À la suite de l'accident dramatique qui s'est produit à la fin du mois d'août dernier, au cours duquel une fillette est décédée après avoir été attaquée par un chien, vous avez immédiatement, madame la ministre, annoncé un projet de loi. Depuis ce drame, d'autres se sont produits, portant le nombre de décès par attaque de chiens à trois, les victimes étant essentiellement des enfants en bas âge.
Pour agir contre ces agressions canines, vous avez déposé, dans le courant du mois d'octobre, ce projet de loi dont nous débattons aujourd'hui. Ce texte prévoit, notamment, l'instauration d'une formation pour les propriétaires de chiens susceptibles de présenter un danger. Cette formation est obligatoire pour les propriétaires de chiens de première et de deuxième catégorie, et est sanctionnée par une attestation d'aptitude. Ces animaux seront soumis à une évaluation comportementale périodique.
Par ailleurs, sont également prévus le renforcement des pouvoirs des préfets et des maires, la déclaration à la mairie de toute morsure, l'interdiction de détenir des chiens d'attaque nés après le 7 janvier 2000.
Rappelons pourtant que nous ne sommes pas dénués de toute législation en la matière, puisque la loi de 1999, même si elle présente des limites, classe les chiens dangereux en deux catégories - chiens d'attaque et chiens de défense - et impose à leurs propriétaires des obligations assez strictes.
En cas de non-respect de ces obligations, des sanctions sont prévues, qui ont même été encore aggravées en 2001, puis en 2007.
Lors de l'élaboration de la loi de 1999, la position du groupe CRC était claire : nous étions favorables à la classification des chiens dangereux, qui a permis de faire baisser le nombre des actes de délinquance à l'aide de chiens tels que les violences, les trafics, les rackets, etc.
Avec un peu plus de 8 millions de chiens en France, il est clair que le risque zéro n'existe pas. Aujourd'hui, ce sont moins les pitbulls qui posent problème que les chiens de deuxième catégorie, dont le nombre a explosé, ou encore les chiens n'appartenant à aucune de ces catégories, comme les bergers allemands.
Ainsi que cela a déjà été indiqué, les accidents graves, voire mortels, surviennent le plus souvent dans la sphère familiale et concernent des personnes vulnérables comme les nourrissons, les enfants et les personnes âgées. Pour la plupart, ils sont dus, soit à la négligence des maîtres qui laissent leurs molosses en présence d'enfants sans aucune surveillance, soit au non-respect de la législation existante.
Sur un sujet aussi fort, il ne saurait être question de verser dans le compassionnel et d'en rester à la dimension émotionnelle, au risque d'aboutir à une loi d'affichage qui serait inefficace et inapplicable. Mais il ne s'agit pas non plus d'être laxiste.
En l'occurrence, le Gouvernement surfe sur l'émotion, certes légitime, suscitée par des faits divers dramatiques et surmédiatisés pour faire passer une loi plus répressive qu'éducative ou préventive.
Avant de légiférer une nouvelle fois, il aurait mieux valu commencer par appliquer les lois existantes, en y consacrant des moyens concrets. En effet, la loi de 1999 permet déjà d'interpeller et de sanctionner, y compris par des peines de prison ferme, les propriétaires de chiens qui sont en infraction. Son application nécessite bien évidemment des moyens matériels et humains, notamment un nombre suffisant d'équipes cynophiles, formées et compétentes pour réaliser les contrôles. Modifiée à deux reprises, cette loi concerne non seulement les animaux dangereux et errants, mais également la protection des animaux, donc la moralisation du commerce d'animaux, les conditions de leur transport, etc. Mais, à ma connaissance, les décrets d'application n'ont pas encore été pris.
On légifère donc encore une fois à la suite de faits divers d'une violence extrême, sans prendre le temps de la réflexion.
Preuve en est l'annonce rapide, madame la ministre, de votre texte, à la suite du drame du mois d'août dernier.
Preuve en est la proposition de nos deux rapporteurs relative aux agents de sécurité utilisant des chiens, à la suite du drame de Bobigny.