Monsieur le ministre, je maintiens mon amendement, non pour vous ennuyer, mais parce que la question du suivi des expositions est pour moi fondamentale, et ce pour deux raisons.
J’évoquerai, dans un premier temps, l’amiante.
Si, dès l’origine, il avait été possible d’assurer la traçabilité de toutes les personnes qui ont été exposées à l’amiante, celles-ci n’auraient pas aujourd’hui toutes les peines du monde à reconstituer leur carrière et à faire valoir leurs droits parce qu’elles ne sont pas sur la liste des entreprises qui ont été répertoriées alors qu’elles y ont travaillé. Un accès individuel n’est pas possible.
C’est le passé, me direz-vous. Eh bien sachez que la situation des personnes qui travaillent aujourd’hui dans les entreprises de désamiantage est loin d’être parfaite. Je ne porte pas de jugement, mais il me semblerait normal que ces salariés puissent se voir remettre des certificats ou être inscrits dans un carnet de suivi.
Tout à l’heure, mon collègue Guy Fischer évoquait la région dont il est l’élu. Dans ma région, la Basse-Normandie, outre les constructions navales, nous avons notre « vallée de la mort », située à Condé-sur-Noireau.
Aussi, le suivi et la traçabilité sont essentiels pour la protection des travailleurs.
J’en viens maintenant à la question du nucléaire.
Lorsque des salariés sont exposés à de faibles doses de radioactivité sur le site qui les emploie, ils bénéficient d’un arrêt de travail. Mais l’industrie nucléaire recourant largement aux entreprises sous-traitantes, il est parfaitement possible que ces mêmes salariés continuent de travailler sur d’autres sites. C’est pourquoi il est très important d’assurer un suivi des expositions.
Monsieur le ministre, il n’y a aucun différend entre nous et nous partageons les mêmes soucis. Comme je l’ai dit, je maintiens mon amendement, même si je sais très bien qu’il ne sera pas adopté. Mais il est indispensable d’assurer le suivi et la traçabilité des salariés pour leur permettre de faire valoir leurs droits.
Une entreprise de construction navale a été reconnue coupable pour avoir exposé ses salariés à l’amiante. Toutes les personnes qui ont travaillé sur son site de production peuvent donc faire valoir leurs droits auprès du fonds commun des accidents du travail, le FCATA, et du fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA. Seulement, les premières victimes de l’amiante, les premiers « désamianteurs », ainsi les femmes de ménage employées par des entreprises d’intérim voilà vingt ou vingt-cinq ans, sont confrontées à une double difficulté : d’une part, elles ne parviennent pas à retrouver la trace des entreprises qui les ont employées, lesquelles ont parfois disparu, d’autre part, elles sont dans l’incapacité de reconstituer leurs carrières.
Pour toutes ces raisons, il est indispensable, monsieur le ministre, d’imposer aux entreprises d’assurer le suivi de leurs salariés qui ont été exposés ou qui ont travaillé sur un lieu exposé.