Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la moitié des photographies échangées sur les réseaux pédopornographiques avaient initialement été publiées sur les réseaux sociaux par des parents, ceux-ci les croyant banales.
Mais ce n'est pas le seul danger auquel sont exposés ces enfants : mises en scène dégradantes pour faire rire, influenceurs qui font commerce de leur vie de famille… Ces pratiques favorisent le harcèlement scolaire et les problèmes liés à l'intimité, l'acceptation de soi et de son image.
Un enfant apparaît en moyenne sur 1 300 photos publiées avant l'âge de 13 ans, alors qu'il n'a pas encore la maturité nécessaire pour y consentir. Selon une étude menée en 2019, 40 % des enfants sont en désaccord avec l'utilisation que font leurs parents de leur image et, une fois adultes, ils leur demandent des comptes.
La protection de leur vie privée manque cruellement à ces enfants et la proposition de loi que nous examinons n'augure pas de progrès majeur. Certes, elle devient un devoir des détenteurs de l'autorité parentale. Pour autant, ce texte est-il suffisant pour responsabiliser les parents, de plus en plus nombreux, dont les intérêts entrent clairement en conflit avec celui de leurs enfants ?
Cette proposition de loi aurait pu suffire il y a quelques années encore, mais la situation actuelle est tout autre : l'avènement des réseaux sociaux, par-delà la simple image des enfants, conduit à exposer des comportements et de nombreux autres aspects de leur personnalité, qui pourront un jour leur porter préjudice.
Ce texte ouvre la voie à des relations conflictuelles aussi bien entre les parents et leurs enfants qu'entre les parents eux-mêmes. Le respect de la vie privée de l'enfant devant toujours rester notre priorité, des propositions complémentaires seraient nécessaires afin de mieux sensibiliser aux conséquences de cet exercice du droit à l'image.
Lorsque cette image est exploitée par des parents qui en font leur fonds de commerce, peut-être serait-il juste, par exemple, que ces enfants perçoivent une rémunération appropriée à leur majorité.
Si nous ne devons pas nous satisfaire de cette proposition de loi, elle a toutefois le mérite de poser les fondements d'une protection du droit à l'image des enfants.