La France possède probablement des ressources en hydrocarbures de schiste considérables. Pour le gaz de schiste, on évoque le chiffre de 5 000 milliards de mètres cubes, alors que notre pays en consomme 40 milliards de mètres cubes par an. Dans un pays qui importe 98, 5 % de son gaz naturel, avec un impact négatif de 10 milliards de dollars sur la facture énergétique nationale, ces chiffres doivent être considérés avec attention.
Le premier intérêt de ces propositions de loi est donc de pousser le Parlement à se saisir de la question de l’approvisionnement en énergie de notre pays, concernant tout particulièrement le gaz naturel. Car le gaz de schiste, c’est avant tout du méthane !
Mes chers collègues, je voudrais appeler votre attention sur quatre points.
En premier lieu, le gaz naturel a vu son importance croître considérablement dans le monde au cours de ces dernières décennies : il représente aujourd’hui 21 % de la consommation mondiale d’énergie, contre 13 % seulement en 1960. Or l’Europe dépend beaucoup pour son approvisionnement des pays de l’ex-Union soviétique et du Moyen-Orient. On a vu les problèmes de sécurité énergétique que pouvait poser cette situation en 2009, lorsqu’un différend entre la Russie et l’Ukraine a privé de gaz plusieurs pays européens.
Une réponse consiste dans le gaz naturel liquéfié, ou GNL, qui circule par bateau. Il permet de diversifier les sources d’approvisionnement. À cet égard, il faut approuver la construction du nouveau terminal méthanier à Dunkerque que vient d’annoncer le Président de la République.
Reste que ces infrastructures ont un coût très élevé. L’idéal serait donc de produire du gaz naturel sur notre propre sol. C’est précisément ce que pourrait permettre le gaz de schiste. Dans une moindre mesure, les huiles de schiste présenteraient le même avantage par rapport aux importations de pétrole.
C’est donc à un enjeu géopolitique aussi bien qu’économique que répondrait cette nouvelle ressource.
En deuxième lieu, nous devons le répéter, il s’agit non pas de remplacer les énergies renouvelables par du gaz de schiste, mais de substituer du gaz extrait de notre sous-sol à du gaz acheté dans des pays lointains et acheminé le plus souvent par gazoduc. Cette ressource ne doit donc pas nuire aux investissements dans les énergies renouvelables. Au contraire – ainsi que vous l’avez rappelé, madame la ministre –, toutes les pistes doivent être explorées pour diversifier et sécuriser le bouquet énergétique français.
Or les capacités hydrauliques n’ont plus qu’une marge de progression limitée dans notre pays et le développement nécessaire de l’électricité éolienne ou photovoltaïque ne peut remplacer à court terme le gaz naturel, qui représente 15 % de la consommation d’énergie primaire.
Reste la biomasse, qui présente des marges de progression importante en France. Je salue à ce propos l’arrêté visant à revaloriser les tarifs d’achat de l’électricité produite par méthanisation, qui a été publié au Journal officiel le 21 mai 2011. Cette source d’énergie est prometteuse, et j’ai regretté que le Grenelle de l’environnement ne lui ait pas fixé des objectifs plus ambitieux.
En troisième lieu, la plupart des critiques à l’encontre des gaz de schiste se fondent – comme cela a été rappelé – sur les excès constatés aux États-Unis, tout particulièrement à travers le film Gasland, qui aligne des images-chocs et des corrélations inquiétantes, mais sans aller véritablement au fond des choses.
Les études scientifiques disponibles sont beaucoup plus mesurées et on ne peut de toute manière pas transposer aussi simplement en France la situation des États-Unis. Tout d’abord, parce que la géologie n’est pas la même.