'opérateur d'infrastructures a, certes, la responsabilité de la qualité du réseau de bout en bout jusqu'au domicile, mais il ne peut s'opposer à ce que l'opérateur commercial installe le dernier kilomètre, en lien avec son client, sauf s'il le fait dans des conditions de qualité dégradées.

Le mode Stoc présente des inconvénients et des avantages. Son inconvénient majeur est que, lorsque survient une défaillance ou une coupure, l'opérateur commercial, en charge du dernier kilomètre, et l'opérateur d'infrastructures se renvoient la balle, ce qui retarde l'attribution des responsabilités et la réparation du dommage causé à l'usager. Il s'agit donc de résoudre cette difficulté relative à l'attribution des responsabilités.

Pour autant, les avantages du mode Stoc ont sans doute contribué à la rapidité du déploiement des réseaux de fibre optique sur l'ensemble du territoire. Cette technique offre de la simplicité pour l'usager, qui n'a qu'un seul interlocuteur pour son abonnement et son raccordement : son opérateur commercial.

De surcroît, la concurrence entre les opérateurs commerciaux pour raccorder au plus vite leurs clients a également contribué à la rapidité de déploiement du plan France Très Haut Débit.

Le Gouvernement, qui accueille les débats sur ces sujets, n'entend pas supprimer le mode Stoc, mais plutôt le corriger. Supprimer cet équilibre entraînerait en effet la réécriture d'un certain nombre de contrats, ce qui retarderait d'autant le déploiement du plan France Très Haut Débit, alors que l'objectif est plutôt de l'accélérer.

De plus, cela pourrait soulever des questions d'équité concurrentielle, car les opérateurs d'infrastructure pourraient être tentés de privilégier les clients de certains opérateurs commerciaux plutôt que d'autres, en raison de liens capitalistiques existants.

Cependant, il est nécessaire de le corriger. Si le Gouvernement propose des amendements sur les trois premiers articles de cette proposition de loi, sur lesquels son avis est réservé, il accueille très favorablement les articles 4 et 5. Ceux-ci renforcent les pouvoirs de l'Arcep pour sanctionner les opérateurs commerciaux qui ne respectent pas leurs responsabilités et améliorent la protection des usagers lorsque leur accès à la fibre est interrompu pendant une trop longue période.

Les amendements proposés par la rapporteure, concernant en particulier les certificats de conformité ou de non-raccordement, visent également à améliorer le mode Stoc pour le rendre plus opérant. L'objectif est d'arriver à la fin du plan France Très Haut Débit, dont l'horizon n'est plus si lointain.

Il est essentiel d'y parvenir : l'étape suivante consistera à décommissionner le réseau cuivre, qui coûte cher à entretenir et qui présente des coûts environnementaux et énergétiques significatifs. Pour ce faire, il est essentiel que chacun puisse accéder au très haut débit, en particulier à la fibre, dans les meilleures conditions. Aujourd'hui, 80 % des Français y sont éligibles, l'objectif est d'atteindre 100 % à l'horizon 2025.

Les corrections qui seront apportées au mode Stoc aujourd'hui et durant la navette sont donc bienvenues pour atteindre cet objectif d'aménagement numérique des territoires et d'égal accès pour tous les citoyens aux possibilités ouvertes dans la société par l'économie numérique.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et SER. – MM. Pierre-Jean Verzelen, Ronan Dantec et Frédéric Marchand applaudissent également.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Photo de Pierre-Jean Verzelen

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme les crèches, comme la poste et comme les commerces de proximité, l'internet est devenu un service structurant des villes et des villages. Aujourd'hui, il est indispensable d'avoir une connexion internet.

Le déploiement de la fibre progresse plus ou moins vite selon les territoires, mais, globalement – cela a été dit –, sa dynamique est plutôt bonne depuis quelques années. Dans les zones d'appel à manifestation d'intention d'investissement (Amii), les opérateurs ont pris des engagements pour permettre ce développement. Dans les autres, les collectivités locales se sont emparées du sujet à bras le corps afin d'apporter les mêmes services dans les territoires ruraux.

Sur le papier, la répartition était équilibrée et a bien fonctionné, comme on peut le constater dans un territoire que je connais bien, l'Aisne, qui est l'un des départements ruraux les mieux fibrés de France.

Cependant, certains élus locaux ont fait remonter à plusieurs reprises des difficultés de raccordement. Ici, une personne est mécontente de constater que son voisin est bien raccordé tandis qu'elle ne l'est pas ; là, une autre qui a toujours eu la fibre s'en trouve soudainement privée. Enfin, on ne peut pas négliger l'impact qu'a eu la crise du covid sur le déploiement de la fibre.

En effet, l'Arcep, dans son dernier rapport, a constaté des ralentissements de déploiement, des problèmes techniques et des malfaçons. On en conclut que l'objectif initial d'une France où tous les foyers seraient fibrés en 2023 ne sera malheureusement pas atteint.

Au 31 décembre 2022, 79 % des foyers étaient raccordables à la fibre optique, mais « raccordables » ne signifie pas « raccordés ». Si plus de 15 millions de foyers sont effectivement reliés à la fibre, il ne faut pas oublier ceux qui attendent toujours un raccordement, ceux qui ont été raccordés, mais sont confrontés à des coupures, qu'elles soient prolongées ou non, ou encore ceux à qui l'on dit qu'ils ne sont pas prioritaires, qu'ils soient des particuliers ou des entreprises.

À l'heure du tout-numérique, cette situation, lorsqu'elle perdure, peut être très pénalisante tous secteurs confondus.

Aussi, au regard de cette situation, nous saluons le travail de notre collègue Patrick Chaize, auteur de cette proposition de loi, ainsi que celui de la rapporteure. Ce texte prévoit des mesures concrètes pour encadrer la sous-traitance et protéger les usagers.

Généralement, le problème, c'est le raccordement de la fibre jusqu'au domicile de l'abonné dans la mesure où ce raccordement part d'une armoire dite « spaghettis ». Cette expression parle d'elle-même : il y a tellement de branchements et de fils que cela peut être très compliqué de s'y retrouver. On a même vu des sous-traitants arracher un branchement pour le remplacer par un autre.

Le mode Stoc, régulièrement utilisé par les opérateurs d'infrastructure, implique l'intervention de sous-traitants, de sorte que l'on s'éloigne de la chaîne initiale ayant déployé le réseau. Il est donc nécessaire de poser clairement le principe de responsabilité des opérateurs d'infrastructure tout en apportant des garanties aux abonnés. Cela implique la mise en place d'un socle d'exigences minimales, lequel est donc bienvenu dans ce texte.

Les techniciens qui interviennent doivent en effet disposer de la formation adéquate pour effectuer « dans les règles de l'art » la réparation ou le raccordement demandés.

Pour rendre effectif ce socle d'exigences, il est important de prévoir un suivi et un partage des données entre l'opérateur qui a déployé la fibre et celui qui effectuera le raccordement depuis la rue jusqu'au domicile. Le compte rendu d'intervention est la première étape pour garantir ce suivi.

Il faudra également veiller à ce que les contrôles soient effectifs et suivis d'effet. Nous espérons ainsi que l'Arcep disposera des moyens financiers suffisants pour mener à bien cette mission.

Le cas échéant, il nous faudra nous poser la question du préraccordement, c'est-à-dire de la possibilité d'aller jusqu'au domaine privé pour installer préalablement les équipements qui permettront le raccordement, comme une prise terminale optique. Cela facilitera le travail effectué ensuite par l'opérateur.

Enfin, le texte prévoit des mesures qui s'appliqueront aux collectivités par le biais des réseaux d'initiative publique (RIP). Pour notre part, nous soutenons la mesure de bon sens qui consiste à assurer la transmission à la collectivité territoriale du calendrier hebdomadaire des interventions dans un délai de quarante-huit heures, lorsqu'elle en a fait la demande.

Aussi l'ensemble des élus du groupe Les Indépendants – République et Territoires votera-t-il cette proposition de loi. §

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chaize

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis très heureux de vous retrouver aujourd’hui dans cet hémicycle pour examiner la proposition de loi visant à assurer la qualité et la pérennité des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, dont j’ai été à l’initiative, avec plus d’une centaine de mes collègues – 139 pour être exact –, de différents horizons politiques.

L’objet de ce texte est clair : répondre aux alertes, répétées depuis des années, relatives aux malfaçons et dégradations récurrentes, qui surviennent lors du raccordement de l’utilisateur final à la fibre optique.

Ces difficultés sont généralement attribuées à une mauvaise gestion du mode « sous-traitance opérateurs commerciaux » (Stoc), par lequel l’opérateur d’infrastructures, responsable du réseau, confie l’étape finale du déploiement aux opérateurs commerciaux. Or ces derniers ont eux-mêmes souvent recours à leurs propres sous-traitants.

Cette pratique, dérogatoire au mode principal de déploiement de la fibre, par lequel l’opérateur d’infrastructures assure le déploiement dans son intégralité, présente deux singularités. D’une part, elle est dépourvue de fondement législatif, puisqu’elle s’est développée sur la base de décisions de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep). D’autre part, elle semble entraver la liberté contractuelle et la liberté d’entreprendre, dès lors que la mise en œuvre du mode Stoc est considérée comme de droit par l’Arcep.

Le régulateur avait pourtant prévu un garde-fou en précisant que le recours automatique au mode Stoc ne serait valable qu’à la condition que les opérateurs commerciaux respectent strictement les règles de l’art.

Malheureusement, les désordres persistants sur l’ensemble du territoire démontrent à quel point ce principe demeure théorique.

Bien entendu, le tableau n’est pas entièrement noir. Le mode Stoc a été un élément clef du déploiement massif et rapide de la fibre sur notre territoire. Alors que nous figurions parmi les plus mauvais élèves de l’Union européenne avant 2013, plus de 18 millions de Français sont désormais raccordés à cette technologie.

Toutefois, ce succès ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt. La situation actuelle n’est pas acceptable au regard des sommes engagées par l’État et les collectivités territoriales pour le déploiement de la fibre depuis 2013 dans le cadre du plan France Très Haut Débit ; elle l’est encore moins au regard des attentes des usagers quant à la qualité de la connexion, alors que les jours du réseau cuivre sont désormais comptés.

Le Gouvernement, l’Arcep et les opérateurs ont pris conscience du problème : dès 2019, un groupe de travail a été mis en place entre les opérateurs d’infrastructure (OI) et les opérateurs commerciaux (OC), aboutissant en 2020 à l’élaboration d’une feuille de route multilatérale pour l’amélioration de l’exploitation et de la qualité des réseaux fibre jusqu’à l’abonné (FttH, pour Fiber to the Home).

Cette feuille de route envisageait l’évolution des contrats Stoc selon quatre axes : un volet sous-traitance prévoyant une meilleure information de l’OC envers l’OI sur le recours à la sous-traitance et une limitation à deux du nombre de rangs de sous-traitants ; un volet qualité du réseau, incluant l’obligation de communiquer un compte rendu d’intervention (CRI) pour chaque raccordement ; un volet qualité de prestation, imposant aux opérateurs commerciaux de faire appel à des intervenants formés ; enfin, un volet sécurité, selon lequel l’OI doit s’assurer que chaque intervenant dispose des agréments nécessaires.

Alors que ces nouveaux contrats auraient dû être mis en œuvre avant la fin de 2020, ils n’étaient toujours pas appliqués sur une grande partie du territoire à l’été 2022. Face à cette inertie et à l’exaspération légitime des usagers et des élus locaux, j’ai déposé en juillet 2022 la proposition de loi qui vous est soumise aujourd’hui.

Monsieur le ministre, dès votre nomination, en juillet dernier, vous avez exprimé votre volonté de vous saisir de ce sujet ; je salue votre engagement. Les opérateurs ont d’ailleurs promis de nouvelles mesures en septembre 2022. Si cette proposition de loi a contribué à les sensibiliser à la nécessité d’accélérer leurs efforts, nous pouvons nous en réjouir.

Néanmoins, nous avons le droit de nous interroger sur la crédibilité de ces annonces comme sur la capacité de la filière à mettre rapidement en place les mesures promises depuis trois ans. La fermeture du réseau cuivre étant désormais engagée, nous ne pouvons plus nous permettre de repousser les échéances.

C’est la raison pour laquelle ce texte a été inscrit à l’ordre du jour de notre assemblée. Il propose un ensemble de mesures concrètes pour assurer la qualité des raccordements à la fibre par le biais de plusieurs leviers.

Le premier, qui est peut-être le plus important, concerne l’encadrement des modalités de recours au mode Stoc. L’article 1er de la proposition de loi vise principalement à clarifier la répartition des responsabilités entre opérateurs et à rappeler le rôle de garant de la qualité des raccordements confié aux opérateurs d’infrastructure.

Cet article souligne que le recours au mode Stoc relève d’un choix de l’OI pour rétablir un véritable principe de sous-traitance et met en place des outils pour assurer la bonne réalisation des travaux et la réparation des malfaçons.

D’une part, il crée un guichet unique auprès de l’OI, chargé de traiter les difficultés de raccordement rencontrées par les usagers. D’autre part, il prévoit la remise systématique à l’utilisateur final, par l’intervenant chargé du raccordement, d’un certificat attestant de la conformité des opérations aux règles de l’art.

L’utilisateur pourra également se prévaloir face aux opérateurs des stipulations des contrats de sous-traitance, lesquels devront intégrer des garanties en matière de qualité de raccordement et de contrôle.

En outre, l’article 3, dans sa rédaction initiale, vise à interdire le recours au mode Stoc dans les zones ayant le statut de zone fibrée, soit 430 communes environ. Dans ces secteurs, déjà entièrement raccordables à la fibre et dans lesquels la transition de l’ADSL vers cette technologie va s’accélérer, il m’a semblé indispensable que la qualité des raccordements fasse l’objet d’une attention particulière.

Le deuxième axe concerne plus spécifiquement les leviers à disposition des collectivités pour contrôler la bonne réalisation des raccordements dans les réseaux d’initiative publique (RIP). La qualité des raccordements revêt en effet une importance supplémentaire dans ces zones, car les réseaux y sont déployés grâce aux deniers publics.

L’article 2 prévoit notamment la remise à la collectivité porteuse du RIP des certificats attestant de la qualité des raccordements afin que celle-ci puisse vérifier la bonne réalisation des travaux. En l’absence de remise de ces certificats, la collectivité ne sera pas tenue de rémunérer l’opérateur pour les travaux de raccordement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Jean Verzelen

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme les crèches, comme la poste et comme les commerces de proximité, internet est devenu un service structurant des villes et des villages. Aujourd'hui, il est indispensable d'avoir une connexion internet.

Le déploiement de la fibre progresse plus ou moins vite selon les territoires, mais, globalement – cela a été dit –, sa dynamique est plutôt bonne depuis quelques années. Dans les zones d'appel à manifestation d'intention d'investissement (Amii), les opérateurs ont pris des engagements pour permettre ce développement. Dans les autres, les collectivités locales se sont emparées du sujet à bras le corps afin d'apporter les mêmes services dans les territoires ruraux.

Sur le papier, la répartition était équilibrée et a bien fonctionné, comme on peut le constater dans un territoire que je connais bien, l'Aisne, qui est l'un des départements ruraux les mieux fibrés de France.

Cependant, certains élus locaux ont fait remonter à plusieurs reprises des difficultés de raccordement. Ici, une personne est mécontente de constater que son voisin est bien raccordé tandis qu'elle ne l'est pas ; là, une autre qui a toujours eu la fibre s'en trouve soudainement privée. Enfin, on ne peut pas négliger l'impact qu'a eu la crise du covid sur le déploiement de la fibre.

En effet, l'Arcep, dans son dernier rapport, a constaté des ralentissements de déploiement, des problèmes techniques et des malfaçons. On peut en conclure que l'objectif initial d'une France où tous les foyers seraient fibrés en 2023 ne sera malheureusement pas atteint.

Au 31 décembre 2022, 79 % des foyers étaient raccordables à la fibre optique, mais « raccordables » ne signifie pas « raccordés ». Si plus de 15 millions de foyers sont effectivement reliés à la fibre, il ne faut pas oublier ceux qui attendent toujours un raccordement, ceux qui ont été raccordés, mais sont confrontés à des coupures, qu'elles soient prolongées ou non, ou encore ceux à qui l'on dit qu'ils ne sont pas prioritaires, qu'ils soient des particuliers ou des entreprises.

À l'heure du tout-numérique, cette situation, lorsqu'elle perdure, peut être très pénalisante tous secteurs confondus.

Aussi, au regard de cette situation, nous saluons le travail de notre collègue Patrick Chaize, auteur de cette proposition de loi, ainsi que celui de la rapporteure. Ce texte prévoit des mesures concrètes pour encadrer la sous-traitance et protéger les usagers.

Généralement, le problème, c'est le raccordement de la fibre jusqu'au domicile de l'abonné, dans la mesure où ce raccordement s'effectue dans une armoire dite « spaghettis ». Cette expression parle d'elle-même : cette armoire contient tellement de branchements et de fils qu'il peut être très compliqué de s'y retrouver. On a même vu des sous-traitants arracher un branchement pour le remplacer par un autre.

Le mode Stoc, régulièrement utilisé par les opérateurs d'infrastructure, implique l'intervention de sous-traitants, de sorte que l'on s'éloigne de la chaîne initiale ayant déployé le réseau. Il est donc nécessaire de poser clairement le principe de responsabilité des opérateurs d'infrastructure tout en apportant des garanties aux abonnés. Cela passe par la mise en place d'un socle d'exigences minimales, lequel est donc bienvenu dans ce texte.

Les techniciens qui interviennent doivent en effet disposer d'une formation adéquate pour effectuer « dans les règles de l'art » la réparation ou le raccordement requis.

Pour rendre effectif ce socle d'exigences, il est important de prévoir un suivi et un partage des données entre l'opérateur qui a déployé la fibre et celui qui effectuera le raccordement depuis la rue jusqu'au domicile. Le compte rendu d'intervention est la première étape pour garantir ce suivi.

Il faudra également veiller à ce que les contrôles soient effectifs et suivis d'effet. Nous espérons ainsi que l'Arcep disposera des moyens financiers suffisants pour mener à bien cette mission.

Le cas échéant, il nous faudra nous poser la question du préraccordement, c'est-à-dire de la possibilité d'aller jusqu'au domaine privé pour installer préalablement les équipements qui permettront le raccordement, comme une prise terminale optique. Cela facilitera le travail effectué ensuite par l'opérateur.

Enfin, le texte prévoit des mesures qui s'appliqueront aux collectivités par le biais des réseaux d'initiative publique (RIP). Pour notre part, nous soutenons la mesure de bon sens qui consiste à assurer la transmission à la collectivité territoriale du calendrier hebdomadaire des interventions dans un délai de quarante-huit heures, lorsqu'elle en a fait la demande.

Aussi l'ensemble des élus du groupe Les Indépendants – République et Territoires votera-t-il cette proposition de loi. §

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la fibre optique est devenue le principal réseau d'accès à internet pour les Français : le taux de locaux raccordables approche aujourd'hui les 80 %. Mais si le déploiement de la fibre progresse bien à l'échelle nationale – cela a été dit –, de fortes disparités régionales demeurent. Selon le rapport de France Stratégie de 2023, certains départements à dominante rurale dépendent toujours à plus de 25 % du réseau cuivre.

Je le souligne ici, et je sais que nous partageons cette analyse, le non-accès à la fibre porte gravement atteinte à un aménagement équilibré du territoire et constitue une rupture d'égalité qui ne peut être tolérée.

Le cap de 2025 a été fixé pour la généralisation de la fibre afin de garantir son accès à tous les usagers. Il est de notre responsabilité, ici, au Sénat, de nous assurer du respect de cet objectif. Nous avons tous en tête la situation intolérable des zones blanches pour le réseau sans fil : il s'agit de ne pas la reproduire. Cette proposition de loi vise prend en compte cette préoccupation et je remercie son auteur, ainsi que la rapporteure, pour leur travail et leur engagement.

Avec le plan France Très Haut Débit, les opérateurs commerciaux sont arrivés massivement sur le marché des réseaux fibre. Cette accélération s'explique par une spécificité française : dans la pratique, l'opération de raccordement final du client est confiée à l'opérateur commercial. En d'autres termes, la partie la plus importante et délicate pour le consommateur est sous-traitée par l'opérateur d'infrastructure.

Cette sous-traitance – le mode Stoc – est non seulement une exception française, mais également une dérogation à notre mode de fonctionnement traditionnel sur les autres réseaux, qu'il s'agisse du gaz, de l'électricité ou de l'eau.

Depuis sa mise en place en 2015, cette méthode est source de nombreuses difficultés – coupures inopinées, techniciens peu scrupuleux, raccordements impossibles ou malfaçons – qui mettent à mal le déploiement de la fibre. Du fait des nombreux litiges entre opérateurs et usagers – nous en avons tous des exemples dans nos territoires –, certaines collectivités ont tiré le signal d'alarme.

Face à l'accroissement du nombre des signalements, l'Arcep a réuni les opérateurs d'infrastructure et les opérateurs commerciaux dès 2019 en vue d'améliorer l'exploitation des réseaux et de résoudre les difficultés. Manifestement, les démarches entreprises par les opérateurs en concertation avec le Gouvernement sont insuffisantes, comme l'a souligné l'auteur de ce texte, Patrick Chaize, que je remercie encore. Nous serons donc attentifs à l'avenir du plan d'action pour améliorer la qualité des réseaux fibre, que les acteurs de la filière ont remis au Gouvernement en septembre 2022.

Dans ce contexte particulier, qui requiert des mesures fortes et efficaces, le groupe écologiste accueille positivement cette proposition de loi. Elle doit permettre d'améliorer le déploiement du plan France Très Haut Débit et de limiter les difficultés et les dysfonctionnements liés à ces raccordements.

Ce texte apportera des outils législatifs pour réguler et contrôler les opérateurs et leurs sous-traitants, pour renforcer les pouvoirs de l'Arcep et mieux protéger les consommateurs, et ainsi rassurer les collectivités particulièrement affectées par ces désordres.

Nous saluons le travail effectué en commission sous l'impulsion de Mme la rapporteure, qui a consolidé le dispositif d'encadrement de la réalisation des raccordements à la fibre tout en veillant à ne pas ralentir le déploiement de cette technologie à deux ans de l'achèvement du plan et alors que la fermeture du réseau cuivre est imminente.

Pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, il apparaît essentiel de renforcer la garantie de la qualité du raccordement grâce à des pouvoirs accrus de l'Arcep et d'améliorer la formation des intervenants chargés de l'installation de la fibre. C'est un point sur lequel je souhaitais insister.

Par ailleurs, les collectivités, en particulier dans les zones rurales, ont été affectées par la mauvaise gestion du déploiement de la fibre, car c'est vers elles que se sont souvent tournés ceux qui ont rencontré des difficultés de connexion. Il est donc essentiel de consulter davantage les élus locaux et, après un constat de carence dans les zones d'initiative privée, de prévoir de nouveaux appels à manifestation d'intérêt.

En matière de protection des consommateurs, notre groupe proposera un amendement travaillé avec l'UFC-Que Choisir visant à modifier les seuils de sanction en cas d'interruption du service d'accès à internet. Une protection efficace des consommateurs paraît nécessaire, car la perte d'une connexion internet entraîne des conséquences qui vont bien au-delà du fait de payer un abonnement pour un service qui ne fonctionne pas, notamment pour les petites entreprises et pour les artisans.

L'absence d'accès à internet affectant la vie quotidienne des personnes, il faut insister encore davantage sur la mise en œuvre du raccordement de tous les foyers.

Nous aurions pu, dans le cadre de notre débat, aborder d'autres sujets, notamment le choix du mode Stoc ou encore l'augmentation de la consommation d'énergie liée au passage au numérique, même si nous insistons sur le fait que la fibre consomme quatre fois moins d'énergie que le réseau cuivre.

Nous n'avons pas le temps pour tout cela, monsieur le président.

En conclusion, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires considérant que ce texte va dans le bon sens, il votera donc en sa faveur.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Demas

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui, si elle peut sembler technique au premier abord, répond à une préoccupation quotidienne de nos concitoyens.

Je tiens à remercier mon collègue Patrick Chaize d'avoir déposé ce texte, qui apporte des solutions pragmatiques pour remédier aux désordres occasionnés dans le raccordement d'utilisateurs finals à la fibre, en raison du recours à une chaîne de sous-traitance, souvent mal maîtrisée, dans le cadre du mode Stoc. Cette expression désigne un mode de réalisation des raccordements à la fibre par lequel l'opérateur d'infrastructure, responsable du réseau, confie la dernière partie du raccordement aux opérateurs commerciaux, qui font généralement eux-mêmes appel à d'autres prestataires.

Alors que cette pratique était l'exception avant 2015, ce mode opératoire est devenu la règle.

