Intervention de Gérard Le Cam

Réunion du 19 mai 2010 à 21h30
Modernisation de l'agriculture et de la pêche — Article 1er

Photo de Gérard Le CamGérard Le Cam :

L’article 1er du projet de loi vise à définir et à mettre en œuvre une politique de l’alimentation. « Enfin ! », a-t-on envie de dire…

Nous avons déposé plusieurs amendements afin d’améliorer le texte. Cependant, même s’ils devaient tous être adoptés, nous sommes bien conscients que cela n’infléchirait pas suffisamment les orientations de l’article 1er.

En effet, même si le Parlement se voit reconnaître un droit de suite, tout dépend de la volonté du Gouvernement de faire une priorité de l’alimentation et de la santé de tous les Français.

Je prendrai un seul exemple à cet égard, qui nous incite à beaucoup de prudence quant aux intentions réelles du Gouvernement : celui de l’aide alimentaire.

Le texte nous laisse assez dubitatifs. Nous craignons que son application n’entraîne une diminution des financements des associations délivrant l’aide alimentaire, au motif qu’elles ne rempliraient pas certains critères.

Cette crainte est renforcée par un contexte budgétaire délétère. Dans le projet de loi de finances pour 2010, les crédits du programme n° 177 « Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables », au sein de la mission « Ville et Logement », regroupant les crédits dédiés au financement des structures d’hébergement d’urgence et d’insertion, sont en diminution par rapport à 2009. Ainsi, en ce qui concerne la prévention de l’exclusion, cette baisse atteint près de 23 %, alors même que les populations visées sont particulièrement exposées au contexte économique difficile que nous connaissons.

Alors que l’INSEE estime que plus de 8 millions de personnes – 13, 2 % de la population – vivent sous le seuil de pauvreté en France, soit avec moins de 880 euros par mois, le taux de fréquentation des lieux de distribution d’aide alimentaire n’a cessé d’augmenter.

Au cours de l’année d’« avant-crise » 2008, les Restos du cœur, fondés par Coluche, ont accueilli 15 % de personnes supplémentaires, notamment des chefs de famille monoparentale et des personnes âgées, mais également beaucoup d’agriculteurs. Ainsi, dans l’Aveyron, les Restos du cœur ont enregistré une affluence record, en hausse de 30 %.

La situation est d’autant plus préoccupante que les associations connaissent de réelles difficultés économiques. Ainsi, Olivier Berthe, le président des Restos du cœur, tenait les propos suivants à l’automne 2009 : « On a bouclé avec un déficit de 5 millions d’euros, et le budget prévisionnel est encore en déficit. »

Il est donc nécessaire de renforcer le Programme européen d’aide aux plus démunis, le PEAD, mais les pouvoirs publics doivent aussi prendre la mesure de la situation et engager des crédits à la hauteur.

Or, face à cette situation dramatique et inacceptable, les pouvoirs publics ont plutôt consacré leur temps et l’argent du contribuable, durant l’automne et l’hiver 2009, à la chasse aux « sans-papiers » dans les locaux des organisations humanitaires.

En effet, ces associations ont dénoncé des interpellations et des descentes qui renforcent le sentiment de peur chez les plus précaires, ainsi que des pressions et des menaces de répression pesant sur les bénévoles, au titre du bien réel « délit de solidarité » !

Nous apprécions que le Gouvernement se préoccupe de la politique de l’alimentation, qui doit être une des missions principales de l’État. Cependant, elle ne doit pas s’inscrire dans la politique du « tout-sécuritaire » et de renforcement des inégalités portée par la majorité.

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