Intervention de Jean-Guy Branger

Réunion du 4 juillet 2005 à 15h00
Confiance et modernisation de l'économie — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Jean-Guy BrangerJean-Guy Branger :

Voilà pourquoi je tiens à m'exprimer d'une manière claire.

J'en viens à la société européenne, qui arrive à vous, mes chers collègues, après des méandres et des sentiers qu'elle ne méritait pas.

Lors du Conseil européen de Nice, en décembre 2000, les Etats membres de l'Union ont enfin décidé, après quelque trente années d'atermoiements, le principe de la création d'un statut de société européenne afin de renforcer l'efficacité et l'attractivité économique et juridique du marché intérieur.

Par cette nouvelle forme de société commerciale, il s'agit de créer un instrument juridique unique, quasi identique dans chaque Etat membre, destiné à permettre aux entreprises d'étendre facilement leurs activités économiques à l'échelon communautaire.

La société européenne est régie, sur le plan communautaire, par un règlement et une directive, qui doivent s'appliquer de façon concomitante. Le règlement traite plus particulièrement des aspects statutaires, alors que la directive complète ces statuts en ce qui concerne l'implication des travailleurs.

C'est en effet là que réside l'une des particularités essentielles de ce nouvel instrument juridique : la société européenne ne peut être constituée que si les modalités d'implication des travailleurs au sein de cette nouvelle entité juridique ont été préalablement déterminées. C'est également là qu'a résidé le principal point d'achoppement de ce projet durant ses longues années de gestation : les modes de participation étaient si diversifiés au sein des différents Etats membres et les habitudes si solidement ancrées qu'il a été particulièrement difficile de parvenir à un point d'équilibre. Lorsque ce point d'équilibre a été trouvé à l'échelon communautaire, le problème s'est posé de la même manière à l'échelon national, et c'est ainsi que la société européenne a longtemps pâti de l'incapacité des différentes organisations à envisager une réforme des systèmes nationaux. Ces organisations ont exercé de très fortes pressions - c'est toujours le cas - afin que l'implication des travailleurs soit minimisée. Cela n'est pas acceptable. C'est pourquoi M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, et moi-même nous sommes battus pour qu'il soit définitivement établi, ainsi que cela vous est présenté dans les amendements que nous vous soumettrons, que le règlement et la directive ne peuvent être dissociés.

Pour autant, la tâche n'était pas simple. Vous ne l'ignorez pas, si la directive se transpose, c'est-à-dire qu'elle laisse au législateur une certaine latitude pour aménager son droit national, le règlement, lui, ne se transpose pas, il a primauté et effet direct, ainsi que cela est reconnu par une jurisprudence constante de l'ensemble de nos juridictions. Pourtant, ce règlement présentait la particularité d'offrir des options aux différents Etats membres : la possibilité de faire telle ou telle chose, ou encore telle autre chose. Les rédacteurs du règlement avaient bien compris qu'un consensus strict serait difficile à obtenir, ils avaient laissé une marge de manoeuvre étroite aux législateurs nationaux.

Les amendements qui vous seront soumis au cours du débat ne sont pas parfaits. Ils ont le mérite de susciter votre réflexion. Toutefois, je le répète, il me paraîtrait plus sage de reporter notre décision à une date où toutes les lacunes auront été comblées et où chacun pourra prendre une décision en connaissance de cause.

Pour quelle raison des textes nous sont-ils soumis alors qu'ils sont imparfaits et pourquoi les amendements sur ces textes ne sont-ils pas de nature à régler tous les problèmes ? Compte tenu de la déclaration d'urgence, ce projet de société européenne a été introduit dans cette loi pour la confiance et la modernisation de l'économie le mercredi 29 juin dernier. Le texte a ensuite été inscrit à l'ordre du jour de notre assemblée lors de la conférence des présidents du jeudi 30 juin et la date de son examen a été rendue publique le vendredi 1er juillet au matin. Sachant que nous sommes aujourd'hui le 4 juillet, je vous laisse imaginer les efforts qui ont été nécessaires pour rassembler des énergies et des compétences en ce premier week-end du mois de juillet !

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