Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez, une nouvelle fois, la responsabilité de vous prononcer sur un texte majeur pour bâtir l’indépendance énergétique de notre pays. Vous avez la responsabilité de vous prononcer sur un texte qui contribuera à répondre au défi du siècle : libérer notre pays de sa dépendance mortifère aux énergies fossiles. Vous avez, enfin, la responsabilité de vous prononcer sur un texte qui permettra à notre pays de produire une énergie abondante, compétitive et décarbonée.
L’objectif du Gouvernement est clair : atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 en réduisant drastiquement notre consommation de pétrole et de gaz fossile, qui pèsent encore pour près des deux tiers de notre consommation d’énergie finale.
Pour relever avec succès l’immense défi de long terme qu’est cette libération des énergies fossiles, nous devrons construire un consensus politique qui transcende les étiquettes partisanes. En effet, je vous le dis avec conviction, notre politique énergétique ne peut pas se permettre de subir, à nouveau, des atermoiements et des décisions erratiques qui ne se fondent ni sur la science ni sur la raison, mais dépendent parfois plutôt d’accords électoralistes de circonstance.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis convaincue que nous posons, depuis l’été dernier, les fondations d’un pacte de renouveau énergétique, un pacte qui permettra de faire face à l’urgence climatique et à l’urgence énergétique.
Ce pacte repose sur des discussions nourries et approfondies entre le Gouvernement et le Parlement, mais également entre le Gouvernement et les élus locaux, les organisations environnementales, les entreprises et, plus largement, l’ensemble des Français.
Je veux d’ailleurs en profiter pour saluer les milliers de nos concitoyens qui ont contribué à la grande concertation sur le futur mix énergétique de notre pays. Je me réjouis qu’ils s’emparent de ces sujets, qui sont certes complexes, mais déterminants pour notre avenir.
L’énergie est aujourd’hui au cœur du débat public et des nombreux travaux parlementaires que vous avez engagés. Il est donc essentiel que nous y travaillions ensemble, car, comme j’ai souvent eu l’occasion de le dire, il n’y aura pas d’indépendance politique sans maîtrise énergétique.
Après le vote des dispositions relatives à la sécurisation de nos approvisionnements énergétiques au sein de la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, l’été dernier, et de la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, en début d’année, je souhaite, avec ce projet de loi d’accélération des procédures administratives nucléaires, poursuivre la relance de notre filière nucléaire.
Je me réjouis de l’accord trouvé en commission mixte paritaire. Je tiens particulièrement à remercier votre rapporteur, Daniel Gremillet, la présidente de votre commission des affaires économiques, Sophie Primas, et les autres membres de celle-ci, de leur investissement jusqu’à la dernière minute, qui a permis ce succès.
C’est un signal fort envoyé à notre filière pour qu’elle se mobilise en vue du lancement du programme de construction de six EPR 2 et de la mise à l’étude de huit réacteurs supplémentaires. Et nous ne nous interdirons pas d’aller plus loin en fonction de la réalité de nos capacités industrielles !
Vous le savez également, l’enjeu des compétences est au cœur de la transition énergétique. Cela est particulièrement vrai pour la filière nucléaire. C’est la raison pour laquelle j’ai demandé à celle-ci de dresser un état des lieux précis des besoins en compétences pour réussir la relance. Les résultats de l’étude qu’ils ont réalisée sont limpides : 100 000, voilà le nombre d’emplois que la filière estime nécessaire de créer au cours de la prochaine décennie. Il faudra recruter des soudeurs, des chaudronniers, des tuyauteurs ou encore des ingénieurs ; autant d’occasions, au cœur des territoires, pour les jeunes ou les travailleurs en reconversion, de prendre part au plus grand projet industriel de notre pays depuis les années 1970. Ils seront les visages de cette « France Nation verte » que nous appelons de nos vœux.
Dans le prolongement de ce travail, je ferai également le point avec l’Université des métiers du nucléaire, au début du mois de juin, sur la stratégie de formation qu’elle mettra en œuvre pour répondre à ces besoins de compétences.
Ce projet de loi sur le nucléaire matérialise, plus profondément, le soutien du Gouvernement et du Parlement à une politique énergétique ambitieuse et crédible.
Je me félicite à ce titre de notre refus, tout au long de l’examen de ce texte, d’opposer nucléaire et énergies renouvelables. En effet, notre urgence, je le répète, est de sortir des énergies fossiles, et nous aurons autant besoin du nucléaire que des énergies renouvelables pour y parvenir.
Avec ce projet de loi, nous accélérons également le renforcement de l’ensemble de notre filière, permise notamment par la montée de l’État au capital d’EDF, ainsi que par les investissements visant à moderniser notre outil de production, comme à Framatome, au Creusot ; dans la continuité du plan France Relance, le plan France 2030 nous permet d’investir dans les innovations en matière nucléaire.
Cette ambition, je la porte au-delà de nos frontières. Je m’emploie en effet depuis plusieurs mois à réunir nos partenaires européens au sein d’une alliance du nucléaire civil. Nous sommes désormais quatorze États membres à travailler aux côtés de la Commission européenne pour que l’énergie nucléaire trouve la place qui lui est due dans le mix énergétique européen. Je réunirai la semaine prochaine mes homologues à Paris pour faire le point sur les projets européens de nouveaux investissements dans le nucléaire. On sera surpris d’en apprendre le nombre !
Tel était également le sens de mon déplacement, il y a quelques jours, avec le président-directeur général d’EDF Luc Rémont, sur le chantier de l’EPR de Hinkley Point, au Royaume-Uni, pour défendre notre savoir-faire d’excellence à l’export.
Mesdames, messieurs les sénateurs, adopter ce texte, c’est permettre à notre pays de réaliser une grande avancée écologique en mobilisant tous les leviers de décarbonation pour lutter contre le dérèglement climatique. C’est aussi donner l’occasion à notre pays de conjuguer réindustrialisation et maîtrise énergétique. C’est enfin lancer le chantier du siècle en matière d’industrie et d’emplois.
La prochaine loi de programmation sur l’énergie et le climat, dont je vous détaillerai prochainement la préparation, devra être ambitieuse et réaliste au regard de nos capacités. J’en serai la garante.
Je nous invite donc à poursuivre le travail engagé, de manière collective, pour bâtir la souveraineté énergétique de notre pays.