Intervention de Bernard Jomier

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 24 septembre 2020 à 10h00
Audition de M. Olivier Véran ministre des solidarités et de la santé

Photo de Bernard JomierBernard Jomier, rapporteur :

Votre stratégie consiste à maintenir la circulation du virus à un niveau tel que les activités de soins usuelles puissent se poursuivre. Cela passe par l'augmentation des moyens hospitaliers et vous avez cité une progression jusqu'à 14 000 lits de réanimation.

Votre stratégie sur les masques, les gestes barrières et la distanciation physique se montre relativement efficace : la reprise de l'augmentation du virus n'a pas la même cinétique qu'au printemps.

En revanche, la stratégie scientifique qui consiste à tester, tracer, isoler est dysfonctionnelle. Le constat est partagé et documenté. Les délais pour les tests dépassent celui de la contagiosité, ce qui empêche la rupture des chaînes de transmission. La Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) observe, grâce aux traçages, que 80 % des personnes infectées n'ont pas été identifiées comme cas contacts. Quant à l'isolement, aucune solution n'est proposée pour les personnes en habitat collectif et communautaire.

Ce dysfonctionnement est pour une large part responsable de la reprise de la circulation du virus. Comment en est-on arrivé là alors qu'il n'y a plus de problème de tests en termes quantitatifs ? La période estivale aurait pourtant dû permettre d'affiner la mise en oeuvre de votre stratégie.

Sibeth Ndiaye nous a rappelé combien la société attendait de la transparence et de l'horizontalité. Hier, vous avez annoncé des décisions sans aucune concertation avec les acteurs des territoires concernés, qu'il s'agisse des élus locaux, des acteurs de santé, de ceux du secteur médico-social. Pourquoi ne pas les avoir consultés en amont ? Comment mettez-vous en oeuvre les concepts de transparence et d'horizontalité dans le processus d'élaboration de vos décisions ?

Au cours des auditions, beaucoup ont mis en avant le rôle du couple préfet-maire. Désormais, on a l'impression que le préfet donne des ordres aux maires, le ministre siégeant à l'échelon supérieur. Si les réponses autoritaires étaient les plus efficaces du monde, nous pourrions entendre ce discours, même en démocratie. En l'occurrence, cela risque d'avoir des conséquences sur l'efficacité des décisions adoptées.

Au mois de juillet, les acteurs de première ligne que nous avons auditionnés ont manifesté de la colère et du ressentiment à l'encontre des autorités publiques. Il s'agit d'acteurs parfaitement insérés dans notre société, pharmaciens, médecins, infirmières, aides à domicile, professionnels du grand âge. Ils nous ont tous dit qu'on ne les avait pas respectés, les autorités refusant de prononcer le mot de « pénurie » quand ils manquaient de matériel. Cela a largement contribué à rompre le lien de confiance entre la population et les pouvoirs publics, rupture extrêmement préjudiciable à la lutte contre l'épidémie dans notre pays.

Dans quelle mesure cette rupture du lien de confiance vous préoccupe-t-elle ? À quelles valeurs vous référerez-vous pour que les autorités de santé, les institutions politiques et la population fassent bloc contre l'épidémie ?

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