Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, dans un exercice assumé d’autosatisfaction, le président Macron m’a hier rassuré. Notre pays va bien, l’ascenseur social fonctionne et nos services publics ont les moyens de remplir leurs missions !
J’ai sans doute été distrait, car, pour moi, la réalité est tout autre. Dans ma réalité, l’école publique est fragilisée par des professeurs non remplacés et désabusés. L’hôpital public s’effondre. J’ai en tête l’exemple tristement emblématique de la maternité Jeanne de Flandre, à Lille, qui transfère une partie de ses patientes et de leurs bébés en Belgique. Dans ma réalité, la France compte désormais près de 5 millions de pauvres et la classe moyenne a de plus en plus de mal à joindre les deux bouts. Le déclassement social frappe de plus en plus nos concitoyens. Dans ma réalité, le logement traverse une crise d’une ampleur inédite depuis trente ans, sans que nous disposions, à ce stade, d’un ministre de plein exercice.
Monsieur le Premier ministre, il faut ouvrir les yeux. Tel est l’état de la France, dont vous êtes comptable. Les propos du Président de la République traduisent sa déconnexion avec le quotidien des Français. Pour lui, c’est la moralisation et l’ordre pour les citoyens, la dérégulation et le désordre pour les intérêts financiers. Ce n’est pas d’optimisme dont il a fait preuve hier soir : il cultive une amnésie politicienne pour conserver le mauvais cap qu’il a fixé voilà bientôt sept ans.
Quant aux Français, ils n’ont rien oublié : ni l’injuste réforme des retraites, ni la stigmatisation des chômeurs, ni la xénophobie rampante de la loi Immigration. Monsieur le Premier ministre, aurez-vous la lucidité de poser ce constat ? Aurez-vous l’audace d’en tirer toutes les conséquences ?