Cet amendement vise également à abroger l'article qui met en place la réforme de la taxe professionnelle.
Cette réforme, qui a été adoptée au moment de l'examen du projet de loi de finances pour 2006, aura des conséquences désastreuses sur l'équilibre financier des collectivités locales. En se résumant à un plafonnement absolu à la valeur ajoutée, elle conduit à supprimer toute marge de manoeuvre, en termes de recettes de taxe professionnelle, sur la partie plafonnée de l'assiette.
En quelques mots, voici les constats qui nous conduisent à appeler de nos voeux la suppression de cette réforme, dont, finalement, personne ne veut, si ce n'est le MEDEF.
Tout d'abord, la réforme est inique par ses conséquences mécaniques. Avec le plafonnement à la valeur ajoutée, les inégalités territoriales s'accroîtront automatiquement. Le pourcentage de bases plafonnées étant extrêmement différent d'un territoire à l'autre, les inégalités - déjà fortes - vont s'intensifier et influer sur les capacités futures de modulation des taux. Certaines communes verront ainsi la quasi-totalité de leurs bases plafonnées.
Le pourcentage de bases plafonnées se situe en effet entre 3 % et 99 % pour les communes, entre 30 % et 82 % pour les départements, et entre 26 % et 61 % pour les régions.
En effet, le plafonnement fondé sur la valeur ajoutée frappera prioritairement les entreprises du secteur industriel, qu'il s'agisse des zones rurales ou industrielles, et touchera à un moindre niveau les entreprises de services. Ainsi, les zones qui peuvent déjà accuser un moindre dynamisme économique et, par conséquent, fiscal seront pénalisées par le plafonnement du produit de la taxe professionnelle.
Les grandes entreprises seront favorisées au détriment des PME. Celles-ci, en effet, seront les grandes perdantes de ce dispositif, car les entreprises échappant au plafonnement de la taxe professionnelle à la valeur ajoutée sont principalement des PME.
Les conséquences économiques de la réforme sont mal mesurées.
Tout d'abord - et cela a déjà été souligné -, le nouveau dispositif pourrait inciter, aux fins d'évasion fiscale, à la précarisation des postes de travail, à travers un recours accru à l'intérim notamment.
Un autre risque tient à la possibilité de nomadisation accrue des bases taxables, puisqu'il sera dorénavant dans l'intérêt des grandes entreprises d'adopter des stratégies d'optimisation fiscale, notamment en répartissant à discrétion la valeur ajoutée entre les différentes filiales d'un même groupe consolidé. Un éminent consultant en finances locales, M. Michel Klopfer, l'a rappelé récemment dans la presse. Selon lui, ce type de comportement serait de nature à attiser la concurrence fiscale entre les territoires.
Les collectivités locales sont ainsi condamnées à une impasse financière.
Le principe constitutionnel d'autonomie financière est foulé aux pieds. L'atteinte à l'autonomie fiscale des collectivités est manifeste car, de facto, le mécanisme du plafonnement limite strictement la marge de manoeuvre des élus locaux.
Rappelons à cet effet que la taxe professionnelle représente la principale marge de manoeuvre des collectivités sur le plan de la fiscalité directe locale : 24 milliards d'euros en 2005, soit environ la moitié des recettes de la fiscalité directe locale.
Elle constitue donc un levier indispensable pour les collectivités dans un contexte de montée en charge des transferts de compétences et d'incertitude quant à l'évolution de leurs recettes.
De manière générale, la réforme condamne les collectivités à la modération fiscale et les impacts escomptés sont redoutables. Toute hausse de taux sera, à l'avenir, sanctionnée, que les taux appliqués soient élevés ou bas, que l'on ait ou non bien géré sa collectivité...
L'intercommunalité est stoppée net dans son élan. En effet, les intercommunalités, en particulier les groupements ayant un régime de taxe professionnelle unique, TPU, subiront de pleins fouets les effets de cette réforme. Une étude de la DGCL souligne d'ailleurs que de nombreux groupements à TPU ont déjà fait jouer leur possibilité de mettre en place une fiscalité mixte.
Inévitablement, cette réforme aura un effet inflationniste sur la fiscalité locale. Cet effet inéluctable est loin de l'objectif recherché ! Les collectivités devront, sans nul doute, financer cette perte de recettes par une augmentation de la pression fiscale sur les ménages et les entreprises non plafonnées. Or chacun reconnaît le caractère injuste des impôts ménages, reposant sur des bases obsolètes et injustes.
Les collectivités se retrouvent ainsi enferrées dans une logique d'accroissement de l'injustice du système fiscal français.
Enfin - et ce n'est pas négligeable ! -, cette réforme a un coût élevé pour les finances de l'État. Ce dernier, qui est déjà le premier contribuable local, verra sa contribution à la taxe professionnelle encore augmentée. Le coût du rattrapage 1995 - 2004 s'élève en effet à 1, 3 milliard d'euros. L'État impécunieux peut-il vraiment se permettre de telles largesses ?
Pour toutes ces raisons, il est essentiel de supprimer cette réforme, inique et dangereuse pour l'équilibre du système financier local.