Nous avons vite compris que la réforme telle qu’elle nous parvenait de l’Assemblée nationale était insuffisante en matière d’indemnisation des charges des avoués et des salariés. Nous avons rencontré, en examinant cette réforme, une vraie désespérance (Mme Anne-Marie Escoffier, MM. Yves Détraigne et Daniel Dubois acquiescent.) : quand des gens font bien leur travail, ils ont en effet du mal à comprendre que l’on veuille supprimer leur profession. Beaucoup ont d’ailleurs découvert à cette occasion la qualité du travail des avoués et l’utilité de ce dernier, notamment par la sécurisation des procédures d’appel.
Je m’amuse d'ailleurs à entendre défendre les avoués par les auteurs de projets ou de propositions de loi qui voulaient leur suppression voilà quelques années…
Nous sommes favorables à la modernisation et à la simplification à condition de ne pas singer d’autres formes de professions judiciaires outre-Atlantique ou quelquefois outre-Manche – mais je sais que vous n’êtes pas adepte de cette école, madame le garde des sceaux. Ce n’est pas notre tradition juridique ; les responsabilités des huissiers et des notaires, notamment, ont plutôt été renforcées dans les textes. Cela me semble équilibré.
Dès lors que la décision était prise et votée à l’Assemblée nationale, le devoir du Sénat était de faire en sorte que, pour cette réforme maintenant inéluctable, comme je l’ai dit aux représentants des professions concernées – l’avenir nous dira si cette modernisation, cette simplification étaient fondées, et nous saurons évaluer la loi pour déterminer si la procédure d’appel est améliorée –, une solution équilibrée, mais juste et équitable quant à l’indemnisation tant des avoués que du personnel, soit trouvée. Je vous assure que les membres de la commission ont vraiment écouté les uns et les autres, y compris les avocats. Il faut saluer à cet égard Patrice Gélard, le rapporteur émérite, qui a énormément travaillé pour trouver des solutions.
Madame le garde des sceaux, il reste un point de désaccord dont il faudra, en l’absence de progression à cet égard, envisager les conséquences : je veux parler des préjudices autres que le seul préjudice patrimonial. Nous avons choisi l’expropriation sous le contrôle du juge parce que cela nous paraissait la formule la plus large, mais vous avez bien compris que l’indemnisation des préjudices réels des charges d’avoués doit pouvoir évoluer.
Quoi qu’il en soit, madame le garde des sceaux, nous vous remercions de votre écoute et de l’attention que vous avez portée aux travaux du Sénat. Si toutes les séances du Parlement se déroulaient dans le climat d’écoute et de dialogue qui a prévalu depuis hier, la législation serait bien meilleure !