Intervention de Annie Le Houerou

Réunion du 4 juillet 2023 à 14h30
Protection des familles d'enfants atteints d'une maladie ou d'un handicap — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Annie Le HouerouAnnie Le Houerou :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’annonce d’une affection de longue durée, d’une maladie grave d’un enfant ou d’un handicap bouleverse le quotidien de la famille confrontée à cette situation.

En examinant cette proposition de loi, nous pensons avant tout à ces familles.

Outre le choc difficile à encaisser, l’annonce conduit à modifier les habitudes de vie. Elle peut toucher de nombreux aspects du quotidien et contraint parfois à trouver un nouveau logement, plus adapté.

Cette période impose de nombreux rendez-vous, notamment médicaux, qui viennent perturber la fragile organisation conçue pour concilier vie professionnelle et vie familiale.

Cette nouvelle donne se traduit souvent par la décision de la mère de famille – c’est généralement elle qui s’y résout – d’arrêter de travailler pour s’occuper de son enfant. Ce bouleversement dans la vie familiale justifie un soutien exceptionnel.

Malgré les dispositifs existants, les parcours sont semés d’embûches. J’y insiste, ce sont très souvent les mères qui doivent adapter leur activité professionnelle, opter pour un temps partiel ou cesser de travailler. Les revenus du foyer s’en trouvent diminués. Le recours aux droits découlant de cette nouvelle situation exige du temps ; il est souvent retardé par des freins administratifs.

À ce choc s’ajoutent des problèmes financiers, le stress lié à la crainte d’une perte d’emploi et l’inquiétude de subir des impayés. Garantir la sécurité de l’emploi et protéger l’employé pour passer ce cap difficile rassure.

Outre-mer, ces difficultés sont exacerbées. §L’éloignement des services publics et les inégalités territoriales d’accès aux soins touchent particulièrement les enfants ultramarins. Les parents accompagnent parfois leur enfant en métropole et se trouvent donc contraints de quitter leur emploi. Les coûts supplémentaires induits aggravent encore leur détresse.

Le suivi et l’accompagnement de ces familles sont mal pris en compte. Une attention particulière et un soutien doivent leur être apportés par la collectivité nationale.

Même si cette proposition de loi ne résout pas l’ensemble des problématiques auxquelles doivent faire face les familles touchées, elle améliore les dispositifs existants.

Nous sommes satisfaits de l’adoption à l’unanimité par l’Assemblée nationale de ce texte, présenté par notre collègue député Paul Christophe le 3 mars dernier.

Cette proposition de loi permet notamment aux CAF de verser des avances sur l’AJPP. Cette allocation est attribuée par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM), sous conditions, pour permettre au parent de cesser temporairement son activité afin de s’occuper de son enfant malade ou handicapé. L’avance est rendue possible dans l’attente de l’avis de la CPAM.

En outre, le présent texte supprime l’accord explicite du service du contrôle médical lors du renouvellement de l’AJPP.

Nous saluons aussi la possibilité donnée aux CAF d’expérimenter sur trois ans une simplification et une amélioration de l’accompagnement des familles bénéficiaires de l’AJPP. Certaines CAF avancent des propositions concrètes pour améliorer la prise en charge des familles confrontées à ces situations.

L’allongement du congé à douze jours pour décès d’un enfant et la protection du droit au logement pour les parents d’enfants handicapés ou malades, sur le même modèle que pour les personnes âgées, vont eux aussi dans le bon sens.

Nous souhaiterions aller plus loin, en créant notamment un statut d’employé plus protecteur pour les parents d’enfants touchés par la longue maladie ou le handicap.

Nous regrettons le rejet en commission des affaires sociales de plusieurs de nos amendements. Il nous semble notamment important de rétablir la rédaction initiale de l’article 1er, qui était plus protectrice.

La commission a voté la possibilité pour l’employeur de rompre le contrat en cas de faute grave ou d’impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l’état de santé de l’enfant de l’intéressé. Cette limitation de la protection de l’employé est certes de nature à rassurer les employeurs ; on ne peut pas en dire autant pour ce qui concerne les salariés.

Nous souhaitons également allonger la durée du congé pour annonce de la survenue d’un handicap ou d’une pathologie chronique de l’enfant. Nous avons proposé dix jours au lieu des cinq retenus à l’issue des travaux de l’Assemblée nationale et de notre commission des affaires sociales. Il s’agit certes d’un progrès par rapport à la durée actuelle, fixée à deux jours. Mais cinq jours restent insuffisants pour permettre aux parents de faire face au choc provoqué par une telle annonce et à toutes ses implications. Ce moment douloureux réclame du temps pour envisager les différentes démarches à accomplir.

Le présent texte contient une autre avancée : il facilite le télétravail. Cette option permet de mieux concilier vie professionnelle et vie familiale lorsque les circonstances et l’emploi l’autorisent. Elle évite l’isolement que pourrait entraîner l’arrêt complet du travail. L’aménagement du poste de travail sous la forme du télétravail doit pouvoir être étudié pour tout salarié chargé d’un enfant ou d’un proche atteint d’une maladie grave ou d’un handicap, lorsque l’intéressé le souhaite.

Un de nos amendements vise à mieux faire connaître cette possibilité, via la notification obligatoire par l’employeur à la personne salariée de la possibilité de télétravailler ou d’adapter son poste. Cette information permet d’évoquer les possibilités envisageables selon le contexte particulier de l’emploi.

Nous proposons également de garantir aux parents d’enfants atteints de maladie grave ou gravement handicapés un poste de télétravail dont le matériel nécessaire et adapté serait à la charge de l’employeur.

Cette proposition de loi crée de nouveaux droits pour faciliter la vie des familles confrontées à ces situations douloureuses. Elle assure une simplification bienvenue des démarches. Les élus du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain la voteront.

La définition d’un statut des aidants familiaux et leur reconnaissance dans une approche plus globale pourraient toutefois trouver leur place dans une grande loi relative à l’adaptation de notre société à la perte d’autonomie ; une grande loi que nous attendons avec impatience, monsieur le ministre !

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