Intervention de Florence Blatrix Contat

Commission des affaires européennes — Réunion du 7 décembre 2023 à 9h05
Économie finances fiscalité — Révision du pacte de stabilité et de croissance - communication

Photo de Florence Blatrix ContatFlorence Blatrix Contat, rapporteure :

En avril 2023, la Commission a présenté sa proposition de révision du PSC et de difficiles négociations se sont engagées. Ce soir, un dîner des ministres des finances de l'UE a lieu et, demain, un conseil Écofin annoncé comme potentiellement décisionnel se tiendra. Le sujet est donc particulièrement brûlant, d'autant que la clause dérogatoire arrive à échéance.

En vue de cette communication, nous avons procédé dans un temps très court à quatre auditions : la direction générale du Trésor, chargée de la préparation des positions françaises sur le sujet, le cabinet de Paolo Gentiloni, commissaire européen aux affaires économiques et monétaires, à la fiscalité et à l'Union douanière, Mme Audrey Gross, conseillère chargée des affaires européennes au cabinet du ministre Bruno Le Maire, et la Cour des comptes européenne, qui a récemment publié un rapport d'analyse assez critique sur les propositions de la Commission en matière de réforme des règles budgétaires.

Je commencerai par revenir sur les raisons de cette réforme. Avant même la crise du covid, un consensus avait émergé au sein de l'Union pour reconnaître que les règles de gouvernance budgétaire étaient obsolètes. Le cadre fixé par le PSC, qui prévoit des seuils maximaux de 3 % du PIB pour le déficit et de 60 % du PIB pour la dette, faisait l'objet de nombreuses critiques. Trois défauts majeurs étaient particulièrement pointés.

D'abord, ce cadre de gouvernance s'est extraordinairement complexifié au fil des années et des crises. Des flexibilités, des dérogations et des exceptions se sont ajoutées au gré des révisions répétées, faisant perdre de sa lisibilité au système. Des indicateurs souvent difficilement observables ont été retenus, comme la croissance potentielle, l'écart de production et surtout le solde structurel, multipliant les critiques sur la fiabilité du cadre.

Ensuite, les règles actuelles ont été critiquées pour leur caractère procyclique. Comme elles fixent des critères numériques uniformes, le cadre peut conduire à amplifier les effets du cycle économique plutôt qu'à les contrebalancer. Ce risque est particulièrement problématique en cas de choc ou de faible croissance. La règle des 3 % empêche théoriquement les États membres de déployer des politiques budgétaires volontaristes en cas de crise. Pourtant, une hausse de l'investissement public paraît incontournable dans les années à venir, pour remédier aux difficultés. Nous sommes confrontés à un mur d'investissements pour financer les transitions écologique et numérique, ainsi que les efforts en matière de défense. Symétriquement, il n'existe aucune incitation à être vertueux quand on se trouve en haut de cycle.

Surtout, ces règles se sont révélées inefficaces. Le PSC visait à assurer une convergence des économies européennes afin d'assurer le bon fonctionnement de l'UEM. Pourtant, nous constatons une forte hétérogénéité des finances publiques des États de l'UE, les niveaux de dette et de déficit restant très disparates. Au deuxième semestre 2023, six pays de l'Union européenne, dont la France, ont encore une dette supérieure à 100 % de leur PIB. À l'inverse, les ratios d'endettement des pays du Nord ont eu tendance à se stabiliser, voire à décroître. Les ratios des dettes publiques de l'Allemagne et des Pays-Bas sont ainsi restés sensiblement les mêmes entre 2007 et 2022 : autour de 66 % pour la dette allemande et de 50 % pour la dette néerlandaise.

Ces règles complexes, procycliques et inefficaces doivent être révisées. Il faut encore ajouter à ces critiques le manque de crédibilité des sanctions. Des amendes comprises entre 0,2 et 0,5 % du PIB pouvaient être infligées aux États ne respectant pas le seuil des 3 %. Ces sanctions très lourdes, qui auraient encore alourdi les difficultés des États, n'ont jamais été appliquées. Dès lors, l'incitation à respecter les règles apparaît bien faible.

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