Intervention de Thomas Dossus

Réunion du 15 juin 2023 à 10h30
Protection des mineurs et honorabilité dans le sport — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Thomas DossusThomas Dossus :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens d’abord à saluer ce travail crucial dans le contexte actuel de libération de la parole, qui percute tous les secteurs et, pour ce qui nous concerne aujourd’hui, toutes les fédérations sportives.

Devant la gravité des faits, le caractère parfois insupportable des témoignages et la douleur des victimes, souvent très jeunes à l’époque des faits, nous sommes quelques fois frappés d’un état de sidération qui peut nous tétaniser.

Mais le silence qui règne sur le sujet est vécu souvent comme une violence supplémentaire et constante par les victimes. Par conséquent, chaque occasion de parler des violences commises contre les enfants est d’utilité publique.

Le sport peut être un lieu d’emprise d’entraîneurs, d’encadrants ou de coaches au comportement criminel. Par conséquent, les entraînements peuvent devenir un enfer pour les enfants.

Depuis le témoignage de la patineuse Sarah Abitbol, la parole se libère et aucune fédération ne semble épargnée. Notre rôle de législateurs est donc d’agir pour que la pratique du sport soit protégée en amont des prédateurs.

Pour protéger les enfants, il faut que la peur change de camp. Et pour qu’elle change de camp, la transparence sur le parcours des encadrants doit devenir la norme. C’est l’objet de cette proposition de loi.

Après son passage en commission, et grâce au travail de notre rapporteur, Jean-Jacques Lozach, le texte prévoit un panel de mesures concrètes pour contrôler en amont l’honorabilité des acteurs du sport.

L’interdiction pour certaines personnes condamnées de travailler auprès d’enfants dans le sport est en effet déjà codifiée au sein de l’article 212-9 du code du sport. Aujourd’hui, il s’agit de le faire respecter.

Pour ce faire, il est prévu que l’administration contrôle le bulletin n° 2 du casier judiciaire contenant la plupart des condamnations judiciaires et des sanctions administratives. Il est également prévu d’appliquer l’incapacité en cas de condamnation à l’étranger et d’ouvrir la possibilité d’une procédure de relèvement, c’est-à-dire d’effacement des conséquences d’une condamnation, sans que celle-ci disparaisse. Par ailleurs, il sera précisé que toute condamnation définitive figurant dans le Fijais entraîne l’incapacité d’exercer même si celle-ci n’est plus mentionnée dans le casier judiciaire.

Le texte vise également à prévoir une mesure administrative d’interdiction temporaire ou définitive de diriger un club sportif pour tout dirigeant qui mettrait en danger des enfants, couvrirait un de ses encadrants ou manquerait d’informer l’administration sur des comportements problématiques au sein du club. Il tend aussi à prévoir une sanction pénale en cas de manquement.

Ce panel de mesures nous semble important, mesuré et efficace. Il constitue un premier pas indispensable pour protéger les enfants pratiquants dans tous les clubs.

Au-delà de cette proposition de loi importante, il nous faudra aller plus loin pour la protection des mineurs. Il nous faudra développer l’accompagnement des clubs pour la prévention des actes de violence contre les jeunes sportifs. Cela passera par la formation et ne se fera pas en un jour.

À ce titre, il nous faudra former toute la chaîne des fédérations pour que l’ensemble des cadres, souvent bénévoles, mettent la parole des enfants et leur protection au-dessus des éventuels corporatismes. Ce problème n’est pas spécifique au sport, mais cette libération de la parole doit percer une chape de plomb qui a trop longtemps pesé sur ce milieu.

Pour que cet accompagnement, cette formation et cette libération de la parole aient lieu, il nous faut naturellement des moyens financiers.

Je connais votre engagement, madame la ministre, vous l’avez d’ailleurs rappelé. Je profite néanmoins de l’occasion qui m’est offerte aujourd’hui à cette tribune pour formuler un vœu : que le prochain projet de loi de finances voie une augmentation significative des budgets dédiés. Peut-être pourriez-vous vous inspirer de ce qu’a fait lors du précédent projet de loi de finances votre collègue ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, en doublant les crédits de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles ?

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