Nous avons tous constaté dans nos territoires l'exaspération des usagers et des élus locaux en raison des dysfonctionnements issus du recours au mode Stoc : débranchements injustifiés, branchements réalisés de façon anarchique, armoires vandalisées et, surtout, absence de recours effectif.

À l'aube de la fermeture du réseau cuivre, le raccordement final à la fibre optique est sans conteste le talon d'Achille du plan France Très Haut Débit. Il est dès lors de notre responsabilité de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la réussite de ce projet ambitieux, alors même que nous entrons dans sa dernière ligne droite.

Face aux problèmes liés à la qualité des raccordements à la fibre, trois options s'offrent à nous.

La première, privilégiée par le Gouvernement jusqu'à maintenant, consiste à négocier avec les opérateurs une solution contractuelle non prescriptive. Si ce mode d'action apparaît comme le plus souple, force est de constater qu'il est pour le moment insuffisant et qu'il n'a pas produit les résultats escomptés.

La révision des contrats Stoc, initiée en 2020 grâce aux contrats dits « Stoc II » puis « Stoc III », a permis des progrès, qui restent toutefois trop timides. Le constat est clair : trois ans après le début des négociations, les engagements pris par les opérateurs peinent encore à être mis en œuvre.

La négociation avec la filière est indispensable, mais elle gagnerait à être encadrée et accompagnée par le législateur si nous souhaitons accélérer la montée en qualité des réseaux fibre et venir à bout des réticences de certains opérateurs.

La deuxième option, la plus radicale, consisterait à mettre fin au mode Stoc et à charger l'opérateur d'infrastructure de la réalisation du raccordement, passant donc en mode OI. À première vue, il peut s'agir de la solution la plus évidente et je comprends que nombre d'acteurs, certains élus locaux notamment, aient pu l'avoir à l'esprit.

Elle conduirait cependant à changer de plan au milieu de la bataille, alors que, depuis 2018, 20 000 locaux en moyenne sont raccordés chaque jour à la fibre. Changer de mode opératoire à ce stade risquerait de mettre un coup d'arrêt à ce déploiement, ce qui ne serait pas conforme à nos objectifs.

La troisième option, à laquelle je souscris pleinement, consiste à mieux encadrer le mode Stoc. Cette solution pragmatique permet de répondre aux préoccupations des usagers et des collectivités sans pour autant renverser la table ni déstabiliser les dynamiques à l'œuvre.

Le présent texte s'inscrit pleinement dans cette troisième voie d'équilibre. Je remercie Patrick Chaize et la commission de m'avoir accordé leur confiance à ce sujet.

Dans des délais restreints, j'ai entendu toutes les parties prenantes – opérateurs, régulateur, administrations centrales, élus locaux et usagers – et proposé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable de reprendre plusieurs de leurs suggestions.

J'en viens à présent aux axes qui ont guidé le travail de la commission et aux principales modifications apportées à la proposition de loi.

Le premier axe a été la clarification des modalités de mise en œuvre du mode Stoc et de la répartition des responsabilités entre les opérateurs.

Conformément aux objectifs de Patrick Chaize, nous avons prévu, à l'article 1er, que l'opérateur d'infrastructure confie la réalisation du raccordement à la fibre à l'opérateur commercial selon un mécanisme de priorité et sous réserve du strict respect des règles de l'art.

Cette proposition pragmatique permet de conserver la volonté de l'auteur de garantir un principe de sous-traitance, en rappelant que la mise en œuvre du mode Stoc relève d'un choix de l'opérateur d'infrastructure, tout en préservant l'équilibre des contrats de sous-traitance en cours.

Avec le même objectif, la commission a souhaité renforcer le caractère opérationnel du guichet unique pour prendre en charge les difficultés de raccordement à la fibre rencontrées par les utilisateurs. Nous avons renforcé la place de ces derniers dans le dispositif, en leur permettant de suivre la résolution des difficultés rencontrées et en garantissant que celle-ci intervienne dans un délai raisonnable, qui ne pourra excéder dix jours.

Ce guichet unique a suscité des réactions différentes chez les usagers, les opérateurs et le Gouvernement. Si tout le monde s'accorde sur son utilité, la définition de ses modalités opérationnelles fait débat. Notre proposition est une première pierre à l'édifice, mais nous sommes ouverts à la perspective qu'un travail plus approfondi soit mené sur cette question dans le cadre de la navette parlementaire.

Enfin, la commission a modifié l'article 3, qui interdit le recours au mode Stoc dans certaines zones du territoire, pour en affiner le périmètre d'application afin de prendre en compte la fermeture du réseau cuivre et restreindre l'interdiction aux raccordements longs et complexes, de manière à limiter les atteintes à la liberté d'entreprendre.

Le deuxième axe des travaux de la commission a été de consolider les exigences de qualité et de contrôle applicables aux raccordements.

Nous avons prévu, à l'article 1er, l'élaboration d'un socle d'exigences minimales de qualité, que les contrats et les cahiers des charges liant les opérateurs commerciaux et leurs sous-traitants devront respecter.

Nous avons également introduit une obligation de labellisation de tout intervenant chargé de réaliser un raccordement à la fibre, selon un référentiel national. De plus, nous avons consacré dans la loi la réalisation systématique d'un compte rendu d'intervention pour permettre à l'opérateur d'infrastructure et à l'utilisateur de vérifier la bonne réalisation du raccordement.

Enfin, à l'article 2, qui concerne les réseaux d'initiative publique, c'est-à-dire les zones dites « RIP », nous avons garanti un délai maximal de quarante-huit heures pour la transmission à la collectivité du calendrier hebdomadaire des interventions de raccordement lorsque cette dernière en fait la demande, de manière à renforcer les moyens de contrôle des élus locaux, souvent démunis face aux malfaçons dans le raccordement final.

Le troisième et dernier axe des travaux de la commission a été d'assurer le caractère opérant des dispositifs.

Nous avons ainsi proposé une nouvelle rédaction de l'article 4, qui étend les pouvoirs en matière de qualité des raccordements à la fibre de l'Arcep, dont nous entendons ainsi clarifier les moyens de contrôle et de sanction.

À l'article 5, qui ouvre de nouveaux droits aux consommateurs en cas d'interruption prolongée du service d'accès à internet, nous avons, d'une part, amélioré l'articulation dans le temps des sanctions susceptibles d'être prononcées à l'encontre de l'opérateur commercial et, d'autre part, veillé à protéger ce dernier d'éventuels abus de la part des consommateurs.

En somme, tous ces ajustements de bon sens, qui résultent d'un travail approfondi de concertation avec tous les acteurs, s'inscrivent pleinement dans l'esprit du texte présenté par Patrick Chaize tout en consolidant sa portée et son caractère opérationnel.

Vous l'aurez compris, face aux dysfonctionnements dans le raccordement des utilisateurs finals à la fibre optique, il n'existe pas de solution miracle emportant satisfaction de l'ensemble des intervenants. Il y a pourtant urgence à agir pour assurer la pérennité et la qualité des raccordements. Le texte de la commission est une proposition ambitieuse et équilibrée, mais nous avons conscience qu'elle est aussi perfectible.

Monsieur le ministre, la balle est dans votre camp pour poursuivre, dans le cadre de la navette parlementaire, le travail sur cette initiative sénatoriale. Celle-ci répond, vous l'aurez compris, à de très fortes attentes de la part des usagers et des élus locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chaize

Le troisième levier concerne les pouvoirs de contrôle et de sanction de l’Arcep.

L’article 4 octroie au régulateur des télécommunications des pouvoirs spécifiques pour garantir la qualité des raccordements à la fibre à plusieurs égards.

Il confère ainsi une base législative au pouvoir de police spéciale des communications électroniques que détiennent conjointement l’Arcep, le ministre en charge du numérique et l’Agence nationale des fréquences (ANFR). Il prévoit également la publication trimestrielle par l’Arcep d’indicateurs portant sur le niveau de qualité de service des réseaux fibre transmis par les opérateurs.

La réalisation d’audits sur la qualité de l’accès au réseau de fibre optique et l’instauration d’un pouvoir d’astreinte au profit de l’Arcep sur ce sujet sont également prévues. Le texte intègre à ce titre l’ensemble des normes relatives à la qualité du raccordement à la fibre dans le corpus des règles dont l’Arcep sanctionne le respect.

Enfin, le dernier levier concerne la protection des droits des consommateurs en cas d’interruption prolongée de l’accès à internet.

L’article 5 vise ainsi à renforcer cette protection par la création de trois nouvelles pénalités à l’encontre du fournisseur d’accès à internet, selon la durée de la panne : suspension du paiement de l’abonnement d’abord ; versement d’une indemnité à l’abonné par l’opérateur ensuite ; enfin, résiliation sans frais de l’abonnement par l’usager.

Mes chers collègues, tels sont les grands axes du texte qui vous est soumis. Celui-ci a suscité une opposition de principe des opérateurs commerciaux, qui ont fait valoir que des engagements pris par la filière étaient préférables à une proposition de loi. Je pense, pour ma part, que les uns n’excluent pas l’autre.

Nous vous proposons donc de voter ce texte afin d’obtenir les engagements tant attendus et de leur conférer une assise solide. J’entends les inquiétudes concernant les risques qu’engendrerait une remise en cause du mode Stoc pour la continuité du déploiement de la fibre. Je tiens à rassurer sur ce point : notre objectif n’est en aucun cas de remettre en cause le modèle actuel, mais bien de guider et d’accompagner les démarches de qualité en cours afin de mieux les traduire sur le terrain. À cet égard, j’invite les opérateurs à lire le texte.

J’ai travaillé dans un état d’esprit d’équilibre avec la rapporteure de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, Patricia Demas, que je tiens à remercier pour son écoute, son implication et les compléments utiles qu’elle a apportés au texte initial.

La qualité des réseaux fibre est un sujet d’intérêt national qui ne saurait dépendre exclusivement du bon vouloir des acteurs économiques. Monsieur le ministre, nous comptons sur vous pour prendre conscience de notre responsabilité collective sur ce sujet et pour nous aider à enrichir et à perfectionner cette initiative sénatoriale dans le cadre de la navette parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à assurer la qualité et la pérennité des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, présentée par M. Patrick Chaize et plusieurs de ses collègues (proposition n° 795, texte de la commission n° 518, rapport n° 517).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Patrick Chaize, auteur de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Marchand

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2013, l'État s'était engagé à couvrir intégralement notre territoire en très haut débit à moyenne échéance grâce au plan France Très Haut Débit. Les objectifs fixés étaient les suivants : le raccordement de 100 % des 35 millions de logements et locaux à usage professionnel, dont 80 % en fibre optique jusqu'à l'abonné en 2022, et la généralisation de la fibre optique en 2025.

En somme, il s'agissait que d'ici à deux ans tous les Français, notamment ceux qui habitent en zone rurale, puissent bénéficier d'une connectivité numérique performante chez eux comme sur leur lieu de travail.

Pour rappel, il y a dix ans, le plan prévoyait initialement 20 milliards d'euros d'investissements publics et privés, dont 3, 3 milliards de subventions de l'État à destination des collectivités locales dans les zones dites « non conventionnées ».

Dans un rapport publié en janvier 2017, la Cour des comptes avait toutefois substantiellement réévalué le coût du plan à 35 milliards d'euros, en estimant que si l'objectif intermédiaire d'une couverture de 50 % du territoire était atteint, l'objectif en matière de très haut débit fixé en 2022 semblait compromis par l'insuffisance du co-investissement privé.

Dans le cadre du plan de relance présenté en septembre 2020, le Gouvernement a amplifié son effort et mobilisé 420 millions d'euros pour soutenir les collectivités locales qui en avaient le plus besoin, n'ayant pu encore viser la généralisation de la fibre. Je pense à la Bretagne, à Mayotte et à l'Auvergne à titre d'exemples.

Quel constat faisons-nous aujourd'hui ? L'objectif d'une couverture de 80 % du territoire en fibre optique était quasi atteint au 31 décembre 2022, ce qui situe la France à la tête des pays les plus fibrés en Europe.

Néanmoins, « raccordable » ne veut pas dire « raccordé » et l'on observe encore des disparités territoriales fortes entre d'une part les zones très denses et les zones moins denses d'initiative privée, où les taux de couverture des locaux sont respectivement de 91 % et 87 %, d'autre part les zones moins denses d'initiative publique, où le taux de couverture est de 68 %. Il faut toutefois noter que ces dernières connaissent le taux de déploiement le plus dynamique, soit 73 % en 2022.

L'objectif d'une couverture de 100 % du territoire par la fibre en 2025 est quasi atteignable, en dépit des 670 000 locaux identifiés comme difficilement raccordables, lesquels devraient faire l'objet de mesures spécifiques et être couverts à l'horizon 2026.

S'il est incontestable que la France a mis en œuvre une dynamique puissante de déploiement de la fibre, il faut aussi constater – c'est l'objet de cette proposition de loi – que des difficultés opérationnelles ont vu le jour, parfois de manière intolérable, notamment pour les collectivités territoriales qui s'en sont fait l'écho.

En effet, le modèle de déploiement de la fibre repose principalement sur la sous-traitance – ce qu'on appelle le mode Stoc –, laquelle subit une forte pression sur les prix de la part des donneurs d'ordre.

Or, la sous-traitance ne permet pas un contrôle optimal de la formation des techniciens chargés d'effectuer les raccordements, ce qui entraîne des malfaçons non seulement sur le réseau, mais aussi parfois sur les infrastructures situées à proximité, à l'instar des tableaux électriques ou des réseaux de gaz.

Si l'Arcep recommande un plafond de deux rangs de sous-traitance, l'autorité indique avoir observé des opérations portant à cinq, voire à six, le nombre de rangs de sous-traitance.

Les points de mutualisation situés en pleine rue concentrent les branchements des câbles de fibre optique et les difficultés opérationnelles : entre les dégradations des armoires techniques et les débranchements sauvages, les particuliers comme les élus locaux sont nombreux à faire part de leur mécontentement. Les témoignages concernant des dégradations, des incivilités ou des malfaçons sont fréquents, autant d'actes dont les techniciens des sous-traitants sont très souvent à l'origine.

La proposition de loi que nous examinons sur l'initiative de notre collègue Patrick Chaize intervient à la suite de ces différents constats.

Notre collègue, également président de l'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca), est un fin connaisseur des questions liées à la fibre. Son expertise sur les problématiques liées à la qualité des raccordements et de l'exploitation sur les réseaux de fibre optique, ainsi que son exigence sur la qualité de service des réseaux et des raccordements, a constitué un éclairage qui porte déjà ses fruits.

En effet, grâce à la description alarmante de la situation en matière de raccordement des abonnés à la fibre optique effectuée dans l'exposé des motifs de la proposition de loi de juillet 2022, les acteurs de la filière ont pris pleinement conscience des difficultés rencontrées par certains usagers, de leur insatisfaction et des légitimes préoccupations des élus locaux, de même que de la vigilance des parlementaires sur ce sujet.

Face au tableau parfois sombre du déploiement de la fibre, les opérateurs se devaient de réagir. En septembre dernier, un plan d'action a été décidé par les acteurs de la filière, qui repose notamment sur la prise de photos avant et après l'opération, jointes au compte rendu d'intervention, et sur la remise en état des points de mutualisation.

La Fédération française des télécoms vient aussi de publier des grilles de compétences à destination des donneurs d'ordre, qu'il s'agisse des opérateurs commerciaux ou des opérateurs d'infrastructure, et de leurs prestataires. Le référentiel concernant les sous-traitants porte notamment sur la formation de leurs techniciens, sur les règles de sécurité et d'ingénierie pour les travaux optiques ou sur les bonnes pratiques lors de travaux chez le client. Ce référentiel sera en application à la fin du mois.

De la même manière, le renforcement du pouvoir de contrôle et de sanction de l'Arcep va indéniablement dans le bon sens.

À l'heure où nous examinons cette proposition de loi, ces dispositions sont mises en œuvre, mais il faudra bien évidemment un certain temps pour les évaluer correctement et pour que l'on puisse mesurer si la prise de conscience de la filière et les mesures engagées permettent de mettre fin aux dysfonctionnements dénoncés.

On pourrait opposer que les dispositions que nous examinons aujourd'hui sont de nature à faire courir le risque de ralentir le déploiement de la fibre par quelques effets de bord préjudiciables. En effet, les opérateurs d'infrastructure, s'ils souscrivent à l'ambition du texte, ont manifesté leur crainte que certains mécanismes prévus dans cette proposition de loi ne finissent par complexifier leur tâche.

Mais nous savons bien, et cela vaut aussi pour les opérateurs, que là où il y a une volonté, il y a un chemin.

En définitive, le constat effectué dans la proposition de loi de juillet 2022 était le bon : il était clairement nécessaire. Celle-ci a d'ores et déjà produit des effets, manifestement dans le bon sens, puisque le Gouvernement a obtenu un certain nombre d'engagements et de concessions de la part des opérateurs.

Il nous appartient donc de donner des signes de notre volonté d'agir et, même s'il peut sembler raisonnable à certains de laisser du temps à la filière pour poursuivre la résolution des dysfonctionnements constatés en juillet 2022, ce texte est un bel accélérateur pour faire et bien faire.

C'est pourquoi le groupe RDPI votera cette proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la fibre optique est devenue le principal réseau d'accès à internet pour les Français : le taux de locaux raccordables approche aujourd'hui les 80 %. Mais si le déploiement de la fibre progresse bien à l'échelle nationale – cela a été dit –, de fortes disparités régionales demeurent. Selon le rapport de France Stratégie de 2023, certains départements à dominante rurale dépendent toujours à plus de 25 % du réseau cuivre.

Je le souligne ici, et je sais que nous partageons cette analyse, le non-accès à la fibre porte gravement atteinte à un aménagement équilibré du territoire et constitue une rupture d'égalité qui ne peut être tolérée.

Le cap de 2025 a été fixé pour la généralisation de la fibre afin de garantir son accès à tous les usagers. Il est de notre responsabilité, ici, au Sénat, de nous assurer du respect de cet objectif. Nous avons tous en tête la situation intolérable des zones blanches pour le réseau sans fil : il s'agit de ne pas la reproduire. Cette proposition de loi prend en compte cette préoccupation et je remercie son auteur, ainsi que la rapporteure, pour leur travail et leur engagement.

Avec le plan France Très Haut Débit, les opérateurs commerciaux sont arrivés massivement sur le marché des réseaux de fibre optique. Cette accélération s'explique par une spécificité française : dans la pratique, l'opération de raccordement final du client est confiée à l'opérateur commercial. En d'autres termes, la partie la plus importante et délicate pour le consommateur est sous-traitée par l'opérateur d'infrastructure.

Cette sous-traitance – le mode Stoc – est non seulement une exception française, mais également une dérogation à notre mode de fonctionnement traditionnel sur les autres réseaux, qu'il s'agisse des réseaux de gaz, d'électricité ou d'eau.

Depuis sa mise en place en 2015, cette méthode est source de nombreuses difficultés – coupures inopinées, techniciens peu scrupuleux, raccordements impossibles ou malfaçons –, qui mettent à mal le déploiement de la fibre. Du fait des nombreux litiges entre opérateurs et usagers – nous en connaissons tous des exemples dans nos territoires –, certaines collectivités ont tiré le signal d'alarme.

Face à l'accroissement du nombre des signalements, l'Arcep a réuni les opérateurs d'infrastructure et les opérateurs commerciaux dès 2019 en vue d'améliorer l'exploitation des réseaux et de résoudre les difficultés. Manifestement, les démarches entreprises par les opérateurs en concertation avec le Gouvernement sont insuffisantes, comme l'a souligné l'auteur de ce texte, Patrick Chaize, que je remercie encore. Nous serons donc attentifs à l'avenir du plan d'action pour améliorer la qualité des réseaux fibre, que les acteurs de la filière ont remis au Gouvernement en septembre 2022.

Dans ce contexte particulier, qui requiert des mesures fortes et efficaces, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires accueille positivement cette proposition de loi. Elle doit permettre d'améliorer le déploiement du plan France Très Haut Débit et de limiter les difficultés et les dysfonctionnements liés à ces raccordements.

Ce texte apportera des outils législatifs pour réguler et contrôler les opérateurs et leurs sous-traitants, pour renforcer les pouvoirs de l'Arcep et mieux protéger les consommateurs, et ainsi rassurer les collectivités particulièrement affectées par ces désordres.

Nous saluons le travail effectué en commission sous l'impulsion de Mme la rapporteure, qui a consolidé le dispositif d'encadrement des raccordements à la fibre tout en veillant à ne pas ralentir le déploiement de cette technologie, à deux ans de l'achèvement du plan et alors que la fermeture du réseau cuivre est imminente.

Pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, il est essentiel de renforcer la garantie de la qualité du raccordement grâce à des pouvoirs accrus de l'Arcep et d'améliorer la formation des intervenants chargés de l'installation de la fibre. J'insiste sur ce point.

Par ailleurs, les collectivités, en particulier dans les zones rurales, ont été affectées par la mauvaise gestion du déploiement de la fibre, car c'est vers elles que se sont souvent tournés ceux qui ont rencontré des difficultés de connexion. Il est donc essentiel de consulter davantage les élus locaux et, après un constat de carence dans les zones d'initiative privée, de prévoir de nouveaux appels à manifestation d'intérêt.

Pour la protection des consommateurs, notre groupe proposera un amendement travaillé avec l'UFC-Que Choisir visant à modifier les seuils de sanction en cas d'interruption du service d'accès à internet. Une protection efficace des consommateurs paraît nécessaire, car la perte d'une connexion à internet a des conséquences autres que le seul fait de devoir payer un abonnement pour un service qui ne fonctionne pas, notamment pour les petites entreprises et pour les artisans.

L'absence d'accès à internet affectant la vie quotidienne des personnes, il faut insister encore davantage sur la mise en œuvre du raccordement de tous les foyers.

Nous aurions pu, dans le cadre de notre débat, aborder d'autres sujets, notamment le choix du mode Stoc ou encore la hausse de la consommation d'énergie liée au passage au numérique, même si la fibre consomme quatre fois moins d'énergie que le réseau cuivre, mais nous n'avons pas le temps pour tout cela, monsieur le président.

En conclusion, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera ce texte, qui va dans le bon sens.

Applaudissements sur les travées des g roupes Les Républicains et UC.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et SER. – MM. Pierre-Jean Verzelen, Ronan Dantec et Frédéric Marchand applaudissent également.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Houllegatte

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le numérique, qu'on appelait il y a encore une décennie « les nouvelles technologies de l'information et de la communication », connaît un essor considérable et conditionne désormais notre développement économique et notre vie sociale. Le numérique prend appui sur le triptyque que représentent les infrastructures, les services et les usages.

Le déploiement des infrastructures permettant le haut débit constitue un préalable et une nécessité pour permettre aux opérateurs et aux sociétés dédiés de proposer des services et aux utilisateurs de s'approprier des usages dont on n'imaginait pas l'étendue il y a encore quelques années.

Ce déploiement vital des infrastructures s'effectue en un temps record si on le compare au déploiement d'autres infrastructures tout aussi déterminantes. Ainsi, sans parler du réseau ferroviaire qui a quadrillé la France en quatre-vingts ans, le réseau électrique s'est déployé sur un bon demi-siècle et il en va de même pour l'adduction d'eau potable.

Il faut remonter à 1974, sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing, et au volontarisme de l'époque dans le cadre de la modernisation du réseau téléphonique commuté, qui a permis en six ans de passer de 6 à 20 millions de lignes, pour connaître une telle rapidité.

Le lancement du plan France Très Haut Débit en 2013, sous François Hollande, s'inscrivait dans la continuité de la volonté d'un État stratège, qui visait à couvrir l'intégralité du territoire en très haut débit en moins d'une décennie.

Ce plan, il faut le reconnaître, est un succès et le rythme des déploiements s'est accéléré. Ainsi, en 2022, ce sont 4, 7 millions de foyers supplémentaires qui ont été raccordés à la fibre optique. Désormais, près de 80 % de locaux sont raccordés et ce taux devrait approcher les 95 % à 98 % en 2025.

Mais, malheureusement, et c'est l'objet de cette proposition de loi, la qualité des raccordements finaux n'est pas toujours au rendez-vous, ce qui entache le succès du plan France Très Haut Débit et génère la colère et la frustration de bon nombre de nos concitoyens.

Il semble en effet que nous ayons confondu vitesse et précipitation, et que l'atteinte d'objectifs chiffrés l'ait emporté sur la qualité du raccordement final proposé à l'usager.

Les faits sont désormais objectivés et le mode de sous-traitance à l'opérateur commercial, censé éviter au domicile de l'usager la double intervention de celui qui livre l'infrastructure de raccordement final et de celui qui propose l'ouverture du service à un opérateur, a démontré ses limites. Les vents de l'ubérisation de la sous-traitance et du partage non équitable de la valeur ont également soufflé sur le secteur des télécommunications, comme sur bien d'autres, hélas !

Dès lors, face à ces dysfonctionnements constatés, fallait-il légiférer ou se contenter de contester, d'interpeller les acteurs dont les opérateurs, de faire les gros yeux et d'en appeler au régulateur ?

