Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'assurance vie est devenue le principal instrument de placement de nos concitoyens. Elle est susceptible de répondre à de nombreuses préoccupations, qu'elles soient d'ordre successoral, patrimonial ou assurantiel.
Toutefois, faute d'avoir connaissance du décès de l'assuré, faute de savoir, pour le bénéficiaire, s'il possède précisément cette qualité - il faut en effet rappeler que le souscripteur n'est pas obligé d'informer le bénéficiaire qu'il a désigné - de nombreux contrats, pour des sommes non négligeables, ne sont pas réclamés. Ces derniers se trouvent alors in fine en situation de déshérence.
Le montant des avoirs d'assurances sur la vie non réclamés pourrait atteindre un à deux milliards d'euros. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 a prévu que, au terme d'un délai de trente ans, les fonds concernés viendraient abonder le Fonds de réserve pour les retraites.
Déjà, la loi du 15 décembre 2005 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de l'assurance avait renforcé les obligations des assureurs et amélioré l'information du souscripteur au moment de la rédaction des clauses de désignation du bénéficiaire, obligeant l'assureur, lorsqu'il a connaissance du décès de l'assuré, d'avertir le bénéficiaire, si les coordonnées de ce dernier figurent au contrat, de la stipulation effectuée à son profit.
Cependant, les coordonnées du bénéficiaire ne sont pas toujours portées au contrat par le souscripteur soit que ce dernier ne le souhaite pas, soit que l'assureur ne l'y ait pas invité.
Il est donc essentiel que le souscripteur ait été informé des conséquences de la désignation des bénéficiaires. C'est ce que prévoit l'article 8 de la loi du 15 décembre 2005, qui précise que le contrat doit comporter une information sur les conséquences de la désignation du ou des bénéficiaires et sur les modalités de cette désignation.
Le souscripteur est averti qu'il doit désigner de la façon la plus précise et la plus complète possible le bénéficiaire - nom, prénom, date et lieu de naissance, profession, adresse - et qu'il doit faire connaître à l'assureur tout changement de ces coordonnées en cours de contrat.
L'engagement que prend l'assureur d'avertir le bénéficiaire au moment du décès doit également être indiqué dans le contrat.
Enfin, l'assureur doit mentionner dans le contrat que, si le souscripteur fait connaître au bénéficiaire la stipulation à son profit, la clause risque d'être rendue irrévocable, ce qui interdit tout rachat ultérieur. Cette mention devrait permettre d'attirer l'attention du souscripteur sur l'enjeu de la désignation du bénéficiaire.
Le cas où l'assureur n'est pas informé du décès de l'assuré ou ne connaît pas les coordonnées du bénéficiaire a également été envisagé. Désormais, toute personne peut demander par lettre à un organisme professionnel représentatif si elle est bénéficiaire d'un contrat souscrit par une personne dont elle apporte la preuve du décès. L'organisme représentatif dispose alors de quinze jours pour transmettre la demande aux entreprises agréées pour proposer des contrats d'assurance sur la vie. Ces dernières ont ensuite un mois pour avertir la personne dans le cas où il existerait une stipulation à son bénéfice.
Pour répondre à cette obligation légale, les professionnels du secteur se sont regroupés dans une association dénommée AGIRA, qui, depuis le 1er mai 2006, répond à toutes les demandes des bénéficiaires potentiels et les transmet, en principe, aux organismes gestionnaires des contrats. Néanmoins, comme cela a été évoqué, ce dispositif n'a permis de dénouer qu'un nombre relativement faible de contrats, puisque, sur près de 10 500 demandes, un peu moins de 700 contrats ont été soldés, pour un montant légèrement supérieur à 12 millions d'euros, ce qui est insuffisant.
Ce constat a conduit le Médiateur de la République, auquel il faut rendre hommage, à préconiser, dans son rapport d'activité pour l'année 2006, la modification de la loi, afin d'instaurer une obligation générale d'information et de recherche des bénéficiaires à la charge des assureurs. Tel est l'objet de la présente proposition de loi.
En effet, le bénéficiaire ne sachant pas nécessairement qu'il a été couché sur un contrat d'assurance sur la vie, et l'assureur ne sachant pas nécessairement que le souscripteur d'un contrat est décédé, il faut permettre aux organismes qui gèrent des contrats d'assurance sur la vie de savoir de manière relativement simple si l'assuré dont ils n'ont plus de nouvelles est décédé ou encore en vie.
Pour ce faire, la proposition de loi autorise les assureurs à accéder au répertoire national d'identification des personnes physiques géré par l'INSEE, ce qui paraît de bonne méthode, dès lors que les renseignements qui seront collectés sont strictement nécessaires à la finalité du traitement mis en oeuvre.
Ainsi, initialement circonscrite à la question des contrats d'assurance non réclamés par leurs bénéficiaires à la suite du décès de l'assuré, la proposition de loi a vu, lors de son examen par l'Assemblée nationale, son champ s'étendre plus généralement aux droits des bénéficiaires, ainsi qu'aux conditions et aux effets de l'acceptation du contrat par ces derniers. Le travail important réalisé par l'Assemblée nationale a été amplement amélioré par le rapporteur de la commission des lois de notre assemblée, M. Henri de Richemont.
Nous avions pensé à déposer un amendement pour sanctionner les assureurs qui ne rechercheraient pas les bénéficiaires d'un contrat d'assurance sur la vie. M. le rapporteur nous a répondu en commission que les assureurs engageraient alors leur responsabilité.