Cette progression s’explique, notamment, par le souci d’un juste dimensionnement des effectifs à la charge de travail croissante pesant sur l’administration pénitentiaire. Ainsi, pour 2009, cette administration a vu ses effectifs augmenter de près de 900 équivalents temps plein.
Une telle évolution est importante. Elle renvoie à la priorité, accordée par la Chancellerie, à l’accompagnement de l’ouverture de nouveaux établissements par des moyens humains correspondants. Cette priorité budgétaire doit être de nature à rassurer les personnels de l’administration pénitentiaire, qui ont fait part au cours des derniers mois de leurs inquiétudes quant à l’avenir.
À n’en pas douter, cet effort financier devra continuer d’être soutenu dans les prochaines années, a fortiori dans le cadre de l’entrée en application de la nouvelle loi pénitentiaire.
Mais il est tout aussi certain que la démarche de rationalisation de l’activité pénitentiaire devra se poursuivre. En particulier, la problématique des transfèrements de détenus, actuellement supportés par la police et la gendarmerie nationales, appelle, dès 2009, des réponses concrètes, réalistes et plus conformes à l’esprit de la LOLF. Dans cette perspective, l’audit en cours de réalisation par le ministère de l’intérieur, à la demande du Sénat, débouchera prochainement sur des conclusions. Celles-ci devront servir de base de négociation entre ce ministère et la Chancellerie.
La rénovation et la construction de places en établissement pénitentiaire constituent une autre priorité absolue.
En 2008, on comptait 50 806 places pour 64 250 détenus. À lui seul, ce simple rapprochement de chiffres témoigne de la crise actuelle. Une durée moyenne de détention qui tend à se stabiliser, mais un nombre de condamnés définitifs qui ne cesse de croître : ce triste constat est malheureusement trop bien connu ; il vide de toute substance le principe de l’encellulement individuel dans les maisons d’arrêt, pourtant inscrit dans la loi depuis 1875. C’est pourquoi j’y attache tant d’importance dans la discussion d’aujourd’hui.
Aussi convient-il de souligner le caractère crucial du programme de modernisation du parc immobilier pénitentiaire engagé avec la loi d’orientation et de programmation pour la justice, la LOPJ. Au total, ce sont 13 200 places qui ont vocation à être ouvertes : 10 800 sont réservées à la réalisation de nouveaux établissements et 2 400 sont dédiées à l’application de nouveaux concepts, par exemple les établissements pour mineurs.
En 2009, 4 588 places, nettes de fermetures d’établissements, seront ainsi créées. Mais le « programme 13 200 » permettra-t-il de remédier au cruel déficit de places en détention ? Probablement pas ! Au regard de la projection réalisée par la commission des finances dans le cadre du projet de loi de finances pour 2009, à supposer que le nombre de détenus demeure au niveau présent et que les prévisions en matière de créations nettes de places soient respectées, le nombre de places n’égalera pas le nombre de personnes détenues au terme de la programmation. La vigilance reste donc de mise. Tout comme demeure centrale la question de la prise en charge défaillante des cas de psychiatrie en milieu carcéral ; plusieurs intervenants l’ont évoqué avant moi.
S’il est difficile d’avoir une estimation exacte de la proportion de détenus atteints de troubles mentaux, on peut néanmoins, sans trop se tromper, avancer un ordre de grandeur d’environ un tiers. La première des explications à cette très forte proportion réside dans la réduction importante du nombre de lits dans les hôpitaux psychiatriques. En tant que président de conseil général, je préside un centre hospitalier spécialisé ; je sais donc de quoi je parle. Le corollaire en est un transfert des personnes souffrant de troubles psychiatriques vers nos prisons, le nouveau code pénal admettant la responsabilité pénale des personnes dont le discernement a été altéré par un trouble psychique ou neuropsychique.
En dépit d’un effort important en vue de l’ouverture d’unités hospitalières spécialement aménagées, les UHSA, on ne peut que vivement déplorer l’insuffisance globale de moyens en la matière, notamment concernant le faible nombre de psychiatres intervenant en établissement pénitentiaire. Un long chemin reste encore à faire sur la voie du renforcement des équipes psychiatriques. Certains diront que c’est mon « dada », mais je crois que j’aborde là l’un des points les plus importants pour la réussite de cette loi.