Intervention de Roland Courteau

Réunion du 9 novembre 2009 à 14h30
Entreprise publique la poste et activités postales — Article 16

Photo de Roland CourteauRoland Courteau :

La disposition majeure de la troisième directive, sur laquelle s’appuie ce projet de loi pour justifier le changement de statut de La Poste en société anonyme, concerne l’interdiction de recourir au financement du secteur réservé.

Jusqu’à présent, c’est le secteur réservé qui permettait partout en Europe de financer le service universel postal, par solidarité tarifaire, dans le consensus, sans contentieux ni subventions publiques.

Et, jusqu’à ce jour, seul le mécanisme de secteur réservé permettait aux opérateurs historiques d’assurer la rentabilité du service universel postal.

Dans la nouvelle directive, pour financer les obligations découlant du service universel, il est bien prévu plusieurs mécanismes, mais les modalités de ceux-ci mettent fin au service réservé !

Les États membres devront notifier à la Commission européenne leur plan de financement du service postal universel avant le 1er janvier 2010 ; c’est d’ailleurs la raison pour laquelle le Gouvernement est certainement si pressé de faire passer au Parlement ce projet de loi.

Au cours de la négociation de la directive, les parlementaires socialistes ont fait part de leurs fortes réserves sur la crédibilité d’un mode de financement autre que celui qui est organisé par le secteur réservé.

Dans la période précédant l’examen de la troisième directive postale, les sénateurs socialistes ont, ici même, fait part de leurs interrogations et de leurs réserves sur la viabilité de ces choix de financement. Bernard Frimat s’était notamment demandé si les modalités proposées permettraient « de préserver, voire de rétablir un service universel de qualité ».

Lors de l’examen par la délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne de la proposition de directive sur l’achèvement du marché intérieur des services postaux de la Communauté, les rapporteurs MM. Jérôme Lambert et Didier Quentin avaient également estimé, en novembre 2006, que les choix alternatifs de financement du service universel n’étaient pas suffisamment crédibles, ni aussi sûrs que le mode de financement par le secteur réservé.

Plus encore, ils avaient estimé que la disparition du secteur réservé « aboutirait à une situation paradoxale où la libéralisation totale du marché conduirait à remplacer un dispositif qui s’autofinance, comme c’est le cas aujourd’hui en France, par un mécanisme nécessitant l’apport de crédits publics ».

Pourtant, dans votre projet de loi, vous proposez en plus de limiter l’assiette de contribution des autres opérateurs aux seuls envois de correspondance, alors que la directive elle-même n’oblige pas à un calcul aussi restrictif.

Dans de telles circonstances, une entreprise publique comme La Poste, qui est rentable, ne pourrait pas survivre, les envois de correspondance constituant sa principale réserve financière pour assurer la péréquation tarifaire à laquelle elle est engagée.

Pendant la négociation de la troisième directive postale, les socialistes n’ont jamais hésité à dénoncer les risques, dont ils étaient conscients, de suppression du secteur réservé et donc du financement de La Poste tel qu’il existe aujourd’hui.

Nous ne pouvons que le constater aujourd’hui, nos inquiétudes, qui se sont révélées légitimes, n’ont jamais été écoutées

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