Certes, madame le rapporteur, le code du travail ne concerne pas seulement les conseils de prud'hommes, mais c'est bien en cas de conflit qu'il est essentiel de connaître le texte et ses modalités d'application.
Or, à l'heure actuelle, nous sommes dans le brouillard le plus complet.
Au mois de septembre dernier, alors que je l'interrogeais sur la réforme des conseils de prud'hommes, M. Xavier Bertrand m'a répondu qu'il ne disposait d'aucune information à ce sujet, Mme Dati n'ayant pas pris contact avec lui, comme en atteste le compte rendu des débats publié au . Aujourd'hui, la liste des conseils de prud'hommes qui seront supprimés a été publiée. La nouvelle carte, qui implique des conditions d'élections différentes, est contestée par les syndicats, hostiles à la suppression d'un certain nombre de conseils de prud'hommes, sinon à tous.
Par ailleurs, le Gouvernement remet en cause l'indemnisation du temps alloué aux juges prud'homaux pour instruire, délibérer et rédiger les jugements. Ils disposeront donc de moins de temps pour accomplir leur travail, alors même qu'ils auront à s'adapter à un instrument nouveau, même s'il n'a pas changé fondamentalement, comme vous l'avez souligné.
Madame la secrétaire d'État, vous dites que le nouveau code est déjà consultable en ligne. Mais que consulte-t-on ? Qu'est-ce qu'un code ? N'est-ce pas avant tout un petit livre ? Vous l'avez peut-être d'ailleurs sur votre bureau, monsieur le président ! En général, c'est le Dalloz, mais il existe en fait trois éditions : outre le Dalloz, l'édition classique des juristes, on trouve le code du travail publié par Litec, édition plutôt destinée aux patrons et aux directeurs des ressources humaines, et celui publié par la Revue judiciaire, édition plutôt consultée par les syndicats d'employés.
Ces trois éditeurs vont-ils réimprimer le nouveau code avant le mois de mai ? Si oui, dans quelles conditions le feront-ils ? Comment pourront-ils, sous chaque nouvel article, insérer et redistribuer les commentaires qui s'imposent, ainsi que la jurisprudence ?
Chacun sait que la lecture des articles d'un code, quel qu'il soit, ne vaut que par les notes en bas de page. Tous les juristes qui siègent dans cet hémicycle, notamment les membres éminents du Conseil d'État, le savent.
S'agissant du droit du travail, la jurisprudence est connue pour être énorme et varier selon les conseils de prud'hommes, les cours d'appels, car les appels sont nombreux en la matière. Et même en cassation, les interprétations sont divergentes entre la chambre sociale et la chambre criminelle !
Dès lors, pouvez-vous m'assurer que ces trois éditions seront prêtes pour le mois de mai ? Pour ma part, j'en doute !
C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement de bon sens, dicté par un souci de bonne application. Je constate que le Gouvernement et la commission s'y opposent. Cela ne prouve qu'une chose : qu'ils veulent aller à marche forcée, imposer le vote conforme et faire en sorte que le brouillard le plus épais règne dans le monde du travail !