L'objet du projet de loi est donc d'instaurer des mesures de prévention qui permettent de protéger aussi l'espace privé.
L'axe principal du texte que j'ai l'honneur de vous présenter, c'est la responsabilisation des détenteurs de chiens. Le but est d'améliorer la prévention. Ce point est important, mais il ne faut pas, néanmoins, exclure une nécessaire et juste dimension répressive qui peut être aussi, dans un certain nombre de cas, la garantie que la loi sera observée.
En ce qui concerne tout d'abord la responsabilisation des détenteurs de chiens et la prévention des accidents, je voudrais insister sur le fait que le comportement du propriétaire ou du détenteur de l'animal est dans une très large mesure la clef. Il est évident que, bien souvent, la dangerosité des chiens tient aussi à des comportements inadéquats de leur propriétaire ou de leur détenteur.
C'est la raison pour laquelle le texte prévoit que, désormais, toute vente ou toute cession à titre gratuit d'un chien par un professionnel ou par un particulier sera subordonnée à la production d'un certificat vétérinaire au moment de la livraison de l'animal. Ce document devra comporter un ensemble de recommandations relatives, notamment, aux modalités de la garde du chien dans les espaces publics mais aussi privés, ainsi qu'aux règles de sécurité applicables à sa détention en fonction de ses caractéristiques. En effet, on ne garde pas de la même manière un chihuahua ou un bouledogue !
En outre, la responsabilisation que j'évoquais à l'instant reposera sur une formation obligatoire et préalable de tous les détenteurs de chiens dits d'attaque ou de défense, c'est-à-dire d'animaux qui, en eux-mêmes, par leur poids et leurs caractéristiques, peuvent représenter un risque.
Cette formation sera sanctionnée par la délivrance d'une attestation d'aptitude à la détention d'un chien - ce que certains ont appelé un permis. Elle comportera des éléments relatifs aux règles d'éducation canine, car un chien se dresse et s'éduque, ainsi que l'apprentissage de règles de sécurité applicables à ces chiens dans les diverses catégories d'espaces. Il faut savoir, entre autres choses, que l'on doit laisser un chien manger tranquillement, qu'il doit avoir sa propre gamelle, qu'il faut éviter que des enfants ne s'en approchent.
Je souligne également qu'il ne s'agit pas simplement ici des chiens de première et de deuxième catégorie. En effet, n'importe quel chien peut mordre à un moment ou à un autre. C'est pourquoi la formation concernera les propriétaires de tout type de chien dès lors que leur animal aura mordu, puisque cela révèle l'existence d'un problème de comportement qui peut être lié, d'abord, à l'éducation donnée par le maître ou à l'attitude de celui-ci.
Par cette disposition, je souhaite prendre en compte toute la mesure du danger, et donc aller au-delà des deux catégories qui avaient été définies par la loi de 1999.
Cependant, il est également important d'agir sur le comportement du chien. À cet égard, la prévention recouvre aussi l'évaluation comportementale : tous les chiens de première et de deuxième catégorie devront faire l'objet d'une évaluation comportementale obligatoire et périodique par un vétérinaire, qui est le professionnel le mieux à même de la pratiquer. Ce sera la condition de la détention légale d'un tel chien.
Dès lors qu'il s'agira d'une obligation légale, l'autorité administrative, notamment les préfets, devra la rappeler aux propriétaires. À défaut de son respect par le propriétaire, le chien, en cas de danger grave et immédiat, pourra être placé et éventuellement, après avis d'un vétérinaire, euthanasié.
Je souhaite par ailleurs renforcer, au travers de ce texte, un certain nombre de sanctions. Quatre dispositions illustrent ce volet.
En premier lieu, en ce qui concerne le contrôle de la détention des chiens de première catégorie, je rappelle que cette détention est prohibée quand elle résulte de l'acquisition ou de l'importation de tels chiens nés postérieurement au 7 janvier 2000.
Néanmoins, il arrive que des chiens de première catégorie soient obtenus par voie de production, c'est-à-dire à la suite de croisements, sans d'ailleurs que les détenteurs ou les propriétaires soient toujours avertis de la nature du chien et du danger qu'il représente.
Il est donc évident qu'il faut régler la situation de ce type de chiens, puisque l'on en rencontre encore bien que leur détention soit interdite par la loi. Nous devons, bien entendu, le faire d'une manière humaine, mais il est indispensable de réguler la présence de ces chiens d'attaque potentiellement dangereux, qui a été ainsi renouvelée par croisements.
En deuxième lieu, il convient de renforcer la répression des faits constituant des imprudences graves susceptibles d'entraîner la mort, comme ce fut malheureusement le cas à Bobigny, le 23 octobre dernier. À la demande du Président de la République, j'ai donc déposé un amendement au présent projet de loi, qui tend à l'aggravation des peines en cas d'homicide ou de blessures involontaires résultant d'une agression par un ou plusieurs chiens. Il s'agit d'un amendement de principe ; nous pourrons débattre de l'adéquation au but visé du périmètre du dispositif.
En troisième lieu, je souhaite améliorer les conditions de remise d'un chien dangereux à l'autorité administrative, notamment par le procureur de la République dans le cadre d'une enquête.
Dans un tel cas, en particulier lorsque l'enquête fait suite à une blessure ou à un décès, il faut savoir ce que l'on va faire du chien dangereux. Il est proposé ici que dès qu'un chien dangereux ne présentera plus d'utilité pour la manifestation de la vérité, c'est-à-dire après que les circonstances de la blessure ou de la mort auront été établies, il sera remis à l'autorité administrative en vue de son placement et, le cas échéant, de son euthanasie.
En quatrième lieu, dans l'optique d'une conception efficace de la chaîne de sécurité, je souhaite que les délits relatifs à la garde et à la circulation des animaux soient désormais jugés plus rapidement et plus facilement. C'est la raison pour laquelle je propose que ce soit un juge unique qui statue sur ces délits, à l'instar de ce qui se pratique pour de nombreuses infractions pénales méritant un traitement rapide.
Telles sont, pour l'essentiel, les dispositions du présent texte. Il s'agit, encore une fois, d'un projet de loi qui intéresse l'ensemble de nos concitoyens et qui se révèle utile dans la mesure où l'on a pu constater que les dispositions existantes n'avaient pas permis d'empêcher, hélas ! les drames que nous avons connus ces derniers mois. Je souhaite que ce texte soit consensuel, et j'écouterai donc avec beaucoup d'attention et d'intérêt les suggestions tendant à son amélioration qui pourront être faites. À mon sens, nous devons viser à la meilleure efficacité possible, au bénéfice de nos concitoyens. Lorsque nous aurons atteint cet objectif, je crois que nous aurons fait, tous ensemble, oeuvre utile.