Intervention de Dominique Braye

Réunion du 19 mai 2010 à 14h30
Sociétés publiques locales — Articles additionnels après l'article 2

Photo de Dominique BrayeDominique Braye :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la présente proposition de loi, qui vise à doter les collectivités locales d’un nouvel outil d’intervention pour réaliser des « prestations intégrées », prévoit la création de SPL et le renforcement des SPLA créées par la loi de 2006 portant engagement national pour le logement. Comme vient de le souligner Thierry Repentin, cette proposition de loi, telle qu’elle est actuellement rédigée, pose de réelles difficultés dans le domaine du logement social, la construction et la gestion de logements sociaux entrant de fait dans le champ d’activité potentielle de ces structures.

Tout d’abord, la proposition de loi introduit une inégalité de traitement entre acteurs ayant les mêmes missions. Si les SPL et les SPLA peuvent intervenir en tant qu’opérateurs en matière de logement social, le principe d’égalité de traitement impose qu’elles se voient appliquer les mêmes obligations que celles qui pèsent sur les organismes d’HLM, les SEM et les organismes à but non lucratif titulaires de l’agrément « maîtrise d’ouvrage » ou de l’agrément « intermédiation locative et gestion locative sociale ».

Ensuite, la proposition de loi est contradictoire avec les orientations de la politique gouvernementale tendant à concentrer les acteurs du logement social. Tous les efforts en direction du monde HLM – efforts ô combien importants ! même s’ils donnent peu de résultats, j’en conviens – visent aujourd’hui à encourager et à favoriser la coopération et le regroupement des organismes d’HLM, donc la réduction du nombre d’intervenants – on en compte plus de neuf cents à ce jour –, afin de promouvoir la mutualisation des moyens et de dégager des fonds propres. À cet égard, je compte sur le président de l’Union sociale pour l’habitat pour œuvrer dans ce sens et pour accroître la performance des bailleurs sociaux.

Ainsi convient-il de prévoir, dès la création des SPL – et le renforcement des SPLA –, que l’intervention de ce nouvel acteur dans le champ du logement social devra être également soumise à la délivrance d’un agrément, garantissant la capacité à l’encadrer, dans ce domaine particulièrement sensible, vous en conviendrez, et qui met en jeu d’importants crédits d’État.

Je tiens à rappeler à M. le président de la commission des lois, à M. le rapporteur ainsi qu’à M. le secrétaire d’État que le Conseil de modernisation des politiques publiques a demandé au ministre en charge du logement de procéder à la restructuration du réseau des organismes de logement social pour aller vers la constitution de groupes structurés et professionnels, ce qui n’est pas le cas actuellement.

Or, force est de le reconnaître, d’un point de vue politique il est difficile de forcer le monde HLM à se restructurer alors que, en parallèle, on permet l’émergence, sans aucun contrôle, d’opérateurs potentiellement concurrents. Les messages adressés à la profession doivent être cohérents. L’argument du verrou réglementaire n’est inversement pas crédible, car les bailleurs sociaux, vous le savez, anticiperont immédiatement en étendant les financements des prêts locatifs à usage social, les PLUS, et des prêts locatifs aidés d’intégration, les PLAI, aux SPL.

D’un point de vue juridique, les SPL pourront avoir accès aux financements des prêts locatifs sociaux, les PLS, lesquels sont ouverts, je le rappelle, à tous les opérateurs. Leur actionnariat étant public, il est très probable que si demain une SPL intentait un recours pour obtenir le financement d’une opération en logement social – PLUS ou PLAI –, elle obtiendrait gain de cause en s’appuyant sur le double argumentaire suivant : d’abord, la directive « Services » impose aux États membres d’accorder les mêmes avantages à des opérateurs réalisant des missions de services publics identiques ; ensuite, son statut est à mi-chemin entre celui des offices et celui des sociétés d’économie mixte et impose logiquement qu’elle bénéficie des mêmes droits.

Selon nous, il y a là tout l’arsenal juridique pour faire condamner l’État, monsieur le secrétaire d’État, en vertu de normes supérieures au décret que vous ne manquerez pas de prendre, à ouvrir les financements PLUS et PLAI aux SPL.

Aussi, pour vous protéger, monsieur le secrétaire d’État, pour protéger l’État et ceux qui vont voter cette proposition de loi, il nous semble impérieux que les SPL et les SPLA qui seraient amenées à intervenir dans le domaine du logement social soient soumises à l’agrément du ministre du logement.

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