Intervention de Thierry Cozic

Réunion du 22 novembre 2023 à 22h00
Loi de finances de fin de gestion pour 2023 — Vote sur l'ensemble

Photo de Thierry CozicThierry Cozic :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis afin d’examiner la version du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 issue de la commission mixte paritaire.

La nature du texte que nous examinons a profondément changé depuis la révision de la loi organique relative aux lois de finances survenue en 2021. Le projet de loi de finances rectificative de fin d’année était déjà un texte sans grande densité ; la loi organique du 28 décembre 2021 en a fait un texte technique, sans aucune épaisseur politique, ce qui, malheureusement, n’est pas souhaitable tant les besoins sont grands.

Dans une période où la représentation nationale n’a même plus l’occasion de débattre pleinement du budget de la Nation à l’Assemblée nationale, la discussion d’un projet de loi de finances rectificative aurait au moins permis d’aborder certains débats de fond, comme la politique fiscale de notre pays, ou encore le financement de nos collectivités territoriales.

Je me félicite néanmoins qu’un accord ait été trouvé entre les deux chambres. Alors que s’enchaînent les recours à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, il est important de constater que la représentation parlementaire sort de l’examen de ce projet de loi par le haut.

Ce texte budgétaire, premier du genre, ne comporte que des ajustements de crédits pour l’année en cours, sans mesure fiscale nouvelle. Rappelons qu’il ouvre 5, 2 milliards d’euros de crédits dans le champ des dépenses de l’État, dont 2, 1 milliards d’euros pour la mission « Défense ». Ces montants sont compensés par des annulations de crédits de 5, 2 milliards d’euros, notamment dans le champ des dispositifs de soutien aux entreprises, ce qui atteste du caractère inopérant de ces derniers.

Nous tenons à souligner l’importance de l’amendement visant à instaurer un soutien de 15 millions d’euros au Haut-Karabagh et à l’Arménie qui, je le rappelle, est confrontée à un afflux massif de réfugiés sur son territoire.

Il est aussi notable qu’une enveloppe de 20 millions d’euros supplémentaires, destinée à la rénovation des ponts, ait été actée au bénéfice des collectivités territoriales. Il est urgent que l’État se saisisse de cette problématique, qui persiste depuis trop longtemps.

Enfin, je tiens à saluer l’adoption par le Sénat d’un amendement déposé par le rapporteur général tendant à abonder de 30 millions d’euros supplémentaires une enveloppe à destination des associations d’aide alimentaire. Je déplore en revanche que cette somme ait été révisée à la baisse par la commission mixte paritaire, passant de 30 à 20 millions d’euros, soit une réduction de 10 millions d’euros.

Ce point est primordial. En effet, comme vous le savez, les banques alimentaires se retrouvent dans une situation très tendue, en raison de la hausse massive du nombre de personnes demandant de l’aide, couplée à l’augmentation de leurs coûts de fonctionnement qu’entraîne l’inflation. Cette situation est tout à fait préoccupante.

Rien que pour les Restos du cœur, les chiffres donnent le vertige : l’association a déjà accueilli 1, 3 million de personnes en 2023, contre 1, 1 million sur l’ensemble de l’année dernière ; au cours des derniers mois, son budget pour les achats alimentaires ensuite redistribués gratuitement aux bénéficiaires a doublé. Face à cette situation extrêmement complexe, elle a décidé de réduire le nombre de ses bénéficiaires. Selon ses estimations, environ 150 000 personnes devront être éconduites.

Les Restos du cœur s’attendent à servir 170 millions de repas cette année, contre 140 millions en 2022. Malgré l’adoption de l’amendement, l’association, qui assure 35 % de l’aide alimentaire en France avec un budget de fonctionnement de seulement 200 millions d’euros par an, a besoin de 35 millions d’euros supplémentaires pour terminer l’exercice à l’équilibre. Je rappelle que ses ressources proviennent de donateurs particuliers, d’entreprises et d’aides publiques de l’État et de l’Union européenne. C’est dire si les 10 millions d’euros retirés auraient été nécessaires pour nos concitoyens les plus démunis ! Ce coup de rabot est fort malvenu.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, les quelques avancées que nous saluons ne sont pas de nature à emporter notre adhésion au présent texte ; rappelons que, lors de sa discussion en première lecture, le Sénat a rejeté nos amendements relatifs, d’une part, au remboursement de l’acompte lié au filet de sécurité et, d’autre part, à la ponction sur l’Unédic.

Demain, monsieur le ministre, nous commencerons les débats sur le budget pour 2024. J’émets le souhait que les échanges soient à la hauteur des enjeux qu’implique l’urgence de la situation. Soyez assuré que le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain prendra toute sa place dans cette discussion, de manière efficace et constructive.

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