Avant de présenter cet amendement, je voudrais remercier à mon tour M. Francis Giraud d'avoir bien voulu soumettre au Sénat un texte tendant à organiser l'action de l'État devant des menaces sanitaires de grande ampleur.
La présente proposition de loi a pour objet de pallier les faiblesses identifiées du système de santé publique en cas de menace sanitaire. L'une des faiblesses majeures, maintes fois soulignée, consiste en la pénurie de personnel techniquement compétent pour coordonner et mettre en oeuvre les dispositifs. À quoi cela sert-il de multiplier instructions, circulaires et réglementations si, en bout de chaîne, il n'y a pas de bras pour les appliquer ?
Pour faire face aux menaces sanitaires, le ministère chargé de la santé a besoin de médecins de santé publique suffisamment nombreux et opérationnels, en particulier sur le terrain. Ils doivent être visibles et identifiés par tous les acteurs.
De plus, pour qu'un système fonctionne en situation de crise, il faut qu'il soit efficace en situation courante, que les acteurs puissent se préparer à froid à la crise et qu'ils connaissent précisément les ressources et les réseaux sur lesquels s'appuyer. Précisément, les médecins inspecteurs de santé publique sont, de toute évidence, au coeur du dispositif, parce qu'ils sont spécialistes de santé publique, au service de l'État et formés pour remplir des missions d'intérêt général.
Or, du fait de la faible attractivité du statut de médecin inspecteur de santé publique, soulignée récemment dans un rapport de l'IGAS, les internes de santé publique se tournent prioritairement vers l'hôpital et les carrières privées. Le corps des médecins inspecteurs de santé publique se trouve actuellement dans une situation très préoccupante : le recrutement est en panne, la moitié des effectifs va partir à la retraite dans les cinq prochaines années et des départs volontaires se produisent car ces professionnels ne peuvent pas exercer dans des conditions satisfaisantes les missions sans cesse élargies qui leur sont confiées.
Qu'adviendrait-il, en cas de menace majeure, si le lien entre les professionnels soignants, les réservistes et les autorités sanitaires ne pouvait être assuré par des médecins de santé publique, ces médecins « invisibles » mais essentiels au bon fonctionnement du système, si les professionnels chargés de coordonner les plans d'urgence n'étaient pas au rendez-vous, si la veille sanitaire ne pouvait être assurée correctement en cas d'épidémie ?
Pour toutes ces missions, le rôle des médecins inspecteurs de santé publique apparaît donc incontournable. Depuis trois ans, une réflexion a été conduite sur une fusion de leur statut et de celui des praticiens hospitaliers. En effet, elle semble constituer la meilleure réponse aux difficultés de recrutement et de valorisation du métier de médecin inspecteur de santé publique, tout en assurant une pérennisation de la filière de santé publique, une meilleure interface avec les soignants et un décloisonnement des structures. Les syndicats représentatifs des praticiens hospitaliers soutiennent ce projet, que le rapport de l'IGAS fait figurer au nombre de ses recommandations.
Depuis trois ans, on oppose aux médecins inspecteurs de santé publique l'attente d'un véhicule législatif adéquat. L'administration a préparé elle-même les projets d'articles de loi visant à rendre possible la fusion des statuts et les a transmis aux médecins inspecteurs de santé publique, qui ont ainsi nourri de légitimes espoirs.
Il me semble que la présente proposition de loi pourrait précisément être le véhicule législatif si longtemps attendu. Je rappelle qu'un amendement prévoyant cette fusion avait été défendu par notre collègue Francis Giraud, au nom de la commission des affaires sociales, lors de la première lecture, en janvier 2004, du projet de loi relatif à la politique de santé publique. Il avait alors été retiré à la suite d'un engagement pris par M. Mattei, mais je l'avais représenté en deuxième lecture, en juillet 2004. À cette occasion, M. Douste-Blazy, à l'époque ministre de la santé, s'était solennellement engagé à faire aboutir rapidement ce dossier. Or nous sommes aujourd'hui en janvier 2007, et la question demeure pendante...
Vous comprendrez donc sans peine, monsieur le ministre, pourquoi notre groupe a jugé nécessaire de soulever à nouveau ce problème du statut des médecins inspecteurs de santé publique. Comptant sur votre volonté de le régler définitivement, je pense que vous ne vous opposerez pas à l'adoption de cet amendement.