Les populations, les associations et les élus concernés n’ont eu aucune connaissance de ces projets et ils ont découvert leur existence par hasard. Quant aux élus locaux et aux parlementaires, ils ont été abasourdis d’apprendre ces projets dans la presse. On peut aisément comprendre le tollé que ces nouvelles ont suscité, tollé que, pour notre part, nous regrettons.
Je le répète, car cela choque particulièrement le groupe du RDSE : aucune concertation n’a eu lieu. Comment peut-on tolérer que des actes administratifs ayant des conséquences aussi importantes sur les territoires soient pris dans de telles conditions ? Les territoires concernés par certains de ces permis sont des parcs naturels régionaux, dont l’intérêt patrimonial est reconnu. Certains sont mêmes candidats au classement au patrimoine mondial de l’UNESCO !
Les acteurs locaux auraient par la suite dû être associés à la mission sur les enjeux de l’exploitation des hydrocarbures de schiste lancée il y a quelques semaines par le Gouvernement, embarrassé sans doute face à l’ampleur de la contestation sur le terrain. Mais cela n’a pas été le cas et, à ma connaissance, cela ne l’est d’ailleurs toujours pas.
Enfin, il n’est pas admissible que les demandes d’exploration du sous-sol ne soient toujours pas soumises à des enquêtes publiques locales. Sur ce point, une mise à jour du code minier est attendue. Ce code, qui engage l’avenir de notre sous-sol, doit être réformé dans son ensemble. Un texte est annoncé, mais combien de temps faudra-t-il encore attendre pour qu’il soit inscrit à l’ordre du jour des assemblées parlementaires ?
Madame le ministre, les paroles et les actes doivent être en harmonie, particulièrement si vous souhaitez donner l’exemple en matière de protection de l’environnement et de gestion des ressources énergétiques.
Depuis le Grenelle de l’environnement, l’État invite chacun, et notamment les collectivités territoriales, à s’engager toujours davantage en faveur de la préservation de la biodiversité et des ressources naturelles, de la réduction des pollutions, des consommations énergétiques et des émissions de gaz à effet de serre.
Les collectivités locales tentent du mieux qu’elles le peuvent de répondre à ces exigences nouvelles, qui sont pourtant souvent sources de lourdes contraintes pour elles. Mais le Gouvernement, lui, de son côté, semble mener une tout autre politique, à l’opposé de ses déclarations médiatiques.
L’année dernière, sans aucune consultation préalable, le Gouvernement, par la signature d’un ministre d’État, a pris la décision d’autoriser des explorations en vue d’une exploitation, potentiellement très polluante, d’énergies fossiles. Au moment même où étaient délivrées ces autorisations, le Grenelle de l’environnement était présenté aux parlementaires. Quelle crédibilité accorder au Gouvernement face à une telle dissonance politique ?
Le comble de l’ironie est que le ministre de l’écologie qui a alors délivré les permis d’exploration, aujourd’hui député, a déposé une proposition de loi pour abroger les autorisations. Nous ne sommes plus à une incohérence près dans ce dossier ! Pensez aussi, madame le ministre, à l’image que nous donnons à nos concitoyens des politiques et de leurs convictions, et plus encore à ce que signifie le principe de responsabilité politique.
Quant aux industriels, ils sont aussi beaucoup trop discrets sur leurs méthodes. Qui peut nous garantir qu’il n’existe pas aujourd’hui d’autre technique d’exploration et d’exploitation du gaz de schiste que la fracturation hydraulique ? Pour ma part, je n’en connais pas, mais la science et les techniques vont vite. Là encore, le manque de transparence et d’information du public ainsi que l’opacité d’une filière sont patents et contribuent à la situation de blocage actuelle.
La polémique a obligé le Gouvernement à instaurer un moratoire et à confier, après coup, au Conseil général de l’industrie, de l’énergie et des technologies et au Conseil de l’environnement et du développement durable une mission destinée à l’éclairer sur les enjeux économiques, sociaux et environnementaux des hydrocarbures de roche-mère que sont le gaz et les huiles de schiste.
On ne peut pas nier que, dans cette affaire, tout a été fait dans le désordre le plus total. À croire que ce désordre a été organisé pour permettre à quelques-uns de parvenir à leurs fins…
Après avoir proposé l’annulation pure et simple des permis, les députés ont révisé leur copie et préféré proscrire la technique elle-même. Du point de vue de la stricte sécurité juridique, ce choix semble plus pertinent, j’en conviens.