Intervention de Annie David

Réunion du 21 juillet 2009 à 21h30
Repos dominical — Exception d'irrecevabilité

Photo de Annie DavidAnnie David :

Au groupe CRC-SPG, nous ne cessons de dénoncer les employeurs voyous qui pratiquent du chantage à l’emploi.

Je me souviens d’avoir entendu ici même, monsieur le ministre, l’un de vos prédécesseurs dénoncer en séance publique le comportement d’un directeur d’usine qui menaçait de fermeture un établissement dont les salariés refusaient de revenir sur les 35 heures. Eh bien, demain, dans les zones touristiques, ce chantage pourra se poursuivre, et d’autant plus facilement qu’avec cette proposition de loi le Gouvernement, en ne prévoyant rien quant à la protection des salariés dans les zones touristiques, qu’elles soient d’intérêt ou d’affluence touristique – nous y reviendrons pendant le débat –, se fait le complice de ce chantage puisqu’il donne toute latitude aux employeurs mais aussi leur fournit les outils pour s’y livrer.

S’agissant des autres salariés, notamment ceux des périmètres d’usage de consommation exceptionnel, il faut être au mieux bien naïf, au pis malhonnête, pour croire qu’ils pourront refuser de travailler le dimanche sans avoir à craindre pour leur emploi. C’est bien, d’ailleurs, ce qui avait amené quelque cinquante-cinq députés de l’UMP et du Nouveau Centre à affirmer, le 27 novembre dernier, dans la tribune intitulée « Vivement Dimanche » : « Chacun connaît les limites du volontariat : sans faire de procès d’intention aux chefs d’entreprise, il est peu probable que les salariés sollicités le dimanche puissent avoir d’autre choix que celui d’accepter. »

Depuis cet appel, me direz-vous, bon nombre d’entre eux sont rentrés dans le rang, certains allant même jusqu’à cosigner le présent texte. Mais ce ralliement tardif ne signifie en rien que les propos tenus hier ne sont plus justes aujourd’hui, d’autant que la proposition de loi ne présente aucune garantie supplémentaire par rapport à ses précédentes versions.

Je ne peux que rappeler que la notion de « volontariat » n’a aucun sens dans un contexte de travail collectif puisque, comme dans toute société, les décisions individuelles ont nécessairement des répercussions collectives. Je reconnais toutefois que cela correspond au mouvement d’individualisation des relations de travail que vous avez entamé depuis des années, et dont la première pierre a été posée dans les années soixante-dix, avec l’individualisation des horaires de travail.

Au regard des politiques que votre majorité mène depuis des années, les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG considèrent que vous avez permis, avec l’« individualisation » des conditions de travail, la « morcellisation » des droits collectifs. Comme le soulignait Maryse Dumas, secrétaire confédérale de la CGT, dans le magazine Liaisons sociales publié en mai dernier, « le volontariat est le moyen employé pour banaliser les atteintes aux protections collectives contenues dans le code du travail ».

La société du « libre choix » dont vous vous réclamez n’existe pas. S’accrocher à cette notion, c’est méconnaître l’ensemble des contraintes tant économiques que sociales qui pèsent sur les salariés dans les entreprises, et en dehors.

Quant aux contreparties financières censées « récompenser » les salariés privés de repos dominical – et vous-même, monsieur le ministre, avez déclaré en séance publique à l'Assemblée nationale qu’elles devaient être « sérieuses » –, elles sont loin d’être à la hauteur. Contrairement aux annonces officielles, seule une minorité des salariés en profitera : celles et ceux qui travaillent dans les fameux PUCE, qui piquent beaucoup, …

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