Intervention de Philippe Marini

Réunion du 7 novembre 2007 à 15h00
Bénéficiaires des contrats d'assurance sur la vie et droits des assurés — Adoption d'une proposition de loi

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous retrouvons ici une question qui avait été évoquée en 2005 lors de l'examen du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de l'assurance, et c'est en fonction des travaux que nous avions menés alors que la commission des finances a souhaité se saisir pour avis de la présente proposition de loi. Celle-ci ne visait initialement qu'à permettre aux organismes professionnels de consulter le fichier national des personnes décédées, mais ses dispositions ont été très notablement enrichies lors de son examen à l'Assemblée nationale, comme l'a indiqué M. le secrétaire d'État, et ce afin de renforcer les garanties des assurés.

Qu'en est-il des enjeux de cette question ? Ils sont a priori importants mais difficiles à bien quantifier. Il existerait, nous dit-on, un stock de 150 000 à 170 000 contrats d'assurance vie non réclamés, pour un montant cumulé qui se chiffrerait peut-être en milliards d'euros, dans la mesure où l'encours total de l'ensemble du secteur de l'assurance vie est de l'ordre de 1 100 milliards à 1 200 milliards d'euros.

Selon moi, des chiffres aussi considérables sont sujets à caution ; nous y reviendrons dans un instant.

L'assuré, dans notre droit - il n'est pas prévu de le modifier, ce qui est d'ailleurs une bonne chose -, choisit ou non d'informer le bénéficiaire de sa situation. En cas d'acceptation par le bénéficiaire de l'apport prévu à son profit, il n'est plus possible à l'adhérent de revenir sur son choix. Si, au contraire, l'adhérent choisit de ne pas informer le bénéficiaire, le risque peut exister qu'au décès dudit adhérent le bénéficiaire n'en tire pas profit.

Pour éviter un tel phénomène, qu'avons-nous fait dans le cadre de la loi de 2005 dite « DDAC assurance » ?

En premier lieu, et sur mon initiative à l'époque, les dispositions de l'article 8 prévoient que « le contrat comporte une information sur les conséquences de la désignation du ou des bénéficiaires et sur les modalités de cette désignation. Il précise que la clause bénéficiaire peut faire l'objet d'un acte sous seing privé ou d'un acte authentique. » D'autre part, « toute personne physique ou morale peut demander par lettre à un ou plusieurs organismes professionnels représentatifs [...] à être informée de l'existence d'une stipulation effectuée à son bénéfice [...] ».

Je rappelais alors, et je le fais de nouveau, qu'une façon sûre, éprouvée et classique d'être assuré d'une bonne exécution de ses intentions est de déposer sous séquestre, chez un tiers de confiance ou chez un professionnel, le contrat d'assurance vie, à charge pour ce professionnel d'accomplir des obligations bien précises quand leur fait générateur intervient, à savoir le décès de l'assuré.

Par ailleurs, toujours en 2005, et sur l'initiative de notre collègue Yves Détraigne, les dispositions de l'article 7 de la loi ont prévu que « lorsque l'assureur est informé du décès de l'assuré, l'assureur est tenu d'aviser le bénéficiaire si les coordonnées sont portées au contrat de la stipulation effectuée à son profit ».

Venons-en à la mise en oeuvre de ces dispositions.

Afin de les appliquer, les organismes représentatifs - la Fédération française des sociétés d'assurances, la Fédération nationale de la mutualité française, le Centre technique des institutions de prévoyance et le Groupement des entreprises mutuelles d'assurance - ont constitué une association, l'AGIRA.

À la fin de 2006, après dix mois de fonctionnement, ce dispositif avait permis de retrouver les bénéficiaires de 625 contrats, sur 15 000 dossiers, soit cinquante à quatre-vingts demandes par jour. On a ainsi pu débloquer au total 12 millions d'euros au profit des bénéficiaires des clauses et ce chiffre somme toute modeste incite, me semble-t-il, à réviser assez sensiblement à la baisse le montant global des sommes des contrats non réclamés. Peut-être a-t-on conçu quelques illusions un peu excessives en la matière.

Qu'en est-il de la question de l'affectation des sommes relevant des contrats en déshérence ?

Jusqu'en 2007, ces sommes étaient portées au bénéfice non pas des actionnaires des compagnies d'assurance, mais de la communauté des assurés sous forme de participation aux bénéfices. J'ai trop souvent lu des amalgames ou des commentaires laissant croire qu'il y avait là, pour les compagnies d'assurance, pour leurs fonds propres, donc pour leurs actionnaires, une sorte de windfall profit, ...

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