Certains pensent qu'une loi n'est peut-être pas nécessaire et que désormais, les choses ayant été dites et la prise de conscience de la gravité du problème ayant été effectuée, le système devrait en quelque sorte s'autoréguler, les mesures correctives par le biais d'une charte des bonnes pratiques et d'engagements respectifs à agir permettant de résorber les dysfonctionnements constatés. Ces engagements sont les bienvenus, mais sont-ils suffisants ?

Permettez-moi d'établir un parallèle avec un sujet qui nous a mobilisés il y a deux ans, celui de la réduction de l'empreinte environnementale du numérique. Le Sénat – souvenez-vous en –, dans le cadre d'une mission d'information, avait mis en évidence cet angle mort de nos politiques publiques, à savoir que si le numérique contribuait à réduire notre empreinte carbone par les services qu'il offrait, il n'en constituait pas moins, à lui seul, un contributeur dont l'empreinte allait s'accentuant avec la multiplication des terminaux consommateurs de matières premières. La mission d'information avait largement contribué à sensibiliser l'ensemble des acteurs de la filière, qui s'étaient empressés de se doter de plans d'action ambitieux, et l'on doit s'en féliciter.

Mais le rôle du Parlement n'est pas celui d'un lanceur d'alerte qui se contenterait de sensibiliser les acteurs pour les conduire à s'autoréguler. Les travaux de la mission d'information ont donc abouti à l'adoption de la loi du 15 novembre 2021 visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France.

Il est donc nécessaire de légiférer. À cet égard, nous pouvons nous féliciter du dépôt de cette proposition de loi. En effet, en votant une loi, nous ne dévoyons pas notre action, nous ne faisons pas preuve de naïveté. La loi permet d'encadrer, de responsabiliser et de protéger dans un souci d'équilibre. Tel est bien ce que prévoient les différents articles de ce texte.

C'est pourquoi les élus du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain abordent de façon positive la discussion de la présente proposition de loi. §

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Marchand

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2013, l'État s'était engagé à couvrir intégralement notre territoire en très haut débit à moyenne échéance grâce au plan France Très Haut Débit. Les objectifs fixés étaient les suivants : le raccordement de 100 % des 35 millions de logements et locaux à usage professionnel, dont 80 % en fibre optique jusqu'à l'abonné en 2022, et la généralisation de la fibre optique en 2025.

En somme, il s'agissait de faire en sorte que, d'ici à deux ans, tous les Français, notamment ceux qui habitent en zone rurale, puissent bénéficier d'une connectivité numérique performante, chez eux comme sur leur lieu de travail.

Pour rappel, il y a dix ans, le plan prévoyait initialement 20 milliards d'euros d'investissements publics et privés, dont 3, 3 milliards de subventions de l'État à destination des collectivités locales dans les zones dites « non conventionnées ».

Dans un rapport publié en janvier 2017, la Cour des comptes avait toutefois substantiellement réévalué le coût du plan à 35 milliards d'euros, et estimé que si l'objectif intermédiaire d'une couverture de 50 % du territoire était atteint, l'objectif en matière de très haut débit fixé pour 2022 semblait compromis par l'insuffisance du co-investissement privé.

Dans le cadre du plan de relance présenté en septembre 2020, le Gouvernement a amplifié son effort et mobilisé 420 millions d'euros pour soutenir les collectivités locales qui en avaient le plus besoin, n'ayant pu encore viser la généralisation de la fibre. Je pense à la Bretagne, à Mayotte et à l'Auvergne à titre d'exemples.

Quel constat faisons-nous aujourd'hui ? L'objectif d'une couverture de 80 % du territoire en fibre optique était quasi atteint au 31 décembre 2022, ce qui place la France à la tête des pays les plus fibrés en Europe.

Néanmoins, « raccordable » ne veut pas dire « raccordé » et l'on observe encore des disparités territoriales fortes entre, d'une part, les zones très denses et les zones moins denses d'initiative privée, où les taux de couverture des locaux sont respectivement de 91 % et 87 %, et, d'autre part, les zones moins denses d'initiative publique, où le taux de couverture est de 68 %. Il faut toutefois noter que ces dernières connaissent le taux de déploiement le plus dynamique, qui était de 73 % en 2022.

L'objectif d'une couverture de 100 % du territoire par la fibre en 2025 est quasi atteignable, en dépit des 670 000 locaux identifiés comme difficilement raccordables, lesquels devraient faire l'objet de mesures spécifiques et être couverts à l'horizon 2026.

S'il est incontestable que la France a mis en œuvre une dynamique puissante de déploiement de la fibre, force est aussi de constater – c'est l'objet de cette proposition de loi – que des difficultés opérationnelles sont apparues, parfois de manière intolérable, notamment pour les collectivités territoriales qui s'en sont fait l'écho.

En effet, le modèle de déploiement de la fibre repose principalement sur la sous-traitance – ce qu'on appelle le mode Stoc –, laquelle subit une forte pression sur les prix de la part des donneurs d'ordre.

Or la sous-traitance ne permet pas un contrôle optimal de la formation des techniciens chargés d'effectuer les raccordements, ce qui entraîne des malfaçons non seulement sur le réseau, mais aussi parfois sur les infrastructures situées à proximité, à l'instar des tableaux électriques ou des réseaux de gaz.

Si l'Arcep recommande un plafond de deux rangs de sous-traitance, l'Autorité indique avoir observé des opérations portant à cinq, voire à six, le nombre de rangs de sous-traitance.

Les points de mutualisation situés en pleine rue concentrent les branchements des câbles de fibre optique et les difficultés opérationnelles : entre les dégradations des armoires techniques et les débranchements sauvages, les particuliers comme les élus locaux sont nombreux à faire part de leur mécontentement. Les témoignages concernant des dégradations, des incivilités ou des malfaçons sont fréquents, autant d'actes dont les techniciens des sous-traitants sont très souvent à l'origine.

La proposition de loi que nous examinons sur l'initiative de notre collègue Patrick Chaize intervient à la suite de ces différents constats.

Notre collègue, également président de l'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca), est un fin connaisseur des questions liées à la fibre. Son expertise sur les problèmes de raccordement aux réseaux de fibre optique et d'exploitation de ces derniers, ainsi que son exigence sur la qualité de service, a constitué un éclairage qui porte déjà ses fruits.

En effet, grâce à la description alarmante de la situation en matière de raccordement des abonnés à la fibre optique effectuée dans l'exposé des motifs de la proposition de loi de juillet 2022, les acteurs de la filière ont pris pleinement conscience des difficultés rencontrées par certains usagers, de leur insatisfaction et des légitimes préoccupations des élus locaux, de même que de la vigilance des parlementaires sur ce sujet.

Face au tableau parfois sombre qui est fait du déploiement de la fibre, les opérateurs se devaient de réagir. En septembre dernier, un plan d'action a donc été décidé par les acteurs de la filière, qui repose notamment sur la prise de photos avant et après l'opération, lesquelles sont jointes au compte rendu d'intervention, et sur la remise en état des points de mutualisation.

La Fédération française des télécoms vient aussi de publier des grilles de compétences à destination des donneurs d'ordre, qu'il s'agisse des opérateurs commerciaux ou des opérateurs d'infrastructure, et de leurs prestataires. Le référentiel concernant les sous-traitants porte notamment sur la formation de leurs techniciens, sur les règles de sécurité et d'ingénierie pour les travaux optiques ou sur les bonnes pratiques lors de travaux chez le client. Ce référentiel sera en application à la fin du mois.

De la même manière, le renforcement du pouvoir de contrôle et de sanction de l'Arcep va indéniablement dans le bon sens.

À l'heure où nous examinons cette proposition de loi, ces dispositions sont mises en œuvre, mais il faudra bien évidemment un certain temps pour les évaluer correctement et pour que l'on puisse mesurer si la prise de conscience de la filière et les mesures engagées permettent de mettre fin aux dysfonctionnements dénoncés.

On pourrait nous opposer que les dispositions que nous examinons aujourd'hui risquent de ralentir le déploiement de la fibre en raison d'effets de bord préjudiciables. Les opérateurs d'infrastructure, s'ils souscrivent à l'ambition du texte, ont en effet manifesté leur crainte que certains mécanismes prévus dans cette proposition de loi ne finissent par complexifier leur tâche.

Mais nous savons bien, et cela vaut aussi pour les opérateurs, que là où il y a une volonté, il y a un chemin.

En définitive, le constat effectué dans la proposition de loi de juillet 2022 était le bon : il était clairement nécessaire. Celle-ci a d'ores et déjà produit des effets, manifestement dans le bon sens puisque le Gouvernement a obtenu un certain nombre d'engagements et de concessions de la part des opérateurs.

Il nous appartient donc de donner des signes de notre volonté d'agir. À cet égard, et même si certains peuvent juger raisonnable de laisser du temps à la filière pour poursuivre la résolution des dysfonctionnements constatés en juillet 2022, ce texte est un bel accélérateur pour faire et bien faire.

C'est pourquoi le groupe RDPI votera cette proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chaize

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis très heureux de vous retrouver aujourd’hui dans cet hémicycle pour examiner la proposition de loi visant à assurer la qualité et la pérennité des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, dont j’ai été à l’initiative, avec plus d’une centaine de mes collègues – 139 pour être exact –, de différents horizons politiques.

L’objet de ce texte est clair : répondre aux alertes, répétées depuis des années, relatives aux malfaçons et dégradations récurrentes, qui surviennent lors du raccordement de l’utilisateur final à la fibre optique.

Ces difficultés sont généralement attribuées à une mauvaise gestion du mode « sous-traitance opérateurs commerciaux » (Stoc), par lequel l’opérateur d’infrastructures, responsable du réseau, confie l’étape finale du déploiement aux opérateurs commerciaux. Or ces derniers ont eux-mêmes souvent recours à leurs propres sous-traitants.

Cette pratique, dérogatoire au mode principal de déploiement de la fibre, par lequel l’opérateur d’infrastructures assure le déploiement dans son intégralité, présente deux singularités. D’une part, elle est dépourvue de fondement législatif, puisqu’elle s’est développée sur la base de décisions de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep). D’autre part, elle semble entraver la liberté contractuelle et la liberté d’entreprendre, dès lors que la mise en œuvre du mode Stoc est considérée comme de droit par l’Arcep.

Le régulateur avait pourtant prévu un garde-fou en précisant que le recours automatique au mode Stoc ne serait valable qu’à la condition que les opérateurs commerciaux respectent strictement les règles de l’art.

Malheureusement, les désordres persistants sur l’ensemble du territoire démontrent à quel point ce principe demeure théorique.

Bien entendu, le tableau n’est pas entièrement noir. Le mode Stoc a été un élément clé du déploiement massif et rapide de la fibre sur notre territoire. Alors que nous figurions parmi les plus mauvais élèves de l’Union européenne avant 2013, plus de 18 millions de Français sont désormais raccordés à cette technologie.

Toutefois, ce succès ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt. La situation actuelle n’est pas acceptable au regard des sommes engagées par l’État et les collectivités territoriales pour le déploiement de la fibre depuis 2013 dans le cadre du plan France Très Haut Débit ; elle l’est encore moins au regard des attentes des usagers quant à la qualité de la connexion, alors que les jours du réseau cuivre sont désormais comptés.

Le Gouvernement, l’Arcep et les opérateurs ont pris conscience du problème : dès 2019, un groupe de travail a été mis en place entre les opérateurs d’infrastructure (OI) et les opérateurs commerciaux (OC), aboutissant en 2020 à l’élaboration d’une feuille de route multilatérale pour l’amélioration de l’exploitation et de la qualité des réseaux fibre jusqu’à l’abonné (FttH, pour Fiber to the H ome).

Cette feuille de route envisageait l’évolution des contrats Stoc selon quatre axes : un volet sous-traitance prévoyant une meilleure information de l’OC envers l’OI sur le recours à la sous-traitance et une limitation à deux du nombre de rangs de sous-traitants ; un volet qualité du réseau, incluant l’obligation de communiquer un compte rendu d’intervention (CRI) pour chaque raccordement ; un volet qualité de prestation, imposant aux opérateurs commerciaux de faire appel à des intervenants formés ; enfin, un volet sécurité, selon lequel l’OI doit s’assurer que chaque intervenant dispose des agréments nécessaires.

Alors que ces nouveaux contrats auraient dû être mis en œuvre avant la fin de 2020, ils n’étaient toujours pas appliqués sur une grande partie du territoire à l’été 2022. Face à cette inertie et à l’exaspération légitime des usagers et des élus locaux, j’ai déposé en juillet 2022 la proposition de loi qui vous est soumise aujourd’hui.

Monsieur le ministre, dès votre nomination, en juillet dernier, vous avez exprimé votre volonté de vous saisir de ce sujet ; je salue votre engagement. Les opérateurs ont d’ailleurs promis de nouvelles mesures en septembre 2022. Si cette proposition de loi a contribué à les sensibiliser à la nécessité d’accélérer leurs efforts, nous pouvons nous en réjouir.

Néanmoins, nous avons le droit de nous interroger sur la crédibilité de ces annonces comme sur la capacité de la filière à mettre rapidement en place les mesures promises depuis trois ans. La fermeture du réseau cuivre étant désormais engagée, nous ne pouvons plus nous permettre de repousser les échéances.

C’est la raison pour laquelle ce texte a été inscrit à l’ordre du jour de notre assemblée. Il propose un ensemble de mesures concrètes pour assurer la qualité des raccordements à la fibre par le biais de plusieurs leviers.

Le premier, qui est peut-être le plus important, concerne l’encadrement des modalités de recours au mode Stoc. L’article 1er de la proposition de loi vise principalement à clarifier la répartition des responsabilités entre opérateurs et à rappeler le rôle de garant de la qualité des raccordements confié aux opérateurs d’infrastructure.

Cet article souligne que le recours au mode Stoc relève d’un choix de l’OI pour rétablir un véritable principe de sous-traitance et met en place des outils pour assurer la bonne réalisation des travaux et la réparation des malfaçons.

D’une part, il crée un guichet unique auprès de l’OI, chargé de traiter les difficultés de raccordement rencontrées par les usagers. D’autre part, il prévoit la remise systématique à l’utilisateur final, par l’intervenant chargé du raccordement, d’un certificat attestant de la conformité des opérations aux règles de l’art.

L’utilisateur pourra également se prévaloir face aux opérateurs des stipulations des contrats de sous-traitance, lesquels devront intégrer des garanties en matière de qualité de raccordement et de contrôle.

En outre, l’article 3, dans sa rédaction initiale, vise à interdire le recours au mode Stoc dans les zones ayant le statut de zone fibrée, soit 430 communes environ. Dans ces secteurs, déjà entièrement raccordables à la fibre et dans lesquels la transition de l’ADSL vers cette technologie va s’accélérer, il m’a semblé indispensable que la qualité des raccordements fasse l’objet d’une attention particulière.

Le deuxième axe concerne plus spécifiquement les leviers à disposition des collectivités pour contrôler la bonne réalisation des raccordements dans les réseaux d’initiative publique (RIP). La qualité des raccordements revêt en effet une importance supplémentaire dans ces zones, car les réseaux y sont déployés grâce aux deniers publics.

L’article 2 prévoit notamment la remise à la collectivité porteuse du RIP des certificats attestant de la qualité des raccordements afin que celle-ci puisse vérifier la bonne réalisation des travaux. En l’absence de remise de ces certificats, la collectivité ne sera pas tenue de rémunérer l’opérateur pour les travaux de raccordement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Houllegatte

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le numérique, qu'on appelait il y a encore une décennie « les nouvelles technologies de l'information et de la communication », connaît un essor considérable et conditionne désormais notre développement économique et notre vie sociale. Le numérique prend appui sur le triptyque que constituent les infrastructures, les services et les usages.

Le déploiement des infrastructures permettant le haut débit est un préalable et une nécessité pour permettre aux opérateurs et aux sociétés dédiés de proposer des services et aux utilisateurs de s'approprier des usages dont on n'imaginait pas l'étendue il y a encore quelques années.

Ce déploiement vital des infrastructures s'effectue en un temps record si on le compare au déploiement d'autres infrastructures tout aussi déterminantes. Ainsi, sans parler du réseau ferroviaire, qui a quadrillé la France en quatre-vingts ans, le réseau électrique s'est déployé sur un bon demi-siècle, de même que le réseau d'adduction d'eau potable.

Il faut remonter à 1974, sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing, et au volontarisme de l'époque dans le cadre de la modernisation du réseau téléphonique commuté, qui a permis en six ans de passer de 6 à 20 millions de lignes, pour connaître une telle rapidité.

Le lancement du plan France Très Haut Débit en 2013, sous François Hollande, s'inscrivait dans la continuité de la volonté d'un État stratège, qui visait à couvrir l'intégralité du territoire en très haut débit en moins d'une décennie.

Ce plan, il faut le reconnaître, est un succès et le rythme des déploiements s'est accéléré. Ainsi, en 2022, ce sont 4, 7 millions de foyers supplémentaires qui ont été raccordés à la fibre optique. Désormais, près de 80 % des locaux sont raccordés et ce taux devrait approcher les 95 % à 98 % en 2025.

Malheureusement, et c'est l'objet de cette proposition de loi, la qualité des raccordements finaux n'est pas toujours au rendez-vous, ce qui entache le succès du plan France Très Haut Débit et génère la colère et la frustration de bon nombre de nos concitoyens.

Il semble en effet que nous ayons confondu vitesse et précipitation, et que l'atteinte d'objectifs chiffrés l'ait emporté sur la qualité du raccordement final proposé à l'usager.

Les faits sont désormais objectivés et le mode de sous-traitance à l'opérateur commercial, censé éviter au domicile de l'usager la double intervention de celui qui livre l'infrastructure de raccordement final et de celui qui propose l'ouverture du service à un opérateur, a démontré ses limites. Les vents de l'ubérisation de la sous-traitance et du partage non équitable de la valeur ont également soufflé sur le secteur des télécommunications, comme sur bien d'autres, hélas !

Dès lors, face aux dysfonctionnements constatés, fallait-il légiférer ou se contenter de contester, d'interpeller les acteurs, dont les opérateurs, de faire les gros yeux et d'en appeler au régulateur ?

Certains pensent qu'une loi n'est peut-être pas nécessaire et que désormais, les choses ayant été dites et les acteurs du secteur ayant pris conscience de la gravité du problème, le système devrait s'autoréguler : des mesures correctives, telles que des chartes de bonnes pratiques et des engagements à agir devraient permettre de résorber les dysfonctionnements constatés. Ces engagements sont les bienvenus, mais sont-ils suffisants ?

Permettez-moi d'établir un parallèle avec un sujet qui nous a mobilisés il y a deux ans : la réduction de l'empreinte environnementale du numérique. Le Sénat – souvenez-vous-en –, dans le cadre d'une mission d'information, avait mis en évidence cet angle mort de nos politiques publiques, à savoir que si le numérique contribuait à réduire notre empreinte carbone par les services qu'il offrait, il n'en constituait pas moins, à lui seul, un contributeur dont l'empreinte allait s'accentuant avec la multiplication des terminaux consommateurs de matières premières. La mission d'information avait largement contribué à sensibiliser l'ensemble des acteurs de la filière, qui s'étaient empressés de se doter de plans d'action ambitieux, et l'on doit s'en féliciter.

Mais le rôle du Parlement n'est pas celui d'un lanceur d'alerte qui se contenterait de sensibiliser les acteurs pour les conduire à s'autoréguler. Les travaux de la mission d'information ont donc abouti à l'adoption de la loi du 15 novembre 2021 visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France.

Il est donc nécessaire de légiférer. À cet égard, nous pouvons nous féliciter du dépôt de la présente proposition de loi. En votant une loi, nous ne dévoyons pas notre action, nous ne faisons pas non plus preuve de naïveté. La loi permet d'encadrer, de responsabiliser et de protéger dans un souci d'équilibre. Tel est bien ce que prévoient les différents articles de ce texte.

C'est pourquoi les élus du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain abordent de façon positive la discussion de la présente proposition de loi. §

Debut de section - Permalien
Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications

Monsieur le président, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à remercier Patrick Chaize pour le dépôt de cette proposition de loi, qui a le mérite de nous permettre de débattre d'une politique publique remarquable : le plan France Très Haut Débit, dont nous célébrons cette année le dixième anniversaire.

Cela m'offre l'occasion de rappeler à quel point ce plan est un très grand succès français : nous sommes passés de 1 million de foyers éligibles à la fibre en 2013 à 8 millions en 2017 et à 34 millions en 2022, faisant de la France le pays d'Europe le plus avancé en matière de déploiement de cette technologie.

Il s'agit sans doute du programme d'investissement le plus ambitieux et le plus important depuis le début du siècle : 34 milliards d'euros lui ont été consacrés, dont 65 % ont été pris en charge par le secteur privé, 25 % par les collectivités territoriales et 10 % par l'État.

C'est également l'un des chantiers industriels les plus ambitieux et les plus importants depuis le début du siècle, qui a mobilisé plus de 40 000 agents sur l'ensemble du territoire pour déployer des millions de prises de fibre optique. Ce succès est vraisemblablement le fruit d'un accord intelligent trouvé voilà dix ans entre l'État, les collectivités et les opérateurs.

Pour autant, ce que je viens de dire ne correspond pas au ressenti de certains de nos concitoyens. Comme le souligne la proposition de loi de Patrick Chaize, des problèmes de qualité très significatifs empoisonnent leur quotidien, en les empêchant d'être raccordés à la fibre ou en leur infligeant des coupures.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 20 000 notifications ont été inscrites sur le site de l'Arcep l'année dernière et des témoignages de problèmes de qualité liés à la fibre sont relayés dans les journaux chaque semaine. Il suffit d'aller à la rencontre de nos concitoyens pour prendre la mesure de leur exaspération quant à ces aléas. Où se situe la responsabilité de ces difficultés ?

Il convient d'abord d'examiner les acteurs en cause : d'un côté, les opérateurs d'infrastructure, qui déploient les réseaux, notamment jusqu'au point de mutualisation ; de l'autre, les opérateurs commerciaux, qui assurent le branchement au dernier kilomètre, en vertu du mode Stoc. Chacun rejette la faute sur l'autre.

Cependant, dans plus de 90 % des cas, les problèmes sont dus aux opérateurs d'infrastructure, en particulier à des réseaux très accidentogènes, souvent conçus à une époque antérieure au plan France Très Haut Débit, rendant le raccordement des foyers difficile et les exposant à des risques de coupures ou de défaillances. Cela permet de rendre compte de l'immense majorité des problèmes liés à la fibre.

Voilà pourquoi j'ai demandé voilà six mois aux opérateurs d'infrastructure dans les territoires où les réseaux sont les plus accidentogènes de me présenter ainsi qu'à l'Arcep un plan de reprise complète de ces réseaux.

Ces plans ont été présentés pour 450 000 locaux et commencent à être déployés ; les opérateurs d'infrastructures sont en train de reconstruire les réseaux. Sur les 450 000 prises concernées, 23 000 ont été révisées à ce stade. C'est encore peu, mais une fois ces plans achevés dans des territoires comme le Calvados, la Seine-Maritime ou l'Essonne, nous aurons résolu une partie importante du problème.

Dans leur minorité, les problèmes sont liés aux opérateurs commerciaux. C'est là le sujet de la proposition de loi que nous allons discuter. En raison de la rapidité des déploiements et de problèmes de responsabilité en cas de défaillance, qui ont bien été identifiés par l'auteur de la proposition de loi, il existe des situations de débranchements ou de coupures sauvages : les sous-traitants des opérateurs commerciaux se présentent devant une armoire pour opérer le raccordement d'un client dans des temps très contraints et le font parfois de manière non appropriée ou au détriment d'usagers déjà raccordés.

Pour résoudre cette minorité de problèmes de qualité de la fibre, on serait tenté de remettre en question l'organisation du déploiement entre opérateurs d'infrastructure et opérateurs commerciaux, que l'on appelle le mode Stoc. Depuis une décision de l'Arcep de 2015, l'opérateur d'infrastructure a certes la responsabilité de la qualité du réseau de bout en bout jusqu'au domicile, mais il ne peut s'opposer à ce que l'opérateur commercial installe le dernier kilomètre, en lien avec son client, sauf s'il le fait dans des conditions de qualité dégradées.

Le mode Stoc présente des inconvénients et des avantages. Son inconvénient majeur est que, lorsque survient une défaillance ou une coupure, l'opérateur commercial, en charge du dernier kilomètre, et l'opérateur d'infrastructure se renvoient la balle, ce qui retarde l'attribution des responsabilités et la réparation du dommage causé à l'usager. Il s'agit donc de résoudre cette difficulté relative à l'attribution des responsabilités.

Pour autant, les avantages du mode Stoc ont sans doute contribué à la rapidité du déploiement des réseaux de fibre optique sur l'ensemble du territoire. Cette technique offre de la simplicité pour l'usager, qui n'a qu'un seul interlocuteur pour son abonnement et son raccordement : son opérateur commercial.

