Intervention de François Bonhomme

Réunion du 2 décembre 2023 à 10h30
Loi de finances pour 2024 — Remboursements et dégrèvements

Photo de François BonhommeFrançois Bonhomme :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État » sont, pour l’essentiel, ceux affectés au remboursement de la dette, enjeu majeur de notre souveraineté nationale.

En effet, alors que près de la moitié de notre dette est détenue par des acteurs étrangers, nous ne pouvons pas, entre autres raisons, laisser ce stock augmenter d’année en année de manière quasi mécanique. Notre endettement, pourtant, ne cesse de croître, dans un écho médiatique somme toute très relatif.

Ainsi, en 2023, la dette publique a franchi le cap symbolique de 3 000 milliards d’euros, atteignant 3 047 milliards d’euros au deuxième trimestre 2023, soit 45 000 euros par Français.

Cette situation nous amène à emprunter en 2024 le montant colossal de 285 milliards d’euros sur les marchés financiers, soit 15 milliards de plus qu’en 2023, qui était pourtant une année record.

Depuis l’élection d’Emmanuel Macron en 2017, notre stock de dette a augmenté de 800 milliards d’euros. En conséquence, la France est passée en 2023 du vingt-troisième au vingt-cinquième rang des pays les plus endettés d’Europe. Peut-on encore se rassurer quand seules désormais la Grèce et l’Italie ont un taux d’endettement supérieur à celui de la France ?

La dette de la France s’élève à 111, 9 % du PIB, contre 90 % en moyenne pour la zone euro, 83 % pour l’Union européenne et 64 % pour l’Allemagne.

Malgré cette situation extrêmement préoccupante, le Gouvernement procrastine. L’année prochaine, notre endettement ne diminuera pas, le projet de loi de finances pour 2024 tablant sur une dette à 109, 7 % du PIB, comme en 2023.

D’après le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, notre taux d’endettement diminuerait de seulement 3, 7 % sur l’ensemble du quinquennat. À ce rythme, il nous faudrait soixante-quatre ans pour égaler le niveau d’endettement actuel de l’Allemagne. Le différentiel avec nos voisins européens est donc abyssal !

Le Sénat a pourtant alerté à maintes reprises sur la situation. De loi de finances en loi de finances, année après année, le groupe Les Républicains n’a cessé de prévenir les gouvernements successifs du risque mortel que nous courrons en renonçant à nous attaquer au mur de la dette. En cas de remontée des taux d’intérêt, la situation pourrait devenir incontrôlable.

Les craintes contre lesquelles nous mettions en garde sont donc devenues une réalité douloureuse, mais est-ce véritablement surprenant ?

Les taux d’intérêt ont explosé, passant de taux négatifs en décembre 2021 à plus de 3, 5 % actuellement pour les emprunts à dix ans, qui sont la référence. La dernière fois que nous avons franchi ce seuil, c’était il y a douze ans, en 2011.

Placé au pied du mur du réel, le Gouvernement lui-même est contraint de se baser sur une hypothèse de rendement de 3, 5 % en 2024 pour les obligations assimilables du Trésor (OAT) à dix ans.

Les conséquences sont naturellement lourdes. Je rappelle qu’un point de taux d’intérêt de plus représente, au bout de dix ans, un coût supplémentaire de 40 milliards d’euros, soit peu ou prou le budget actuel de la défense. Un point de taux d’intérêt en plus, c’est aussi 2, 5 milliards d’euros supplémentaires de charge de la dette la première année, 6 milliards la deuxième, 10 milliards la troisième et près de 17 milliards à l’horizon 2027 !

Voilà, nous y sommes. La situation n’est plus tout à fait théorique, ni imaginaire, ni encore moins virtuelle. Les effets de la hausse des taux d’intérêt seront de plus en plus forts, et ce dès 2024.

Ainsi, le Gouvernement prévoit que la charge de la dette augmentera de 11 milliards d’euros en 2024. Cette hausse se poursuivra de manière inexorable, à raison d’une dizaine de milliards d’euros de plus chaque année : 48 milliards d’euros en 2023, 56 milliards en 2024, 66 milliards en 2025, 75 milliards en 2026, 84 milliards en 2027. Comme l’a très bien dit M. le rapporteur spécial Albéric de Montgolfier, cela représente quasiment l’équivalent du produit de l’impôt sur le revenu.

Dès 2025, la charge de la dette sera donc sans nul doute, à elle seule, supérieure au plus important poste de budget de l’État, à savoir l’éducation.

Nous le voyons bien : nous sommes enfermés dans un cercle vicieux qu’il nous faut absolument briser.

Madame la ministre, quelle est votre attitude ? Que fait le Gouvernement ?

Revenons aux sources : l’engagement pris par le Président de la République le 3 juillet 2017, devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles. Pendant une heure et quinze minutes, nous avions bu les paroles présidentielles.

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