Intervention de Anne SOUYRIS

Réunion du 14 mars 2024 à 16h00
Dispositions législatives relatives à la santé — Discussion générale

Photo de Anne SOUYRISAnne SOUYRIS :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les écologistes voteront ce projet de loi de ratification.

L'extension relative aux recherches humaines était fortement attendue et demandée, notamment en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. En transposant la loi dans ces collectivités d'outre-mer, on garantit que leurs habitants bénéficient des mêmes droits que ceux de l'Hexagone, et que des recherches spécifiques sur des pathologies régionales puissent être effectuées.

L'extension dans les trois collectivités de la loi du 2 mars 2022 visant à renforcer le droit à l'avortement est également une bonne nouvelle. En allongeant les délais pour recourir à l'IVG dans ces collectivités d'outre-mer, on facilite l'accès des femmes de ces territoires à des centres de santé dédiés pour réaliser des IVG dans les meilleures conditions sanitaires possible.

Les obstacles auxquels ces dernières peuvent être confrontées pour obtenir une IVG dans des délais stricts seront ainsi réduits, comme dans l'Hexagone.

C'est d'autant plus important si l'on tient compte de la dimension insulaire de ces collectivités et des difficultés d'accès à certains services de santé.

En résumé, l'avancée qu'apporte cette ordonnance contribue tout simplement à protéger la santé et à promouvoir les droits des femmes dans ces territoires.

Cependant, que dire de la forme ? Continuerons-nous à prendre des ordonnances tous les dix ans afin de transposer les lois votées au Parlement sur tel ou tel sujet, comme ici sur la santé ?

Est-il normal que ces collectivités d'outre-mer aient dû attendre pratiquement douze ans avant de bénéficier des mêmes avancées que dans l'Hexagone en matière de recherches impliquant la personne humaine ?

Jusqu'à récemment, en effet, ces territoires ne pouvaient pas intégrer de patients au sein d'essais thérapeutiques, et donc accéder à des traitements innovants. Peut-on évaluer la perte de chance pour les patients polynésiens ou néo-calédoniens atteints d'un cancer et en échec thérapeutique sur l'une de ces îles du Pacifique ? La question mérite d'être posée de manière solennelle.

Y a-t-il en République des citoyennes et des citoyens de seconde zone ? Si vous en doutiez, il s'agit bien d'une question rhétorique, car nous connaissons tous et toutes la réponse.

L'extension à l'outre-mer des textes votés au Parlement portant sur les compétences de l'État est bien trop lente. Sommes-nous dans une République indivisible ou dans une République à deux vitesses ? Les citoyens et les citoyennes doivent pouvoir disposer des mêmes droits sur l'ensemble du territoire, surtout lorsqu'il s'agit du mieux-disant, dans le respect de l'autonomie des collectivités.

Nous devons promouvoir l'égalité de la loi tout en garantissant le respect des spécificités et des aspirations des collectivités d'outre-mer. Il faut créer un juste équilibre entre l'universalité des nouveaux droits et la reconnaissance de la diversité des contextes locaux et des règles d'autonomie.

Les collectivités d'outre-mer ne doivent pas être les oubliées de chaque nouvelle législation. Elles doivent être associées dans une approche plus collaborative aux discussions, en amont de chaque loi votée au Parlement.

La consultation bâclée par le Gouvernement témoigne une fois encore du mépris de la République pour les territoires français ultramarins.

La consultation locale pour avis, d'abord, joue un rôle trop modeste. Ensuite, les représentants des collectivités concernées par cette ordonnance ont tous déploré les conditions de leur saisine. Ils n'ont pas pu formuler un avis approfondi ni effectuer une analyse juridique détaillée sur les différentes transpositions. Mais encore, un seul avis a été reçu par le Gouvernement, celui de la Nouvelle-Calédonie.

Bien que l'Assemblée territoriale de Wallis-et-Futuna ait formulé et transmis un avis, ce dernier n'a jamais été reçu par le Gouvernement. Est-ce normal ? Pouvons-nous tolérer ce manque de considération pour un territoire de la République ?

Afin de s'assurer que ces nouveaux droits deviennent effectifs dans les trois collectivités concernées par cette ordonnance, l'État doit, dans le respect de ses compétences, améliorer son soutien aux politiques de santé locales et investir dans des infrastructures de santé, en lien étroit avec les autorités locales. Il devra s'assurer que l'offre de soins y est suffisante et adaptée, notamment en matière de recours à l'IVG.

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