De surcroît, la concurrence entre les opérateurs commerciaux pour raccorder au plus vite leurs clients a également contribué à la rapidité de déploiement du plan France Très Haut Débit.

Le Gouvernement, qui accueille les débats sur ces sujets, n'entend pas supprimer le mode Stoc, mais plutôt le corriger. Supprimer cet équilibre entraînerait en effet la réécriture d'un certain nombre de contrats, ce qui retarderait d'autant le déploiement du plan France Très Haut Débit, alors que l'objectif est plutôt de l'accélérer.

De plus, cela pourrait soulever des questions d'équité concurrentielle, car les opérateurs d'infrastructure pourraient être tentés de privilégier les clients de certains opérateurs commerciaux plutôt que d'autres, en raison de liens capitalistiques existants.

Cependant, il est nécessaire de le corriger. Si le Gouvernement propose des amendements sur les trois premiers articles de cette proposition de loi, sur lesquels son avis est réservé, il accueille très favorablement les articles 4 et 5. Ceux-ci renforcent les pouvoirs de l'Arcep pour sanctionner les opérateurs commerciaux qui ne respectent pas leurs responsabilités et améliorent la protection des usagers lorsque leur accès à la fibre est interrompu pendant une trop longue période.

Les amendements de Mme la rapporteure qui concernent en particulier les certificats de conformité ou de non-raccordement visent également à améliorer le mode Stoc pour le rendre plus opérant. Il s'agit d'arriver à la fin du plan France Très Haut Débit, qui n'est plus si lointaine. Il est essentiel d'y parvenir.

L'étape suivante consistera à décommissionner le réseau cuivre, qui coûte cher à entretenir et qui présente des coûts environnementaux et énergétiques significatifs. Pour ce faire, il est essentiel que chacun puisse accéder au très haut débit, en particulier à la fibre, dans les meilleures conditions. Aujourd'hui, 80 % des Français y sont éligibles ; l'objectif est d'atteindre 100 % à l'horizon 2025.

Les corrections qui seront apportées au mode Stoc aujourd'hui et durant la navette sont donc bienvenues pour atteindre cet objectif d'aménagement numérique des territoires et d'égal accès pour tous les citoyens aux possibilités ouvertes par l'économie numérique.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Claude Varaillas

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec ses aspects techniques et l'imaginaire futuriste auquel il renvoie, le tout-numérique fait l'objet de critiques parfois légitimes, notamment lorsqu'il s'agit des installations et de la couverture réseau qui en découle.

Alors que la presse grand public évoque désormais régulièrement les avancées de l'intelligence artificielle et les potentialités positives comme négatives qui s'ouvrent à nous, pour une partie de nos concitoyens le haut débit se fait encore attendre.

L'objectif de nous voir toutes et tous connectés se heurte à celui de la rentabilité et à la politique du chiffre, qui provoque de nombreux désagréments sur le terrain.

Malfaçons, raccordements ratés, débranchements intempestifs : les collectivités et les usagers font face à de lourdes difficultés lorsqu'il s'agit de désigner un responsable à ces manquements. Selon l'Avicca, qui regroupe les collectivités engagées dans le numérique, près de 75 % des raccordements réalisés en mode Stoc présentent des défauts. Le phénomène n'est pas nouveau et les appels à la vigilance des opérateurs sont récurrents, mais les contrats Stoc V1, V2 et V3 n'y ont rien changé.

La proposition de loi que nous examinons a le mérite, dans un contexte où les usagers, les installateurs ou les installations font l'objet d'un mauvais traitement, de mieux encadrer le déploiement par les opérateurs privés jusqu'alors guidés par la rentabilité, la quantité des foyers raccordés primant sur la qualité du réseau.

Je salue le travail de nos collègues Patrick Chaize et Patricia Demas, qui posent des limites à une forme de désordre que nous avons été amenés à constater dans nos départements. Ainsi, dans les zones rurales, dite « zones peu denses », on a parfois dû déployer un réseau d'initiative publique, faute de manifestations d'intérêt de la part des opérateurs privés, par défaut de rentabilité, et consacrer en conséquence un budget important au déploiement du haut débit.

Ainsi, dans mon département, le coût d'un tel programme s'est élevé à 500 millions d'euros. Même si nous avons bénéficié d'un soutien de la part de l'État, 74 millions d'euros restent à la charge de la collectivité départementale.

La forte hausse du nombre des alertes constatées par l'Arcep en 2022 est révélatrice des difficultés rencontrées par les utilisateurs. La médiatrice des communications électroniques évoquait « les naufragés de la fibre » dans un rapport de 2021, en soulignant les dysfonctionnements occasionnés par des installations bâclées.

Alors que le réseau cuivre, dit « réseau historique » d'Orange, devrait être démantelé d'ici à 2030, il est légitime d'exiger des opérateurs des garanties afin de permettre le basculement vers la fibre dans les meilleures conditions pour les usagers.

La sous-traitance, qui devait être dérogatoire pour le raccordement final de la fibre au domicile, est devenue la règle – nous l'avons constaté. Or c'est précisément cette sous-traitance en cascade qui génère des désordres sur le terrain. Les cadences imposées sont nuisibles non seulement pour les installations, mais aussi parfois pour la sécurité des installateurs, souvent mal formés.

Je pense aux sous-traitants des sous-traitants, à celles et à ceux qui subissent une forme d'uberisation qui les pousse à faire toujours plus de raccordements, sans en avoir véritablement les moyens, et qui sont surtout mal rémunérés.

La mise en place d'un guichet unique pour assurer la prise en charge des difficultés sur le terrain et le certificat de conformité sur le modèle des raccordements de gaz, ainsi que la mise en place d'un contrat de sous-traitance élaboré par l'opérateur d'infrastructure et soumis à l'Arcep, participent des améliorations nécessaires et susceptibles de corriger la situation existante.

Les droits des consommateurs sont par ailleurs renforcés – c'est important – et des sanctions sont prévues en cas d'interruption du service.

Cette proposition de loi pourrait aller plus loin en remettant en cause le modèle même du déploiement de la fibre. Je pense notamment à ce que nous avons su faire pour nos réseaux de télécommunications historiques ou pour celui du gaz et de l'électricité – permettez-moi d'y penser ! ERDF, GRDF ou France Télécom : ces noms résonnent comme des vestiges après tant d'années de déstructuration et de privatisation !

Les opérateurs publics sont pourtant des gages de réussite, de durabilité et d'efficacité d'un déploiement qui est avant tout, et bien avant le profit, un enjeu d'intérêt général.

À l'heure où nous donnons au numérique une place de plus en plus importante dans nos vies, où la dématérialisation poursuit son chemin, y compris en matière de services publics, cette proposition de loi, grâce aux objectifs qu'elle affiche, participe de la réduction de la fracture numérique, alors que l'on sait que 13 millions de nos concitoyens sont en situation d'illectronisme.

Parce que ce texte permettra une amélioration concrète, visible et attendue sur le terrain, le groupe CRCE le votera.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Demas

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui, si elle peut sembler technique au premier abord, répond à une préoccupation quotidienne de nos concitoyens.

Je tiens à remercier mon collègue Patrick Chaize d’avoir déposé ce texte, qui apporte des solutions pragmatiques pour remédier aux désordres occasionnés dans le raccordement d’utilisateurs finals à la fibre, en raison du recours à une chaîne de sous-traitance, souvent mal maîtrisée, dans le cadre du mode Stoc. Cette expression désigne un mode de réalisation des raccordements à la fibre par lequel l’opérateur d’infrastructure, responsable du réseau, confie la dernière partie du raccordement aux opérateurs commerciaux, qui font généralement eux-mêmes appel à d’autres prestataires.

Alors que cette pratique était l’exception avant 2015, ce mode opératoire est devenu la règle.

Nous avons tous constaté dans nos territoires l’exaspération des usagers et des élus locaux en raison des dysfonctionnements issus du recours au mode Stoc : débranchements injustifiés, branchements réalisés de façon anarchique, armoires vandalisées et, surtout, absence de recours effectif.

À l’aube de la fermeture du réseau cuivre, le raccordement final à la fibre optique est sans conteste le talon d’Achille du plan France Très Haut Débit. Il est dès lors de notre responsabilité de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la réussite de ce projet ambitieux, alors même que nous entrons dans sa dernière ligne droite.

Face aux problèmes liés à la qualité des raccordements à la fibre, trois options s’offrent à nous.

La première, privilégiée par le Gouvernement jusqu’à maintenant, consiste à négocier avec les opérateurs une solution contractuelle non prescriptive. Si ce mode d’action apparaît comme le plus souple, force est de constater qu’il est pour le moment insuffisant et qu’il n’a pas produit les résultats escomptés.

La révision des contrats Stoc, initiée en 2020 grâce aux contrats dits « Stoc II » puis « Stoc III », a permis des progrès, qui restent toutefois trop timides. Le constat est clair : trois ans après le début des négociations, les engagements pris par les opérateurs peinent encore à être mis en œuvre.

La négociation avec la filière est indispensable, mais elle gagnerait à être encadrée et accompagnée par le législateur si nous souhaitons accélérer la montée en qualité des réseaux fibre et venir à bout des réticences de certains opérateurs.

La deuxième option, la plus radicale, consisterait à mettre fin au mode Stoc et à charger l’opérateur d’infrastructure de la réalisation du raccordement, passant donc en mode OI. À première vue, il peut s’agir de la solution la plus évidente et je comprends que nombre d’acteurs, certains élus locaux notamment, aient pu l’avoir à l’esprit.

Elle conduirait cependant à changer de plan au milieu de la bataille, alors que, depuis 2018, 20 000 locaux en moyenne sont raccordés chaque jour à la fibre. Changer de mode opératoire à ce stade risquerait de mettre un coup d’arrêt à ce déploiement, ce qui ne serait pas conforme à nos objectifs.

La troisième option, à laquelle je souscris pleinement, consiste à mieux encadrer le mode Stoc. Cette solution pragmatique permet de répondre aux préoccupations des usagers et des collectivités sans pour autant renverser la table ni déstabiliser les dynamiques à l’œuvre.

Le présent texte s’inscrit pleinement dans cette troisième voie d’équilibre. Je remercie Patrick Chaize et la commission de m’avoir accordé leur confiance à ce sujet.

Dans des délais restreints, j’ai entendu toutes les parties prenantes – opérateurs, régulateur, administrations centrales, élus locaux et usagers – et proposé à la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable de reprendre plusieurs de leurs suggestions.

J’en viens à présent aux axes qui ont guidé le travail de la commission et aux principales modifications apportées à la proposition de loi.

Le premier axe a été la clarification des modalités de mise en œuvre du mode Stoc et de la répartition des responsabilités entre les opérateurs.

Conformément aux objectifs de Patrick Chaize, nous avons prévu, à l’article 1er, que l’opérateur d’infrastructure confie la réalisation du raccordement à la fibre à l’opérateur commercial selon un mécanisme de priorité et sous réserve du strict respect des règles de l’art.

Cette proposition pragmatique permet de conserver la volonté de l’auteur de garantir un principe de sous-traitance, en rappelant que la mise en œuvre du mode Stoc relève d’un choix de l’opérateur d’infrastructure, tout en préservant l’équilibre des contrats de sous-traitance en cours.

Avec le même objectif, la commission a souhaité renforcer le caractère opérationnel du guichet unique pour prendre en charge les difficultés de raccordement à la fibre rencontrées par les utilisateurs. Nous avons renforcé la place de ces derniers dans le dispositif, en leur permettant de suivre la résolution des difficultés rencontrées et en garantissant que celle-ci intervienne dans un délai raisonnable, qui ne pourra excéder dix jours.

Ce guichet unique a suscité des réactions différentes chez les usagers, les opérateurs et le Gouvernement. Si tout le monde s’accorde sur son utilité, la définition de ses modalités opérationnelles fait débat. Notre proposition est une première pierre à l’édifice, mais nous sommes ouverts à la perspective qu’un travail plus approfondi soit mené sur cette question dans le cadre de la navette parlementaire.

Enfin, la commission a modifié l’article 3, qui interdit le recours au mode Stoc dans certaines zones du territoire, pour en affiner le périmètre d’application afin de prendre en compte la fermeture du réseau cuivre et restreindre l’interdiction aux raccordements longs et complexes, de manière à limiter les atteintes à la liberté d’entreprendre.

Le deuxième axe des travaux de la commission a été de consolider les exigences de qualité et de contrôle applicables aux raccordements.

Nous avons prévu, à l’article 1er, l’élaboration d’un socle d’exigences minimales de qualité, que les contrats et les cahiers des charges liant les opérateurs commerciaux et leurs sous-traitants devront respecter.

Nous avons également introduit une obligation de labellisation de tout intervenant chargé de réaliser un raccordement à la fibre, selon un référentiel national. De plus, nous avons consacré dans la loi la réalisation systématique d’un compte rendu d’intervention pour permettre à l’opérateur d’infrastructure et à l’utilisateur de vérifier la bonne réalisation du raccordement.

Enfin, à l’article 2, qui concerne les réseaux d’initiative publique, c’est-à-dire les zones dites « RIP », nous avons garanti un délai maximal de quarante-huit heures pour la transmission à la collectivité du calendrier hebdomadaire des interventions de raccordement lorsque cette dernière en fait la demande, de manière à renforcer les moyens de contrôle des élus locaux, souvent démunis face aux malfaçons dans le raccordement final.

Le troisième et dernier axe des travaux de la commission a été d’assurer le caractère opérant des dispositifs.

Nous avons ainsi proposé une nouvelle rédaction de l’article 4, qui étend les pouvoirs en matière de qualité des raccordements à la fibre de l’Arcep, dont nous entendons ainsi clarifier les moyens de contrôle et de sanction.

À l’article 5, qui ouvre de nouveaux droits aux consommateurs en cas d’interruption prolongée du service d’accès à internet, nous avons, d’une part, amélioré l’articulation dans le temps des sanctions susceptibles d’être prononcées à l’encontre de l’opérateur commercial et, d’autre part, veillé à protéger ce dernier d’éventuels abus de la part des consommateurs.

En somme, tous ces ajustements de bon sens, qui résultent d’un travail approfondi de concertation avec tous les acteurs, s’inscrivent pleinement dans l’esprit du texte présenté par Patrick Chaize tout en consolidant sa portée et son caractère opérationnel.

Vous l’aurez compris, face aux dysfonctionnements dans le raccordement des utilisateurs finals à la fibre optique, il n’existe pas de solution miracle emportant satisfaction de l’ensemble des intervenants. Il y a pourtant urgence à agir pour assurer la pérennité et la qualité des raccordements. Le texte de la commission est une proposition ambitieuse et équilibrée, mais nous avons conscience qu’elle est aussi perfectible.

Monsieur le ministre, la balle est dans votre camp pour poursuivre, dans le cadre de la navette parlementaire, le travail sur cette initiative sénatoriale. Celle-ci répond, vous l’aurez compris, à de très fortes attentes de la part des usagers et des élus locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chaize

Le troisième levier concerne les pouvoirs de contrôle et de sanction de l’Arcep.

L’article 4 octroie au régulateur des télécommunications des pouvoirs spécifiques pour garantir la qualité des raccordements à la fibre à plusieurs égards.

Il confère ainsi une base législative au pouvoir de police spéciale des communications électroniques que détiennent conjointement l’Arcep, le ministre en charge du numérique et l’Agence nationale des fréquences (ANFR). Il prévoit également la publication trimestrielle par l’Arcep d’indicateurs portant sur le niveau de qualité de service des réseaux fibre transmis par les opérateurs.

La réalisation d’audits sur la qualité de l’accès au réseau de fibre optique et l’instauration d’un pouvoir d’astreinte au profit de l’Arcep sur ce sujet sont également prévues. Le texte intègre à ce titre l’ensemble des normes relatives à la qualité du raccordement à la fibre dans le corpus des règles dont l’Arcep sanctionne le respect.

Enfin, le dernier levier concerne la protection des droits des consommateurs en cas d’interruption prolongée de l’accès à internet.

L’article 5 vise ainsi à renforcer cette protection par la création de trois nouvelles pénalités à l’encontre du fournisseur d’accès à internet, selon la durée de la panne : suspension du paiement de l’abonnement d’abord ; versement d’une indemnité à l’abonné par l’opérateur ensuite ; enfin, résiliation sans frais de l’abonnement par l’usager.

Mes chers collègues, tels sont les grands axes du texte qui vous est soumis. Celui-ci a suscité une opposition de principe des opérateurs commerciaux, qui ont fait valoir que des engagements pris par la filière étaient préférables à une proposition de loi. Je pense, pour ma part, que les uns n’excluent pas l’autre.

Nous vous proposons donc de voter ce texte afin d’obtenir les engagements tant attendus et de leur conférer une assise solide. J’entends les inquiétudes concernant les risques qu’engendrerait une remise en cause du mode Stoc pour la continuité du déploiement de la fibre. Je tiens à rassurer sur ce point : notre objectif n’est en aucun cas de remettre en cause le modèle actuel, mais bien de guider et d’accompagner les démarches de qualité en cours afin de mieux les traduire sur le terrain. À cet égard, j’invite les opérateurs à lire le texte.

J’ai travaillé dans un état d’esprit d’équilibre avec la rapporteure de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, Patricia Demas, que je tiens à remercier pour son écoute, son implication et les compléments utiles qu’elle a apportés au texte initial.

La qualité des réseaux fibre est un sujet d’intérêt national qui ne saurait dépendre exclusivement du bon vouloir des acteurs économiques. Monsieur le ministre, nous comptons sur vous pour prendre conscience de notre responsabilité collective sur ce sujet et pour nous aider à enrichir et à perfectionner cette initiative sénatoriale dans le cadre de la navette parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons a pour objectif de garantir la qualité des raccordements de fibre optique réalisés jusqu'à l'abonné tout en évitant la dégradation des équipements de réseaux optiques.

En effet, de nombreux dysfonctionnements sont observés au quotidien par les administrés, qu'il s'agisse de coupures répétées ou de la fragilisation du réseau.

Ces problèmes sont a priori liés au recours à la sous-traitance dite « Stoc », c'est-à-dire la sous-traitance à l'opérateur commercial lors du raccordement des abonnés à la fibre.

L'Arcep reconnaît ce mode de sous-traitance depuis 2015, à condition que les raccordements soient effectués dans le respect « des règles de l'art ».

Mais force est de constater que de nombreux problèmes sont relevés depuis l'accélération du déploiement de la fibre sur notre territoire. C'est un sujet dont je discute souvent avec mes collègues du groupe Union Centriste, notamment avec Évelyne Perrot, que j'associe à mes propos.

Cette technologie doit pourtant répondre à un besoin grandissant de communication et de numérisation du quotidien des Français. Je pense particulièrement à l'accès aux démarches administratives, qui sont désormais quasiment toutes dématérialisées, que ce soit en matière d'état civil, de sécurité sociale, de scolarité, d'impôts ou encore d'accès au logement. C'est dire combien l'accès aux services publics est devenu un parcours du combattant pour de nombreuses personnes !

Je ne mentionnerai pas les problèmes de fracture numérique et les zones blanches, bien connus de notre assemblée et de nos élus locaux. Ce n'est pas le sujet aujourd'hui, mais cela reste malheureusement un réel problème pour nos concitoyens, comme l'a mentionné précédemment notre collègue Ronan Dantec.

Un accès stable à internet est désormais une nécessité et la fibre optique présente bien des avantages grâce à sa grande capacité de transport d'informations, à ses interférences réduites et à sa meilleure durée de vie. À ce jour, c'est la technologie qui permet d'atteindre les meilleurs débits internet.

La France avait très bien commencé son pari numérique, puisque 34 millions de foyers, d'entreprises et d'administrations ont été rendus raccordables à la fibre optique en 2022. Mais pour que la fibre soit une réalité pour tous, de très importants travaux ont été et sont encore nécessaires.

Les maires, toujours en première ligne lorsque les problèmes apparaissent, nous font remonter régulièrement les désagréments que rencontrent les utilisateurs. En effet, la fibre, quand on y a goûté, on ne peut plus s'en passer !

Chaque opérateur renvoie à d'autres la responsabilité des dysfonctionnements : tantôt c'est la faute de celui qui a déployé le réseau, de ses éventuels sous-traitants, tantôt c'est celle de celui qui commercialise le service, voire d'un tiers qui serait intervenu pour tout débrancher ! Bref, on ne sait plus vers qui se tourner !

Comme c'est souvent le cas, la mairie devient naturellement le bureau des pleurs, le réceptacle des reproches et l'endroit privilégié où des consommateurs excédés espèrent trouver une réponse à leurs difficultés.

Les différentes initiatives des opérateurs pour répondre aux attentes des élus et des administrés, qu'il s'agisse de la création du mode Stoc V2 en 2020 ou du plan qualité en 2022, n'ont pas permis de rétablir complétement la situation.

Après une longue période de patience, cette situation n'est plus supportable : de nouveaux engagements doivent donc être pris par les différentes parties, et ce d'autant plus que l'objectif du Gouvernement est de généraliser la fibre optique sur l'ensemble du territoire d'ici à 2025.

La sous-traitance doit notamment être mieux encadrée, afin d'éviter une dégradation des réseaux, des déconnexions impromptues ou encore une fragilisation et un vieillissement prématuré des réseaux.

Tel est l'objectif de cette proposition de loi, qui tend à réaffirmer que l'opérateur d'infrastructure est responsable des raccordements à son réseau et le garant global de la qualité des travaux.

Le texte prévoit que les contrats de sous-traitance devront être conformes à un modèle élaboré par l'opérateur d'infrastructure, qui sera soumis à l'avis préalable de l'Arcep et opposable par les usagers.

Chaque intervenant chargé d'effectuer un raccordement à la fibre remettra un certificat à l'abonné, document qui devra attester de la conformité des travaux réalisés au cahier des charges.

Ces mesures viennent utilement clarifier le mode de sous-traitance choisi et contribuent à garantir la transparence nécessaire au bon déroulement des travaux de raccordement.

Le présent texte vise également à renforcer les pouvoirs de contrôle et de sanction de l'Arcep, ainsi que les droits des consommateurs en cas d'interruption prolongée du service d'accès à internet.

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a, suivant en cela les orientations de sa rapporteure – que je salue –, modifié la proposition de loi initiale et enrichi l'arsenal des solutions proposées.

À titre d'exemples, le texte prévoit l'élaboration à l'échelon national d'un socle d'exigences minimales de qualité pour la réalisation des raccordements à la fibre, la fixation d'un délai de résolution des dysfonctionnements n'excédant pas dix jours ou encore la traçabilité de la gestion des incidents.

La transparence sur le bon déroulement des travaux est renforcée, la réalisation systématique d'un compte rendu d'intervention étant prévue. L'utilisateur final sera en droit de le consulter, tout comme le contrat de sous-traitance, ce qui lui permettra de vérifier lui-même la bonne réalisation du raccordement.

Ces mesures sont aujourd'hui nécessaires pour garantir la qualité du réseau et de son déploiement à l'échelon national, le quantitatif ne devant pas, bien sûr, se faire au détriment du qualitatif. Les attentes des élus locaux et des usagers sont fortes à cet égard, mes chers collègues, vous le savez.

Il reste à peine deux ans avant la date butoir fixée pour atteindre le très haut débit pour tous : des mesures concrètes, plus que nécessaires, doivent donc être prises. C'est la raison pour laquelle le groupe Union Centriste votera en faveur de ce texte. §

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Claude Varaillas

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec ses aspects techniques et l'imaginaire futuriste auquel il renvoie, le tout-numérique fait l'objet de critiques parfois légitimes, en particulier les installations et la couverture réseau.

Alors que la presse grand public évoque désormais régulièrement les avancées de l'intelligence artificielle et les potentialités positives comme négatives qui s'ouvrent à nous, le haut débit se fait encore attendre pour une partie de nos concitoyens.

L'objectif de nous voir toutes et tous connectés se heurte à celui de la rentabilité et à la politique du chiffre, qui provoque de nombreux désagréments sur le terrain.

Malfaçons, raccordements ratés, débranchements intempestifs : les collectivités et les usagers font face à de lourdes difficultés lorsqu'il s'agit de désigner un responsable à ces manquements. Selon l'Avicca, qui regroupe les collectivités engagées dans le numérique, près de 75 % des raccordements réalisés en mode Stoc présentent des défauts. Le phénomène n'est pas nouveau et les appels à la vigilance des opérateurs sont récurrents, mais les contrats Stoc V1, V2 et V3 n'y ont rien changé.

La proposition de loi que nous examinons a le mérite, dans un contexte où les usagers, les installateurs ou les installations font l'objet d'un mauvais traitement, de mieux encadrer le déploiement par les opérateurs privés jusqu'alors guidés par la rentabilité, la quantité des foyers raccordés primant sur la qualité du réseau.

