Intervention de Guy Fischer

Réunion du 5 juin 2008 à 9h30
Modernisation du marché du travail — Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

On notera, tout de même, l’évidente contradiction entre cette mesure et les propos du Président de la République, qui déclare chaque jour vouloir augmenter le pouvoir d’achat des Français et ne cesse d’annoncer, avec de faux accents gaulliens, la généralisation du droit à l’intéressement. Car demain, les salariés embauchés sous contrat de mission n’auront comme seul remerciement de leur parfaite mobilisation que le droit d’aller grossir la file des demandeurs d’emploi. Et ne doutez pas qu’entre une prime d’intéressement et le maintien de leur emploi, le choix sera simple. La prime annoncée ne saura jamais compenser la perte de l’emploi.

De surcroît, les débats relatifs à l’offre valable d’emploi, qui se dérouleront ce mois-ci, ne sont pas pour nous rassurer. On voit bien comment, progressivement, vous transformez notre droit, passant du droit au maintien de l’emploi et à la protection du droit à travailler à celui d’employabilité et de flexibilité, qui se limite à replacer le demandeur d’emploi dans un parcours professionnel, quitte à méconnaître ses légitimes attentes, notamment en termes d’adéquation entre le travail proposé et les diplômes obtenus ou les expériences passées.

La qualité de ce qui reste du service public de l’emploi, après la fusion des ASSEDIC et de l’ANPE, s’analysera demain seulement sous l’angle du chiffre, et non plus sous celui de la qualité du reclassement proposé. Ce reclassement sera d’ailleurs de plus en plus le fait de sociétés privées, comme Ingeus.

Que dire du contrat de portage, qui conduit votre gouvernement à l’apothéose de l’individualisation des droits et du libéralisme économique ? Demain, ni l’État ni l’employeur n’auront de responsabilité sociale à l’égard des salariés ainsi recrutés. Il leur appartiendra de rechercher une clientèle, de leur proposer une offre de service, une contrepartie financière, qui intégrera la rémunération de la société de portage, dont le rôle est, dans cette relation triangulaire, pourtant bien limité.

Mais vous poussez très loin la responsabilité du salarié sur son avenir social, puisque vous faites peser sur lui seul l’organisation de son travail et le montant de sa rémunération.

Autant dire que le MEDEF, qui rêve d’une France débarrassée du code du travail et d’une relation entre l’employeur et l’employé régie par la seule relation contractuelle, doit applaudir des deux mains.

Je regrette, par ailleurs, que votre majorité, qui se prononce chaque jour pour le droit à travailler plus, ait refusé d’adopter nos amendements visant à préciser que la forme normale du contrat de travail est le CDI à temps plein. Nous offrions ainsi à votre gouvernement la possibilité de mettre en œuvre la fameuse reconnaissance du travail des salariés. Et pourtant, vous vous y êtes opposés.

On comprend, dès lors, que le fameux droit à travailler plus pour gagner plus n’est, en fait, qu’une obligation de travailler plus, si l’employeur l’exige. Il y a entre vos propos et vos agissements des écarts considérables.

Madame la secrétaire d’État, les sénatrices et sénateurs communistes voteront contre ce projet de loi, ce qui ne vous surprendra pas.

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