Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la France compte plus de 200 casinos. L’objectif initial de cette proposition était d’offrir aux communes d’Arnac-Pompadour en Corrèze et de Saumur dans le Maine-et-Loire la possibilité d’ouvrir chacune leur propre casino, objectif légitime et recevable.
Au regard du droit positif en vigueur, cette faculté leur était malheureusement interdite. En effet, les conditions permettant l’ouverture de tels établissements sont prévues de manière particulièrement stricte par l’article L. 321-1 du code de la sécurité intérieure.
Sont pour l’heure autorisées à accueillir un casino en leur sein les communes ayant un statut de station de tourisme, balnéaire, thermale ou climatique ou les communes-centres des grandes métropoles dotées d’équipements culturels particuliers.
Il s’agit là d’un choix pour le moins arbitraire, qui entraîne une surconcentration de ces établissements sur les littoraux et, dans une moindre mesure, dans les communes thermales, laissant de nombreux territoires français écartés de la possibilité de se doter de ce type d’établissement.
La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui a donc pour objectif d’élargir ce champ. Dans sa rédaction initiale, elle permettait en effet d’ouvrir cette possibilité aux seules communes dotées de « sites historiques du Cadre noir et des haras nationaux [ayant] organisé, au moins pendant cinq années […] au moins dix événements hippiques au rayonnement national ou international par an ».
Jugeant que ces critères cumulatifs rendraient ce texte difficilement opérationnel, M. le rapporteur a préféré en changer la rédaction de l’article unique. Cette modification de la législation en vigueur devrait permettre l’ouverture à terme d’une douzaine de casinos supplémentaires.
Si le texte originel pouvait faire sens, dans la mesure où les activités hippiques et équestres alimentent grandement le monde des paris, donc des jeux d’argent, dont les casinos tirent leurs recettes, cette nouvelle rédaction soulève des interrogations et nous inquiète.
Si l’ouverture de deux nouveaux casinos n’est pas de nature à bouleverser les équilibres territoriaux en la matière, qu’en est-il de l’ouverture potentielle de treize nouveaux établissements ?
Nous ne nions aucunement que ces nouveaux casinos constitueraient des sources nouvelles d’attractivité économique et touristique pour les communes qui les accueilleront. Pour autant, nous ne pouvons adhérer à cette libéralisation excessive, et ce pour au moins deux raisons.
D’une part, il est à craindre que l’ouverture d’une douzaine de nouveaux casinos ne vienne bouleverser cette activité et ne mette encore plus en difficulté cette filière, déjà fragilisée par l’essor des jeux de hasard et des paris en ligne.
D’autre part, la fréquentation des casinos et la pratique des jeux de hasard et de paris en ligne sont source d’excès, de dépendance et d’endettement pour certains de nos concitoyens.
Ainsi, au cours des cinq dernières années, les dépenses de jeux des Français ont augmenté de 12, 5 %. Par ailleurs, 1, 6 % de nos concitoyens s’adonneraient à une pratique excessive en la matière, soit plusieurs centaines de milliers de personnes, particulièrement au sein des milieux sociaux défavorisés, populaires et paupérisés.
Nous partageons donc les réserves et la prudence qui ont été exprimées tant par notre collègue Nathalie Goulet que par Mme la secrétaire d’État. Pour autant, une fois n’est pas coutume, les sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain disposeront d’une liberté de vote, liée aux enjeux locaux et territoriaux, ainsi que Joël Bigot l’a exposé tout à l’heure. Pompadour et Saumur, oui ! En revanche, l’ouverture d’un casino dans une douzaine de nouvelles communes n’est pas forcément raisonnable.
Par conséquent, dans sa majorité, le groupe SER s’abstiendra.