Intervention de Jocelyne Guidez

Réunion du 4 juillet 2023 à 14h30
Protection des familles d'enfants atteints d'une maladie ou d'un handicap — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jocelyne GuidezJocelyne Guidez :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ouvrirai mon propos par une citation de l’abbé Pierre : « Nous sommes tous ensemble responsables, responsables de nous-mêmes et responsables les uns des autres, c’est cela la grandeur d’être homme. »

Je salue à mon tour le travail de Paul Christophe, l’auteur de cette proposition de loi – je ne suis pas surprise de la qualité de son texte : j’ai travaillé avec lui à plusieurs reprises sur des propositions de loi relatives aux aidants –, ainsi que celui de notre collègue rapporteure, Marie-Pierre Richer, qui éclaire avec précision les enjeux de cet important dossier législatif.

Ce texte apporte des solutions de proximité pour faire évoluer nos mécanismes de solidarité. Il prend en compte les contraintes et besoins des parents dont l’enfant est atteint d’une maladie, d’un handicap, ou victime d’un accident d’une particulière gravité, afin de les aider à traverser cette épreuve extrêmement douloureuse. Il étend aux parents d’enfants malades les dispositifs prévus pour les adultes placés dans une situation semblable.

Ces parents, souvent jeunes, qui forment parfois un foyer monoparental, doivent faire face à la maladie de leur enfant et accompagner ce dernier. Pour eux, la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle devient dès lors très délicate. L’enfant malade exigeant une attention particulière et une présence soutenue, ils doivent endosser plusieurs rôles : tout en restant parents, ils deviennent soignants, accompagnateurs, experts administratifs ou encore instituteurs.

Pour eux, les obstacles sont nombreux : freins administratifs, délais d’attente de plusieurs semaines, voire de plusieurs mois, difficultés financières… S’y ajoutent le possible manque de compréhension de l’employeur et l’obligation de diminuer son temps de travail, voire de cesser son activité pour s’occuper de son enfant.

Afin de réduire ces difficultés, des avancées majeures ont été accomplies ces dernières années en faveur de l’accompagnement des proches aidants, grâce à l’ouverture de nouveaux droits. De récentes réformes ont encore amélioré la protection des familles concernées. Néanmoins, il est nécessaire de veiller collectivement à la diffusion des possibilités offertes à nos concitoyens, afin que les familles soient mieux informées de leurs droits.

Nous ne pouvons que saluer les dispositions de cette proposition de loi, qu’il s’agisse de l’allongement de la durée des congés accordés, de l’accélération des procédures ou encore de la simplification du recours aux prestations par les bénéficiaires.

La protection contre le licenciement des salariés en congé de présence parentale nous semble une adaptation bienvenue. Un amendement de Mme la rapporteure vise à garantir l’effectivité de cette mesure, y compris lors d’éventuelles périodes de reprise du contrat de travail entre deux congés auprès de l’enfant. Il tend à accorder aux parents en congé de présence parentale un niveau de protection identique, quels que soient leurs choix professionnels. Dès lors, un parent d’enfant malade ou handicapé qui souhaiterait garder un lien avec son travail et fractionner son congé serait aussi bien protégé que celui qui chercherait à poser en un bloc l’ensemble des jours auxquels il a droit.

De plus, le présent texte renforce le recours au télétravail pour les salariés aidants. L’employeur devra ainsi motiver son éventuel refus d’accorder à un salarié aidant la possibilité de travailler à distance.

Ces mesures réduisent les risques de discrimination et assurent une meilleure adaptation du monde du travail aux caractéristiques des salariés en question.

Nous sommes convaincus du bien-fondé de ces dispositifs, qui répondent au besoin de stabilité des parents. Il s’agit de mieux protéger ces derniers de certains risques socioprofessionnels afin qu’ils puissent se consacrer pleinement au combat de leur enfant.

Nous nous réjouissons évidemment de l’augmentation de la durée du congé pour l’annonce du handicap ou d’une pathologie d’un enfant. Pour les parents, une telle annonce constitue inévitablement un choc psychologique. Elle impose à la famille une nouvelle organisation et un apprentissage de la gestion de la maladie.

La loi du 17 décembre 2021 visant à l’accompagnement des enfants atteints de pathologie chronique ou de cancer a permis aux parents concernés de bénéficier d’un congé de deux jours. Face aux besoins et à la lourdeur des procédures à engager, les associations ont jugé cette durée insuffisante.

Cette proposition de loi permet d’aller un peu plus loin en portant ce congé à cinq jours ouvrables. Les familles auront ainsi davantage de temps pour assimiler la nouvelle, se renseigner sur le diagnostic posé et accomplir les multiples démarches administratives et médicales auxquelles elles sont confrontées.

Par amendement, la commission des affaires sociales a porté de sept jours ouvrés à quatorze jours ouvrables le congé minimal applicable en cas de décès d’un enfant ou d’une personne à charge de moins de 25 ans, ou d’un enfant lui-même parent. Les familles auront ainsi davantage de temps pour se recueillir et mener les démarches qui s’imposent, sans contrainte professionnelle.

L’article 3 permet aux caisses d’allocations familiales de verser l’allocation journalière de présence parentale dans l’attente de l’avis du service du contrôle médical des caisses primaires d’assurance maladie. Ces avances sur prestation contribueront à réduire les délais de traitement et permettront aux parents d’enfants malades de voir leurs arrêts d’activité compensés plus rapidement.

Compte tenu des difficultés que les bénéficiaires de l’AJPP rencontrent pour se loger, il paraît prioritaire de garantir la situation de ceux qui disposent déjà d’un logement adapté.

En vertu de l’article 4 bis, un bailleur ne peut plus donner congé à un locataire bénéficiaire de l’AJPP dont les ressources sont inférieures au plafond prévu pour les logements conventionnés lors du renouvellement du bail, à moins que l’on ne propose à ce locataire un logement, à proximité, correspondant à ses besoins. Cette protection, qui limite le droit de propriété des bailleurs, ne pourrait courir au-delà de six années.

L’article 5 favorise la mise en œuvre des innovations, à titre expérimental, dans le service consacré aux AJPP des CAF afin de mieux accompagner les allocataires et de les aider à se prémunir contre les difficultés financières.

Enfin, nous nous devons d’évoquer deux points importants concernant les travailleurs indépendants et les territoires ultramarins.

Nous ne saurions oublier les travailleurs indépendants, notamment les commerçants et les artisans qui limitent leur activité professionnelle lors du parcours de soins de leurs enfants. Il est nécessaire de leur assurer la survie de leur activité économique.

Nous tenons également à insister sur la spécificité sanitaire des territoires ultramarins et sur ses conséquences humaines, sociales et financières. Une famille de l’Hexagone bénéficiera le plus souvent d’une prise en charge dans un hôpital de sa région de résidence, quand une famille ultramarine devra parfois se rendre en France métropolitaine pour y faire soigner son enfant, en général en région parisienne, où les prix sont particulièrement élevés, notamment pour se loger.

Cette situation est très pénalisante, particulièrement dans le cas d’un traitement de longue durée : les pathologies les plus graves, comme les cancers, peuvent entraîner de nombreux mois d’hospitalisation et induire des périodes d’attente entre différents traitements, pendant lesquelles les malades ne sont pas autorisés à rentrer outre-mer.

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