Intervention de Nicolas Sarkozy

Réunion du 14 décembre 2005 à 15h00
Lutte contre le terrorisme — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire :

Chaque fois que nécessaire, la République se défendra contre ceux qui injurient ses principes.

J'ajoute que nous avons découvert un jeune terroriste de l'âge de seize ans qui était chargé de faire passer un certain nombre de candidats au jihad de notre pays vers l'Irak.

La caractéristique des arrestations, c'est le très jeune âge des personnes qui sont concernées. Cela démontre qu'il faut être très sévère à l'endroit des prédicateurs de haine, qui peuvent embrigader des jeunes qui n'ont pas la structure intellectuelle pour se défendre.

Fort de ces constats, j'invite la Haute Assemblée à prendre la mesure des risques potentiels qui planent sur la France, et je la convie, à travers ce projet de loi, à un devoir renforcé de vigilance et de protection.

Certes, notre démocratie est, par nature, un espace perfectible au sein duquel le respect des droits fondamentaux ne se négocie pas. Mais liberté n'est pas synonyme d'imprévoyance, et démocratie n'est pas synonyme de faiblesse. Il faut agir maintenant, car je ne veux pas que nous ayons un jour à prononcer les mots « trop tard ». C'est pourquoi ce projet de loi est examiné en urgence.

Mesdames, messieurs les sénateurs, nous ne partons pas de rien ! Depuis une vingtaine d'années, chaque gouvernement et chaque majorité se sont employés à affûter nos dispositifs de lutte contre le terrorisme en adaptant les moyens, en accentuant les coopérations et en ajustant notre droit à la réalité du temps.

En ce qui concerne les moyens, une meilleure coordination de l'action des services a été mise en place à travers l'unité de coordination de la lutte antiterroriste, l'UCLAT. Des plans spécifiques, au premier rang desquels figure le plan Vigipirate, ont également renforcé nos outils de prévention. Depuis 2002, les effectifs du RAID, de la DST, de la division nationale antiterroriste, de la police judiciaire et des services spécialisés des renseignements généraux ont été renforcés.

S'agissant de la coopération avec les pays alliés, elle n'a jamais cessé de s'approfondir, y compris sur le plan européen.

Bien des choses restent encore à faire sur cette question stratégique, mais l'extradition de Rachid Ramda, que nous avons obtenue le mois dernier, révèle qu'un changement d'esprit et de méthode est à l'oeuvre.

Le renforcement d'Europol, la création d'un véritable parquet européen, la clause de solidarité entre Etats victimes d'un attentat constituent, selon moi, les prochaines étapes indispensables à l'élaboration d'une véritable stratégie commune.

Enfin, pour ce qui est du droit, les textes votés en 1986 ont permis la centralisation et la spécialisation des poursuites et de l'instruction des infractions terroristes. Ils ont aussi créé les possibilités d'un démantèlement judiciaire préventif des réseaux.

La loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, du gouvernement de Lionel Jospin, a pour sa part facilité les fouilles de véhicules, les perquisitions et saisies en enquête préliminaire. Elle a aussi permis l'utilisation des moyens militaires de déchiffrement et le recours à la visioconférence dans les procédures judiciaires. Elle a par ailleurs modifié diverses dispositions du code pénal relatives à la répression du terrorisme.

La loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure a pérennisé ces dispositions, tandis que celle du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a renforcé les moyens d'enquête judiciaire et a créé de nouvelles infractions en matière de terrorisme.

Bref, nous disposons d'instruments juridiques qui ont été conçus pour donner plus de moyens à l'autorité judiciaire, et nous le devons à la gauche comme à la droite : en matière de lutte contre le terrorisme, il y a une continuité de la politique, et il ne saurait d'ailleurs en être autrement.

Mais ces instruments ont une caractéristique qui justifie notre démarche actuelle : ils s'enclenchent davantage après la commission d'un acte terroriste qu'en amont de celui-ci.

Prévenir le terrorisme et non le subir, parer les coups plutôt que panser les plaies, en un mot agir en amont des attentats potentiels en permettant une meilleure collecte des renseignements, c'est tout l'esprit de ce projet de loi. Car ce qu'attendent de nous les Français, c'est que nous les protégions et, pour cela, il faut que nous soyons efficaces avant que l'irréparable se produise.

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