Intervention de Cécile Cukierman

Réunion du 13 juillet 2023 à 10h30
Objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires — Vote sur l'ensemble

Photo de Cécile CukiermanCécile Cukierman :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre volonté commune, ici au Sénat, était de clarifier les objectifs du ZAN, en facilitant leur mise en œuvre, sans en faire une entrave supplémentaire à la libre administration des collectivités territoriales.

Il fallait garantir aux élus une meilleure prise en compte des déséquilibres existants, ce que le mode de calcul des objectifs du ZAN ne permettait pas initialement.

Il fallait veiller à ne pas fragiliser le territoire ni faire comme si l’aménagement actuel du territoire était parfait, alors que des déséquilibres flagrants pénalisent nos concitoyens et leurs élus.

Il fallait aussi agir clairement en faveur de la transition écologique, pour garantir la pérennité des espaces naturels, agricoles et forestiers, dont nous ne pourrons nous passer.

Il y a urgence à agir pour la perméabilité des sols, pour les nappes phréatiques, pour la biodiversité, et contre le réchauffement climatique, dont les effets se font de plus en plus sentir.

Cette proposition de loi ne résoudra pas à elle seule la grande question de l’aménagement. Mais nous allons garantir un droit à l’hectare, et c’est important.

Cependant, madame la ministre, sans moyens supplémentaires pour traiter les friches et installer de nouveaux services publics, vous aurez beau avoir des droits à construire, sans un rééquilibrage des investissements réalisés sur nos territoires en matière de logement, d’infrastructures, d’entreprises, de transports, il ne se construira rien !

Je le relevais en première lecture : selon le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), 67 % des intercommunalités déclarent avoir déjà refusé des projets d’implantation ou subi des déménagements d’entreprises par manque de foncier.

L’enjeu de rapprocher le consommateur du producteur, le salarié de son lieu de travail, de mieux aménager pour moins polluer, demeure. L’enjeu de la transition écologique reste également un impératif, notamment pour préserver les sols.

Nous avons besoin d’un équilibre entre ces deux enjeux, pour faciliter l’implantation de projets d’intérêt général. Il ne peut y avoir d’écologie sans égalité, sans prise en compte des réalités sociales et géographiques de nos territoires, dans leur diversité.

Le choix que nous faisons doit permettre à toutes et à tous d’habiter une planète vivable et d’y vivre dignement.

Pour cela, nous devons conforter la place des collectivités, faire en sorte qu’elles décident, aménagent et ajustent au lieu de seulement subir.

Parallèlement, il faudra des moyens, notamment au travers du renforcement du fonds vert par un plan d’investissement sans précédent. Mais nous en sommes loin, beaucoup trop loin !

Il se dit même que ce fonds serait amputé des sommes nécessaires à la reconstruction des bâtiments endommagés lors des récentes émeutes… Ce serait alors la double peine pour les collectivités et la transition écologique.

Sans oublier l’enjeu, cher à notre collègue Cédric Vial, du compte 212 du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) : les collectivités ne bénéficient plus du remboursement du FCTVA pour leurs opérations d’aménagement d’espaces naturels et de renaturation des sols.

Nos travaux ne constitueront donc certainement pas l’alpha et l’oméga de la lutte contre le réchauffement climatique. Mais le Sénat a su créer un outil efficace. Nous avons conservé un droit au projet d’un hectare, pour toutes les communes – un droit qui doit demeurer communal, madame la ministre. Nous avons permis d’accueillir de grands projets, non décomptés jusqu’à 10 000 hectares.

Toutes ces décisions seront suivies et débattues par une conférence régionale dont la composition tiendra compte de la diversité des collectivités, avec un droit de proposition pour les régions et un droit de contestation.

Par ailleurs, le droit de préemption et le droit de surseoir à statuer, pour permettre une meilleure maîtrise du foncier, constituent également un progrès et constitueront des pouvoirs supplémentaires pour les élus locaux.

Enfin, nous avons accordé six mois supplémentaires dans la déclinaison des objectifs du ZAN.

Nous devons cependant rester vigilants, notamment sur le décompte des bâtiments agricoles, qui risque d’obérer la capacité à construire de nombre de nos communes.

Quatre défis, intrinsèquement liés, devront être relevés : souveraineté climatique, réindustrialisation, souveraineté alimentaire et logement. Ce texte, qui remet en cause une approche dogmatique au profit d’une approche pragmatique, fera date pour repenser l’aménagement de notre territoire. Mais nous risquons de nous revoir très vite pour aborder de nouveau ces enjeux…

Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera ce texte.

Pour finir, je souhaite saluer le travail de notre présidente et de notre rapporteur. Ils nous ont permis d’aboutir à un consensus et nous ont tirés vers le haut, sans niveler et en respectant toutes nos sensibilités. Dans une République où le débat politique est parfois si fragilisé, madame la ministre, cette méthode de travail doit nous aider à repenser la politique française. De cela, je tiens à remercier très sincèrement notre présidente.

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