Intervention de Christian Redon-Sarrazy

Réunion du 13 juillet 2023 à 10h30
Objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires — Vote sur l'ensemble

Photo de Christian Redon-SarrazyChristian Redon-Sarrazy :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis deux ans, le Sénat s’est particulièrement investi pour répondre aux préoccupations des élus locaux concernant la mise en œuvre de l’objectif de zéro artificialisation nette, imposé par la loi Climat et résilience d’août 2021.

La difficile articulation des objectifs de sobriété foncière avec le développement des territoires suscite de nombreuses craintes, notamment dans les zones rurales, qui redoutent d’être freinées dans leurs projets de développement.

Quatre axes principaux cristallisaient leurs inquiétudes : les outils permettant de respecter le calendrier imposé et de freiner les projets très consommateurs d’espaces ; la juste répartition de l’effort de réduction de l’artificialisation entre territoires ; l’association des communes à l’élaboration des schémas d’aménagement régionaux ; enfin, la place des grands projets dans le décompte global.

Le texte porté et adopté par le Sénat le 16 mars dernier a trouvé une issue favorable lors de la commission mixte paritaire qui s’est tenue le 6 juillet dernier, après plusieurs heures de discussion entre les deux assemblées et le Gouvernement, preuve que les arbitrages n’avaient rien d’évident.

Le Sénat a néanmoins tenu bon pour faire entendre la voix des territoires et répondre aux besoins de clarification et d’appui des élus locaux.

Durant les négociations de ces derniers mois, le groupe socialiste s’est attaché à rétablir l’équité entre les territoires, à mieux faire respecter les particularités et les contraintes locales et à ramener l’apaisement dans la mise en œuvre de cette réforme d’ampleur et structurante pour l’avenir de nos territoires.

Cette proposition de loi comporte quatre avancées majeures.

En premier lieu, afin de redonner du temps aux collectivités pour engager cette réforme et permettre aux citoyens d’en mieux comprendre les enjeux, nous avions souhaité le report des dates d’entrée en vigueur des Sraddet et des autres documents d’urbanisme.

Nous avons pu repousser l’entrée en vigueur du Sraddet jusqu’au 22 novembre 2024, soit neuf mois supplémentaires de concertation. Les Scot devront être mis en conformité au plus tard en février 2027 et les PLU et les cartes communales en février 2028.

En second lieu, conformément à la proposition initiale du Sénat, le dialogue territorial sera renforcé par l’entremise d’une conférence régionale de gouvernance du ZAN, qui restera principalement composée d’élus locaux et régionaux ; ONG et associations seront consultées au titre des personnes publiques associées.

Point particulièrement sensible, la garantie rurale d’un hectare, qui doit donner à toutes les petites communes des perspectives de développement, a été préservée et étendue. Ainsi, aucune commune n’en sera exclue, qu’elle soit couverte ou non par un document d’urbanisme, sans condition de densité. Pour les communes soumises au règlement national d’urbanisme (RNU), la loi exige seulement qu’elles approuvent ou prescrivent un PLU ou une carte communale avant le 22 août 2026.

Enfin, dernier sujet particulièrement important, nous pouvons compter sur un forfait national d’artificialisation de 10 000 hectares, mutualisé entre les régions couvertes par un Sraddet.

Si la mise en place de ce compté à part pour les projets d’intérêt national était acquise, l’identification de ces projets et la mutualisation de la consommation d’espace en résultant ont suscité davantage de débats. In fine, le dialogue entre le président du conseil régional, la conférence régionale de gouvernance et l’État pour identifier les projets d’envergure nationale devrait prévaloir ; mais si besoin, la commission de concertation arbitrera. En cas de dépassement du forfait national de 10 000 hectares, le surplus de consommation ne pourra en aucun cas être imputé sur l’enveloppe des territoires.

Parallèlement à l’examen de ce texte au Parlement, les négociations se sont poursuivies avec le Gouvernement, notamment au travers de la présentation et de la mise en consultation, le 13 juin dernier, de deux projets de décrets : l’un, sur la nomenclature du ZAN ; l’autre, sur son application par les Sraddet.

Nous avons rappelé que l’intention du législateur de la loi Climat et résilience était très claire : la trajectoire permettant d’aboutir aux objectifs du ZAN ainsi que leur déclinaison territoriale figurent au titre des objectifs du Sraddet, et donc dans un rapport de prise en compte.

Or, en publiant le décret n° 2022-763, le Gouvernement avait contourné cette intention en prévoyant qu’en matière de lutte contre l’artificialisation des sols le fascicule du Sraddet devait comprendre des règles territorialisées avec des cibles chiffrées.

Nous nous sommes toujours opposés à cette logique verticale, estimant que le Sraddet devait demeurer un document stratégique, et non prescriptif. Nous avons trouvé un accord avec le Gouvernement sur ce point : le caractère obligatoire des cibles chiffrées formulé dans le décret de juin dernier a été supprimé, redonnant ainsi aux régions de la souplesse dans la territorialisation de leurs objectifs.

Nous ne pouvons que saluer tous ces efforts de négociation, qui ont permis d’aboutir à un texte cohérent. Nous espérons qu’il permettra une mise en œuvre apaisée du ZAN et respectueuse des particularités locales.

Deux sujets restent cependant encore en suspens : la question de l’accompagnement des élus et celle du financement. Il faudra en effet renforcer l’ingénierie, prévoir des adaptations fiscales, aider les élus à identifier et à réhabiliter les effacements de friches. Depuis plusieurs années, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain fait des propositions lors de l’examen du budget.

Conscients que l’élaboration d’une carte communale peut être coûteuse pour une petite commune, nous demanderons à nouveau une ligne budgétaire dédiée et un renforcement de l’accompagnement technique. Nous y ajouterons des demandes d’aides supplémentaires à la rénovation du bâti ancien des communes rurales. C’est un point auquel nous tenons tout particulièrement, qui s’inscrit totalement dans les objectifs de sobriété foncière, sans pour autant compromettre le développement des territoires.

Si les débats ont été parfois vifs, nous sommes satisfaits d’avoir pu aboutir à un texte de compromis équilibré. Nous voterons donc naturellement en faveur des conclusions de la commission mixte paritaire.

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