Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la discussion de l’article 13 du projet de loi organique me donne l’occasion de vous faire part d’une interrogation qui me taraude depuis quelque temps en considérant la pratique actuelle du pouvoir, celle du Président de la République et de l’exécutif.
Dans quelle République vivons-nous ? Vers quelle République allons-nous ? Quel qualificatif faut-il lui attribuer ?
On essaie de museler tous les pouvoirs.
Concernant le pouvoir judiciaire, on nous annonce pour bientôt la suppression des juges d’instruction au profit des procureurs. Le garde des sceaux, le Premier ministre et le Président de la République pourront intervenir et régler les affaires comme ils en auront envie. Pourtant, dans cette période, il y a bien d’autres choses à faire, alors même que l’on apprend que certains juges ne lisent pas leur courrier, que des détenus s’évadent de prison avec des explosifs et que l’on déplore un nouveau suicide en prison, qui s’ajoute à une liste déjà longue !
En ce qui concerne les médias, notre collègue François Rebsamen vient de parler du temps de parole du Président de la République. Mais que dire de la presse écrite, où tous les propriétaires de journaux sont les amis du Président de la République, l’un d’entre eux siégeant même sur les travées de la majorité de notre assemblée ?
S’agissant de la presse télévisée, le débat sur la réforme de l’audiovisuel nous a permis de constater que le CSA a été réduit à un rôle de potiche, le Président de la République s’octroyant le pouvoir de nomination.
Et aujourd'hui, on veut supprimer ou limiter le droit d’amendement des parlementaires, qui est l’essence même, j’oserai dire les tripes mêmes, de la vie parlementaire ! On veut que nous nous fassions hara-kiri ! Mais vous allez, vous aussi, vous faire hara-kiri, mes chers collègues de la majorité, en votant cet article 13, puisque vous êtes l’opposition de demain.
J’en reviens à ma question : quel qualificatif donner à cette République qui intervient dans le fonctionnement de la justice, limite son indépendance, restreint considérablement le pouvoir du Parlement et s’octroie tous les pouvoirs concernant la presse. Autoritaire ? Certainement ! Va-t-on aller au-delà ? Louis Mermaz a rappelé tout à l'heure ce qui s’est passé dans l’histoire ; je crains que nous n’allions dans ce sens.
Quoi qu’il en soit, mes chers collègues, ne votez pas l’article 13 : il se retournera demain contre vous et contre le Parlement !