La question de l’égalité entre les sexes ne peut pas être traitée seulement au détour de deux articles d’un projet de loi, en l’occurrence les articles 30 et 31.
En effet, cette question se pose dans chaque article de la réforme proposée, à commencer, bien sûr, par les articles 5 et 6, qui portent un réel coup à tous les travailleurs ayant connu des carrières longues, pénibles ou fractionnées, donc majoritairement aux femmes.
Deux maigres mesures proposées un matin ne peuvent apporter un changement de fond. Ce ne sont que deux gouttes d’eau dans l’injustice que la réforme fait aux femmes qui touchent actuellement une pension de retraite inférieure de 40 % à celle des hommes.
Je trouve également choquant que le Gouvernement puisse se targuer, dans les médias en particulier, de mettre en place des politiques prenant en compte les situations difficiles ou précaires et apportant des réponses aux femmes alors que, dans le même temps, il a fait voter, lors de l’examen de la loi de finances de 2009, la suppression de la demi-part fiscale pour les parents isolés, mesure qui concerne 3, 6 millions de Français, dont une grande majorité de femmes.
Il est également choquant de le voir proposer la suppression de l’avantage fiscal consenti aux jeunes couples durant la première année qui suit leur union.
M. le ministre a rappelé à maintes reprises au cours des débats, tant au Sénat qu’à l'Assemblée nationale, que les femmes connaissaient non pas des « problèmes de retraite », mais seulement des « problèmes de carrière ».
Certes, leurs carrières sont plus fractionnées que celles des hommes ; elles comportent des périodes de chômage ou d'inactivité. Les femmes sont aussi dans une situation plus précaire – elles occupent 83 % des emplois à temps partiel – et moins bien rémunérées – elles touchent en moyenne un salaire inférieur de 27 % à celui des hommes. Je suis d'accord avec M. Woerth : mécaniquement, tout cela se répercute sur le calcul des retraites.
Mais cette situation est aussi et surtout le fruit d’une discrimination intolérable de tous les jours, qui se manifeste aussi à travers cette réforme des retraites.
En ne prenant pas suffisamment en compte les carrières à temps partiel, précaires, longues ou morcelées, le Gouvernement prolonge cette discrimination professionnelle jusqu’au moment de la retraite.
Ainsi, il occulte une part importante de femmes qui, pour s’occuper de leur foyer et de leurs enfants, ont couramment recours à des aménagements ou des suspensions temporaires de carrière. Pourtant, cette situation ne relève pas forcément d’une volonté de la mère de rester au foyer. Elle est bien souvent contrainte, et cela a été relevé à de multiples reprises.
Il ne suffit donc pas de proposer quelques avancées éparses pour régler ce problème de fond, qui, pour être traité, nécessite une véritable prise de conscience de la persistance des inégalités et des discriminations. Mais ce n’est pas ce que le Gouvernement fait avec la présente réforme !
Pour conclure, je tiens à répéter que les dispositifs de solidarité au sein des régimes de retraite ne compensent pas efficacement l’impact des enfants sur le calcul des pensions de retraite pour les femmes, comme l’a prétendu pourtant M. le ministre lors de la présentation du présent projet de loi. De telles affirmations sont archi-fausses !
Je vous appelle donc, mes chers collègues, à voter contre l’article 31, qui ne règle pas le fond du problème.