À la lecture du texte issu du 49.3, il nous apparaît que cet adage a prévalu une nouvelle fois. Compte tenu de l’investissement de chacun des sénateurs et de chacune des sénatrices dans nos débats, on peut dire, au regard de leurs résultats réels, tangibles dans le budget, que l’effort parlementaire ne paie pas, ou qu’il paie très peu.
Rembobinons le mauvais film qu’est devenu le débat budgétaire dans notre République, au parlementarisme dit « rationalisé », même si « piétiné » conviendrait mieux.
Nous avons commencé à échanger ensemble, monsieur le ministre, lors des « dialogues de Bercy ». Vous nous aviez alors annoncé un budget historique pour la transition, avec un cap : le verdissement de notre fiscalité.
Je vous avais déjà fait part de nos doutes, tant les ordres de grandeur annoncés étaient loin de ce qui est attendu pour être à la hauteur de nos engagements, de nos trajectoires climatiques et des générations futures.
Vous aviez ouvert la porte aux débats parlementaires pour enrichir éventuellement cette trajectoire budgétaire historiquement verte.
Malgré 150 heures de débats en séance publique dans cet hémicycle, aucune ouverture n’a semblé possible sur le verdissement de notre fiscalité, que ce soit les propositions de fiscalité incitative ou la mise à contribution des comportements les plus polluants ou des plus aisés : tout a été balayé avec le mépris habituel.
Cependant, sur d’autres sujets, des dizaines d’amendements ont été adoptées, parfois de façon très large et transpartisane, sur des points essentiels.
Mais ce n’est pas le Parlement qui tient le stylo, et ce n’est pas le respect du débat parlementaire qui guide ce gouvernement. Nous sommes donc amenés, après ces heures de débats, à statuer sur un texte qui a largement balayé le travail de notre Haute Assemblée. Et, quand il ne l’a pas fait, quand, par miracle, un amendement transpartisan a survécu, cela nous est présenté comme un oubli à corriger !
Vous avez refusé de maintenir le prêt à taux zéro. Vous avez refusé de mieux cibler les aides sur l’énergie. Vous avez refusé de retravailler la dotation globale de fonctionnement des collectivités. Même la recherche de financements pour les transports publics n’a pas trouvé grâce à vos yeux ! L’égalité territoriale a été bafouée : la seule autorité organisatrice de la mobilité qui a pu se doter de ressources supplémentaires reste, une nouvelle fois, l’Île-de-France.
Nous saluons tout de même un progrès, objet d’un combat historique de certains des sénateurs de notre groupe : nous nous félicitons de la création d’un fonds de soutien de 250 millions d’euros pour accompagner, dans leur fonctionnement, les collectivités dotées d’un plan climat.
Enfin, la persévérance de mon collègue Ronan Dantec a fini par payer. Ce combat de longue haleine permettra à de nombreuses collectivités d’accélérer leurs projets. C’est un pas dans la bonne direction. Ne doutons pas que les prochaines années amèneront à amplifier le mouvement.
Je vais conclure, monsieur le ministre, par un message de colère, cette colère qui monte dans un certain nombre de territoires et chez un certain nombre d’élus locaux.
Monsieur le ministre, le Gouvernement et l’État ne sont pas à la hauteur de leurs obligations en matière d’hébergement. Des milliers d’enfants – oui, des enfants ! – dorment toujours à la rue.
Nous avons voté ici, de manière transpartisane, 6 000 nouvelles places d’hébergement d’urgence. Mais, d’un trait de plume, en mauvais comptable, vous avez décidé de les annuler ! D’un trait de plume, vous avez décidé de laisser des gamins dormir dans des tentes.
Vous n’avez eu de cesse de rappeler à quel point la France renouait avec l’investissement et le retour de la richesse produite, à quel point les comptes se redressaient, à quel point nous sommes au rendez-vous de la compétition mondiale.
Mais que valent toutes ces paroles quand des gamins continuent de dormir à la rue ? Qui peut accepter cela ?
Monsieur le ministre délégué chargé des comptes publics, ce trait de plume pèsera lourd dans votre bilan. Nous saurons vous le rappeler ! Vous serez désormais le comptable qui aura préféré laisser dormir des gamins à la rue pour rassurer les banquiers.
Nous ne voterons donc pas ce budget.