Cet article 10 est en effet le symbole de la tuyauterie des lois de financement de la sécurité sociale. Pour le comprendre, il faut le lire en miroir de l'article 32 du projet de loi de finances, qui modifie la part de TVA affectée à la sécurité sociale.
En effet, le Gouvernement a pris l'habitude – ce n'est pas le premier ! – d'opérer des transferts réguliers entre les branches afin de redistribuer les surplus à celles qui sont déficitaires. Mais les conséquences de ces transferts sur le solde de ces branches manquent cruellement de lisibilité.
En plus des transferts réguliers, les réaffectations d'impôts et de taxes par l'État ou les modifications de taux de cotisation correspondent de facto à des transferts entre branches.
Malgré l'importance des montants concernés, ces mouvements, fortement variables d'une année à l'autre, ne font pas l'objet d'un rapport d'évaluation sur leur efficacité, notamment pour réduire les écarts de solde entre branches. En particulier, l'impact de ces changements sur les soldes des différentes branches n'est pas présenté dans les lois de financement de la sécurité sociale.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 poursuit les mesures de transferts financiers résultant de la réforme des retraites, avec notamment un transfert de 194 millions d'euros de TVA de la branche maladie vers la branche vieillesse.
En outre, l'Unédic contribue au financement des politiques de l'État pour encourager l'emploi. Cet article permet au Gouvernement de réduire par arrêté la compensation par l'Urssaf Caisse nationale à l'Unédic du coût du dispositif de réduction dégressive de cotisations sociales patronales. Et ce dispositif n'est pas borné… On peut d'ailleurs s'interroger sur la constitutionnalité d'une disposition qui ne prévoit aucun plafond en la matière.
L'article 10 annule par ailleurs l'augmentation de 250 millions d'euros des plafonds de compensation par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) aux départements, alors même que ceux-ci ont des besoins importants. Bref, j'arrête l'énumération.
Nous ne voterons pas l'amendement de suppression de nos collègues communistes, mais nous comprenons leur position : il est temps de clarifier ces mécanismes de tuyauterie !