Je salue le travail de nos collègues Patrick Chaize et Patricia Demas, qui posent des limites à une forme de désordre que nous avons constatée dans nos départements. Ainsi, dans les zones rurales, dites « zones peu denses », on a parfois dû déployer un réseau d'initiative publique, faute de manifestations d'intérêt de la part des opérateurs privés, par défaut de rentabilité, et consacrer en conséquence un budget important au déploiement du haut débit.

Dans mon département, le coût d'un tel programme s'est élevé à 500 millions d'euros. Même si nous avons bénéficié d'un soutien de la part de l'État, 74 millions d'euros restent à la charge de la collectivité départementale.

La forte hausse du nombre des alertes constatées par l'Arcep en 2022 est révélatrice des difficultés rencontrées par les utilisateurs. La médiatrice des communications électroniques évoquait « les naufragés de la fibre » dans un rapport de 2021, en soulignant les dysfonctionnements occasionnés par des installations bâclées.

Alors que le réseau cuivre, dit « réseau historique » d'Orange, devrait être démantelé d'ici à 2030, il est légitime d'exiger des opérateurs des garanties afin de permettre le basculement vers la fibre dans les meilleures conditions pour les usagers.

La sous-traitance, qui devait être dérogatoire pour le raccordement final de la fibre au domicile, est devenue la règle, nous l'avons constaté. Or c'est précisément cette sous-traitance en cascade qui provoque des désordres sur le terrain. Les cadences imposées nuisent non seulement aux installations, mais aussi parfois à la sécurité des installateurs, souvent mal formés.

Je pense aux sous-traitants des sous-traitants, à celles et à ceux qui subissent une forme d'ubérisation qui les pousse à réaliser toujours plus de raccordements, sans en avoir véritablement les moyens, et qui sont surtout mal rémunérés.

La mise en place d'un guichet unique pour assurer la prise en charge des difficultés sur le terrain, d'un certificat de conformité sur le modèle des raccordements au gaz, et d'un contrat de sous-traitance élaboré par l'opérateur d'infrastructure et soumis à l'Arcep, participent des améliorations nécessaires et susceptibles de corriger la situation existante.

Les droits des consommateurs sont par ailleurs renforcés – c'est important – et des sanctions sont prévues en cas d'interruption du service.

Cette proposition de loi pourrait aller plus loin en remettant en cause le modèle même du déploiement de la fibre. Je pense notamment à ce que nous avons su faire pour nos réseaux de télécommunications historiques ou pour celui du gaz et de l'électricité – permettez-moi d'y penser ! ERDF, GRDF ou France Télécom : ces noms résonnent comme des vestiges après tant d'années de déstructuration et de privatisation !

Les opérateurs publics sont pourtant des gages de réussite, de durabilité et d'efficacité pour un déploiement qui est avant tout un enjeu d'intérêt général, avant d'être une source de profit.

À l'heure où nous donnons au numérique une place de plus en plus importante dans nos vies, où la dématérialisation poursuit son chemin, y compris en matière de services publics, cette proposition de loi, grâce aux objectifs qu'elle affiche, participe de la réduction de la fracture numérique, alors que l'on sait que 13 millions de nos concitoyens sont en situation d'illectronisme.

Parce que ce texte permettra une amélioration concrète, visible et attendue sur le terrain, le groupe CRCE le votera.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Jean Verzelen

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme les crèches, comme la poste et comme les commerces de proximité, internet est devenu un service structurant des villes et des villages. Aujourd'hui, il est indispensable d'avoir une connexion internet.

Le déploiement de la fibre progresse plus ou moins vite selon les territoires, mais, globalement – cela a été dit –, sa dynamique est plutôt bonne depuis quelques années. Dans les zones d'appel à manifestation d'intention d'investissement (Amii), les opérateurs ont pris des engagements pour permettre ce développement. Dans les autres, les collectivités locales se sont emparées du sujet à bras le corps afin d'apporter les mêmes services dans les territoires ruraux.

Sur le papier, la répartition était équilibrée et a bien fonctionné, comme on peut le constater dans un territoire que je connais bien, l'Aisne, qui est l'un des départements ruraux les mieux fibrés de France.

Cependant, certains élus locaux ont fait remonter à plusieurs reprises des difficultés de raccordement. Ici, une personne est mécontente de constater que son voisin est bien raccordé tandis qu'elle ne l'est pas ; là, une autre qui a toujours eu la fibre s'en trouve soudainement privée. Enfin, on ne peut pas négliger l'impact qu'a eu la crise du covid sur le déploiement de la fibre.

En effet, l'Arcep, dans son dernier rapport, a constaté des ralentissements de déploiement, des problèmes techniques et des malfaçons. On peut en conclure que l'objectif initial d'une France où tous les foyers seraient fibrés en 2023 ne sera malheureusement pas atteint.

Au 31 décembre 2022, 79 % des foyers étaient raccordables à la fibre optique, mais « raccordables » ne signifie pas « raccordés ». Si plus de 15 millions de foyers sont effectivement reliés à la fibre, il ne faut pas oublier ceux qui attendent toujours un raccordement, ceux qui ont été raccordés, mais sont confrontés à des coupures, qu'elles soient prolongées ou non, ou encore ceux à qui l'on dit qu'ils ne sont pas prioritaires, qu'ils soient des particuliers ou des entreprises.

À l'heure du tout-numérique, cette situation, lorsqu'elle perdure, peut être très pénalisante tous secteurs confondus.

Aussi, au regard de cette situation, nous saluons le travail de notre collègue Patrick Chaize, auteur de cette proposition de loi, ainsi que celui de la rapporteure. Ce texte prévoit des mesures concrètes pour encadrer la sous-traitance et protéger les usagers.

Généralement, le problème, c'est le raccordement de la fibre jusqu'au domicile de l'abonné, dans la mesure où ce raccordement s'effectue dans une armoire dite « spaghettis ». Cette expression parle d'elle-même : cette armoire contient tellement de branchements et de fils qu'il peut être très compliqué de s'y retrouver. On a même vu des sous-traitants arracher un branchement pour le remplacer par un autre.

Le mode Stoc, régulièrement utilisé par les opérateurs d'infrastructure, implique l'intervention de sous-traitants, de sorte que l'on s'éloigne de la chaîne initiale ayant déployé le réseau. Il est donc nécessaire de poser clairement le principe de responsabilité des opérateurs d'infrastructure tout en apportant des garanties aux abonnés. Cela passe par la mise en place d'un socle d'exigences minimales, lequel est donc bienvenu dans ce texte.

Les techniciens qui interviennent doivent en effet disposer d'une formation adéquate pour effectuer « dans les règles de l'art » la réparation ou le raccordement requis.

Pour rendre effectif ce socle d'exigences, il est important de prévoir un suivi et un partage des données entre l'opérateur qui a déployé la fibre et celui qui effectuera le raccordement depuis la rue jusqu'au domicile. Le compte rendu d'intervention est la première étape pour garantir ce suivi.

Il faudra également veiller à ce que les contrôles soient effectifs et suivis d'effet. Nous espérons ainsi que l'Arcep disposera des moyens financiers suffisants pour mener à bien cette mission.

Le cas échéant, il nous faudra nous poser la question du préraccordement, c'est-à-dire de la possibilité d'aller jusqu'au domaine privé pour installer préalablement les équipements qui permettront le raccordement, comme une prise terminale optique. Cela facilitera le travail effectué ensuite par l'opérateur.

Enfin, le texte prévoit des mesures qui s'appliqueront aux collectivités par le biais des réseaux d'initiative publique (RIP). Pour notre part, nous soutenons la mesure de bon sens qui consiste à assurer la transmission à la collectivité territoriale du calendrier hebdomadaire des interventions dans un délai de quarante-huit heures, lorsqu'elle en a fait la demande.

Aussi l'ensemble des élus du groupe Les Indépendants – République et Territoires votera-t-il cette proposition de loi. §

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et SER. – MM. Ronan Dantec, Frédéric Marchand et Pierre-Jean Verzelen applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons a pour objectif de garantir la qualité des raccordements à la fibre optique réalisés jusqu'à l'abonné tout en évitant la dégradation des équipements des réseaux optiques.

En effet, de nombreux dysfonctionnements sont observés au quotidien par les administrés, qu'il s'agisse de coupures répétées ou de la fragilisation du réseau.

Ces problèmes sont a priori liés au recours à la sous-traitance dite « Stoc », c'est-à-dire à la sous-traitance à l'opérateur commercial du raccordement des abonnés à la fibre.

L'Arcep reconnaît ce mode de sous-traitance depuis 2015, à condition que les raccordements soient effectués dans le respect « des règles de l'art ».

Mais force est de constater que de nombreux problèmes sont relevés depuis l'accélération du déploiement de la fibre sur notre territoire. C'est un sujet dont je discute souvent avec mes collègues du groupe Union Centriste, notamment avec Évelyne Perrot, que j'associe à mes propos.

Cette technologie doit pourtant répondre à un besoin grandissant de communication et de numérisation du quotidien des Français. Je pense particulièrement à l'accès aux démarches administratives, qui sont désormais quasiment toutes dématérialisées, que ce soit en matière d'état civil, de sécurité sociale, de scolarité, d'impôts ou encore d'accès au logement. C'est dire combien l'accès aux services publics est devenu un parcours du combattant pour de nombreuses personnes !

Je n'évoquerai pas la fracture numérique et les zones blanches, bien connues de notre assemblée et de nos élus locaux. Ce n'est pas le sujet aujourd'hui, mais cela reste malheureusement un réel problème pour nos concitoyens, comme l'a mentionné précédemment notre collègue Ronan Dantec.

Un accès stable à internet est désormais une nécessité et la fibre optique présente bien des avantages grâce à sa grande capacité de transport d'informations, à ses interférences réduites et à sa meilleure durée de vie. À ce jour, c'est la technologie qui permet d'atteindre les meilleurs débits internet.

La France avait très bien commencé son pari numérique, puisque 34 millions de foyers, d'entreprises et d'administrations ont été rendus raccordables à la fibre optique en 2022. Mais pour que la fibre soit une réalité pour tous, de très importants travaux ont été et sont encore nécessaires.

Les maires, toujours en première ligne lorsque les problèmes apparaissent, nous font part régulièrement des désagréments que rencontrent les utilisateurs. En effet, la fibre, quand on y a goûté, on ne peut plus s'en passer !

Chaque opérateur renvoie à d'autres la responsabilité des dysfonctionnements : tantôt c'est la faute de celui qui a déployé le réseau, de ses éventuels sous-traitants, tantôt c'est celle de celui qui commercialise le service, voire d'un tiers qui serait intervenu pour tout débrancher ! Bref, on ne sait plus vers qui se tourner...

Comme c'est souvent le cas, la mairie devient naturellement le bureau des pleurs, le réceptacle des reproches et l'endroit privilégié où des consommateurs excédés espèrent trouver une réponse à leurs difficultés.

Les différentes initiatives des opérateurs pour répondre aux attentes des élus et des administrés, qu'il s'agisse de la création du mode Stoc V2 en 2020 ou du plan qualité en 2022, n'ont pas permis de rétablir complétement la situation.

Après une longue période de patience, cette situation n'est plus supportable : de nouveaux engagements doivent être pris par les différentes parties, et ce d'autant plus que l'objectif du Gouvernement est de généraliser la fibre optique sur l'ensemble du territoire d'ici à 2025.

La sous-traitance, notamment, doit être mieux encadrée, afin d'éviter une dégradation des réseaux, des déconnexions impromptues ou encore une fragilisation et un vieillissement prématuré des réseaux.

Tel est l'objectif de cette proposition de loi, qui réaffirme que l'opérateur d'infrastructure est responsable des raccordements à son réseau et le garant global de la qualité des travaux.

Le texte prévoit que les contrats de sous-traitance devront être conformes à un modèle élaboré par l'opérateur d'infrastructure, soumis à l'avis préalable de l'Arcep et opposable par les usagers.

Chaque intervenant chargé d'effectuer un raccordement à la fibre remettra à l'abonné un certificat attestant de la conformité des travaux réalisés au cahier des charges.

Ces mesures viennent utilement clarifier le mode de sous-traitance choisi et contribuent à garantir la transparence nécessaire au bon déroulement des travaux de raccordement.

Le présent texte vise également à renforcer les pouvoirs de contrôle et de sanction de l'Arcep, ainsi que les droits des consommateurs en cas d'interruption prolongée du service d'accès à internet.

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a, suivant en cela les orientations de sa rapporteure – que je salue –, modifié la proposition de loi initiale et enrichi l'arsenal des solutions proposées.

À titre d'exemples, le texte prévoit l'élaboration à l'échelon national d'un socle d'exigences minimales de qualité pour la réalisation des raccordements à la fibre, la fixation d'un délai de résolution des dysfonctionnements n'excédant pas dix jours ou encore la traçabilité de la gestion des incidents.

La transparence sur le bon déroulement des travaux est renforcée, la réalisation systématique d'un compte rendu d'intervention étant prévue. L'utilisateur final sera en droit de le consulter, ainsi que le contrat de sous-traitance, ce qui lui permettra de vérifier lui-même la bonne réalisation du raccordement.

Ces mesures sont aujourd'hui nécessaires pour garantir la qualité du réseau et de son déploiement à l'échelon national, le quantitatif ne devant pas, bien sûr, se faire au détriment du qualitatif. Les attentes des élus locaux et des usagers sont fortes à cet égard, vous le savez, mes chers collègues.

Il reste à peine deux ans avant la date butoir fixée pour atteindre le très haut débit pour tous : des mesures concrètes, plus que nécessaires, doivent donc être prises. C'est la raison pour laquelle le groupe Union Centriste votera en faveur de ce texte. §

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Gold

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à la fin de l'année 2022, les trois quarts du territoire étaient couverts par la fibre optique et 18 millions de Français avaient souscrit un abonnement.

Notre pays est le champion d'Europe de la fibre optique. Et pourtant, à la fin de 2022, l'Arcep avait reçu près de 45 000 alertes – ce chiffre a augmenté de 17 % en un an –, imputables pour une large part à des problèmes liés à l'internet fixe et, notamment, aux raccordements. Entre 15 % et 20 % des abonnés seraient touchés par un dysfonctionnement.

Il suffit d'en parler autour de nous pour constater le ras-le-bol général : la fibre est devenue un sujet de crispation du quotidien.

Alors qu'internet est aujourd'hui un outil indispensable, y compris pour accéder aux services publics les plus essentiels, les coupures à répétition, les erreurs de raccordement et les malfaçons du réseau fibré sont particulièrement mal vécues. Elles sont aussi une source d'inquiétude, puisque le réseau cuivre est progressivement abandonné et qu'il n'existera aucune solution de remplacement à un réseau en fibre sûr et performant.

Aujourd'hui, la réussite est quantitative, quand la qualité est déceptive.

La proposition de loi de notre collègue Patrick Chaize, que nous sommes plusieurs à avoir cosignée au sein du groupe du RDSE, apporte des solutions pour pallier les dysfonctionnements qui surviennent dans le raccordement final de l'usager.

Cette responsabilité a été sous-traitée par l'Arcep aux opérateurs commerciaux, aux fournisseurs d'accès à internet. Les contrats de sous-traitance, dits « Stoc », sont une exception, une dérogation devenue la règle. Ils ont sans aucun doute permis le déploiement rapide de la fibre et son succès commercial, mais ils sont directement mis en cause pour leur implication dans les problèmes de raccordement, les intervenants ayant souvent une qualification insuffisante et le manque de contrôle étant évident.

Les opérateurs ont pris des engagements en 2020 puis en 2022, sans effets visibles pour les usagers et les collectivités.

Sans remettre en cause l'équilibre actuel et la dynamique du déploiement de la fibre, le texte issu des travaux de la commission comporte des pistes d'amélioration auxquelles nous souscrivons.

Tout d'abord, la proposition de loi précise que, si le raccordement est confié en priorité à l'opérateur commercial, c'est à condition qu'il respecte strictement les règles de l'art. Tout en rappelant que l'opérateur d'infrastructure est responsable de son réseau, nous garantissons ainsi la stabilité des contrats de sous-traitance en cours.

Ensuite, tout en restant la norme, la sous-traitance aux opérateurs commerciaux serait interdite pour les raccordements longs et complexes dans les zones déjà fibrées, dans les communes où la fermeture du réseau cuivré est engagée et en cas de simple changement de fournisseur d'accès à internet par un abonné déjà raccordé.

Ces précisions devraient permettre de concentrer le mode Stoc sur le déploiement massif et rapide de la fibre, tout en garantissant un niveau de qualité optimal dans les zones les plus tendues et dans les cas les plus complexes.

Enfin, les exigences minimales envers les sous-traitants et les sanctions en cas d'interruption prolongée de l'accès à internet seraient relevées, tandis que les pouvoirs de police de l'Arcep seraient étendus.

Le travail effectué par notre rapporteure, dans des délais très contraints, a permis d'aboutir à ce que nous considérons comme une position d'équilibre.

Les opérateurs commerciaux, tout comme l'Arcep et le Gouvernement, y sont opposés, notamment sur certains aspects : ils considèrent que cette proposition de loi pourrait conduire à la déstabilisation d'un modèle qui a fait ses preuves.

Confier le raccordement final à l'opérateur d'infrastructure engendrerait en effet une réorganisation de la filière et, peut-être, un ralentissement du déploiement de la fibre. Mais 80 % des locaux sont aujourd'hui raccordables. L'objectif d'une couverture intégrale du territoire en fibre optique en 2025 est à portée de main. Alors que le réseau cuivre sera bientôt éteint, peut-être devrions-nous dès maintenant nous concentrer sur la qualité du réseau fibré plutôt que sur sa vitesse de déploiement, quitte à ralentir un peu la cadence.

L'organisation actuelle a conduit à des situations ubuesques : on observe des habitations et des équipements dégradés, des clients débranchés sans raison, des câbles installés de façon anarchique.

Dans le cadre d'une analyse de terrain menée l'an dernier, l'Arcep a constaté que, dans 840 points de mutualisation, seule la moitié des câblages respectaient les règles de l'art. En outre, les opérateurs d'infrastructures et opérateurs commerciaux se renvoyant la balle, il est difficile pour les utilisateurs et les élus locaux d'identifier un responsable.

Ce texte a le mérite d'apporter des solutions : il renverse la hiérarchie de la filière pour faire du plan France Très Haut Débit une réelle réussite. Attentif aux difficultés et aux inquiétudes des usagers et des élus, le groupe du RDSE s'associera à cette démarche.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la fibre optique est devenue le principal réseau d'accès à internet pour les Français : le taux de locaux raccordables approche aujourd'hui les 80 %. Mais si le déploiement de la fibre progresse bien à l'échelle nationale – cela a été dit –, de fortes disparités régionales demeurent. Selon le rapport de France Stratégie de 2023, certains départements à dominante rurale dépendent toujours à plus de 25 % du réseau cuivre.

Je le souligne ici, et je sais que nous partageons cette analyse, le non-accès à la fibre porte gravement atteinte à un aménagement équilibré du territoire et constitue une rupture d'égalité qui ne peut être tolérée.

Le cap de 2025 a été fixé pour la généralisation de la fibre afin de garantir son accès à tous les usagers. Il est de notre responsabilité, ici, au Sénat, de nous assurer du respect de cet objectif. Nous avons tous en tête la situation intolérable des zones blanches pour le réseau sans fil : il s'agit de ne pas la reproduire. Cette proposition de loi prend en compte cette préoccupation et je remercie son auteur, ainsi que la rapporteure, pour leur travail et leur engagement.

Avec le plan France Très Haut Débit, les opérateurs commerciaux sont arrivés massivement sur le marché des réseaux de fibre optique. Cette accélération s'explique par une spécificité française : dans la pratique, l'opération de raccordement final du client est confiée à l'opérateur commercial. En d'autres termes, la partie la plus importante et délicate pour le consommateur est sous-traitée par l'opérateur d'infrastructure.

Cette sous-traitance – le mode Stoc – est non seulement une exception française, mais également une dérogation à notre mode de fonctionnement traditionnel sur les autres réseaux, qu'il s'agisse des réseaux de gaz, d'électricité ou d'eau.

Depuis sa mise en place en 2015, cette méthode est source de nombreuses difficultés – coupures inopinées, techniciens peu scrupuleux, raccordements impossibles ou malfaçons –, qui mettent à mal le déploiement de la fibre. Du fait des nombreux litiges entre opérateurs et usagers – nous en connaissons tous des exemples dans nos territoires –, certaines collectivités ont tiré le signal d'alarme.

Face à l'accroissement du nombre des signalements, l'Arcep a réuni les opérateurs d'infrastructure et les opérateurs commerciaux dès 2019 en vue d'améliorer l'exploitation des réseaux et de résoudre les difficultés. Manifestement, les démarches entreprises par les opérateurs en concertation avec le Gouvernement sont insuffisantes, comme l'a souligné l'auteur de ce texte, Patrick Chaize, que je remercie encore. Nous serons donc attentifs à l'avenir du plan d'action pour améliorer la qualité des réseaux fibre, que les acteurs de la filière ont remis au Gouvernement en septembre 2022.

Dans ce contexte particulier, qui requiert des mesures fortes et efficaces, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires accueille positivement cette proposition de loi. Elle doit permettre d'améliorer le déploiement du plan France Très Haut Débit et de limiter les difficultés et les dysfonctionnements liés à ces raccordements.

Ce texte apportera des outils législatifs pour réguler et contrôler les opérateurs et leurs sous-traitants, pour renforcer les pouvoirs de l'Arcep et mieux protéger les consommateurs, et ainsi rassurer les collectivités particulièrement affectées par ces désordres.

Nous saluons le travail effectué en commission sous l'impulsion de Mme la rapporteure, qui a consolidé le dispositif d'encadrement des raccordements à la fibre tout en veillant à ne pas ralentir le déploiement de cette technologie, à deux ans de l'achèvement du plan et alors que la fermeture du réseau cuivre est imminente.

Pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, il est essentiel de renforcer la garantie de la qualité du raccordement grâce à des pouvoirs accrus de l'Arcep et d'améliorer la formation des intervenants chargés de l'installation de la fibre. J'insiste sur ce point.

Par ailleurs, les collectivités, en particulier dans les zones rurales, ont été affectées par la mauvaise gestion du déploiement de la fibre, car c'est vers elles que se sont souvent tournés ceux qui ont rencontré des difficultés de connexion. Il est donc essentiel de consulter davantage les élus locaux et, après un constat de carence dans les zones d'initiative privée, de prévoir de nouveaux appels à manifestation d'intérêt.

Pour la protection des consommateurs, notre groupe proposera un amendement travaillé avec l'UFC-Que Choisir visant à modifier les seuils de sanction en cas d'interruption du service d'accès à internet. Une protection efficace des consommateurs paraît nécessaire, car la perte d'une connexion à internet a des conséquences autres que le seul fait de devoir payer un abonnement pour un service qui ne fonctionne pas, notamment pour les petites entreprises et pour les artisans.

L'absence d'accès à internet affectant la vie quotidienne des personnes, il faut insister encore davantage sur la mise en œuvre du raccordement de tous les foyers.

Nous aurions pu, dans le cadre de notre débat, aborder d'autres sujets, notamment le choix du mode Stoc ou encore la hausse de la consommation d'énergie liée au passage au numérique, même si la fibre consomme quatre fois moins d'énergie que le réseau cuivre, mais nous n'avons pas le temps pour tout cela, monsieur le président.

En conclusion, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera ce texte, qui va dans le bon sens.

Debut de section - Permalien
Jean-Noël Barrot

Monsieur le président, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à remercier Patrick Chaize pour le dépôt de cette proposition de loi, qui a le mérite de nous permettre de débattre d’une politique publique remarquable : le plan France Très Haut Débit, dont nous célébrons cette année le dixième anniversaire.

Cela m’offre l’occasion de rappeler à quel point ce plan est un très grand succès français : nous sommes passés de 1 million de foyers éligibles à la fibre en 2013 à 8 millions en 2017 et à 34 millions en 2022, faisant de la France le pays d’Europe le plus avancé en matière de déploiement de cette technologie.

Il s’agit sans doute du programme d’investissement le plus ambitieux et le plus important depuis le début du siècle : 34 milliards d’euros lui ont été consacrés, dont 65 % ont été pris en charge par le secteur privé, 25 % par les collectivités territoriales et 10 % par l’État.

C’est également l’un des chantiers industriels les plus ambitieux et les plus importants depuis le début du siècle, qui a mobilisé plus de 40 000 agents sur l’ensemble du territoire pour déployer des millions de prises de fibre optique. Ce succès est vraisemblablement le fruit d’un accord intelligent trouvé voilà dix ans entre l’État, les collectivités et les opérateurs.

