Je le dis avec force : le droit de propriété n’est jamais gagnant quand il s’appuie sur des fondements d’exclusion et d’inégalité d’accès. Je veux citer ici Eugène Varlin, figure de la Commune de Paris, qui disait très justement : « Tant qu’un homme pourra mourir de faim à la porte d’un palais où tout regorge, il n’y aura rien de stable dans les institutions humaines. »
Que sont devenus le droit au logement, le droit à la dignité, le droit à vivre décemment ? Et nous allons déployer notre police et notre justice, pour punir les plus pauvres ?
Je veux vous rappeler les fondements de nos institutions. L’article II de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, issue de la Révolution française, que nous célébrerons avec fierté dans un mois, garantit le droit à la vie privée. Cette vie-là ne peut exister dans la rue.
Comme nous le rappelait l’abbé Pierre, le logement est un droit, non un privilège. Les dixième et onzième alinéas du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, qui ont valeur constitutionnelle et qui sont d’une très grande modernité, l’explicitent clairement. Le dixième alinéa dispose ainsi : « La Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ». Le onzième alinéa est aussi très clair : « Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence ». Que faisons-nous de ces valeurs constitutives de notre Nation ?
Ne perdez pas de vue l’idéal républicain et les valeurs qui ont fondé notre République, au prix de nombreuses luttes.
C’est aussi, et j’en termine ainsi, la demande formulée dans le courrier adressé à la France, le 30 mars dernier, par le rapporteur spécial de l’Organisation des Nations unies sur le logement convenable et par le rapporteur spécial de l’ONU sur l’extrême pauvreté et sur les droits de l’homme. La Défenseure des droits a aussi formulé une alerte, estimant que ce texte n’était ni nécessaire ni proportionné.
Vous n’êtes pas si sévère avec les marchands de sommeil – l’un d’entre nous a abordé ce sujet précédemment – dont l’activité est particulièrement lucrative. Vous me direz si je me trompe, monsieur le garde des sceaux, mais ils ne risquent au maximum qu’une amende de 15 000 euros, alors qu’ils profitent de la misère des gens.