Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, une fois n'est pas coutume : c'est une joie de constater que, cette année, les commissions saisies des crédits de cette mission ont émis un avis favorable à leur adoption ! Sauf coup de théâtre, nous pouvons donc espérer que ces crédits soient enfin votés au Sénat, après plusieurs années de turbulences.
Et pour cause : cette année, de nombreuses raisons justifient que nous votions ce budget. D'abord, son augmentation est significative ; ensuite, il répond aux crises du présent ; enfin, il prépare notre agriculture aux enjeux de demain.
Pour commencer, permettez-moi de revenir un instant sur la croissance historique qui caractérise ce budget. Le montant total de la mission pour 2024 s'établit à 4, 75 milliards d'euros en crédits de paiement. Cela représente une augmentation significative par rapport à 2023 de l'ordre de 22, 8 % : une croissance singulière à deux chiffres qui pourrait donner à ce budget des airs de « quoi qu'il en coûte » agricole – je reprends là les paroles du rapporteur spécial de la commission des finances.
Cette hausse significative est bienvenue, mais encore faut-il s'interroger sur la pertinence de la répartition des crédits de la mission. En l'occurrence, la répartition prévue cette année s'avère pertinente pour deux raisons : d'une part, ce budget permet de répondre aux crises du présent ; d'autre part, il prépare notre agriculture aux défis de demain.
Les conséquences du dérèglement climatique se font d'ores et déjà ressentir. C'est pourquoi l'État doit soutenir nos filières pour qu'elles puissent s'adapter, tout en préservant leur compétitivité. Or les crédits de la mission attestent justement d'un soutien significatif de la part du ministère envers les acteurs concernés.
Pour la deuxième année consécutive, les effectifs de l'Office national des forêts (ONF) sont préservés. Par ailleurs, le présent budget engage des moyens supplémentaires dans le cadre de la création de la nouvelle mission d'intérêt général relative à l'adaptation au changement climatique et à la défense de la forêt contre l'incendie.
Je tiens également à souligner deux avancées majeures pour les acteurs forestiers, obtenues par nos collègues députés : la réévaluation du budget consacré à la défense des forêts contre les incendies et l'augmentation des effectifs du Centre national de la propriété forestière, établissement public qui gère les forêts privées. La hausse initiale de 5 ETP est désormais portée à 16 ETP, ce qui permettra à cet établissement d'assumer les nouvelles missions qui lui ont été conférées par la loi du 10 juillet 2023. Cette demande forte des acteurs a été entendue, je pense que nous pouvons nous en réjouir.
Mes chers collègues, lorsque j'évoque le soutien aux filières, je pense également à l'agriculture biologique. Au-delà des fonds de crise et d'urgence déployés, la filière bio doit aujourd'hui faire face à des évolutions de marché qui menacent la dynamique d'augmentation de consommation observée ces dernières années. Or les producteurs décidant de s'engager dans la conversion doivent pouvoir trouver des débouchés.
Notez que 10 millions d'euros supplémentaires permettront de porter le montant total du fonds Avenir Bio à 18 millions d'euros, ce qui assurera le financement d'actions de communication pour inverser la tendance. N'oublions pas les 825 millions d'euros d'ouverture de crédits, votés dans la récente loi de finances de fin de gestion, qui permettront d'aider les filières en matière d'arrachage ou de vaccination contre l'influenza aviaire.
Voilà autant d'exemples qui viennent confirmer que ce budget apporte des réponses adaptées aux crises actuelles. Mais loin de se limiter au présent, ce budget s'intéresse également à l'avenir. Comme le disait le philosophe dijonnais Maurice Blondel, « l'avenir ne se prévoit pas, il se prépare ».
Tel est, je le pense, l'état d'esprit qui a présidé à l'élaboration du présent budget, qui adapte notre agriculture aux enjeux de demain et justifie l'effort significatif dont témoigne cette mission.
Comment ? D'abord, en accompagnant les acteurs dans la transition écologique. Les moyens dédiés à la planification écologique seront augmentés à hauteur de 1, 3 milliard d'euros dès 2024.
Préparer notre agriculture pour l'avenir exige également que nous puissions assurer notre souveraineté alimentaire, qui va de pair avec la sécurité alimentaire. C'est la raison pour laquelle ce budget renforce la prévention des risques sanitaires, tant dans le domaine végétal qu'animal.
Au titre du programme 206, plus de 900 millions d'euros seront mobilisés pour prévenir et lutter contre les risques sanitaires dans les 145 000 exploitations d'élevage et les 59 000 exploitations viticoles de notre pays. Cela représente une hausse des crédits de 38 % par rapport à 2023, qui s'explique par la volonté de favoriser le changement des pratiques afin de préserver la santé publique et l'environnement.
À ce sujet, la France s'engage dans la réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires, notamment au travers du plan Écophyto 2030. Notre pays doit continuer à rechercher des solutions de substitution tout en accompagnant les agriculteurs.
Construire le modèle agricole de demain, c'est également miser sur les jeunes, l'enseignement et le renouvellement des générations. Notre groupe se réjouit donc que le ministère place l'enseignement technique agricole au cœur de son action.
Avec la nouvelle allocation dont bénéficieront les élèves stagiaires de la voie professionnelle et la mise en place du pacte enseignant, nous pourrons mieux rémunérer les professeurs et les conseillers principaux d'éducation, tout en rémunérant les personnels volontaires pour l'exécution de missions complémentaires.
De plus, l'enveloppe de 1, 3 milliard d'euros consacrée à la planification écologique constitue un virage important. Elle permettra de financer des politiques publiques très concrètes, comme la replantation de 50 000 kilomètres linéaires de haies d'ici 2030 dans le cadre du pacte en faveur des haies. Il s'agit d'un plan essentiel qui rappelle le rôle central de nos agriculteurs et l'intérêt que présentent les haies pour la préservation de la biodiversité, la rétention de l'eau et la lutte contre les inondations. À bien regarder les évolutions de la pluviométrie dans notre pays, un tel pacte s'avère indispensable.
Notre groupe salue également les 15 millions d'euros supplémentaires alloués au compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » (Casdar), portant ainsi le montant total du compte à 141 millions d'euros.
Enfin, notre groupe souhaite que les amendements votés en première partie de ce PLF visant à relever le montant de taxe affectée aux chambres d'agriculture pour 2024 soient pérennisés dans le cadre de la navette parlementaire.
Pour conclure, vu l'augmentation historique des crédits de la mission et la pertinence de leur répartition, le groupe RDPI votera pour l'adoption de ce budget, symbole d'une agriculture résiliente et préparée pour affronter les défis de demain.