Pour autant, ce que je viens de dire ne correspond pas au ressenti de certains de nos concitoyens. Comme le souligne la proposition de loi de Patrick Chaize, des problèmes de qualité très significatifs empoisonnent leur quotidien, en les empêchant d’être raccordés à la fibre ou en leur infligeant des coupures.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 20 000 notifications ont été inscrites sur le site de l’Arcep l’année dernière et des témoignages de problèmes de qualité liés à la fibre sont relayés dans les journaux chaque semaine. Il suffit d’aller à la rencontre de nos concitoyens pour prendre la mesure de leur exaspération quant à ces aléas. Où se situe la responsabilité de ces difficultés ?

Il convient d’abord d’examiner les acteurs en cause : d’un côté, les opérateurs d’infrastructure, qui déploient les réseaux, notamment jusqu’au point de mutualisation ; de l’autre, les opérateurs commerciaux, qui assurent le branchement au dernier kilomètre, en vertu du mode Stoc. Chacun rejette la faute sur l’autre.

Cependant, dans plus de 90 % des cas, les problèmes sont dus aux opérateurs d’infrastructure, en particulier à des réseaux très accidentogènes, souvent conçus à une époque antérieure au plan France Très Haut Débit, rendant le raccordement des foyers difficile et les exposant à des risques de coupures ou de défaillances. Cela permet de rendre compte de l’immense majorité des problèmes liés à la fibre.

Voilà pourquoi j’ai demandé voilà six mois aux opérateurs d’infrastructure dans les territoires où les réseaux sont les plus accidentogènes de me présenter ainsi qu’à l’Arcep un plan de reprise complète de ces réseaux.

Ces plans ont été présentés pour 450 000 locaux et commencent à être déployés ; les opérateurs d’infrastructures sont en train de reconstruire les réseaux. Sur les 450 000 prises concernées, 23 000 ont été révisées à ce stade. C’est encore peu, mais une fois ces plans achevés dans des territoires comme le Calvados, la Seine-Maritime ou l’Essonne, nous aurons résolu une partie importante du problème.

Dans leur minorité, les problèmes sont liés aux opérateurs commerciaux. C’est là le sujet de la proposition de loi que nous allons discuter. En raison de la rapidité des déploiements et de problèmes de responsabilité en cas de défaillance, qui ont bien été identifiés par l’auteur de la proposition de loi, il existe des situations de débranchements ou de coupures sauvages : les sous-traitants des opérateurs commerciaux se présentent devant une armoire pour opérer le raccordement d’un client dans des temps très contraints et le font parfois de manière non appropriée ou au détriment d’usagers déjà raccordés.

Pour résoudre cette minorité de problèmes de qualité de la fibre, on serait tenté de remettre en question l’organisation du déploiement entre opérateurs d’infrastructure et opérateurs commerciaux, que l’on appelle le mode Stoc. Depuis une décision de l’Arcep de 2015, l’opérateur d’infrastructure a certes la responsabilité de la qualité du réseau de bout en bout jusqu’au domicile, mais il ne peut s’opposer à ce que l’opérateur commercial installe le dernier kilomètre, en lien avec son client, sauf s’il le fait dans des conditions de qualité dégradées.

Le mode Stoc présente des inconvénients et des avantages. Son inconvénient majeur est que, lorsque survient une défaillance ou une coupure, l’opérateur commercial, en charge du dernier kilomètre, et l’opérateur d’infrastructure se renvoient la balle, ce qui retarde l’attribution des responsabilités et la réparation du dommage causé à l’usager. Il s’agit donc de résoudre cette difficulté relative à l’attribution des responsabilités.

Pour autant, les avantages du mode Stoc ont sans doute contribué à la rapidité du déploiement des réseaux de fibre optique sur l’ensemble du territoire. Cette technique offre de la simplicité pour l’usager, qui n’a qu’un seul interlocuteur pour son abonnement et son raccordement : son opérateur commercial.

De surcroît, la concurrence entre les opérateurs commerciaux pour raccorder au plus vite leurs clients a également contribué à la rapidité de déploiement du plan France Très Haut Débit.

Le Gouvernement, qui accueille les débats sur ces sujets, n’entend pas supprimer le mode Stoc, mais plutôt le corriger. Supprimer cet équilibre entraînerait en effet la réécriture d’un certain nombre de contrats, ce qui retarderait d’autant le déploiement du plan France Très Haut Débit, alors que l’objectif est plutôt de l’accélérer.

De plus, cela pourrait soulever des questions d’équité concurrentielle, car les opérateurs d’infrastructure pourraient être tentés de privilégier les clients de certains opérateurs commerciaux plutôt que d’autres, en raison de liens capitalistiques existants.

Cependant, il est nécessaire de le corriger. Si le Gouvernement propose des amendements sur les trois premiers articles de cette proposition de loi, sur lesquels son avis est réservé, il accueille très favorablement les articles 4 et 5. Ceux-ci renforcent les pouvoirs de l’Arcep pour sanctionner les opérateurs commerciaux qui ne respectent pas leurs responsabilités et améliorent la protection des usagers lorsque leur accès à la fibre est interrompu pendant une trop longue période.

Les amendements de Mme la rapporteure qui concernent en particulier les certificats de conformité ou de non-raccordement visent également à améliorer le mode Stoc pour le rendre plus opérant. Il s’agit d’arriver à la fin du plan France Très Haut Débit, qui n’est plus si lointaine. Il est essentiel d’y parvenir.

L’étape suivante consistera à décommissionner le réseau cuivre, qui coûte cher à entretenir et qui présente des coûts environnementaux et énergétiques significatifs. Pour ce faire, il est essentiel que chacun puisse accéder au très haut débit, en particulier à la fibre, dans les meilleures conditions. Aujourd’hui, 80 % des Français y sont éligibles ; l’objectif est d’atteindre 100 % à l’horizon 2025.

Les corrections qui seront apportées au mode Stoc aujourd’hui et durant la navette sont donc bienvenues pour atteindre cet objectif d’aménagement numérique des territoires et d’égal accès pour tous les citoyens aux possibilités ouvertes par l’économie numérique.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Gold

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à la fin de l'année 2022, les trois quarts du territoire étaient couverts par la fibre optique et 18 millions de Français avaient souscrit un abonnement.

Notre pays est le champion d'Europe de la fibre optique. Et pourtant, à la fin de 2022, l'Arcep avait reçu près de 45 000 alertes – ce nombre a augmenté de 17 % en un an –, imputables pour une large part à des problèmes liés à l'internet fixe et, notamment, aux raccordements. Entre 15 % et 20 % des abonnés seraient touchés par un dysfonctionnement.

Il suffit d'en parler autour de nous pour constater le ras-le-bol général : la fibre est devenue un sujet de crispation du quotidien.

Alors qu'internet est aujourd'hui un outil indispensable, y compris pour accéder aux services publics les plus essentiels, les coupures à répétition, les erreurs de raccordement et les malfaçons du réseau fibré sont particulièrement mal vécues. Elles sont aussi une source d'inquiétude, alors que le réseau cuivre est progressivement abandonné et qu'il n'existera bientôt plus aucune solution de remplacement à un réseau en fibre sûr et performant.

Aujourd'hui, la réussite est quantitative, quand la qualité est déceptive.

La proposition de loi de notre collègue Patrick Chaize, que nous sommes plusieurs à avoir cosignée au sein du groupe du RDSE, prévoit des solutions pour pallier les dysfonctionnements qui surviennent dans le raccordement final de l'usager.

Cette responsabilité a été sous-traitée par l'Arcep aux opérateurs commerciaux et aux fournisseurs d'accès à internet. Les contrats de sous-traitance dits « Stoc » sont une exception, une dérogation devenue la règle. Ils ont sans aucun doute permis le déploiement rapide de la fibre et son succès commercial, mais ils sont directement mis en cause pour leur implication dans les problèmes de raccordement, la qualification des intervenants étant souvent insuffisante et le manque de contrôle évident.

Les opérateurs ont pris des engagements en 2020, puis en 2022, sans effets visibles pour les usagers et les collectivités.

Sans remettre en cause l'équilibre actuel et la dynamique du déploiement de la fibre, le texte issu des travaux de la commission comporte des pistes d'amélioration auxquelles nous souscrivons.

Tout d'abord, la proposition de loi précise que, si le raccordement est confié en priorité à l'opérateur commercial, c'est à condition qu'il respecte strictement les règles de l'art. Tout en rappelant que l'opérateur d'infrastructure est responsable de son réseau, nous garantissons ainsi la stabilité des contrats de sous-traitance en cours.

Ensuite, tout en restant la norme, la sous-traitance aux opérateurs commerciaux serait interdite pour les raccordements longs et complexes dans les zones déjà fibrées, dans les communes où la fermeture du réseau cuivré est engagée et en cas de simple changement de fournisseur d'accès à internet par un abonné déjà raccordé.

Ces précisions devraient permettre de concentrer le mode Stoc sur le déploiement massif et rapide de la fibre, tout en garantissant un niveau de qualité optimal dans les zones les plus tendues et dans les cas les plus complexes.

Enfin, les exigences minimales envers les sous-traitants et les sanctions en cas d'interruption prolongée de l'accès à internet seraient relevées, tandis que les pouvoirs de police de l'Arcep seraient étendus.

Le travail effectué par notre rapporteure, dans des délais très contraints, a permis d'aboutir à ce que nous considérons comme une position d'équilibre.

Les opérateurs commerciaux, tout comme l'Arcep et le Gouvernement, sont opposés à ce texte, notamment à certains de ses aspects : ils considèrent que cette proposition de loi pourrait conduire à la déstabilisation d'un modèle qui a fait ses preuves.

Confier le raccordement final à l'opérateur d'infrastructure entraînerait en effet une réorganisation de la filière et, peut-être, un ralentissement du déploiement de la fibre. Mais 80 % des locaux sont aujourd'hui raccordables. L'objectif d'une couverture intégrale du territoire en fibre optique en 2025 est à portée de main. Alors que le réseau cuivre sera bientôt éteint, peut-être devrions-nous dès à présent nous concentrer sur la qualité du réseau fibré plutôt que sur sa vitesse de déploiement, quitte à ralentir un peu la cadence.

L'organisation actuelle a donné lieu à des situations ubuesques : on observe des habitations et des équipements dégradés, des clients débranchés sans raison, des câbles installés de façon anarchique.

Dans le cadre d'une analyse de terrain effectuée l'an dernier, l'Arcep a constaté que, dans 840 points de mutualisation, seule la moitié des câblages respectaient les règles de l'art. En outre, les opérateurs d'infrastructure et les opérateurs commerciaux se renvoyant la balle, il est difficile pour les utilisateurs et les élus locaux d'identifier un responsable.

Ce texte a le mérite d'apporter des solutions : il renverse la hiérarchie de la filière pour faire du plan France Très Haut Débit une réelle réussite. Attentif aux difficultés et aux inquiétudes des usagers et des élus, le groupe du RDSE s'associera à cette démarche.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Marchand

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2013, l'État s'était engagé à couvrir intégralement notre territoire en très haut débit à moyenne échéance grâce au plan France Très Haut Débit. Les objectifs fixés étaient les suivants : le raccordement de 100 % des 35 millions de logements et locaux à usage professionnel, dont 80 % en fibre optique jusqu'à l'abonné en 2022, et la généralisation de la fibre optique en 2025.

En somme, il s'agissait de faire en sorte que, d'ici à deux ans, tous les Français, notamment ceux qui habitent en zone rurale, puissent bénéficier d'une connectivité numérique performante, chez eux comme sur leur lieu de travail.

Pour rappel, il y a dix ans, le plan prévoyait initialement 20 milliards d'euros d'investissements publics et privés, dont 3, 3 milliards de subventions de l'État à destination des collectivités locales dans les zones dites « non conventionnées ».

Dans un rapport publié en janvier 2017, la Cour des comptes avait toutefois substantiellement réévalué le coût du plan à 35 milliards d'euros, et estimé que si l'objectif intermédiaire d'une couverture de 50 % du territoire était atteint, l'objectif en matière de très haut débit fixé pour 2022 semblait compromis par l'insuffisance du co-investissement privé.

Dans le cadre du plan de relance présenté en septembre 2020, le Gouvernement a amplifié son effort et mobilisé 420 millions d'euros pour soutenir les collectivités locales qui en avaient le plus besoin, n'ayant pu encore viser la généralisation de la fibre. Je pense à la Bretagne, à Mayotte et à l'Auvergne à titre d'exemples.

Quel constat faisons-nous aujourd'hui ? L'objectif d'une couverture de 80 % du territoire en fibre optique était quasi atteint au 31 décembre 2022, ce qui place la France à la tête des pays les plus fibrés en Europe.

Néanmoins, « raccordable » ne veut pas dire « raccordé » et l'on observe encore des disparités territoriales fortes entre, d'une part, les zones très denses et les zones moins denses d'initiative privée, où les taux de couverture des locaux sont respectivement de 91 % et 87 %, et, d'autre part, les zones moins denses d'initiative publique, où le taux de couverture est de 68 %. Il faut toutefois noter que ces dernières connaissent le taux de déploiement le plus dynamique, qui était de 73 % en 2022.

L'objectif d'une couverture de 100 % du territoire par la fibre en 2025 est quasi atteignable, en dépit des 670 000 locaux identifiés comme difficilement raccordables, lesquels devraient faire l'objet de mesures spécifiques et être couverts à l'horizon 2026.

S'il est incontestable que la France a mis en œuvre une dynamique puissante de déploiement de la fibre, force est aussi de constater – c'est l'objet de cette proposition de loi – que des difficultés opérationnelles sont apparues, parfois de manière intolérable, notamment pour les collectivités territoriales qui s'en sont fait l'écho.

En effet, le modèle de déploiement de la fibre repose principalement sur la sous-traitance – ce qu'on appelle le mode Stoc –, laquelle subit une forte pression sur les prix de la part des donneurs d'ordre.

Or la sous-traitance ne permet pas un contrôle optimal de la formation des techniciens chargés d'effectuer les raccordements, ce qui entraîne des malfaçons non seulement sur le réseau, mais aussi parfois sur les infrastructures situées à proximité, à l'instar des tableaux électriques ou des réseaux de gaz.

Si l'Arcep recommande un plafond de deux rangs de sous-traitance, l'Autorité indique avoir observé des opérations portant à cinq, voire à six, le nombre de rangs de sous-traitance.

Les points de mutualisation situés en pleine rue concentrent les branchements des câbles de fibre optique et les difficultés opérationnelles : entre les dégradations des armoires techniques et les débranchements sauvages, les particuliers comme les élus locaux sont nombreux à faire part de leur mécontentement. Les témoignages concernant des dégradations, des incivilités ou des malfaçons sont fréquents, autant d'actes dont les techniciens des sous-traitants sont très souvent à l'origine.

La proposition de loi que nous examinons sur l'initiative de notre collègue Patrick Chaize intervient à la suite de ces différents constats.

Notre collègue, également président de l'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca), est un fin connaisseur des questions liées à la fibre. Son expertise sur les problèmes de raccordement aux réseaux de fibre optique et d'exploitation de ces derniers, ainsi que son exigence sur la qualité de service, a constitué un éclairage qui porte déjà ses fruits.

En effet, grâce à la description alarmante de la situation en matière de raccordement des abonnés à la fibre optique effectuée dans l'exposé des motifs de la proposition de loi de juillet 2022, les acteurs de la filière ont pris pleinement conscience des difficultés rencontrées par certains usagers, de leur insatisfaction et des légitimes préoccupations des élus locaux, de même que de la vigilance des parlementaires sur ce sujet.

Face au tableau parfois sombre qui est fait du déploiement de la fibre, les opérateurs se devaient de réagir. En septembre dernier, un plan d'action a donc été décidé par les acteurs de la filière, qui repose notamment sur la prise de photos avant et après l'opération, lesquelles sont jointes au compte rendu d'intervention, et sur la remise en état des points de mutualisation.

La Fédération française des télécoms vient aussi de publier des grilles de compétences à destination des donneurs d'ordre, qu'il s'agisse des opérateurs commerciaux ou des opérateurs d'infrastructure, et de leurs prestataires. Le référentiel concernant les sous-traitants porte notamment sur la formation de leurs techniciens, sur les règles de sécurité et d'ingénierie pour les travaux optiques ou sur les bonnes pratiques lors de travaux chez le client. Ce référentiel sera en application à la fin du mois.

De la même manière, le renforcement du pouvoir de contrôle et de sanction de l'Arcep va indéniablement dans le bon sens.

À l'heure où nous examinons cette proposition de loi, ces dispositions sont mises en œuvre, mais il faudra bien évidemment un certain temps pour les évaluer correctement et pour que l'on puisse mesurer si la prise de conscience de la filière et les mesures engagées permettent de mettre fin aux dysfonctionnements dénoncés.

On pourrait nous opposer que les dispositions que nous examinons aujourd'hui risquent de ralentir le déploiement de la fibre en raison d'effets de bord préjudiciables. Les opérateurs d'infrastructure, s'ils souscrivent à l'ambition du texte, ont en effet manifesté leur crainte que certains mécanismes prévus dans cette proposition de loi ne finissent par complexifier leur tâche.

Mais nous savons bien, et cela vaut aussi pour les opérateurs, que là où il y a une volonté, il y a un chemin.

En définitive, le constat effectué dans la proposition de loi de juillet 2022 était le bon : il était clairement nécessaire. Celle-ci a d'ores et déjà produit des effets, manifestement dans le bon sens puisque le Gouvernement a obtenu un certain nombre d'engagements et de concessions de la part des opérateurs.

Il nous appartient donc de donner des signes de notre volonté d'agir. À cet égard, et même si certains peuvent juger raisonnable de laisser du temps à la filière pour poursuivre la résolution des dysfonctionnements constatés en juillet 2022, ce texte est un bel accélérateur pour faire et bien faire.

C'est pourquoi le groupe RDPI votera cette proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Demas

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si elle peut sembler technique au premier abord, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui répond à une préoccupation quotidienne de nos concitoyens.

Je tiens à remercier mon collègue Patrick Chaize d’avoir déposé ce texte, qui apporte des solutions pragmatiques pour remédier aux désordres occasionnés dans le raccordement d’utilisateurs finaux à la fibre, en raison du recours à une chaîne de sous-traitance, souvent mal maîtrisée, dans le cadre du mode Stoc. Cette expression désigne un mode de réalisation des raccordements à la fibre par lequel l’opérateur d’infrastructure, responsable du réseau, confie la dernière partie du raccordement aux opérateurs commerciaux, qui font généralement eux-mêmes appel à d’autres prestataires.

Alors que cette pratique était l’exception avant 2015, ce mode opératoire est devenu la règle.

Nous avons tous constaté dans nos territoires l’exaspération des usagers et des élus locaux en raison des dysfonctionnements issus du recours au mode Stoc : débranchements injustifiés, branchements réalisés de façon anarchique, armoires vandalisées et, surtout, absence de recours effectif.

À l’aube de la fermeture du réseau cuivre, le raccordement final à la fibre optique est sans conteste le talon d’Achille du plan France Très Haut Débit. Il est dès lors de notre responsabilité de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la réussite de ce projet ambitieux, alors même que nous entrons dans sa dernière ligne droite.

Face aux problèmes liés à la qualité des raccordements à la fibre, trois options s’offrent à nous.

La première, privilégiée par le Gouvernement jusqu’à maintenant, consiste à négocier avec les opérateurs une solution contractuelle non prescriptive. Si ce mode d’action apparaît comme le plus souple, force est de constater qu’il est pour le moment insuffisant et qu’il n’a pas produit les résultats escomptés.

La révision des contrats Stoc, engagée en 2020 grâce aux contrats dits Stoc II puis Stoc III, a permis des progrès, qui restent toutefois trop timides. Le constat est clair : trois ans après le début des négociations, les engagements pris par les opérateurs peinent encore à être mis en œuvre.

La négociation avec la filière est indispensable, mais elle gagnerait à être encadrée et accompagnée par le législateur si nous souhaitons accélérer la montée en qualité des réseaux fibre et venir à bout des réticences de certains opérateurs.

La deuxième option, la plus radicale, consisterait à mettre fin au mode Stoc et à charger l’opérateur d’infrastructure de la réalisation du raccordement, passant donc en mode OI. À première vue, il peut s’agir de la solution la plus évidente et je comprends que nombre d’acteurs, certains élus locaux notamment, aient pu l’avoir à l’esprit.

Elle conduirait cependant à changer de plan au milieu de la bataille, alors que, depuis 2018, 20 000 locaux en moyenne sont raccordés chaque jour à la fibre. Changer de mode opératoire à ce stade risquerait de mettre un coup d’arrêt à ce déploiement, ce qui ne serait pas conforme à nos objectifs.

La troisième option, à laquelle je souscris pleinement, consiste à mieux encadrer le mode Stoc. Cette solution pragmatique permet de répondre aux préoccupations des usagers et des collectivités sans pour autant renverser la table ni déstabiliser les dynamiques à l’œuvre.

Le présent texte s’inscrit pleinement dans cette troisième voie d’équilibre. Je remercie Patrick Chaize et la commission de m’avoir accordé leur confiance à ce sujet.

Dans des délais restreints, j’ai entendu toutes les parties prenantes – opérateurs, régulateur, administrations centrales, élus locaux et usagers – et proposé à la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable de reprendre plusieurs de leurs suggestions.

J’en viens à présent aux axes qui ont guidé le travail de la commission et aux principales modifications apportées à la proposition de loi.

Le premier axe a été la clarification des modalités de mise en œuvre du mode Stoc et de la répartition des responsabilités entre les opérateurs.

Conformément aux objectifs de Patrick Chaize, nous avons prévu, à l’article 1er, que l’opérateur d’infrastructure confie la réalisation du raccordement à la fibre à l’opérateur commercial selon un mécanisme de priorité et sous réserve du strict respect des règles de l’art.

Cette proposition pragmatique permet de conserver la volonté de l’auteur de garantir un principe de sous-traitance, en rappelant que la mise en œuvre du mode Stoc relève d’un choix de l’opérateur d’infrastructure, tout en préservant l’équilibre des contrats de sous-traitance en cours.

Avec le même objectif, la commission a souhaité renforcer le caractère opérationnel du guichet unique pour prendre en charge les difficultés de raccordement à la fibre rencontrées par les utilisateurs. Nous avons renforcé la place de ces derniers dans le dispositif, en leur permettant de suivre la résolution des difficultés rencontrées et en garantissant que celle-ci intervienne dans un délai raisonnable, qui ne pourra excéder dix jours.

Ce guichet unique a suscité des réactions différentes chez les usagers, les opérateurs et le Gouvernement. Si tout le monde s’accorde sur son utilité, la définition de ses modalités opérationnelles fait débat. Notre proposition est une première pierre à l’édifice, mais nous sommes ouverts à la perspective qu’un travail plus approfondi soit mené sur cette question dans le cadre de la navette parlementaire.

Enfin, la commission a modifié l’article 3, qui interdit le recours au mode Stoc dans certaines zones du territoire, pour en affiner le périmètre d’application afin de prendre en compte la fermeture du réseau cuivre et restreindre l’interdiction aux raccordements longs et complexes, de manière à limiter les atteintes à la liberté d’entreprendre.

Le deuxième axe des travaux de la commission a été de consolider les exigences de qualité et de contrôle applicables aux raccordements.

Nous avons prévu, à l’article 1er, l’élaboration d’un socle d’exigences minimales de qualité, que les contrats et les cahiers des charges liant les opérateurs commerciaux et leurs sous-traitants devront respecter.

Nous avons également introduit une obligation de labellisation de tout intervenant chargé de réaliser un raccordement à la fibre, selon un référentiel national. De plus, nous avons consacré dans la loi la réalisation systématique d’un compte rendu d’intervention pour permettre à l’opérateur d’infrastructure et à l’utilisateur de vérifier la bonne réalisation du raccordement.

Enfin, à l’article 2, qui concerne les réseaux d’initiative publique, c’est-à-dire les zones dites RIP, nous avons garanti un délai maximal de quarante-huit heures pour la transmission à la collectivité du calendrier hebdomadaire des interventions de raccordement lorsque cette dernière en fait la demande, de manière à renforcer les moyens de contrôle des élus locaux, souvent démunis face aux malfaçons dans le raccordement final.

Le troisième et dernier axe des travaux de la commission a été d’assurer le caractère opérant des dispositifs.

Nous avons ainsi proposé une nouvelle rédaction de l’article 4, qui étend les pouvoirs en matière de qualité des raccordements à la fibre de l’Arcep, dont nous entendons ainsi clarifier les moyens de contrôle et de sanction.

À l’article 5, qui ouvre de nouveaux droits aux consommateurs en cas d’interruption prolongée du service d’accès à internet, nous avons, d’une part, amélioré l’articulation dans le temps des sanctions susceptibles d’être prononcées à l’encontre de l’opérateur commercial et, d’autre part, veillé à protéger ce dernier d’éventuels abus de la part des consommateurs.

En somme, tous ces ajustements de bon sens, qui résultent d’un travail approfondi de concertation avec tous les acteurs, s’inscrivent pleinement dans l’esprit du texte présenté par Patrick Chaize tout en consolidant sa portée et son caractère opérationnel.

