Intervention de Sylvie Vermeillet

Réunion du 2 mai 2023 à 14h30
Quelle réponse au phénomène mondialisé des fraudes fiscales aux dividendes — Débat organisé à la demande du groupe communiste républicain citoyen et écologiste

Photo de Sylvie VermeilletSylvie Vermeillet :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe CRCE nous propose ce soir un sujet épineux, ardu, mais passionnant, et je le remercie, au nom de mon groupe, de nous inviter à cette réflexion.

Les membres de la commission des finances se souviennent de l’exceptionnelle audition du 1er décembre 2021 sur les outils de lutte contre les pratiques d’arbitrage de dividendes, au cours de laquelle le chef du service de la sécurité juridique et du contrôle fiscal de la DGFiP, M. Iannucci, avait bien du mal à se faire comprendre par le directeur général délégué de la Fédération bancaire française, M. Barel.

Entre contrôle de l’encaissement de l’impôt dû et menace de perte de compétitivité des établissements bancaires français à l’échelle mondiale, les logiques se sont combattues avec courtoisie, mais sans concessions.

Tout d’abord, les pratiques en matière de CumCum et de CumEx ont cours depuis maintenant tant d’années que tout se passe, du point de vue des utilisateurs, comme si elles étaient normalisées, voire légalisées. Les enjeux financiers sont désormais tels qu’ils sont considérés comme acquis et que toute tentative de suppression dans un pays rendrait son gouvernement responsable de la perte de compétitivité de ses banques. Dans le même temps, personne ne s’inquiéterait des milliards d’impôts qui échapperaient aux États…

Pourtant, mieux vaut tard que jamais : même si nos administrations fiscales européennes ont eu du mal à appréhender ces phénomènes de fraude, elles méritent tout notre soutien pour ne rien lâcher dans la bagarre et reprendre le dessus. Elles ont surtout besoin de moyens pour parvenir à y voir clair.

Comme le dit avec sagesse M. Iannucci : « L’objectif principal est d’identifier les abus, sans toutefois paralyser les marchés financiers, notamment les opérateurs français. » Il ajoute : « C’est un problème de compétences. Comment avoir des vérificateurs suffisamment spécialisés, ayant des compétences pointues sur ces mécanismes ? »

J’ai déjà dit ici qu’il nous fallait les meilleurs des meilleurs, les former, les recruter, donc les rémunérer à la hauteur de leurs qualités : nul besoin de rappeler ce que gagnent ceux qui sont du côté de l’optimisation ou de la fraude fiscales…

Nous devons ensuite – et j’espère que cela ne relève pas de l’utopie – faire de nos impôts des outils simples, à l’image de la flat tax. La complexité de notre fiscalité fait le bonheur des fraudeurs, qui disposent de tous les moyens de la déjouer. Plus nous cherchons à les punir, plus ils s’échinent à inventer le système qui les affranchit.

Puisqu’ils ont systématiquement un coup d’avance, revenons à des dispositifs plus directs, plus facilement contrôlables par notre administration fiscale. Ne pas le faire nous coûtera toujours plus cher : c’est ainsi que l’administration allemande a remboursé plus de dix fois par action la même retenue à la source sans avoir pu vérifier que l’impôt avait été acquitté.

Par la mise à jour du Bofip du l5 février 2023 et deux rescrits, notre administration apporte des précisions sur l’application de la retenue à la source aux rétrocessions de dividendes de source française à des non-résidents : elle attaque sous l’angle du bénéficiaire effectif afin de cibler le redevable de l’impôt. Bref, elle ne fait pas que contrôler : elle est obligée de réagir à la fraude. Nous n’intégrons pas suffisamment cette réalité lors de nos inventions fiscales.

Pour que l’État reste maître de ses lois de finances, nul besoin d’un miracle : il faut de la détermination et des compétences.

Enfin, dans un esprit de Nation, rien n’interdit aux établissements bancaires français de proposer eux-mêmes des solutions, que nous aurons plaisir à étudier

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