Intervention de Christophe Béchu

Réunion du 4 décembre 2023 à 14h30
Loi de finances pour 2024 — Compte d'affectation spéciale : financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale

Photo de Christophe BéchuChristophe Béchu :

Monsieur le président, mesdames les rapporteures, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, en une heure quarante-deux se sont succédé vingt et une interventions, et je ne dispose, pour vous répondre, que de quatorze minutes et cinquante secondes.

Vous pouvez donc aisément imaginer la frustration qui est la mienne, tout comme j’anticipe celle qui sera la vôtre à l’issue de mon intervention, puisque nombre des questions que vous avez évoquées n’auront pas pu trouver de réponse directe.

Je note néanmoins, dans cet exercice auquel nous venons d’assister, les nombreux avis favorables exprimés et la tonalité positive de l’écrasante majorité des propos, même si quelques-uns des orateurs ont conditionné leur vote en faveur des crédits au sort qui sera réservé à un certain nombre d’amendements.

À défaut d’entrer complètement dans le détail, je souhaite redire ce que recouvre la mission « Écologie, développement et mobilité durables », et insister sur quelques points.

Atténuer nos émissions de gaz à effet de serre ; adapter notre société au dérèglement qui est déjà là, mais aussi à celui qui s’annonce, compte tenu du non-respect des trajectoires fixées dans l’accord de Paris sur le plan mondial ; mettre en œuvre la stratégie nationale pour la biodiversité 2030 (SNB), la première du genre, qui est dotée des moyens nécessaires et s’inscrit dans le cadre européen du règlement sur la restauration de la nature et dans le cadre mondial des prescriptions de la COP15 : voilà le socle sur lequel repose ce budget.

Les crédits de la mission sont en augmentation de 15 %. Sont inscrits, en crédits de paiement, 62 milliards d’euros, quand les autorisations d’engagement progressent de 10 milliards d’euros. Clément Beaune y reviendra pour ce qui concerne le ferroviaire, mais chacun sait que, lorsqu’un plan d’envergure est annoncé, tout commence, la première année, par le lancement d’un certain nombre d’études, ce qui mobilise davantage d’autorisations d’engagement que de crédits de paiement.

Dans ce budget, le fait le plus saillant, signalé par beaucoup d’entre vous, ce sont bien entendu les créations de postes.

Après quelque vingt années de baisses d’effectifs, près de 20 000 suppressions de postes au sein du pôle écologique au sens large, sous tous les gouvernements confondus, y compris ceux qu’ont défendus une partie des orateurs qui sont montés à cette tribune pour donner des leçons et faire comme si tout avait commencé en 2017, nous assistons bien – chose inédite, donc, depuis vingt ans – à des créations de postes.

Après dix-huit années de baisse, nous avons eu une année de pause, puis, cette année, donc, des créations d’emplois, qui ont permis à un certain nombre d’entre vous de se réjouir de manière ciblée – je pense aux propos du rapporteur spécial Vincent Capo-Canellas. Météo-France, le Cerema, d’autres organismes, dont les agences de l’eau et, plus largement, les effectifs concourant au succès de la SNB, à hauteur de 120 postes, ont pu bénéficier de telles créations.

J’en viens aux crédits proprement dits.

Ils visent à assurer notre souveraineté énergétique. Ma collègue Agnès Pannier-Runacher sera présente dans cet hémicycle au moment de l’examen des amendements. Je vous prie de bien vouloir excuser son absence en cet instant : elle est retenue par des réunions qui sont précisément consacrées au nucléaire.

À propos du nucléaire, j’indique qu’il va bénéficier de 1, 4 milliard d’euros de crédits supplémentaires. Au-delà de l’objectif consistant à crédibiliser les lauréats des projets de SMR (Small Modular Reactors, petits réacteurs modulaires), il s’agit, plus largement, d’assurer la relance du nucléaire sur le plan national, au moment où, sur le plan mondial et de façon spectaculaire à l’occasion de la COP28, le monde mesure la nécessité d’utiliser tous les leviers à sa disposition pour décarboner et pour sortir du fossile, non seulement, bien sûr, en accélérant la production d’énergies renouvelables, mais aussi en s’appuyant sur une énergie pilotable.

La stratégie nationale pour la biodiversité, quant à elle, a fait l’objet d’une présentation générale et suscité de nombreux échanges, avec les instances concernées comme avec les ONG. En résultent des moyens et une vision, qui s’inscrivent dans le double cadre, européen et mondial, que j’évoquais voilà quelques instants.

Je le dis sans malice à Christine Lavarde, les crédits consacrés à l’eau ont évidemment un lien direct avec la biodiversité ; on sait en effet combien les milieux aquatiques sont en première ligne face à l’érosion de la biodiversité. De façon plus large, les continuités écologiques nécessitent des moyens et des crédits, de même que la lutte contre la consommation d’intrants et les conséquences qui en découlent.

Décarboner le quotidien est à l’évidence un axe essentiel. Cette ambition s’appuie sur la progression des crédits mobilisés au titre de la rénovation énergétique, ainsi que sur l’augmentation des efforts en direction des mobilités, que détaillera Clément Beaune dans un instant.

Les crédits supplémentaires que nous allouons à la rénovation énergétique vont au-delà d’un simple effort financier : ils accompagnent la refonte de MaPrimeRénov’ dans un contexte de sous-exécution du budget de ce dispositif, 1 milliard d’euros de trésorerie fléchés vers ces aides n’ayant pas été mobilisés au cours de l’année 2023. Dit autrement, les prévisions du Gouvernement quant au niveau des enveloppes que demanderaient nos concitoyens se sont révélées justes.

Le temps est à l’accélération de MaPrimeRénov’, et ce à deux égards ; la refonte du dispositif se double en effet d’un élargissement des conditions d’éligibilité, 400 millions d’euros étant désormais orientés, à partir de l’année prochaine, vers l’accompagnement des bailleurs sociaux.

L’exécution de ce budget sera aussi l’occasion de généraliser l’adoption des budgets verts au sein des collectivités.

J’ai entendu ce matin un certain nombre de critiques – l’outil, en particulier, ne serait pas mûr. L’Association des maires de France en a pourtant adopté le principe, je tiens à le rappeler. Il a fait l’objet d’une validation formelle et ses contours ont été définis. Voilà une méthode qui nous permettra, non pas d’amplifier le verdissement au-delà de ce qui vous a été présenté, mais tout simplement de disposer d’un référentiel commun pour déterminer ce qui est « vert » et ce qui ne l’est pas.

Je regrette que le Sénat ait supprimé la réforme des redevances de l’eau, alors que tous les comités de bassin sans exception attendent des moyens qui sont évidemment indispensables. Je salue l’intervention du rapporteur pour avis Pascal Martin, qui a insisté sur la hausse des crédits alloués à la prévention des risques.

Je connais l’attachement de la Haute Assemblée au fonds Chaleur. Il sera porté à 820 millions d’euros, soit un montant historique représentant une augmentation de crédits de près de 60 %.

Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, je m’attends à ce que, lors de l’examen des amendements, nous ayons maintes fois l’occasion de discuter du fonds vert. Je veux vous dire à quel point je suis ému, touché, honoré de voir certains, ici, exprimer leur souhait d’en modifier les contours, d’en prélever une partie des enveloppes, tant je me souviens de l’accueil timide ou circonspect qu’il avait rencontré ici même.

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