Vous l’aurez compris, face aux dysfonctionnements dans le raccordement des utilisateurs finaux à la fibre optique, il n’existe pas de solution miracle donnant satisfaction à l’ensemble des intervenants. Il y a pourtant urgence à agir pour assurer la pérennité et la qualité des raccordements. Le texte de la commission est une proposition ambitieuse et équilibrée, mais nous avons conscience qu’elle est aussi perfectible.

Monsieur le ministre, la balle est dans votre camp pour poursuivre, dans le cadre de la navette parlementaire, le travail sur cette initiative sénatoriale. Celle-ci répond, vous l’aurez compris, à de très fortes attentes de la part des usagers et des élus locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mandelli

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui la proposition de loi visant à assurer la qualité et la pérennité des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique de notre éminent collègue Patrick Chaize, dont je tiens évidemment à saluer l'excellent travail et la constance de l'engagement sur les sujets liés au numérique.

Effectivement, la qualité des raccordements et la pérennité des réseaux de fibre optique sont essentielles pour le développement du numérique sur le territoire national.

L'auteur de ce texte présente – comme à son habitude – une étude sérieuse et propose une vision globale de cette question d'avenir qui concerne tous les citoyens, dans tous les territoires.

Actuellement, plus de 15 000 Français sont raccordés à la fibre chaque jour, soit près d'un million de souscriptions à la fibre tous les trimestres. Nous pouvons collectivement saluer les efforts de tous les acteurs de la filière qui contribuent à ce déploiement soutenu. Mais à un tel rythme, des défaillances peuvent survenir.

Aussi cette proposition de loi prévoit-elle d'apporter des réponses aux dysfonctionnements qui surviennent lors du raccordement à la fibre de l'utilisateur final, lesquels sont liés à un recours parfois mal maîtrisé à la sous-traitance dans le cadre du mode « sous-traitance opérateur commercial », dit mode Stoc.

Le déploiement de la fibre optique en France est un enjeu majeur pour l'aménagement du territoire, le développement économique et social du pays, ainsi que pour la compétitivité de nos entreprises. C'est également un enjeu de développement durable, puisque la fibre optique est une technologie plus économe en énergie que les technologies existantes et qu'elle favorise la réduction de la consommation d'énergie et des émissions de gaz à effet de serre.

Je tiens également à souligner avec insistance et force le travail de grande qualité de notre rapporteure Patricia Demas, qui a présenté et fait adopter dix-neuf amendements au nom de notre commission, afin de compléter et de préciser le dispositif de ce texte.

Réparties en trois axes, ces dispositions ont pour objectif de clarifier le cadre de mise en œuvre du mode Stoc et la chaîne des responsabilités, de renforcer les exigences en matière de qualité et de contrôle applicable aux raccordements et, enfin, d'assurer le caractère opérant des dispositifs.

D'un point de vue européen, le déploiement de la fibre optique en France suit un très bon rythme, puisque la part de la fibre a doublé en deux ans, passant d'environ 24 % en 2019 à 46 % en 2021. Aujourd'hui, les opérateurs, cela a été dit, ont fibré plus de 70 % du territoire. Notre taux de couverture est ainsi l'un des plus élevés d'Europe, nettement supérieur désormais à la moyenne des pays de l'OCDE. Le travail des différents opérateurs est de nouveau à saluer.

Mais, d'un point de vue national, nous constatons de nombreuses disparités dans les raccordements faisant craindre une fracture numérique. C'est parfois le cas entre la ville et la campagne, mais pas toujours comme nous pourrions l'imaginer : en Vendée, par exemple, on constate que, dans les deux villes situées en zone d'appel à manifestation d'intention d'investissement (Amii), La Roche-sur-Yon et Les Sables-d'Olonne, l'opérateur a pris du retard dans le déploiement de la fibre. Il invoque d'ailleurs des prétextes sur lesquels je ne souhaite pas revenir ici, puisqu'un certain nombre de procédures sont en cours.

Je tiens ici à soutenir le travail des maires et des élus locaux du département de la Vendée, ainsi que celui de l'Arcep, qui ont porté la voix des usagers auprès des opérateurs, afin qu'ils respectent leurs obligations et que leurs investissements soient à la hauteur.

Il convient en effet de n'oublier personne dans le cadre de ce déploiement : les territoires urbains et les territoires ruraux, les particuliers, les entreprises et les collectivités, en un mot tous nos concitoyens, quelle que soit leur activité. De cette couverture globale et qualitative dépendra la réussite finale du plan France Très Haut Débit.

Dès lors, la présente proposition de loi, examinée et amendée par notre Haute Assemblée, sous la férule de notre rapporteure Patricia Demas, permet de fixer un cadre de mise en œuvre du mode Stoc, de clarifier la répartition des responsabilités, de renforcer les contrôles de la qualité des raccordements et de protéger les droits des usagers en cas d'interruption des services internet.

Dans le détail, il s'agit notamment de rappeler la responsabilité de l'opérateur d'infrastructure dans le choix du mode de réalisation des raccordements et son rôle de garant de la qualité des travaux, en prévoyant d'instaurer un guichet unique assurant la prise en charge des difficultés de raccordement.

Il s'agit également d'interdire le mode Stoc dans les zones fibrées et dans les communes dans lesquelles la fermeture du réseau cuivre est engagée.

Il s'agit aussi d'accroître les pouvoirs de contrôle et de sanction de l'Arcep sur tous les opérateurs intervenant sur le réseau.

Il s'agit enfin de renforcer les droits des consommateurs face aux effets des coupures prolongées d'accès à internet et aux débranchements sauvages, tout en protégeant les opérateurs commerciaux contre d'éventuels abus des consommateurs.

Le temps est désormais aux actes concrets pour garantir la qualité des raccordements à la fibre.

Pour toutes ces raisons, et pour couper court à tout suspense

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Houllegatte

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le numérique, qu'on appelait il y a encore une décennie « les nouvelles technologies de l'information et de la communication », connaît un essor considérable et conditionne désormais notre développement économique et notre vie sociale. Le numérique prend appui sur le triptyque que constituent les infrastructures, les services et les usages.

Le déploiement des infrastructures permettant le haut débit est un préalable et une nécessité pour permettre aux opérateurs et aux sociétés dédiés de proposer des services et aux utilisateurs de s'approprier des usages dont on n'imaginait pas l'étendue il y a encore quelques années.

Ce déploiement vital des infrastructures s'effectue en un temps record si on le compare au déploiement d'autres infrastructures tout aussi déterminantes. Ainsi, sans parler du réseau ferroviaire, qui a quadrillé la France en quatre-vingts ans, le réseau électrique s'est déployé sur un bon demi-siècle, de même que le réseau d'adduction d'eau potable.

Il faut remonter à 1974, sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing, et au volontarisme de l'époque dans le cadre de la modernisation du réseau téléphonique commuté, qui a permis en six ans de passer de 6 à 20 millions de lignes, pour connaître une telle rapidité.

Le lancement du plan France Très Haut Débit en 2013, sous François Hollande, s'inscrivait dans la continuité de la volonté d'un État stratège, qui visait à couvrir l'intégralité du territoire en très haut débit en moins d'une décennie.

Ce plan, il faut le reconnaître, est un succès et le rythme des déploiements s'est accéléré. Ainsi, en 2022, ce sont 4, 7 millions de foyers supplémentaires qui ont été raccordés à la fibre optique. Désormais, près de 80 % des locaux sont raccordés et ce taux devrait approcher les 95 % à 98 % en 2025.

Malheureusement, et c'est l'objet de cette proposition de loi, la qualité des raccordements finaux n'est pas toujours au rendez-vous, ce qui entache le succès du plan France Très Haut Débit et génère la colère et la frustration de bon nombre de nos concitoyens.

Il semble en effet que nous ayons confondu vitesse et précipitation, et que l'atteinte d'objectifs chiffrés l'ait emporté sur la qualité du raccordement final proposé à l'usager.

Les faits sont désormais objectivés et le mode de sous-traitance à l'opérateur commercial, censé éviter au domicile de l'usager la double intervention de celui qui livre l'infrastructure de raccordement final et de celui qui propose l'ouverture du service à un opérateur, a démontré ses limites. Les vents de l'ubérisation de la sous-traitance et du partage non équitable de la valeur ont également soufflé sur le secteur des télécommunications, comme sur bien d'autres, hélas !

Dès lors, face aux dysfonctionnements constatés, fallait-il légiférer ou se contenter de contester, d'interpeller les acteurs, dont les opérateurs, de faire les gros yeux et d'en appeler au régulateur ?

Certains pensent qu'une loi n'est peut-être pas nécessaire et que désormais, les choses ayant été dites et les acteurs du secteur ayant pris conscience de la gravité du problème, le système devrait s'autoréguler : des mesures correctives, telles que des chartes de bonnes pratiques et des engagements à agir devraient permettre de résorber les dysfonctionnements constatés. Ces engagements sont les bienvenus, mais sont-ils suffisants ?

Permettez-moi d'établir un parallèle avec un sujet qui nous a mobilisés il y a deux ans : la réduction de l'empreinte environnementale du numérique. Le Sénat – souvenez-vous-en –, dans le cadre d'une mission d'information, avait mis en évidence cet angle mort de nos politiques publiques, à savoir que si le numérique contribuait à réduire notre empreinte carbone par les services qu'il offrait, il n'en constituait pas moins, à lui seul, un contributeur dont l'empreinte allait s'accentuant avec la multiplication des terminaux consommateurs de matières premières. La mission d'information avait largement contribué à sensibiliser l'ensemble des acteurs de la filière, qui s'étaient empressés de se doter de plans d'action ambitieux, et l'on doit s'en féliciter.

Mais le rôle du Parlement n'est pas celui d'un lanceur d'alerte qui se contenterait de sensibiliser les acteurs pour les conduire à s'autoréguler. Les travaux de la mission d'information ont donc abouti à l'adoption de la loi du 15 novembre 2021 visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France.

Il est donc nécessaire de légiférer. À cet égard, nous pouvons nous féliciter du dépôt de la présente proposition de loi. En votant une loi, nous ne dévoyons pas notre action, nous ne faisons pas non plus preuve de naïveté. La loi permet d'encadrer, de responsabiliser et de protéger dans un souci d'équilibre. Tel est bien ce que prévoient les différents articles de ce texte.

C'est pourquoi les élus du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain abordent de façon positive la discussion de la présente proposition de loi. §

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Jean Verzelen

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme les crèches, comme la poste et comme les commerces de proximité, internet est devenu un service structurant des villes et des villages. Aujourd’hui, il est indispensable d’avoir une connexion internet.

Le déploiement de la fibre progresse plus ou moins vite selon les territoires, mais, globalement – cela a été dit –, sa dynamique est plutôt bonne depuis quelques années. Dans les zones d’appel à manifestation d’intention d’investissement (Amii), les opérateurs ont pris des engagements pour permettre ce développement. Dans les autres, les collectivités locales se sont emparées du sujet à bras le corps afin d’apporter les mêmes services dans les territoires ruraux.

Sur le papier, la répartition était équilibrée et a bien fonctionné, comme on peut le constater dans un territoire que je connais bien, l’Aisne, qui est l’un des départements ruraux les mieux fibrés de France.

Cependant, certains élus locaux ont fait remonter à plusieurs reprises des difficultés de raccordement. Ici, une personne est mécontente de constater que son voisin est bien raccordé tandis qu’elle ne l’est pas ; là, une autre qui a toujours eu la fibre s’en trouve soudainement privée. Enfin, on ne peut pas négliger l’impact qu’a eu la crise du covid sur le déploiement de la fibre.

En effet, l’Arcep, dans son dernier rapport, a constaté des ralentissements de déploiement, des problèmes techniques et des malfaçons. On peut en conclure que l’objectif initial d’une France où tous les foyers seraient fibrés en 2023 ne sera malheureusement pas atteint.

Au 31 décembre 2022, 79 % des foyers étaient raccordables à la fibre optique, mais « raccordables » ne signifie pas « raccordés ». Si plus de 15 millions de foyers sont effectivement reliés à la fibre, il ne faut pas oublier ceux qui attendent toujours un raccordement, ceux qui ont été raccordés, mais sont confrontés à des coupures, qu’elles soient prolongées ou non, ou encore ceux à qui l’on dit qu’ils ne sont pas prioritaires, qu’ils soient des particuliers ou des entreprises.

À l’heure du tout-numérique, cette situation, lorsqu’elle perdure, peut être très pénalisante tous secteurs confondus.

Aussi, au regard de cette situation, nous saluons le travail de notre collègue Patrick Chaize, auteur de cette proposition de loi, ainsi que celui de la rapporteure. Ce texte prévoit des mesures concrètes pour encadrer la sous-traitance et protéger les usagers.

Généralement, le problème, c’est le raccordement de la fibre jusqu’au domicile de l’abonné, dans la mesure où ce raccordement s’effectue dans une armoire dite « spaghettis ». Cette expression parle d’elle-même : cette armoire contient tellement de branchements et de fils qu’il peut être très compliqué de s’y retrouver. On a même vu des sous-traitants arracher un branchement pour le remplacer par un autre.

Le mode Stoc, régulièrement utilisé par les opérateurs d’infrastructure, implique l’intervention de sous-traitants, de sorte que l’on s’éloigne de la chaîne initiale ayant déployé le réseau. Il est donc nécessaire de poser clairement le principe de responsabilité des opérateurs d’infrastructure tout en apportant des garanties aux abonnés. Cela passe par la mise en place d’un socle d’exigences minimales, lequel est donc bienvenu dans ce texte.

Les techniciens qui interviennent doivent en effet disposer d’une formation adéquate pour effectuer « dans les règles de l’art » la réparation ou le raccordement requis.

Pour rendre effectif ce socle d’exigences, il est important de prévoir un suivi et un partage des données entre l’opérateur qui a déployé la fibre et celui qui effectuera le raccordement depuis la rue jusqu’au domicile. Le compte rendu d’intervention est la première étape pour garantir ce suivi.

Il faudra également veiller à ce que les contrôles soient effectifs et suivis d’effet. Nous espérons ainsi que l’Arcep disposera des moyens financiers suffisants pour mener à bien cette mission.

Le cas échéant, il nous faudra nous poser la question du préraccordement, c’est-à-dire de la possibilité d’aller jusqu’au domaine privé pour installer préalablement les équipements qui permettront le raccordement, comme une prise terminale optique. Cela facilitera le travail effectué ensuite par l’opérateur.

Enfin, le texte prévoit des mesures qui s’appliqueront aux collectivités par le biais des réseaux d’initiative publique (RIP). Pour notre part, nous soutenons la mesure de bon sens qui consiste à assurer la transmission à la collectivité territoriale du calendrier hebdomadaire des interventions dans un délai de quarante-huit heures, lorsqu’elle en a fait la demande.

Aussi l’ensemble des élus du groupe Les Indépendants – République et Territoires votera-t-il cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mandelli

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui la proposition de loi visant à assurer la qualité et la pérennité des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique de notre éminent collègue Patrick Chaize, dont je tiens évidemment à saluer l'excellent travail et la constance de l'engagement sur les sujets liés au numérique.

La qualité des raccordements et la pérennité des réseaux de fibre optique sont essentielles pour le développement du numérique sur le territoire national.

L'auteur de ce texte présente, comme à son habitude, une étude sérieuse et propose une vision globale sur cette question d'avenir qui concerne tous les citoyens, dans tous les territoires.

Actuellement, plus de 15 000 Français sont raccordés à la fibre chaque jour, soit près d'un million de souscriptions à la fibre tous les trimestres. Nous pouvons collectivement saluer les efforts de tous les acteurs de la filière qui contribuent à ce déploiement soutenu. Mais à un tel rythme, des défaillances peuvent survenir.

Aussi cette proposition de loi prévoit-elle d'apporter des réponses aux dysfonctionnements qui surviennent lors du raccordement à la fibre de l'utilisateur final, lesquels sont liés à un recours parfois mal maîtrisé à la sous-traitance dans le cadre du mode de sous-traitance aux opérateurs commerciaux, dit mode « Stoc ».

Le déploiement de la fibre optique en France est un enjeu majeur pour l'aménagement du territoire, le développement économique et social du pays, ainsi que pour la compétitivité de nos entreprises. C'est également un enjeu de développement durable, puisque la fibre optique est une technologie plus économe en énergie que les technologies existantes et qu'elle favorise la réduction de la consommation d'énergie et des émissions de gaz à effet de serre.

Je tiens également à souligner avec insistance et force le travail de grande qualité de notre rapporteure Patricia Demas, qui a présenté et fait adopter dix-neuf amendements au nom de notre commission, afin de compléter et de préciser le dispositif de ce texte.

Réparties en trois axes, ces dispositions ont pour objectif de clarifier le cadre de mise en œuvre du mode Stoc et la chaîne des responsabilités, de renforcer les exigences en matière de qualité et de contrôle applicables aux raccordements et, enfin, d'assurer le caractère opérant des dispositifs.

D'un point de vue européen, le déploiement de la fibre optique en France se fait à un très bon rythme, puisque la part de la fibre a doublé en deux ans, passant d'environ 24 % en 2019 à 46 % en 2021. Aujourd'hui, les opérateurs, cela a été dit, ont fibré plus de 70 % du territoire. Notre taux de couverture est ainsi l'un des plus élevés d'Europe, nettement supérieur désormais à celui de la moyenne des pays de l'OCDE. Le travail des différents opérateurs est de nouveau à saluer.

Mais, à l'échelon national, nous constatons de nombreuses disparités dans les raccordements, lesquels font craindre une fracture numérique. C'est parfois le cas entre la ville et la campagne, mais pas toujours, contrairement à ce que l'on pourrait imaginer. Ainsi, en Vendée, par exemple, ce sont dans deux villes, situées en zone d'appel à manifestation d'intention d'investissement, La Roche-sur-Yon et Les Sables-d'Olonne, que l'opérateur a pris du retard dans le déploiement de la fibre. Il invoque d'ailleurs des prétextes sur lesquels je ne souhaite pas revenir ici, un certain nombre de procédures étant en cours.

Je tiens ici à soutenir le travail des maires et des élus locaux du département de la Vendée, ainsi que celui de l'Arcep, qui ont porté la voix des usagers auprès des opérateurs, afin qu'ils respectent leurs obligations et que leurs investissements soient à la hauteur.

Il convient en effet de n'oublier personne dans le cadre de ce déploiement : ni les territoires urbains, ni les territoires ruraux, ni les particuliers, ni les entreprises, ni les collectivités, en un mot aucun de nos concitoyens, quelle que soit leurs activités. De cette couverture globale et qualitative dépendra la réussite finale du plan France Très Haut Débit.

Dès lors, la présente proposition de loi, examinée et amendée par notre Haute Assemblée, sous la férule de notre rapporteure Patricia Demas, permet de fixer un cadre de mise en œuvre du mode Stoc, de clarifier la répartition des responsabilités, de renforcer les contrôles de la qualité des raccordements et de protéger les droits des usagers en cas d'interruption des services internet.

Dans le détail, il s'agit notamment de rappeler la responsabilité de l'opérateur d'infrastructure dans le choix du mode de réalisation des raccordements et son rôle de garant de la qualité des travaux et d'instaurer un guichet unique assurant la prise en charge des difficultés de raccordement.

Il s'agit également d'interdire le mode Stoc dans les zones fibrées et dans les communes dans lesquelles la fermeture du réseau cuivre est engagée.

Il s'agit aussi d'accroître les pouvoirs de contrôle et de sanction de l'Arcep sur tous les opérateurs intervenant sur le réseau.

Il s'agit enfin de renforcer les droits des consommateurs face aux effets des coupures prolongées d'accès à internet et aux débranchements sauvages, tout en protégeant les opérateurs commerciaux contre d'éventuels abus des consommateurs.

Le temps est désormais aux actes concrets pour garantir la qualité des raccordements à la fibre.

Pour toutes ces raisons, et pour couper court à tout suspense

Applaudissements au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous partageons tous le même constat : la France est à la pointe en matière de déploiement de la fibre d'un point de vue quantitatif mais, dès lors qu'on l'étudie dans le détail, le raccordement des abonnés pose problème.

Bon nombre de Français, naufragés du numérique, connaissent ainsi des galères. Chaque semaine, lorsque je rencontre les élus de mon département, la question du raccordement à la fibre est très régulièrement abordée, comme celle du zéro artificialisation nette (ZAN) ou des finances. Comme toujours, ceux qui sont en première ligne face aux difficultés des administrés – les maires – se sont largement mobilisés, en particulier en interpellant directement l'Arcep.

C'est pourquoi la proposition de loi de notre collègue Patrick Chaize va dans la bonne direction.

Je pense en particulier à l'article 5 relatif au renforcement des droits des consommateurs en cas d'interruption d'un service d'accès à internet, qui permettra de mieux protéger les Français, notamment les plus vulnérables, trop souvent démunis face aux clauses des contrats de leur opérateur. Je pense également à l'article 4, qui prévoit de renforcer le rôle de l'Arcep en tant que police spéciale des opérateurs, et qui contribuera à renforcer à terme la qualité de notre réseau.

Au-delà de ces deux articles, l'ensemble du dispositif permettra d'améliorer l'effectivité de l'accès à internet et, en conséquence, celle de l'accès aux savoirs et aux droits.

En effet, même s'il s'agit d'un lieu commun, il convient de rappeler que le numérique, et internet en particulier, s'est introduit au cœur de la vie des Français depuis une vingtaine d'années. Il permet non seulement le télétravail, la consommation de biens et de services sur des sites marchands, mais également le maintien du lien avec nos proches, le développement et le partage de nos passions, l'accès à l'information, l'apprentissage ou encore l'accès aux droits sur les plateformes de l'administration publique.

Ce deuxième aspect du numérique est celui de l'émancipation des individus. Mais cet effet émancipateur est à double tranchant : plus la digitalisation de la société avance, plus ceux qui restent sur le bord de la route du numérique se retrouvent progressivement en situation d'exclusion.

Ainsi, notre vigilance doit être toute particulière en ce qui concerne la fracture numérique, aussi bien celle de premier degré, qui concerne l'accès matériel, physique au numérique, que celle de second degré qui concerne les usages, ceux de ces 16 millions de personnes en situation d'illectronisme, un nombre qui ne cesse d'augmenter.

Cet éloignement du numérique concerne davantage nos concitoyens les plus précaires, les moins diplômés, ceux pour qui l'accès à l'information et le recours à leurs droits est un impératif, notamment à l'heure de l'administration 100 % dématérialisée.

Le ministre Jean-Noël Barrot a récemment reconduit les engagements du Gouvernement, notamment la garantie d'un raccordement de tous à la fibre d'ici à 2025. Mais encore faut-il que ce raccordement soit opérationnel !

Si la bataille pour l'inclusion numérique s'annonce encore bien longue, cette proposition de loi constitue une avancée bienvenue pour l'émancipation par le numérique. C'est pourquoi, sans aucun suspense, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain la soutiendra et la votera. §

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Claude Varaillas

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec ses aspects techniques et l'imaginaire futuriste auquel il renvoie, le tout-numérique fait l'objet de critiques parfois légitimes, en particulier les installations et la couverture réseau.

Alors que la presse grand public évoque désormais régulièrement les avancées de l'intelligence artificielle et les potentialités positives comme négatives qui s'ouvrent à nous, le haut débit se fait encore attendre pour une partie de nos concitoyens.

L'objectif de nous voir toutes et tous connectés se heurte à celui de la rentabilité et à la politique du chiffre, qui provoque de nombreux désagréments sur le terrain.

Malfaçons, raccordements ratés, débranchements intempestifs : les collectivités et les usagers font face à de lourdes difficultés lorsqu'il s'agit de désigner un responsable à ces manquements. Selon l'Avicca, qui regroupe les collectivités engagées dans le numérique, près de 75 % des raccordements réalisés en mode Stoc présentent des défauts. Le phénomène n'est pas nouveau et les appels à la vigilance des opérateurs sont récurrents, mais les contrats Stoc V1, V2 et V3 n'y ont rien changé.

La proposition de loi que nous examinons a le mérite, dans un contexte où les usagers, les installateurs ou les installations font l'objet d'un mauvais traitement, de mieux encadrer le déploiement par les opérateurs privés jusqu'alors guidés par la rentabilité, la quantité des foyers raccordés primant sur la qualité du réseau.

Je salue le travail de nos collègues Patrick Chaize et Patricia Demas, qui posent des limites à une forme de désordre que nous avons constatée dans nos départements. Ainsi, dans les zones rurales, dites « zones peu denses », on a parfois dû déployer un réseau d'initiative publique, faute de manifestations d'intérêt de la part des opérateurs privés, par défaut de rentabilité, et consacrer en conséquence un budget important au déploiement du haut débit.

Dans mon département, le coût d'un tel programme s'est élevé à 500 millions d'euros. Même si nous avons bénéficié d'un soutien de la part de l'État, 74 millions d'euros restent à la charge de la collectivité départementale.

