Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le 6 mars 1974, avec l'annonce du plan Messmer, la France de l'énergie entrait dans une nouvelle ère : une ère où souveraineté et indépendance énergétiques rimaient avec nucléaire et ambition, une ère où les sphères scientifique, industrielle et politique ne faisaient qu'un au service de l'intérêt national.
Devenu le grenier à électrons d'origine nucléaire de l'Europe, notre pays s'est progressivement imposé durant la fin du XXe siècle comme un acteur de premier plan pour bâtir l'indépendance énergétique de la France et de l'Europe. Forts de nos certitudes, nous n'avons pas su profiter de cette dynamique et nous remettre en question.
Nous n'avons pas pris les décisions stratégiques qui s'imposaient pour continuer de développer notre capacité de production d'électricité nucléaire. Affaiblissement de la volonté politique sous les coups de boutoir de certains ayatollahs verts, absence de construction de nouveaux réacteurs, tarissement des filières de formation du secteur : la déliquescence de notre filière nucléaire était aussi manifeste que notre aveuglement et notre incapacité à nous en rendre compte.
À travers la fermeture de Fessenheim et la crise énergétique, durant laquelle la France est devenue importatrice nette d'électricité en lieu et place de son rôle traditionnel d'exportateur, notre myopie a été révélée au grand jour.
À l'heure où nous avions plus que jamais besoin d'une politique nucléaire robuste et efficiente, l'attentisme et le court-termisme de nos dirigeants ont déstabilisé grandement l'ensemble du secteur et son acteur phare : EDF.
Nous devons tous, sur ces travées, saluer le sursaut que constitue le discours de Belfort et, plus encore, la décision prise par le Président de la République de construire de nouveaux réacteurs nucléaires. Cette relance est décisive pour l'indépendance stratégique de notre pays et pour notre souveraineté énergétique.
Ce projet de loi est un premier pas à saluer pour rompre avec le déclin de la production d'électricité d'origine nucléaire. Avec le groupe Union Centriste, nous saluons les compromis qui ont été trouvés, afin de faire aboutir ce texte, vital pour traduire concrètement la relance de l'énergie nucléaire dans notre pays.
Nous devons faire plus, et agir plus efficacement, afin que les premières dalles des nouveaux réacteurs soient coulées le plus rapidement possible.
Le Sénat a, je crois, pris toute sa part dans la construction d'un texte intelligent en faisant fi de tout dogmatisme et de croyances dépourvues de fondements scientifiques.
L'abrogation des limites de production d'électricité d'origine nucléaire et du plafonnement de la part de celle-ci dans notre mix énergétique constitue à ce titre un signal fort adressé au secteur.
La non-comptabilisation des nouveaux réacteurs et des infrastructures afférentes dans le ZAN est également déterminante.
Enfin, le fléchage du bénéfice de la taxe d'aménagement perçue sur les réacteurs vers les collectivités sera clé. Elle facilitera l'acceptabilité locale des nouveaux réacteurs et permettra d'embarquer l'ensemble des acteurs dans cette relance du nucléaire.
Mes chers collègues, je crois que nous avons agi de manière responsable pour améliorer un texte technique qui nécessitait manifestement des ajustements. À ce titre, je tiens à saluer les efforts conjoints des rapporteurs des deux commissions, Daniel Gremillet et Pascal Martin, de la présidente Sophie Primas et du président Jean-François Longeot pour enrichir ce projet de loi.
Je crois qu'il nous faut désormais poursuivre cette dynamique, accélérer la formation des personnels et faire confiance aux acteurs scientifiques, industriels et administratifs mobilisés sur ce projet.
C'est tout ce que nous attendons de la loi de programmation pluriannuelle de l'énergie que nous examinerons à l'automne.
Plus qu'un nouveau plan Messmer, j'espère qu'avec ces deux textes, nous tirerons des enseignements de nos erreurs passées, afin de doter notre pays d'une véritable ambition nucléaire et d'une vision stratégique pour les années à venir, sans oublier la nécessité, soulignée précédemment par Fabien Gay, de continuer à travailler sur le mix énergétique.