L’amendement n° 136 vise à rétablir la contribution à la charge des entreprises au financement des fonds au bénéfice des victimes de l’amiante.
Cette contribution visait à tenir compte de la responsabilité des entreprises à l’origine des dépenses du FCAATA. Elle avait été créée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 et supprimée par la loi de finances pour 2009.
Il est donc proposé de la rétablir. Elle a en effet été supprimée au seul motif que son rendement était peu élevé depuis sa mise en œuvre – 34 millions d’euros au lieu des 120 millions d’euros attendus –, que son recouvrement était difficile en raison de la grande discrétion des entreprises redevables – on les comprend –, qu’elle générait de nombreux contentieux – ce qui me semble normal – et qu’elle était défavorable à la reprise de l’activité des entreprises en redressement ou liquidation judiciaire – cela demande à être démontré.
La décision de 2009 a pour effet de mettre à la charge de l’ensemble des entreprises de la branche AT-MP, et à la charge de l’État, puisque la contribution a été remplacée par une contribution de l’État, le financement de la réparation d’un préjudice dont l’origine est clairement identifiée.
Nous sommes à nouveau devant la déresponsabilisation demandée par les employeurs et assumée par le Gouvernement.
Cette contribution doit être rétablie à la fois en raison de la chute des recettes de la branche AT-MP et pour des raisons de justice. Plutôt que de la supprimer, il conviendrait d’en augmenter le produit en améliorant ses modalités de recouvrement. Dans notre pays, lorsque l’on veut recouvrir une contribution, on sait le faire.
J’ajoute que cela permettrait peut-être de maintenir l’allocation versée aux préretraités ayant été exposés à l’amiante plutôt que de bricoler une modification du décret de 1999 relatif à l’allocation de cessation anticipée d’activité.
Je rappelle que le Gouvernement prévoit une modification de ce décret afin de limiter la prise en compte des revenus salariaux pour calculer le montant de l’allocation. Le but est de limiter la prise en compte aux « revenus présentant un caractère régulier et habituel ». Cette formule a pour seul objectif de retirer du calcul le solde des congés payés, les RTT, les primes, ce qui permet de « gratter » quelques euros au détriment des salariés victimes.
Avec cette affaire, le Gouvernement, comme souvent en matière sociale, entreprend de modifier une réglementation afin de combattre une jurisprudence de la Cour de cassation qui ne lui convient pas.
Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, on ne sait plus quelle règle vous suivez. Si ses arrêts vous arrangent, vous les suivez, dans le cas contraire, vous faites voter une loi pour que la Cour de cassation n’ait plus rien à dire. Mais il y a toujours une constante. Lorsqu’il s’agit de gratter un peu d’argent au détriment des salariés, on légifère afin de passer outre les arrêts de la Cour de cassation.
Le Gouvernement revient même sur sa circulaire du 14 décembre 2000 et sur les dispositions déjà prises par plusieurs caisses régionales d’assurance maladie. Surtout, il modifie une réglementation au préjudice des salariés ayant été exposés à l’amiante.
Tout cela correspond à la trame de ce projet de loi qui, systématiquement, derrière les effets d’annonce, oublie de rechercher et de sanctionner les responsabilités – bien qu’elles soient identifiées –, renvoie les charges sur la collectivité et ajoute à la souffrance des victimes une pénalisation financière. C’est tout à fait inacceptable.