La forte hausse du nombre des alertes constatées par l'Arcep en 2022 est révélatrice des difficultés rencontrées par les utilisateurs. La médiatrice des communications électroniques évoquait « les naufragés de la fibre » dans un rapport de 2021, en soulignant les dysfonctionnements occasionnés par des installations bâclées.

Alors que le réseau cuivre, dit « réseau historique » d'Orange, devrait être démantelé d'ici à 2030, il est légitime d'exiger des opérateurs des garanties afin de permettre le basculement vers la fibre dans les meilleures conditions pour les usagers.

La sous-traitance, qui devait être dérogatoire pour le raccordement final de la fibre au domicile, est devenue la règle, nous l'avons constaté. Or c'est précisément cette sous-traitance en cascade qui provoque des désordres sur le terrain. Les cadences imposées nuisent non seulement aux installations, mais aussi parfois à la sécurité des installateurs, souvent mal formés.

Je pense aux sous-traitants des sous-traitants, à celles et à ceux qui subissent une forme d'ubérisation qui les pousse à réaliser toujours plus de raccordements, sans en avoir véritablement les moyens, et qui sont surtout mal rémunérés.

La mise en place d'un guichet unique pour assurer la prise en charge des difficultés sur le terrain, d'un certificat de conformité sur le modèle des raccordements au gaz, et d'un contrat de sous-traitance élaboré par l'opérateur d'infrastructure et soumis à l'Arcep, participent des améliorations nécessaires et susceptibles de corriger la situation existante.

Les droits des consommateurs sont par ailleurs renforcés – c'est important – et des sanctions sont prévues en cas d'interruption du service.

Cette proposition de loi pourrait aller plus loin en remettant en cause le modèle même du déploiement de la fibre. Je pense notamment à ce que nous avons su faire pour nos réseaux de télécommunications historiques ou pour celui du gaz et de l'électricité – permettez-moi d'y penser ! ERDF, GRDF ou France Télécom : ces noms résonnent comme des vestiges après tant d'années de déstructuration et de privatisation !

Les opérateurs publics sont pourtant des gages de réussite, de durabilité et d'efficacité pour un déploiement qui est avant tout un enjeu d'intérêt général, avant d'être une source de profit.

À l'heure où nous donnons au numérique une place de plus en plus importante dans nos vies, où la dématérialisation poursuit son chemin, y compris en matière de services publics, cette proposition de loi, grâce aux objectifs qu'elle affiche, participe de la réduction de la fracture numérique, alors que l'on sait que 13 millions de nos concitoyens sont en situation d'illectronisme.

Parce que ce texte permettra une amélioration concrète, visible et attendue sur le terrain, le groupe CRCE le votera.

Debut de section - Permalien
Jean-Noël Barrot

Monsieur le président, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à remercier Patrick Chaize pour le dépôt de cette proposition de loi, qui a le mérite de nous permettre de débattre d’une politique publique remarquable : le plan France Très Haut Débit, dont nous célébrons cette année le dixième anniversaire.

Cela m’offre l’occasion de rappeler à quel point ce plan est un très grand succès français : nous sommes passés de 1 million de foyers éligibles à la fibre en 2013 à 8 millions en 2017 et à 34 millions en 2022, faisant de la France le pays d’Europe le plus avancé en matière de déploiement de cette technologie.

Il s’agit sans doute du programme d’investissement le plus ambitieux et le plus important depuis le début du siècle : 34 milliards d’euros lui ont été consacrés, dont 65 % ont été pris en charge par le secteur privé, 25 % par les collectivités territoriales et 10 % par l’État.

C’est également l’un des chantiers industriels les plus ambitieux et les plus importants depuis le début du siècle, qui a mobilisé plus de 40 000 agents sur l’ensemble du territoire pour déployer des millions de prises de fibre optique. Ce succès est vraisemblablement le fruit d’un accord intelligent trouvé voilà dix ans entre l’État, les collectivités et les opérateurs.

Pour autant, ce que je viens de dire ne correspond pas au ressenti de certains de nos concitoyens. Comme le souligne la proposition de loi de Patrick Chaize, des problèmes de qualité très significatifs empoisonnent leur quotidien, en les empêchant d’être raccordés à la fibre ou en leur infligeant des coupures.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 20 000 notifications ont été inscrites sur le site de l’Arcep l’année dernière et des témoignages de problèmes de qualité liés à la fibre sont relayés dans les journaux chaque semaine. Il suffit d’aller à la rencontre de nos concitoyens pour prendre la mesure de leur exaspération quant à ces aléas. Où se situe la responsabilité de ces difficultés ?

Il convient d’abord d’examiner les acteurs en cause : d’un côté, les opérateurs d’infrastructure, qui déploient les réseaux, notamment jusqu’au point de mutualisation ; de l’autre, les opérateurs commerciaux, qui assurent le branchement au dernier kilomètre, en vertu du mode Stoc. Chacun rejette la faute sur l’autre.

Cependant, dans plus de 90 % des cas, les problèmes sont dus aux opérateurs d’infrastructure, en particulier à des réseaux très accidentogènes, souvent conçus à une époque antérieure au plan France Très Haut Débit, rendant le raccordement des foyers difficile et les exposant à des risques de coupures ou de défaillances. Cela permet de rendre compte de l’immense majorité des problèmes liés à la fibre.

Voilà pourquoi j’ai demandé voilà six mois aux opérateurs d’infrastructure dans les territoires où les réseaux sont les plus accidentogènes de me présenter ainsi qu’à l’Arcep un plan de reprise complète de ces réseaux.

Ces plans ont été présentés pour 450 000 locaux et commencent à être déployés ; les opérateurs d’infrastructures sont en train de reconstruire les réseaux. Sur les 450 000 prises concernées, 23 000 ont été révisées à ce stade. C’est encore peu, mais une fois ces plans achevés dans des territoires comme le Calvados, la Seine-Maritime ou l’Essonne, nous aurons résolu une partie importante du problème.

Dans leur minorité, les problèmes sont liés aux opérateurs commerciaux. C’est là le sujet de la proposition de loi que nous allons discuter. En raison de la rapidité des déploiements et de problèmes de responsabilité en cas de défaillance, qui ont bien été identifiés par l’auteur de la proposition de loi, il existe des situations de débranchements ou de coupures sauvages : les sous-traitants des opérateurs commerciaux se présentent devant une armoire pour opérer le raccordement d’un client dans des temps très contraints et le font parfois de manière non appropriée ou au détriment d’usagers déjà raccordés.

Pour résoudre cette minorité de problèmes de qualité de la fibre, on serait tenté de remettre en question l’organisation du déploiement entre opérateurs d’infrastructure et opérateurs commerciaux, que l’on appelle le mode Stoc. Depuis une décision de l’Arcep de 2015, l’opérateur d’infrastructure a certes la responsabilité de la qualité du réseau de bout en bout jusqu’au domicile, mais il ne peut s’opposer à ce que l’opérateur commercial installe le dernier kilomètre, en lien avec son client, sauf s’il le fait dans des conditions de qualité dégradées.

Le mode Stoc présente des inconvénients et des avantages. Son inconvénient majeur est que, lorsque survient une défaillance ou une coupure, l’opérateur commercial, en charge du dernier kilomètre, et l’opérateur d’infrastructure se renvoient la balle, ce qui retarde l’attribution des responsabilités et la réparation du dommage causé à l’usager. Il s’agit donc de résoudre cette difficulté relative à l’attribution des responsabilités.

Pour autant, les avantages du mode Stoc ont sans doute contribué à la rapidité du déploiement des réseaux de fibre optique sur l’ensemble du territoire. Cette technique offre de la simplicité pour l’usager, qui n’a qu’un seul interlocuteur pour son abonnement et son raccordement : son opérateur commercial.

De surcroît, la concurrence entre les opérateurs commerciaux pour raccorder au plus vite leurs clients a également contribué à la rapidité de déploiement du plan France Très Haut Débit.

Le Gouvernement, qui accueille les débats sur ces sujets, n’entend pas supprimer le mode Stoc, mais plutôt le corriger. Supprimer cet équilibre entraînerait en effet la réécriture d’un certain nombre de contrats, ce qui retarderait d’autant le déploiement du plan France Très Haut Débit, alors que l’objectif est plutôt de l’accélérer.

De plus, cela pourrait soulever des questions d’équité concurrentielle, car les opérateurs d’infrastructure pourraient être tentés de privilégier les clients de certains opérateurs commerciaux plutôt que d’autres, en raison de liens capitalistiques existants.

Cependant, il est nécessaire de le corriger. Si le Gouvernement propose des amendements sur les trois premiers articles de cette proposition de loi, sur lesquels son avis est réservé, il accueille très favorablement les articles 4 et 5. Ceux-ci renforcent les pouvoirs de l’Arcep pour sanctionner les opérateurs commerciaux qui ne respectent pas leurs responsabilités et améliorent la protection des usagers lorsque leur accès à la fibre est interrompu pendant une trop longue période.

Les amendements de Mme la rapporteure qui concernent en particulier les certificats de conformité ou de non-raccordement visent également à améliorer le mode Stoc pour le rendre plus opérant. Il s’agit d’arriver à la fin du plan France Très Haut Débit, qui n’est plus si lointaine. Il est essentiel d’y parvenir.

L’étape suivante consistera à décommissionner le réseau cuivre, qui coûte cher à entretenir et qui présente des coûts environnementaux et énergétiques significatifs. Pour ce faire, il est essentiel que chacun puisse accéder au très haut débit, en particulier à la fibre, dans les meilleures conditions. Aujourd’hui, 80 % des Français y sont éligibles ; l’objectif est d’atteindre 100 % à l’horizon 2025.

Les corrections qui seront apportées au mode Stoc aujourd’hui et durant la navette parlementaire sont donc bienvenues pour atteindre cet objectif d’aménagement numérique des territoires et d’égal accès pour tous les citoyens aux possibilités ouvertes par l’économie numérique.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis-Jean de Nicolay

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au préalable, permettez-moi de vous indiquer, pour ne pas entretenir inutilement le suspense, que je voterai aussi cette proposition de loi de Patrick Chaize.

La France a très tôt fait le choix de miser sur le réseau de fibre optique pour en faire demain la norme en matière d'accès aux services en très haut débit, que ce soit pour les particuliers ou les entreprises.

Dans le cadre du plan France Très Haut Débit, prévu initialement pour 2022, puis pour 2025, et même jusqu'à 2030 dans certaines régions, l'application de cette vision stratégique se trouve aujourd'hui à un moment charnière, alors que la fin du réseau téléphonique est engagée dans nos territoires.

Le niveau d'exigence et de qualité lors des interventions sur ce réseau doit être à la hauteur de l'enjeu que constitue le très haut débit et doit permettre d'assurer sa pérennité à long terme.

Or nous le constatons aujourd'hui en tant qu'élus locaux, mais également en tant que consommateurs : la dégradation de la situation est telle qu'elle nécessite, outre une prise de conscience, un engagement fort, dût-il passer par la voie légale.

Pour faire face au rythme rapide de déploiement, qui constitue un véritable succès, qu'il nous faut encourager, le choix tout à fait singulier qu'a fait la France du mode Stoc a pu sembler judicieux : ce sont les opérateurs commerciaux qui raccordent les clients au réseau de fibre optique construit par d'autres, les opérateurs d'infrastructure. Or ce mode est également susceptible de favoriser les manquements, voire de provoquer la dégradation du réseau dans des proportions non négligeables, comme on l'observe depuis 2018.

Les exemples se multiplient : dégradations, vandalisme, déconnexions physiques d'abonnés, raccordements expéditifs relevant de la malfaçon et engendrant, au passage, des nœuds de fibres pouvant provoquer des coupures, fragilisation et vieillissement prématuré des réseaux. J'en passe et des meilleures…

Cette situation, qui perdure malgré la signature en 2021 du contrat Stoc V 2, lequel est destiné à mieux encadrer ces pratiques et à régler les nombreux dysfonctionnements, est aujourd'hui inacceptable.

Force est d'ailleurs de constater que les signalements liés à l'internet fixe, et plus particulièrement aux problèmes de raccordement à la fibre, sur la plateforme du régulateur « J'alerte l'Arcep » se multiplient. Ils ont tout simplement doublé en un an et figurent en tête des signalements, soit 37 % du total.

Le choix de ce mode de gestion, que nous n'allons pas remettre en cause aujourd'hui, ne saurait cependant en aucune manière justifier une quelconque dégradation de la qualité du réseau.

Alors que, à terme, la fibre optique jusqu'à l'abonné sera l'unique moyen d'accès aux services numériques en très haut débit, l'exigence de qualité, que ce soit en termes de raccordement ou d'exploitation, appelle un véritable effort de long terme pour que soit assurée une maintenance des infrastructures.

À cet égard, nous sommes aujourd'hui le relais de l'exaspération de nos territoires, qui multiplient les motions contre le plan d'extinction du cuivre prévu tant que les difficultés de raccordement à la fibre ne seront pas résorbées, et qui plaident pour un entretien sérieux des infrastructures en place, lesquelles se dégradent dangereusement. Dans la Sarthe, département dont je suis élu, ces motions datent de la semaine dernière !

Aussi, et sans renier les efforts d'ores et déjà fournis par l'Arcep en synergie avec les opérateurs à travers son plan qualité, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui contribue à mettre en place des dispositions légales plus fines, afin de réguler la cacophonie actuelle.

Je salue le travail de son auteur Patrick Chaize, ainsi que celui de la rapporteure qui, loin de déstabiliser le système, a véritablement tenu à ciseler le texte pour apporter des solutions pragmatiques et garantir des raccordements de qualité.

Tout d'abord, face à la sous-traitance en cascade et sur le fondement d'un socle d'exigences minimales, notre rapporteure lutte contre la dilution des responsabilités en renforçant le principe du guichet unique à la charge du responsable du réseau, ce qui permettra d'assurer un service après-vente rapide.

Elle instaure des obligations pour l'intervenant, qui devra fournir un compte rendu d'intervention, ainsi qu'un certificat de conformité au cahier des charges qui lui est imposé.

Elle fait par ailleurs en sorte que l'Arcep puisse efficacement jouer son rôle.

Enfin, elle sécurise les droits du consommateur final, qui ne doit pas pâtir de la situation actuelle et rester démuni lorsqu'il est privé de services, alors même qu'il paie un abonnement.

Le texte que nous examinons aujourd'hui, en apportant des précisions bienvenues et en préservant l'ensemble des acteurs concernés, tend à garantir un environnement propice, qui permettra d'atteindre cet objectif de qualité et de pérennité.

Vous l'aurez compris, je joindrai ma voix au concert de celles et ceux qui approuvent cette proposition de loi. §

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous partageons tous le même constat : la France est à la pointe en matière de déploiement de la fibre d'un point de vue quantitatif mais, dans le détail, le raccordement des abonnés pose problème.

Bon nombre de Français, naufragés du numérique, connaissent ainsi des galères. Chaque semaine, lorsque je rencontre les élus de mon département, la question du raccordement à la fibre est très régulièrement abordée, comme celle du zéro artificialisation nette (ZAN) ou des finances. Comme toujours, ceux qui sont en première ligne face aux difficultés des administrés – les maires – se sont largement mobilisés, en particulier en interpellant directement l'Arcep.

C'est pourquoi la proposition de loi de notre collègue Patrick Chaize va dans la bonne direction.

Je pense en particulier à l'article 5 relatif au renforcement des droits des consommateurs en cas d'interruption d'un service d'accès à internet, qui permettra de mieux protéger les Français, notamment les plus vulnérables, trop souvent démunis face aux clauses des contrats de leur opérateur. Je pense également à l'article 4, qui prévoit de renforcer le rôle de l'Arcep en tant que police spéciale des opérateurs et qui contribuera à accroître à terme la qualité de notre réseau.

Outre ces deux articles, l'ensemble du dispositif permettra d'améliorer l'effectivité de l'accès à internet et, en conséquence, celle de l'accès aux savoirs et aux droits.

En effet, même s'il s'agit d'un lieu commun, il convient de rappeler que le numérique, et internet en particulier, s'est introduit au cœur de la vie des Français depuis une vingtaine d'années. Il permet non seulement le télétravail, la consommation de biens et de services sur des sites marchands, mais également le maintien du lien avec nos proches, le développement et le partage de nos passions, l'accès à l'information, l'apprentissage ou encore l'accès aux droits sur les plateformes de l'administration publique.

Le numérique permet l'émancipation des individus, mais cet effet émancipateur est à double tranchant : plus la digitalisation de la société avance, plus ceux qui restent sur le bord de la route du numérique se retrouvent progressivement en situation d'exclusion.

Ainsi, notre vigilance doit être toute particulière s'agissant de la fracture numérique, aussi bien celle du premier degré, qui concerne l'accès matériel, physique au numérique, que celle du second degré, qui concerne les usages, ceux des 16 millions de personnes en situation d'illectronisme, un nombre qui ne cesse d'augmenter.

L'éloignement du numérique concerne davantage nos concitoyens les plus précaires, les moins diplômés, ceux pour qui l'accès à l'information et le recours à leurs droits est un impératif, notamment à l'heure de l'administration 100 % dématérialisée.

Le ministre Jean-Noël Barrot a récemment réitéré les engagements du Gouvernement, notamment la garantie d'un raccordement de tous à la fibre d'ici à 2025. Mais encore faut-il que ce raccordement soit opérationnel !

Si la bataille pour l'inclusion numérique s'annonce encore bien longue, cette proposition de loi constitue une avancée bienvenue pour l'émancipation par le numérique. C'est pourquoi, sans aucun suspense, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain la soutiendra et la votera. §

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons a pour objectif de garantir la qualité des raccordements à la fibre optique réalisés jusqu'à l'abonné tout en évitant la dégradation des équipements des réseaux optiques.

En effet, de nombreux dysfonctionnements sont observés au quotidien par les administrés, qu'il s'agisse de coupures répétées ou de la fragilisation du réseau.

Ces problèmes sont a priori liés au recours à la sous-traitance dite « Stoc », c'est-à-dire à la sous-traitance à l'opérateur commercial du raccordement des abonnés à la fibre.

L'Arcep reconnaît ce mode de sous-traitance depuis 2015, à condition que les raccordements soient effectués dans le respect « des règles de l'art ».

Mais force est de constater que de nombreux problèmes sont relevés depuis l'accélération du déploiement de la fibre sur notre territoire. C'est un sujet dont je discute souvent avec mes collègues du groupe Union Centriste, notamment avec Évelyne Perrot, que j'associe à mes propos.

Cette technologie doit pourtant répondre à un besoin grandissant de communication et de numérisation du quotidien des Français. Je pense particulièrement à l'accès aux démarches administratives, qui sont désormais quasiment toutes dématérialisées, que ce soit en matière d'état civil, de sécurité sociale, de scolarité, d'impôts ou encore d'accès au logement. C'est dire combien l'accès aux services publics est devenu un parcours du combattant pour de nombreuses personnes !

Je n'évoquerai pas la fracture numérique et les zones blanches, bien connues de notre assemblée et de nos élus locaux. Ce n'est pas le sujet aujourd'hui, mais cela reste malheureusement un réel problème pour nos concitoyens, comme l'a mentionné précédemment notre collègue Ronan Dantec.

Un accès stable à internet est désormais une nécessité et la fibre optique présente bien des avantages grâce à sa grande capacité de transport d'informations, à ses interférences réduites et à sa meilleure durée de vie. À ce jour, c'est la technologie qui permet d'atteindre les meilleurs débits internet.

La France avait très bien commencé son pari numérique, puisque 34 millions de foyers, d'entreprises et d'administrations ont été rendus raccordables à la fibre optique en 2022. Mais pour que la fibre soit une réalité pour tous, de très importants travaux ont été et sont encore nécessaires.

Les maires, toujours en première ligne lorsque les problèmes apparaissent, nous font part régulièrement des désagréments que rencontrent les utilisateurs. En effet, la fibre, quand on y a goûté, on ne peut plus s'en passer !

Chaque opérateur renvoie à d'autres la responsabilité des dysfonctionnements : tantôt c'est la faute de celui qui a déployé le réseau, de ses éventuels sous-traitants, tantôt c'est celle de celui qui commercialise le service, voire d'un tiers qui serait intervenu pour tout débrancher ! Bref, on ne sait plus vers qui se tourner...

Comme c'est souvent le cas, la mairie devient naturellement le bureau des pleurs, le réceptacle des reproches et l'endroit privilégié où des consommateurs excédés espèrent trouver une réponse à leurs difficultés.

Les différentes initiatives des opérateurs pour répondre aux attentes des élus et des administrés, qu'il s'agisse de la création du mode Stoc V2 en 2020 ou du plan qualité en 2022, n'ont pas permis de rétablir complétement la situation.

Après une longue période de patience, cette situation n'est plus supportable : de nouveaux engagements doivent être pris par les différentes parties, et ce d'autant plus que l'objectif du Gouvernement est de généraliser la fibre optique sur l'ensemble du territoire d'ici à 2025.

La sous-traitance, notamment, doit être mieux encadrée, afin d'éviter une dégradation des réseaux, des déconnexions impromptues ou encore une fragilisation et un vieillissement prématuré des réseaux.

Tel est l'objectif de cette proposition de loi, qui réaffirme que l'opérateur d'infrastructure est responsable des raccordements à son réseau et le garant global de la qualité des travaux.

Le texte prévoit que les contrats de sous-traitance devront être conformes à un modèle élaboré par l'opérateur d'infrastructure, soumis à l'avis préalable de l'Arcep et opposable par les usagers.

Chaque intervenant chargé d'effectuer un raccordement à la fibre remettra à l'abonné un certificat attestant de la conformité des travaux réalisés au cahier des charges.

Ces mesures viennent utilement clarifier le mode de sous-traitance choisi et contribuent à garantir la transparence nécessaire au bon déroulement des travaux de raccordement.

Le présent texte vise également à renforcer les pouvoirs de contrôle et de sanction de l'Arcep, ainsi que les droits des consommateurs en cas d'interruption prolongée du service d'accès à internet.

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a, suivant en cela les orientations de sa rapporteure – que je salue –, modifié la proposition de loi initiale et enrichi l'arsenal des solutions proposées.

À titre d'exemples, le texte prévoit l'élaboration à l'échelon national d'un socle d'exigences minimales de qualité pour la réalisation des raccordements à la fibre, la fixation d'un délai de résolution des dysfonctionnements n'excédant pas dix jours ou encore la traçabilité de la gestion des incidents.

La transparence sur le bon déroulement des travaux est renforcée, la réalisation systématique d'un compte rendu d'intervention étant prévue. L'utilisateur final sera en droit de le consulter, ainsi que le contrat de sous-traitance, ce qui lui permettra de vérifier lui-même la bonne réalisation du raccordement.

Ces mesures sont aujourd'hui nécessaires pour garantir la qualité du réseau et de son déploiement à l'échelon national, le quantitatif ne devant pas, bien sûr, se faire au détriment du qualitatif. Les attentes des élus locaux et des usagers sont fortes à cet égard, vous le savez, mes chers collègues.

Il reste à peine deux ans avant la date butoir fixée pour atteindre le très haut débit pour tous : des mesures concrètes, plus que nécessaires, doivent donc être prises. C'est la raison pour laquelle le groupe Union Centriste votera en faveur de ce texte. §

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la fibre optique est devenue le principal réseau d’accès à internet pour les Français : le taux de locaux raccordables approche aujourd’hui les 80 %. Mais si le déploiement de la fibre progresse bien à l’échelle nationale – cela a été dit –, de fortes disparités régionales demeurent. Selon le rapport de France Stratégie de 2023, certains départements à dominante rurale dépendent toujours à plus de 25 % du réseau cuivre.

Je le souligne ici, et je sais que nous partageons cette analyse, le non-accès à la fibre porte gravement atteinte à un aménagement équilibré du territoire et constitue une rupture d’égalité qui ne peut être tolérée.

Le cap de 2025 a été fixé pour la généralisation de la fibre afin de garantir son accès à tous les usagers. Il est de notre responsabilité, ici, au Sénat, de nous assurer du respect de cet objectif. Nous avons tous en tête la situation intolérable des zones blanches pour le réseau sans fil : il s’agit de ne pas la reproduire. Cette proposition de loi prend en compte cette préoccupation et je remercie son auteur, ainsi que la rapporteure, pour leur travail et leur engagement.

Avec le plan France Très Haut Débit, les opérateurs commerciaux sont arrivés massivement sur le marché des réseaux de fibre optique. Cette accélération s’explique par une spécificité française : dans la pratique, l’opération de raccordement final du client est confiée à l’opérateur commercial. En d’autres termes, la partie la plus importante et délicate pour le consommateur est sous-traitée par l’opérateur d’infrastructure.

Cette sous-traitance – le mode Stoc – est non seulement une exception française, mais également une dérogation à notre mode de fonctionnement traditionnel sur les autres réseaux, qu’il