Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 7 novembre 2007 à 21h45
Chiens dangereux — Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Je crains sincèrement, en tout cas s'agissant de morsures non mortelles et survenant dans le cercle familial, que l'on n'aboutisse, en l'espèce, à l'effet inverse du but recherché et que les morsures ne soient, à l'avenir, passées sous silence.

Une autre question se pose. Avec votre texte, le maire est largement mis à contribution. C'est lui qui délivre le récépissé de déclaration de chiens dangereux. Il peut imposer une formation aux propriétaires de chiens dangereux, demander une nouvelle évaluation de l'animal, ordonner le placement de l'animal mordeur, voire faire procéder à son euthanasie. De même, en cas de défaut d'attestation d'aptitude, il peut faire placer l'animal, voire faire procéder à son euthanasie. Mais le maire aura-t-il seulement le temps et les moyens de remplir toutes les missions que lui impose la loi en la matière ? Je crains, là aussi, que la réponse ne soit malheureusement négative.

Par ailleurs, la question, pourtant réelle et essentielle, des trafics et des élevages clandestins d'animaux n'est pas évoquée dans le texte, alors que ces trafics, en particulier en provenance d'Europe de l'Est, sont des pourvoyeurs de chiots qui, une fois adultes, deviennent agressifs en raison des mauvais traitements subis auparavant. Alors que l'on estime à 100 000 le nombre de chiots importés illégalement chaque année en France, rien n'est prévu pour renforcer le contrôle de la vente et de l'achat de jeunes animaux.

Enfin, contrairement à ce qui a pu être annoncé, rien n'est prévu non plus pour interdire les croisements susceptibles de produire des chiens dangereux.

S'agissant des agents de sécurité qui utilisent un chien dans leur activité, les deux rapporteurs proposent une formation. Cela me semble être un minimum ! Mais qu'avez-vous prévu pour créer les conditions de garde de ces chiens en dehors des heures de travail ? Est-il normal que ces personnels de surveillance rentrent chez eux, souvent dans des habitats collectifs, avec leur outil de travail, en l'occurrence un chien ? Est-il normal que la garde et l'entretien de ces chiens soient à la charge des employés, même si ceux-ci perçoivent une prime ? L'employeur n'aurait-il aucune responsabilité en la matière ?

Le Président de la République vous a demandé, madame le ministre, d'entamer une réflexion avec l'ensemble des professionnels concernés sur les moyens que les sociétés de surveillance mettent à la disposition de leurs agents pour que les chiens soient correctement gardés en dehors des heures de travail. Dans ces conditions, madame le ministre, pourquoi ne pas attendre le résultat de cette réflexion avant de légiférer comme nous le faisons aujourd'hui ?

Ne gagnerions-nous pas en efficacité et en lisibilité à élaborer sur la question des chiens dangereux une loi d'ensemble qui intégrerait la problématique des agents de surveillance utilisant un chien dans l'exercice de leur activité et qui engloberait la question des conditions de travail de ces personnels et celle du contrôle éventuel des entreprises sur les sociétés de surveillance auxquelles elles ont recours ?

Pour l'heure, madame le ministre, les sénateurs du groupe CRC ont l'intention de s'abstenir sur ce texte. Cette abstention est motivée par différentes raisons : l'effet d'affichage de ce texte, le dispositif complexe et coûteux qui est prévu, les effets pervers qu'il risque d'engendrer et, enfin, sa difficile application, faute de moyens.

Cette question des moyens est, pour nous, fondamentale en ce qu'elle conditionne les bonnes réponses à trouver pour résoudre ce qui est un vrai problème. À ce titre, nous aurions pu déposer des amendements, mais ceux-ci seraient tombés sous le coup de l'article 40 de la Constitution.

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