Messieurs les ministres, en dépit de la réforme votée l'année dernière, l'écart en valeur absolue ne cesse de se creuser : est-ce donc pour cette raison que vous souhaitez revoir le dispositif ?
Si la réforme a permis de diminuer l'écart relatif, il n'en reste pas moins que les 40 départements nouvellement éligibles à la DFM ont perçu, en 2005, des attributions 3, 22 fois inférieures à celle des 24 départements anciennement éligibles, alors que ce rapport était de 1 à 3, 59 en 2004. Or, le potentiel financier par habitant des premiers n'excède que de 2, 2 % celui des seconds : rien ne peut donc justifier la préservation d'un écart si important !
J'ai tenu à attirer votre attention sur ce point parce que je sais à quel point la mutation est difficile et doit être longuement expliquée. Notre détermination à mener la réforme la plus juste et la plus équitable est sans faille, et vous savez pouvoir compter sur nous. Cette question de la DFM présente, d'ailleurs, l'intérêt de nous montrer qu'il existe encore des marges de progression : alors que les collectivités, singulièrement les départements, traversent clairement une crise de confiance, la préservation d'inégalités de ce type ne peut que jeter le trouble parmi les élus et, donc, conduire à la fameuse « crispation » que je viens d'évoquer.
En deuxième lieu, j'évoquerai les droits de mutation à titre onéreux.
Depuis le début de la discussion de ce projet de budget, nous entendons une clameur insistante s'élever du banc du Gouvernement : il y a des problèmes liés au RMI, à l'APA, aux routes et aux SDIS, mais les DMTO, eux, progressent ! Cela est tout à fait exact, et il faut s'en féliciter, car cette ressource, qui est la seule à connaître un certain dynamisme, sert de « contrepoint », même si ce n'est pas son rôle, à l'évolution décevante de la TIPP.
Cependant, il faut bien se rendre à l'évidence : si cette ressource a augmenté de 80 % depuis 2000, nos dépenses en niveau ont plus progressé encore. De plus, elle est très mal répartie : entre le département des Alpes-Maritimes et celui de la Meuse, où les DMTO représentent respectivement un montant par habitant de 232 euros et de 48 euros, le rapport est de 1 à 6 !
En conséquence, messieurs les ministres, tout en me félicitant du dynamisme de cette recette qui apporte effectivement un peu de souplesse aux collectivités, il ne faudrait pas ramener tout le débat que nous devons avoir avec vous à la seule question des DMTO.
À mon sens, cette année de « calme relatif » constitue au contraire une pause bienvenue : nous devons impérativement la mettre à profit pour « poser les sujets sur la table », faire le point et réfléchir, afin de ne pas nous retrouver tous les ans à devoir tristement constater que, même si l'État remplit scrupuleusement ses obligations constitutionnelles, il subsiste encore des inquiétudes, et toujours les mêmes.
J'en viens maintenant à un tout autre sujet.
Comme j'en avais exprimé l'intention voilà un an, la commission des finances du Sénat, fidèle en cela à sa vocation, travaille actuellement avec le service des collectivités territoriales sur la constitution d'une base de données relative aux finances locales. Notre objectif, à terme, est de doter le Sénat d'un outil lui permettant de procéder à des expertises et à des simulations de manière complètement autonome.
Afin de déterminer dans quelle mesure un tel outil pouvait être développé, le Sénat a demandé à deux cabinets de réaliser une étude de faisabilité, qui lui a été remise en juillet dernier. Il en ressort que notre assemblée ne peut pas se doter de capacités de simulation aussi efficaces que celles dont dispose le Gouvernement, et ce à double titre : d'une part, du fait de limitations en termes de moyens, notamment d'effectifs, les personnes recrutées ne pouvant avoir toutes les compétences nécessaires pour utiliser cet outil de simulation ; d'autre part, du fait de difficultés relatives à l'obtention des données, notamment en termes de délais.
Outre un coût de fonctionnement significatif, la mise en place d'un tel outil aurait, en effet, un autre inconvénient : il permettrait de ne procéder à des simulations, en « régime de croisière », que sur 10 % des dispositions fiscales et sur 50 % des dotations. Comme une seule simulation à la fois serait possible, avec pour chacune un délai variant d'une heure à plusieurs jours, nous ne pourrions étudier qu'une faible part des mesures proposées dans les amendements déposés lors de la discussion budgétaire et portant sur les collectivités territoriales.
Enfin, bien évidemment la montée en charge d'un tel dispositif serait lente et difficile.
Aussi nous a-t-il semblé plus réaliste d'envisager une action en deux temps.
Dans un premier temps, il convient de convenir avec le Gouvernement des modalités concrètes selon lesquelles les principales données dont il dispose pourraient, dès à présent, être mises à la disposition du Sénat.
Dans un second temps, il importe de mettre en place, au sein de la Haute Assemblée, une « capacité minimale » d'utilisation des données financières et fiscales des administrations centrales, peu coûteuse et rapidement opérationnelle, pour laquelle nous pourrions éventuellement décider d'une montée en puissance ultérieure, en vue d'accéder progressivement à une véritable autonomie d'expertise.
À cet égard, la commission des finances a auditionné, le 18 octobre dernier, le directeur général de la DGI, la direction générale des impôts, le représentant de la DGCL, la direction générale des collectivités locales, et celui de la DGCP, la direction générale de la comptabilité publique, ainsi qu'un représentant du directeur général de l'INSEE. Lors de cette audition, il est apparu que les informations pertinentes pouvaient être obtenues, pour l'essentiel, auprès de ces trois directions générales. Elles se sont, d'ailleurs, engagées à répondre à nos éventuelles demandes et à nous transmettre un certain nombre de fichiers. Je leur ai donc immédiatement envoyé un courrier en ce sens.
Messieurs les ministres, mes chers collègues, seule la DGCP a répondu dans les délais. Je viens seulement de recevoir ce matin même les informations de la DGI. Le cas de la DGCL est plus particulier : non seulement elle nous a adressé les données demandées avec un léger retard, mais, surtout, elle a fait preuve d'un sens de l'humour certain, auquel elle ne nous avait pas habitués jusqu'à maintenant.
En effet, nonobstant les dispositions de l'article 57 de la LOLF, elle nous a demandé de lui régler, sous 30 jours, la somme de 1 526, 01 euros, dont 1, 52 euro de frais de port !