Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Investir pour la France de 2030 » représentent 7, 7 milliards d’euros en 2024, soit un peu plus de 2 % des crédits budgétaires inscrits dans le projet de loi de finances.
En préambule, je rappelle que ces montants font l’objet d’une gestion particulière, laquelle déroge au cadre de droit commun du budget général et réduit la marge de manœuvre dont nous disposons.
En effet, le plan France 2030 est l’héritier du programme d’investissements d’avenir lancé à la suite du rapport Juppé-Rocard de 2010. §Il s’agissait alors de sanctuariser une partie des crédits budgétaires, afin de s’assurer qu’ils soient dirigés vers des investissements pluriannuels de long terme ayant pour double objectif de redresser la croissance potentielle de l’économie française et d’accélérer sa transition vers des modes de production plus durables.
Aussi, les crédits de cette mission n’ont pas vocation à être directement versés aux porteurs de projet soutenus par les programmes d’investissements. Ils doivent alimenter le compte des opérateurs publics qui sont les interlocuteurs directs des porteurs de projet et qui sont gestionnaires du décaissement progressif des aides financées par les programmes d’investissements.
Le choix de ce circuit budgétaire particulier emporte des conséquences multiples. Il a notamment pour effet de réduire la marge de manœuvre dont dispose le Parlement, étant donné que les crédits versés correspondent au financement de projets en faveur desquels l’État s’est déjà engagé depuis longtemps, parfois depuis plusieurs années.
J’aurai l’occasion d’y revenir : ce schéma de financement rend inopérants la plupart des amendements de crédits déposés sur les programmes de la mission. En effet, il est nécessaire que les opérateurs honorent les engagements pris auprès des bénéficiaires finaux.
Ce cadre budgétaire particulier se justifie par la volonté de préserver les investissements publics face au risque, bien documenté, de préférence pour le court terme. En revanche, il suppose une vigilance particulière de notre part : nous devons nous assurer que le plan finance bien des dépenses de long terme, exigeant l’intervention de cet instrument extrabudgétaire.
Mes chers collègues, pour ce qui est du projet de loi de finances pour 2024, l’examen de la mission « Investir pour la France de 2030 » nous donnera également l’occasion de débattre d’un dispositif de conditionnalité écologique pour les bénéficiaires du plan.
Dans le texte qu’il nous a transmis après activation de l’article 49.3 de la Constitution, le Gouvernement a fait le choix de retenir un article 54 bis, adopté, malgré son avis défavorable, par l’Assemblée nationale.
Fruit d’un amendement de notre collègue députée Eva Sas, cet article subordonne l’octroi des aides du plan France 2030 au respect de l’obligation de publication d’un bilan carbone pour certaines entreprises, bilan créé par la loi Grenelle II du 12 juillet 2010.
Saisie de ce dispositif de conditionnalité, la commission des finances s’est prononcée favorablement quant à son principe. Pour autant, nous vous présenterons deux amendements visant à aménager la rédaction proposée pour s’assurer qu’elle n’entraînera pas un alourdissement de la charge administrative pesant sur les entreprises.
Le plan France 2030 doit bien sûr rester fidèle à ses buts initiaux, à savoir la contribution à la croissance potentielle et l’accélération de la décarbonation de notre économie.
Cela étant, le financement de la transition écologique est aussi l’un des principaux objectifs du plan et l’adoption de nos amendements permettrait de faire coïncider le dispositif de conditionnalité avec une obligation existante pour les entreprises de plus de 500 employés. La rédaction que nous proposons préserve, partant, la finalité du plan France 2030 tout en contribuant au renforcement de l’effectivité de l’obligation de publication d’un bilan carbone pour les entreprises concernées.
Au bénéfice de ces aménagements, la commission des finances vous propose d’adopter l’article 54 bis et donc le dispositif de conditionnalité retenu par l’Assemblée nationale.