Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, seul pays de l’Union européenne à disposer d’un modèle d’armée complet, la France est engagée depuis de nombreuses années dans la lutte contre les groupes terroristes, que ce soit en Afrique, au Levant ou en Asie centrale.
Plus qu’aucun de nos partenaires, nous connaissons le prix de la souveraineté et celui du sang. Je veux rendre hommage à toutes celles et à tous ceux qui ont donné leur vie pour la France, à ceux qui ont été blessés, ainsi qu’à l’ensemble de nos forces. Leur engagement et leur professionnalisme nous permettent d’être libres.
La guerre est de retour sur notre continent. Autant que nous le pouvons, nous devons continuer de soutenir l’Ukraine, qui se bat pour sa survie, pour l’Europe et pour la liberté. Ce soutien ne doit cependant pas obérer la montée en puissance de nos capacités.
La commission, sous la conduite de son président, a veillé à maintenir ce chemin de crête. Il est étroit, mais il est incontournable. Jusqu’en 2030, les besoins de nos armées s’élèvent à plus de 400 milliards d’euros. La commission a fait le choix de lisser davantage l’augmentation du budget de la défense afin de crédibiliser cette hausse.
Un fonds européen destiné à l’industrie de la recherche dans le domaine militaire a vu le jour. D’un montant de 7 milliards d’euros pour la période 2021-2027, ce fonds démontre la prise de conscience unanime de la nécessité d’agir solidairement pour la défense de notre continent. Nous devons pouvoir faire face au réarmement, qui est non seulement français, mais aussi européen et international.
Nos entreprises doivent être à la hauteur de ces enjeux et prêtes à répondre à la demande. Dans mon département, cela va des petites entreprises, comme EM2 à Ancenis – une des très rares entreprises spécialisées dans les emballages d’obus, qui fait face actuellement à une demande exponentielle, voire faramineuse, en raison de la guerre en Ukraine, ce qui témoigne de la gravité de la situation –, aux grandes entreprises, comme Naval Group et les Chantiers de l’Atlantique, qui seront chargés de construire d’ici à 2038 un porte-avions à Saint-Nazaire pour un budget supérieur à 5 milliards d’euros.
À ce sujet, j’appelle votre attention, monsieur le ministre, car un véritable défi doit être relevé. Une part significative des travaux à Saint-Nazaire sont réalisés par des sous-traitants étrangers pour un coût salarial moins élevé, ce qui nous interpelle. Nous devons d’ores et déjà former du personnel qualifié capable d’assumer la construction du futur porte-avions.
L’État doit être au rendez-vous en matière d’éducation et de formation professionnelle, mais également pour accompagner les petites et moyennes entreprises, qui devront investir pour absorber une demande croissante. La visibilité dans les programmes à venir est essentielle, si nous voulons des acteurs français capables de répondre à des besoins complexes et variés en matière de défense. Leur contribution à la sécurité nationale, européenne et internationale est inestimable.
Notre engagement dans la défense et la sécurité est non seulement un impératif stratégique, mais aussi l’occasion de renforcer notre industrie, de créer des emplois et de stimuler l’innovation.
Nos entreprises sont un atout pour l’économie de nos territoires. Elles constituent une source d’expertise technologique de premier plan et une voie de développement qui contribue non seulement à notre sécurité, mais aussi à notre prospérité.
La dissuasion nucléaire doit rester la clé de voûte de notre stratégie de défense. Il nous faut absolument préserver cet héritage du général de Gaulle, qui a permis à la France d’être libre. Pour demeurer crédibles, nous devons veiller à l’entretien et au développement de nos vecteurs. Cela représente un coût très élevé, mais c’est le prix de notre liberté – il n’est donc pas négociable.
Nos forces conventionnelles doivent également être préparées à être engagées dans des conflits de haute intensité. Contrairement à Poutine, nous ne voyons pas nos soldats comme de la chair à canon. Nous les considérons comme des techniciens très efficaces qui doivent pouvoir servir en bénéficiant du meilleur matériel.
Le projet de LPM prévoit donc pour les années à venir une montée en gamme. La France s’apprête ainsi à moderniser ses équipements, en privilégiant la qualité sur la quantité. Les dernières technologies sont, certes, plus onéreuses, mais elles permettent une précision et une discrétion pouvant faire la différence.
Aujourd’hui comme hier, la patrie a besoin de femmes et d’hommes pour la défendre. Les effectifs de nos armées devront être portés à 275 000 postes en équivalent temps plein (ETP) en 2030. Pour les appuyer, mais aussi pour faire vivre le lien armées-Nation, la programmation prévoit d’accroître le nombre de réservistes à 80 000 à l’horizon 2030. Nous approuvons cette orientation.
Afin de parvenir à nos objectifs, nous avons également besoin de renforcer notre base industrielle et technologique de défense, que j’évoquais tout à l’heure. Le texte simplifie la passation de marchés et adapte les enquêtes de coûts. Plusieurs dispositions ont également pour objet de permettre à la France de disposer des matériels nécessaires à une confrontation. La création d’un livret d’épargne souveraineté est à cet égard pertinente.
Mes chers collègues, l’invasion de l’Ukraine par la Russie marque le début d’une nouvelle ère. D’autres conflits de haute intensité pourraient éclater à l’avenir, impliquant la France ou ses alliés. La guerre est toujours une tragédie. Il est de notre devoir de préparer au mieux notre pays à cette triste éventualité.
Vous connaissez les mots de Clemenceau : « il faut savoir ce que l’on veut ; quand on le sait, il faut avoir le courage de le dire ; quand on le dit, il faut avoir le courage de le faire ». Nous avons dit ce que nous voulions : à nous d’avoir le courage de le faire !