Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous entamons l’examen des articles de cette proposition de loi, qui a beaucoup évolué depuis son dépôt à l’Assemblée nationale au mois de mars dernier.
Madame la ministre, après la polémique née de l’octroi par votre prédécesseur, dans la plus grande opacité, de permis exclusifs de recherche de gaz et huiles de schiste, au moment même d’ailleurs où il appelait sur ces bancs à une révolution verte, votre Gouvernement a été obligé de réagir en déclarant un moratoire provisoire sur l’exploration et l’exploitation de ces hydrocarbures.
Les parlementaires se sont émus également de cette situation, puisque ce sont cinq propositions de loi qui ont été déposées sur ce sujet, tant les enjeux sont importants. Il n’est en effet plus à démontrer que l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures de roche posent de multiples problèmes environnementaux.
Nous savons que la consommation importante en eau pose problème, puisqu’il faut entre 10 000 mètres cubes et 20 000 mètres cubes d’eau pour un puits de gaz non conventionnel. L’eau est une ressource bien trop précieuse, notamment en ces temps de sécheresse, pour être ainsi utilisée, sans parler, évidemment, de l’acheminement par camion de cette eau, qui n’est pas fait pour améliorer le bilan carbone !
Parallèlement, nous constatons une contamination des nappes phréatiques, et cela à deux moments : lors de la fracturation, puis lors de la remontée d’une partie du fluide de fracture.
Le traitement des eaux usagées n’est pas non plus satisfaisant, puisque ce taux de retraitement varie entre 30 % et 80 %. À ce titre, voilà ce que des scientifiques de l’université de Montpellier ont estimé : « Le mode de recharge de ces aquifères et leur structure interne favorisent les déplacements de polluants éventuels et la quasi-absence d’autoépuration ». Ils concluent : « Ainsi, leur vulnérabilité aux pollutions est reconnue comme élevée et très spécifique. »
Rappelons également que les additifs chimiques dans les eaux de fracturation sont des produits cancérigènes. Ils présentent donc un risque majeur pour la santé.
De plus, l’emprise au sol de ce type d’installation n’est pas sans impact sur les paysages, puisqu’il faut creuser de nombreux trous de forage.
Enfin, l’étude menée par l’université Cornell à New York indique que les hydrocarbures de roche génèrent du méthane, qui ajoute aux inconvénients de cette exploitation.
Pourtant, dans notre assemblée, force est de le constater, la majorité parlementaire considère que de tels éléments, s’ils sont pour le moins inquiétants, ne justifient pas l’interdiction pure et simple de l’exploration et de l’exploitation de ces hydrocarbures par fracturation hydraulique.
Vous avez ainsi fait le choix en commission d’ouvrir à nouveau la porte à cette technique sous couvert de permettre la recherche scientifique alors que l’exploration avec fracturation est conduite depuis une trentaine d’années déjà du côté de Lacq.
Tout cela est absolument incompatible avec le principe de précaution posé à l’article 5 de la Charte de l’environnement, qui dispose : « Lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incertaine en l’état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d’attributions, à la mise en œuvre de procédures d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. »
Il est donc aujourd’hui de la responsabilité des pouvoirs publics d’interdire toute fracturation hydraulique, quel qu’en soit l’objectif, qu’il soit commercial ou de recherche.
L’amendement adopté en commission constitue un recul très important par rapport au texte issu de l’Assemblée nationale, puisqu’il revient à autoriser la fracturation hydraulique. Le groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche ne peut donc absolument pas l’accepter.