Intervention de Nicole Borvo Cohen-Seat

Réunion du 21 juillet 2009 à 21h30
Repos dominical — Demande de renvoi à la commission

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

Je note d’ailleurs que vous n’avez pas auditionné non plus l’association « Laissez-nous travailler », qui prétend se faire le porte-parole de la minorité de salariés favorables au travail le dimanche. Il faut dire qu’au vu des débats à l’Assemblée nationale, notamment de la négation du volontariat dans les zones touristiques et de l’absence de contreparties, son président, M. Grumberg, pourtant ardent défenseur du travail le dimanche, considère aujourd’hui que le compte n’y est pas pour les salariés.

Tout cela permet d’entrevoir un troisième motif à cette précipitation : agir vite pour éviter la contestation dans votre propre camp.

Mais, au-delà de ces considérations, qui intéressent surtout la majorité sénatoriale, je ne peux que dénoncer l’absence d’étude d’impact, pourtant si chère aux parlementaires, tout particulièrement aux sénateurs. Celle-ci aurait permis de mieux cerner les conséquences sur l’emploi de l’application de cette proposition de loi, notamment dans le commerce de proximité.

Une étude avait pourtant bien été menée avant l’élection de Nicolas Sarkozy à la Présidence de la République : elle avait démontré que, pour un emploi créé dans la grande distribution, trois seraient supprimés dans le commerce de proximité. Et l’on sait par expérience que, dans la grande distribution, très grande utilisatrice de temps partiel et non moins grande pourvoyeuse de précarité, les emplois sont moins protecteurs et moins rémunérateurs que dans le commerce de proximité. Les comptes sociaux pâtiront immanquablement de cette perte en quantité et en qualité.

Ainsi, au Royaume-Uni, pays qui vous sert de modèle – alors même que les Britanniques prennent aujourd’hui conscience de certains effets négatifs du thatchérisme –, on comptait, avant l’application de la loi autorisant le travail le dimanche, 15 000 magasins de proximité non franchisés vendant des chaussures ; aujourd'hui, il n’en reste plus que 350…

Naturellement, je vous entends déjà contester ces propos, monsieur le ministre. C’est votre droit et, de toute façon, en l’absence d’étude d’impact, rien ne peut venir ni les corroborer ni les contredire !

Cette étude d’impact aurait également permis de mesurer les conséquences de l’application de cette proposition de loi sur la vie sociale et familiale, ainsi que sur l’environnement. Je ne reprendrai pas ce qui a été dit précédemment par mes collègues à ce sujet, mais chacun sait que, plus les grandes surfaces s’éloignent des centres-villes, plus les gens sont obligés de se déplacer avec leurs voitures.

En outre, je regrette que la commission des affaires économiques ne se soit pas autosaisie, comme je l’y avais invitée par courrier. Au mieux, ce refus traduit votre volonté d’aller vite, très vite, au détriment de la qualité du travail parlementaire. Au pis, il prouve que, dans vos propres rangs, certains doutent des quelques effets positifs de cette nouvelle dérégulation sur l’économie de notre pays. Pour ma part, je penche pour la deuxième hypothèse. Comme le faisait justement remarquer M. François Baroin en décembre dernier, « les gens qui consommeront le dimanche ne le feront pas un autre jour ». C’est une sans doute une lapalissade, mais précisément parce qu’il s’agit d’une vérité d’évidence !

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